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Anne Perry, La conspiration de Whitechapel

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Connaissez-vous Jack l’Éventreur ? Eh bien l’enquête de Thomas Pitt le conduit à découvrir une vérité à son sujet, quatre ans après les faits réels…

Nous sommes en 1892 et la reine Victoria, « vieille dame, petite, replète, aux regards vifs » (p.394), en deuil de son mari consort depuis 30 ans, est aussi absente de son peuple que certains Présidents français, 114 ans plus tard. Heureusement, la république permet de virer les rois fainéants. Ce n’était pas le cas de Victoria, qui règnera encore 9 ans !

Quoi d’étonnant alors à ce que fleurissent les complots ? De généreux idéalistes qui ont « fait 1848 » rêvent d’instaurer dans les îles du Royaume-Uni la république et de lâcher l’empire. D’autres, intelligents, ambitieux et froids, les manipulent à merci pour tirer les marrons du feu en leur faveur (comme souvent). Ce qu’ils veulent ? Le pouvoir, bien sûr !

Ils sont aidés par un Prince de Galles frivole, queutard et dépensier, qui deviendra le roi Édouard VII pour 9 ans à peine avant de céder la place à son neveu. Son fils, le duc de Clarence, était mort en effet. De mort naturelle ? C’est ce dont l’enquête d’un journaliste que croise Pitt permet de douter.

Thomas Pitt, justement, est au meilleur de sa forme. Il réussit par ses observations de terrain à faire condamner l’assassin d’un juste, admirateur des républiques grecques antiques. Il s’attire ainsi la haine de certains avocats et juges, tous membres du Cercle intérieur, cette organisation secrète qui noyaute le pouvoir et vise même à le prendre. En donnant un coup de pouce à certaines circonstances. Par exemple un gros scandale mettant en cause le Prince de Galles, le feu mis aux poudres de la misère en fermant quelques usines des quartiers pauvres de Londres

londres brumeux de jack l eventreur

Pitt, renvoyé du commissariat de Bow Street par les influents qu’il gêne, est affecté à la Special Branch, cette police secrète chargée de surveiller les activistes dans ces quartiers mal famés qu’un rien pousse à l’émeute. S’il y disparaissait, d’ailleurs, les manipulateurs n’en seraient que plus ravis.

Mais voilà, Pitt n’est pas seul, lui non plus. Le passé vous rattrape toujours et il a su nouer des relations et des amitiés qui le confortent et qui l’aident : sa femme Charlotte, sa bonne Gracie, son ancien inspecteur Tellman, la tante par alliance de sa femme Lady Vespasia, son ancien chef Cornwallis, son nouveau chef Narraway… Chacun apporte sa pierre à l’édifice, les embrouilles sont débrouillées. Non sans mal, mais c’est ce qui fait l’attrait haletant de l’enquête. Nous avons là en effet l’un des meilleurs Pitt de la série !

Anne Perry, La conspiration de Whitechapel (The Whitechapel Conspiracy), 2001, traduction française 10/18 2006, 395 pages, €8.10

e-book format Kindle, €10.99

Les romans d’Anne Perry déjà chroniqués sur ce blog

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Château de Peyrepertuse

Au-dessus de Duilhac s’élève le château de Peyrepertuse, très haut à 800 m d’altitude sur son éperon rocheux.

peyrepertuse

Nous grimpons – interminablement – depuis le village, dès après le petit-déjeuner.

peyrepertuse tour

Les autres s’arrêtent à la porte, sans doute pour quelques explications. Je préfère pour ma part poursuivre tout seul, afin de faire des photos à mon aise, sans personne dans l’image.

peyrepertuse plan du chateau

Je fais ainsi deux fois l’ascension du donjon, depuis l’église Sainte-Anne, fouillée entre 1977 et 1993, via l’escalier de Saint-Louis – qui comprend 122 marches. Je les ai comptées.

peyrepertuse escalier de st louis

Les chiottes aériennes de l’époque laissent rêveur : il fallait avoir envie !

peyrepertuse chiottes

La chapelle San Jordi, tout en haut perchée, est aux trois-quarts en ruines mais domine toute la contrée. Elle élève vers le ciel sa prière désormais muette.

peyrepertuse chapelle san jordi

Nous voyons, depuis le donjon, le village de Ruffiac en bas et, d’un autre côté Quéribus, puis le téton de la tour de Tautavel, au bas de laquelle passe le Verdouble ! La Méditerranée est une ligne blanche à l’horizon, qui se confond presque avec le ciel. Les défenses s’étendent sur une vaste étendue, au sommet de la crête.

