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La Roque Saint Christophe

Tout près se tient le site troglodytique que j’ai visité il y a 25 ans. C’est un Monument historique classé, un site troglodytique d’1 km de long et 80 m de haut avec cinq niveaux et une centaine d’abris sous roche. Le Moyen-Age a vu son âge d’or avec une forteresse et une cité à flanc de falaise, avec même un port sur la Vézère au bas. Il y a beaucoup moins de monde que lorsque je suis venu, Covid oblige, et nous pouvons visiter sans être gênés. Évidemment, il faut encore monter.

Le lieu présente des témoins négatifs de l’existence médiévale. Nous pouvons voir un lieu de vie, une cuisine, une étable, une chapelle creusée dans le roc, et quelques instruments de levage reconstitués en bois pour monter les marchandises ou descendre les animaux. Une maquette du site en bois avec de petits personnages intéresse beaucoup la jeunesse, mais notre âge mûrissant aussi. L’endroit pouvait abriter environ mille personnes, plus les animaux. Les maisons, aujourd’hui simples alvéoles ouvertes, étaient fermées de parois en bois ou en torchis. Les restes d’une église montrent des croix gravées, des fonts baptismaux et six tombes orientées sud-est/nord-ouest – vers Jérusalem.

Côté forteresse, une porte fortifiée gardée par une sentinelle permettait de jeter de grosses pierres sur les assaillants depuis le haut ; elle était suivie d’une fosse piégée avec un pont basculant. Des passages étroits ne permettaient le passage que d’un seul homme à la fois. Des passerelles mobiles rejoignaient les différentes sentes creusées à même le rocher, ce qui permettait une défense facile lorsqu’elles étaient ôtées. Les raids de Vikings – Périgueux est prise en 849 – et les querelles incessantes entre petits seigneurs incitent l’évêque Frotaire de Périgueux à faire construire cinq forts défensifs, dont La Roque Saint-Christophe pour barrer les voies d’accès navigables. Des encoches creusées dans le plafond rocheux d’une vaste grotte ouverte sur le vide permettaient d’attacher la longe des chevaux. Un coffre-fort du XIIe siècle est creusé à même la roche, il était fermé d’une porte en bois avec un système de verrouillage pris dans la pierre. Le fort sera rasé pendant les guerres de religion.

Nous pique-niquons sur les tables en béton du parking au pied de la falaise, sous les arbres. Il y a des touristes, mais pas trop, quelques Allemands et Néerlandais en camping-cars, et une horde d’Américains cyclistes avec une camionnette d’accompagnement et une pléthore de nourriture et de boissons dans des glacières. Un clan de Hollandais d’une même famille, tous adultes, bavarde fort et se congratulent en visitant le lieu. Notre boîte comprend cette fois une salade de pâtes au thon à la tomate, un sandwich au pâté et une banane. Le tout est trop copieux pour nos âges, je finis la salade mais réserve la banane. En revanche, je reprends de l’eau dans ma gourde aux toilettes de l’accueil. Certes il fait chaud et lourd, certes les montées nous font transpirer, mais il me semble que je bois beaucoup plus après 50 ans qu’à 35 ans. Bruno me le confirme, plus le corps est vieux, plus il fatigue et plus il lui faut d’eau.

Le coude de la route au-dessus de l’accueil en falaise donne sur la Vézère, et il est dit qu’ici nombre de collabos ont été exécutés et balancés à la flotte en 1944. Les colonnes nazies qui remontaient du Sud vers la Normandie ont en effet été impitoyables avec les habitants des villages et pas seulement à Tulle ou à Oradour-sur-Glane. Il y avait trop de résistants pour que cela ne les énerve pas et tout mort allemand se voyait payer d’un village brûlé, gamins compris. Bruno nous dit que les Allemands sont encore mal vus dans la région 75 ans après la fin de la guerre, même lorsqu’ils sont jeunes et touristes. Les Hollandais, qui parlent une langue gutturale comme l’allemand et qui sont blonds comme eux, sont assimilés aux anciens occupants, alors qu’eux-mêmes ont été victimes de la barbarie nazie.

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