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Coutances

Le petit-déjeuner buffet est surtout continental et plutôt moyen ; il offre cependant du camembert et du pont-l’évêque à qui veut se nourrir autrement que de féculents et sucreries à la mode. Le café à la machine est en revanche très bon, pas trop fort et parfumé.

Nous partons de l’hôtel à pied, sac sur le dos, pour commencer par une visite de la ville. Coutances est une vieille cité sur sa colline qui a donné son nom au Cotentin, chapeautée depuis les temps médiévaux par l’Eglise en remplacement de Cosedia, la capitale des Gaulois Unelles. La cathédrale domine, siège de l’évêque du diocèse et capitale de la Manche jusqu’à ce que la Révolution décide de la décentrer à Saint-Lô. Les Anglais ne l’ont pas ratée en 1944, détruisant 60% de son bâti. L’évêché a été brûlé par les bombasses. Il fait gris, humide, un brin pluvieux.

Nous commençons par le jardin botanique, légué à la ville avec son hôtel particulier du XVIIe en 1852 par les Quesnel-Morinière pour cultiver des plantes médicinales à destination des indigents. Le jardin a été aménagé par un officier de marine en retraite qui a planté des arbres exotiques comme un gigantesque cèdre du Liban, un gingko biloba, un hêtre à feuilles de fougères, un séquoia. C’est un vrai « paradis des arbres » comme disait Rémy de Gourmont, romancier et critique littéraire fin XIXe originaire du Cotentin ; il aimait s’y promener.

Des buis taillés représentent un paon faisant la roue, un chat aux yeux brillants et à la queue dressée. Une statue de Anne Hilarion de Costentin de Tourville, vice-amiral et maréchal de France (1642-1701) y trône au bout d’une allée et un pressoir à cidre en pierre, jadis actionné par un âne, est sous hangar protégé d’une grille. Nous ne visitons pas le musée qui contient entre autres des peintures du Pou qui grimpe, un mouvement artistique transgressif de l’entre-deux guerres, mais nous passons par l’Hôtel de ville.

Le hall et la salle des mariages sont ornés de peintures locales qui rappellent l’histoire de la Normandie et la vie paysanne. Une vaste fresque évoque les vikings barbares puis les médiévaux de Guillaume. Dans la salle des mariages, femmes en coiffes traditionnelles et hommes en habit et chapeau haut de forme mènent une noce. Sur la cheminée, derrière la table de l’officier d’état civil, trône une statue en bronze représentant un couple idéal à la manière des demi-dieux antiques, tous deux enlacés, jeunes, vigoureux et presque nus pour montrer leur santé procréative (le communisme soviétique reprendra cette symbolique dans ses statues de prolos).

Le menu du restaurant de l’Hôtel de ville affiche normand : saumon fumé crème ciboulette, bulots mayonnaise, côte de porc au camembert d’Isigny Sainte-Mère, filet de poisson crème de salicorne, pomme au four crème fouettée. Alléchant !

La cathédrale élève sa voûte de pierre grise. Commencée en 1056 par le prélat-chevalier Geoffroy de Montbray, compagnon de Guillaume, elle a été poursuivie par les fils de Tancrède de Hauteville au XIIIe siècle dans le style gothique normand. Le transept est élevé en 1225 et le chœur achevé vers 1240. Epargnée par les bombes mais pas par la volonté des Anglais, la cathédrale reste un fleuron de Normandie avec ses flèches à 78 m.

Les colonnes montantes sans aspérité donnent une impression de hauteur intérieure. La tour-lanterne octogonale s’élève à 41 m. Des vitraux remontent jusqu’au XIIIe siècle et l’un du XIVe présente le Jugement dernier. La vierge Notre-Dame de Coutances, du XIVe, tient un Bambin tout nu qui la regarde avec tendresse.

Un petit garçon blond aux cheveux en casque et au tee-shirt rouge qui déambule avec sa mère dans la nef me rappelle les Vikings antiques tandis qu’à l’extérieur un adolescent vigoureux au teint fleuri arpente le trottoir pour aller voir un copain et qu’une robuste jeune fille arbore une bonne gueule de Normande. Si le duché de Normandie est fondé en 911, en 933 le duc Guillaume Longue-Épée conquiert l’Avranchin, le Cotentin et les îles Anglo-Normandes sur Incon et ses Vikings de Bretagne. Avec son consentement, le roi danois Harald, déchu par son fils et chassé de ses terres, débarque un peu plus tard avec soixante navires. Les Scandinaves ont clairement influé sur le patrimoine génétique du Cotentin selon des chercheurs britanniques de l’université de Leicester qui ont collecté en juin 2015 des centaines d’échantillons de salive pour le prouver.

Plus bas, nous faisons le tour de l’église Saint-Pierre avec une tour-lanterne de 1550 ornée de clochetons. Les maisons grises de la ville en granit des îles Chausey s’harmonisent avec le gris du ciel qui déverse parfois ses giboulées.

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