queribus depuis peyrepertuse

Au retour à l’entrée, un petit garçon de sept ans prénommé Olympe est sermonné par ses parents : « tu fais attention, il y a du vide et des pierres qui roulent ; tu restes auprès de nous et tu ne cours pas ». Quand je lui dis qu’il doit grimper haut et encore 122 marches, il s’écrie « c’est cool ! ». Optimisme de l’enfance qui n’a jamais peur de rien.

peyrepertuse domine la plaine

Nous poursuivons à pied par le Pla de Brézou où des vaches beiges aux longues cornes nous regardent de leurs yeux doux. Y pousse la ciste de Montpellier, en général mauve, parfois blanche. Le chemin pierreux monte en forêt, puis au grand soleil enfin revenu. Le vent reste constant, soufflant parfois en rafales aux cols ou sur les hauteurs. Il est frais, humide, à la limite de la pluie croirait-on ; mais il s’agit du Sers, le vent d’ouest venant de la terre, qui n’apporte pas de précipitations.

Au lieu choisi pour le pique-nique, nous dépassons une bande de femmes assises en jacassant, qui attendent leurs mecs. Ceux-ci surviennent en groupe compact un peu plus tard, primesauts comme des gamins. Ils ont vu un « serpin… » – autrement dit un orvet, prononcé avec cet accent à couper au couteau dont j’ai subi enfant les dictées. Ils l’observent, le titillent, enfin l’apportent triomphalement aux femelles comme un trophée de chasse. Des gamins, je vous dis.

ermitage antoine gorges de galamus

Nous suivons le GR 367 jusqu’aux gorges de Galamus, dont le nom proviendrait d’un centurion romain. Géologiquement, c’est un coup d’épée dans la montagne, au fond duquel se précipite un torrent sinueux et violent. Des kayakistes sur le parking au-dessus se rhabillent, adultes machos comme ados frissonnants quittant leur combinaison, les pieds nus. Un Antoine fut ermite dans une grotte au-dessus. Devenu saint après sa mort en 1870, elle est désormais lieu de pèlerinage. Une chapelle est dédiée au saint dans la grotte et il est représenté par une statue de bois brun toute luisante. Quelques chauves-souris peuplent les lieux et s’envolent en criaillant à notre entrée.

ermitage antoine gorges de galamus grotte chapelle

Un escalier de 108 marches bas de plafond, creusé dans le roc, rejoint la route creusée à flanc de falaise qui passe au-dessus. Une source, dédiée à sainte Marie-Madeleine, s’écoule dans une vasque artificielle, tandis qu’une statue de Christ viril à la poitrine puissante domine la double femme : Marie-Madeleine aux yeux bandés, parée et se mirant dans un miroir, Marie-Madeleine décillée et debout face au Sauveur. La pancarte qui « explique l’œuvre d’art » à côté me semble… passer à côté du sens.

ermitage antoine gorges de galamus christ et 2 madeleine

La route qui prend après le second parking, au-dessus de l’ermitage, a été achevée en 1892 ; elle est très étroite et sinue sur une file dans la gorge. L’à-pic est impressionnant sur le torrent de l’Agly, une soixantaine de mètres plus bas. Après la borne marquant la limite du département de l’Aude, il se met à pleuvoir. Le vent n’a pas cessé. Le paysage s’est brusquement transformé : au nord des forêts de chênes et de hêtres, au sud la garrigue aux chênes verts et kermès, l’érable de Montpellier et le genévrier de Phénicie.

Il est convenu qu’une camionnette taxi nous prenne un peu plus loin, et elle est bienvenue. Elle nous conduit au gîte de La Bastide, un « accueil paysan » du XVe siècle isolé dans un paysage de prairies. Une partie du bâtiment principal de la ferme sert au gîte, l’autre moitié au couple de paysans, lui « mal foutu » un peu grippé et elle, Allemande venue se mettre au vert en 68 et restée depuis lors. De nombreuses vaches stabulent devant nous, elles retourneront au pâturage dès l’aube venue. Le dîner est goûteux : salade bio du jardin très croquante, blanquette de veau de la ferme, quiche aux épinards, petits chèvres des voisins. En apéro, nous goûtons le Rivesaltes ambré. Suit un vin rouge de l’année, épais, à la saveur de cerise. Notre repos, dans un dortoir sous le toit avec deux douches pour tout le groupe, « confort adapté à l’habitat local » selon la charte accueil paysan, est bien mérité.

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