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Jean-Christophe Grangé, Kaïken

Les psychopathes, il connaît, Grangé, il en fait son fonds de commerce. Olivier Passan, commandant à la brigade criminelle de Paris les traque dans les banlieues sordides du 9.3, notamment celui que la presse appelle « l’Accoucheur » qui ne tue que les femmes enceintes de plusieurs mois en les éviscérant et en brûlant le bébé encore relié par le cordon au ventre de sa mère. Charmant…

Il va progressivement découvrir que le tueur est un orphelin comme lui, passé dans des foyers d’accueil comme lui, mais détruit à jamais par les mauvais traitements qu’il a subis en raison d’une anomalie physique qu’il garde secrète. Passan est sur le point de le serrer mais il agit seul, avec son adjoint déjanté Fifi, et le viol d’une gamine par deux racailles les empêchent in extremis de prendre en flagrant délit le boucher à l’œuvre. Il part à la course et lorsqu’il le rattrape, celui-ci s’est débarrassé de ses gants de chirurgien tachés de sang et, à moins de les retrouver, impossible de le relier au meurtre par éviscération qui vient d’être commis dans un hangar à deux pas de là. D’autant que Passan, sur plainte antérieur du tueur pour harcèlement policier, a une injonction judiciaire de ne pas l’approcher à moins de 200 m. Faute de flag et de preuves concrètes, rien à faire, le tueur est relâché par la justice.

C’est alors que d’étranges événements menacent la famille du commandant. Dans sa villa de Suresnes, entouré d’un terrain dont une partie est un jardin japonais qu’il a composé lui-même, son épouse nipponne Naoko découvre un soir le cadavre dépiauté d’un fœtus qui la regarde depuis l’intérieur du frigo. Aucune trace d’effraction, aucune empreinte. Un peu plus tard, c’est le chien Diego qui est tué et éviscéré dans la chambre des enfants sans même qu’ils se réveillent. Les caméras de surveillance montrent une femme en kimono de soie et masque de Nô – mais qui cela peut-il être ? Naoko ? Son amie Sandrine un brin déstabilisée par son cancer en phase terminale ? Une réminiscence du passé venu du Japon ? Les deux garçons de 8 et 5 ans, Shinji et Hiroki, sont deux poupées de porcelaine pleines de vie ; pour eux, tout va bien dès lors que l’un des parents est présent. Leur monde est alors stable et ils ne s’en font pas plus.

Heureusement, car rien n’est terminé. Le psychopathe éviscérateur de jeunes femmes n’est pas le seul à en vouloir à la famille franco-japonaise ; même éliminé, tout se poursuit. Je ne peux en dire plus, sinon que Passan est fragile dans son ménage et ne connaît pas si bien que cela son épouse japonaise, malgré leurs dix ans de mariage. Mais il est obstiné et, malgré fatigue et blessures, ira jusqu’au bout pour connaître la vérité. Il lui faudra voyager jusqu’au Japon, dans une île retirée sans aucun habitant mais où règnent les kamis, ces divinités des arbres, des sources et des lieux, pour connaître enfin ce qu’il n’aurait jamais soupçonné. Car, au-delà du folklore samouraï et zen, le pays forme à la dure des névrosés qui tournent volontiers psychopathes. Décidément, l’auteur n’en sort pas… A propos, le kaïken est le poignard des femmes samouraïs qui se faisaient seppuku après la mort de leur mari.

Un thriller haletant, découpé en courts chapitres de suspense, qui se lit au galop malgré le nombre de ses pages. Un très bon Jean-Christophe Grangé.

Les psychopathes les psychopathes, il connaît Jean-Christophe Grangé, Kaïken, 2012, Livre de poche 2014, 547 pages, €8.70 e-book Kindle €7.99

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