Au musée Jacquemart André à Paris se tient jusqu’au 5 janvier l’exposition des Chefs-d’œuvre de la Galerie Borghèse de Rome, fermée pour travaux. Ce sont des peintures de la Renaissance et du baroque, collection rassemblée par le neveu du pape Paul V (mort en 1621), le cardinal Scipion Borghèse (mort en 1633).


Le clou de l’expo est un tableau de Caravage jeune, alors employé par le Cavalier d’Arpin, Le Garçon à la corbeille de fruits. Caravage invente un nouveau langage pour la nature morte en introduisant le temps et l’action : les fruits ne sont pas tous dans un état de perfection, et la beauté du très jeune homme, androgyne en sa fleur, l’épaule nue comme une femme, passera – car tout passe. D’ailleurs, la vie même est temps qui passe, elle naît, existe puis meurt, fleurs comme fruits et chair. Le peintre semble dire : cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie ! Dévorez à belle dents les fruits de la terre et la jeunesse de la chair. Il sera bientôt trop tard.




Une salle rassemble les mythes fondateurs de la culture occidentale moderne, mythologie gréco-romaine et Ancien Testament. La Cène de Bassano représente le dernier repas du Christ avec ses douze disciples. Jean, le bien-aimé, est représenté jeune, à demi endormi sur la poitrine de Jésus qui retient une caresse, tandis que la tête de l’agneau pascal est sur la table, rappel de la Pâque et du sacrifice qui sera bientôt consommé : l’agneau de Pâque juif deviendra le Christ chrétien sur la croix. Quant à Judas, à l’extrême-droite, il n’a pas les cheveux roux mais un chat à ses pieds. Si le chien symbolise la fidélité, le chat représente chez les chrétiens la sournoiserie, l’indépendance de toute attache, donc la traîtrise.


La galerie de portraits Renaissance avec des peintures d’Antonello da Messina, de Lorenzo Lotto et de Parmesan.
Le corps est exposé dans une autre salle. Le pontificat de Paul V marque son intérêt les émotions, les effets de texture et de couleur, et la représentation réaliste du corps humain. Cette tendance s’oppose au maniérisme académique qui dominait de la fin XVIe.



Amour ou Éros rassemble des tableaux des écoles toscane, maniériste et vénitienne. On peut y lire l’inflexion moralisatrice de Michele del Ghirlandaio, la posture sensuelle de la Fornarina de Raphaël et le ton ouvertement érotique de Zucchi avec Éros et Psyché. La jeune fille éclaire le corps de son jeune et fougueux amant pour le voir, alors qu’elle avait promis de n’en rien faire, sinon Éros disparaîtrait à jamais de sa vie. Mais, telle Eve ou Pandore, elle n’a pas pu s’en empêcher… Léonard de Vinci peint une Léda et le cygne où la jeune fille nue semble ravie d’avoir été violée par Zeus et d’avoir donné naissance à ses jumeaux.


Puis un chef-d’œuvre de Titien rarement sorti des salles de la Villa Borghèse, Vénus bandant les yeux de l’Amour. La mère noue un bandeau sur la tête du garçonnet tandis que ses compagnes tendent un arc et des flèche, pour que le gamin Amour tire au hasard dans les cœurs humains.

L’art baroque se veut total, mariant peinture et sculpture, au sein de l’architecture conçue pour eux.
Le mouvement, la vie, les couleurs, la richesse des matériaux, l’expression des passions, s’opposent à la Renaissance qui préférait le triomphe de la raison, de l’équilibre, de la beauté classique intemporelle antique.
Un beau dépaysement en plein Paris.
Musée Jacquemart André, 158 boulevard Haussmann, 75008
Ouvert tous les jours de 10h à 18h.
En période d’exposition, nocturnes :
– les vendredis jusqu’à 22h
– les samedis et dimanches jusqu’à 20h, sauf fermeture anticipée exceptionnelle à 19h les 7, 14, 21 et 28 décembre
– du 21 décembre au 5 janvier jusqu’à 20h, sauf fermeture anticipée exceptionnelle à 18h les 24, 25 et 31 décembre, et le 1er janvier.
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Sublime.
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