Julien Arbois, Petits et grands mensonges de l’Histoire de France

L’histoire non seulement est écrite par les vainqueurs mais aussi par ceux qui veulent galvaniser leurs troupes. L’auteur, historien, permet de séparer le bon grain de l’ivresse (comme dirait le populo), des Celtes jusqu’à François Mitterrand. En moins de 300 pages et 55 chapitres, l’honnête homme (s’il en reste) comme l’étudiant et l’historien pourrons en savoir un peu plus sur les mystères de l’histoire de France.

Ainsi, de plus en plus de monde sait que les Gaulois n’ont pas construit les dolmens, contrairement à ce qui est dit dans Astérix, ni que ceux-ci servaient à des sacrifices humains, comme on le croyait encore au XIXe siècle. Peu de gens savent aussi que Vercingétorix était un ami de Jules César avant de le combattre, ni que le fameux vase de Soissons ne fut non seulement jamais brisé mais de plus venait de Reims. Le roi Dagobert ne mettait pas sa culotte à l’envers et n’était pas le premier des rois fainéants. Charlemagne n’a pas eu non plus cette idée (folle) d’inventer l’école ni de punir les fils de nobles trop fainéants.

Les mensonges anciens sont de belles histoires que l’on conte encore dans les manuels du primaire, mais les fausses vérités plus récentes n’en sont pas moins d’autres belles histoires inventées pour faire croire. Molière n’est pas mort sur scène mais dans son lit et bien après avoir terminé la présentation de la pièce Le malade imaginaire. Louis XIV a bel et bien eu un ou plusieurs enfants noirs et la fameuse bataille de Valmy est loin d’être un miracle mais l’effet d’une corruption secrète entre la République et les assaillants. Quant à Cambronne, a-t-il vraiment prononcé « le » mot à Waterloo ?

Victor Hugo surtout a su écrire lui-même sa légende et rien de ce qu’il déclare n’est vérifié. Enflé comme il l’était, beaucoup plus conformiste qu’il n’a voulu l’avouer, il est conservateur avant d’être romantique, monarchiste avant d’être bonapartiste puis de virer casaque républicain contre Napoléon le Petit, exilé volontaire et absolument jamais banni comme il s’en glorifie.

Les taxis de la Marne, si célèbres en 1914, n’ont guère transporté que 7000 soldats sur les 150 000 du front lors d’interminables voyages cahotants à 25 km/h. Et Charles De Gaulle n’a été général qu’à titre provisoire et jamais confirmé. Quant à François Mitterrand, il a toujours ménagé la chèvre et le chou durant l’Occupation, volontiers vichyste jusqu’à réclamer la francisque des mains du maréchal Pétain avec l’aide de deux parrains membres de la Cagoule, avant d’aider la Résistance lorsqu’il a senti le vent tourner en 1943. Il fustige en 1936 dans un article de L’Echo de Paris la « tour de Babel » du quartier latin et sa population de métèques, il entre début 1942 à la Légion française des combattants volontaires de la Révolution nationale de Vichy avant d’être chargé des relations avec la presse par ce même gouvernement. Et il ne cessera durant ses mandats de faire fleurir la tombe du maréchal Pétain.

Il y aurait d’autres chapitres de la légende de l’histoire à écrire, comme quoi le storytelling n’est pas une invention récente mais a toujours aidé les gouvernants à magnifier leur camp et a célébrer leurs héros. Ce n’est qu’assez récemment, au fond, que l’exigence de vérité, due à l’essor de la pensée scientifique, délaisse les contes pour les réalités et somme les historiens de changer de registre.

Julien Arbois, Petits et grands mensonges de l’Histoire de France, 2015, Pocket 2016, 278 pages, €6.80 e-book Kindle €13.99


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