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De Locmaria au Palais

C’est notre partie la plus facile du tour, mais le dernier jour et sur 17 km quand même. Le vent a tourné au nord, ce qui nous permet de l’avoir dans le nez, mais moins fort qu’hier et sans grains cette fois-ci.

Dans une anse près de Locmaria est installé un camp scout. La plage de sable dans la crique est juste au-delà de la route. Les gamins, que l’on voit en chemise par ce matin venteux, doivent être excités par le vent et l’eau froide vu qu’ils sont peu boutonnés. Le climat breton incite à discipliner sa libido.

À la pointe de Kerdonis, le phare qui culmine à 37,90 mètres au-dessus de la mer fait l’objet d’une légende contemporaine. Une famille était gardien de phare et le père, le soir du 18 avril 1911 est mort en nettoyant la lentille. Comme le mécanisme était démonté, sa femme et ses enfants ont fait tourner le phare toute la nuit à la main, avec le cadavre à leurs côtés, pour ne pas que les marins soient privés du feu annonçant les abords de Belle-Île et l’entrée dans le golfe du Morbihan. Le chanteur Théodore Botrel les a appelés « les Petits Gardiens du feu » et la veuve Matelot a reçu la médaille d’honneur des Travaux publics.

À Port An Do, tout près de là, est la plage où ont débarqué les Anglais en 1761.

Nous marchons parmi les fougères avec quelques criques en dénivelée, mais moins accentuées que sur la côte sud. La maison idéale de Sandrine est tout en pierre de granite, une plage au pied dans sa crique. Il faut simplement clôturer le terrain avant la pente si l’on a des enfants petits.

Nous passons le hameau de Samzun, qui me rappelle Anaïck portant ce même nom de famille, une archéologue que j’ai bien connue. Puis surgit la plage des Grands sables, la plus grande de l’île, où la chienne court et aboie aux vagues mais surtout au kit-surfeur dont la voile lui fait peur. Un ado s’essaie à la planche mais il y a moins de rouleaux que sur la Côte sauvage.

Nous avons laissé nos affaires à la bagagerie des Cars bleus ce matin et nous les récupérons pour prendre le ferry de 16 heures qui nous mènera à Quiberon. Sur le pont supérieur du Bangor, j’observe un père aux trois fils ; il les cajole et leur parle à tour de rôle. Celui du milieu, 7 ans, vêtu d’un blouson de simili cuir, d’un pull et d’un polo, veut absolument se mettre sur son ventre nu, sous le T-shirt. Le plus petit, 4 ans et tout blond, l’imite, puis veut jouer l’avion à bout de bras. Un papa poule.

Les adieux sont très brefs, le Tire-bouchon part trois quarts d’heure plus tard et, si je tente d’attendre quelques minutes la navette qui ne vient pas, je décide très vite d’aller à la gare à pied. C’est éprouvant pour mon ampoule sous le pied droit mais efficace, car j’arrive vingt minutes avant le départ. Une fois installé, je suis sur le siège d’à côté où deux frères s’aiment d’amour tendre. Cela semble de plus en plus courant comme si le monde hostile incitait aux câlins. Le plus grand a 13 ans et écoute sa musique avec des oreillettes tandis que le petit a 6 ou 7 ans. Il pose sa tête sur le torse de l’aîné et se laisse câliner distraitement par la main. Un autre garçon plus grand et un cousin ou un ami, ou deux cousins, sur le siège derrière, écoutent eux aussi la musique de leur téléphone portable. La mère est assise sur le siège derrière moi et s’occupe de distribuer les vivres, un sachet de pomme pressée et un mini cake emballé pour chacun. Lorsque le train arrive à Auray, elle demande au petit frère de réveiller l’aîné « en lui faisant une caresse pour ne pas le brusquer ».

Dans le TGV pour Paris, un bobo qui lit Le Monde sur un siège parallèle face à moi est sans cesse sollicité par ses deux filles. La plus jeune a 8 ans, la plus grande 10 ans. Si la cadette fait très fille, l’aînée est un garçon manqué comme la Claude du Club des cinq. Fagotée d’un short de foot, d’un t-shirt vert pomme et d’un k-way rouge, elle porte des tongs. Je l’ai cru garçon avec ses cheveux blonds dans le cou, ses longues jambes nues et sa vêture foutraque, mais ses tongs sont roses et papa l’appelle Pépita. Lui casse la croûte avec une boite de sardines et une boite de thon. Il y a du pain et des crêpes, rien de plus. Les filles doivent s’en contenter ou « demander à Juliette », une amie, une tante ou une belle-sœur du wagon voisin, « si elle a du fromage ». Passe alors celui que le père appelle aussitôt « Cupidon chéri », un mignon petit blond de 5 ou 6 ans qui se prénomme en réalité Paul.

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