Le bus va vers Palerme, la Panormos fondée par les Phéniciens. A Bagheria s’élève la villa Palagonia aux quelques 60 monstres grotesques de Tomaso Napoli sur les 600 originaux, dit-on, en réaction au sérieux de l’Inquisition. Plutôt surréaliste, comme le propriétaire, Ferdinand Gravina, prince de Palagonia. La villa de 1715 est elle-même théâtrale, sa façade en courbes comme un rideau de scène, ses pavements de marbres colorés, ses fresques grises au mur, ses miroirs au plafond pour refléter les chandelles des bals et réceptions. On dit que le prince était fou de jalousie et qu’il avait enfermé en ce palais entouré de monstres sa jeune femme trop séduisante. Certains grotesques avaient les traits des amants, permettant à l’épouse de méditer sur ses fautes et l’horreur de ses désirs charnels pour d’autres mâles, plus juvéniles que son mari. Goethe a évoqué cette villa dans son Voyage en Italie.
Le baroque de cette villa est dit « de dérision » par le goût de la métamorphose (transformation d’humains en animaux), le goût d’accumuler tout et rien, voire n’importe quoi, le goût de l’illusion par les jeux de miroirs. Selon les voyageurs qui ont décrit l’intérieur, il y aurait eu aussi des chaises aux pieds sciés à hauteurs différentes, des canapés se tournant le dos, des fauteuils rembourrés d’aiguilles… La chapelle comprenait un crucifix horizontal aux bras et jambes écartés, des candélabres qui pendaient des stigmates et du nombril du Christ.
De curieuses plantes vertes aux boules comme en dentelle seraient des Gomphocarpus physocarpus, arbrisseaux buissonnants d’environ 1 m de haut qui fleurissent en saison chaude et donnent des fruits semblables à des capsules gonflables vert clair, rondes, jusqu’à 8 cm de diamètre. Ces plantes proviennent d’Afrique du sud-est. Je n’en avais jamais vu.



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