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Rikjsmuseum d’Amsterdam 1

Nous prenons le tram avec un forfait pour trois jours, ce qui nous permettra de l’emprunter pour revenir à l’hôtel. Il y a foule à l’entrée du musée. Nous ne faisons heureusement pas la queue, grâce aux billets de groupe déjà pris. Des scolaires en primaire et en collège arpentent les salles mais aussi des familles en ce vendredi. Nous allons d’abord visiter le musée dont la rénovation s’est terminée en 2013. Je ne peux rendre compte de tout, le musée est trop riche. Je ne vous donne qu’une sélection de ce qui m’a marqué.

Le Louvre des Pays-Bas est un musée qui se visite en une journée, heureusement. Il retrace l’histoire de l’art hollandais, ce qui permet de resituer Vermeer dans la lignée et l’époque. Ce sont les primitifs flamands qui ont maîtrisé la peinture à huile et ont fait tellement attention aux détails. Le réalisme de Frans Hals vient d’eux, tout comme la minutie de Vermeer.

Des scènes bibliques, comme il se doit, jalonnent le 16ème siècle. Une tablette mémoriale vers 1500 montre combien la vie est brève et que le destin est le tombeau.

Jan Cornelisz Vermeyen, Sainte famille v.1528, expose un Bambin musclé nu en sa nature humaine, déjà adulte dans son regard, prêt pour sa Mission de sauvetage du genre homo.

Jan Mostaert, Adoration des mages XVe

Les peintres de genre sont Jan Steen et De Hoogh, tandis que Ruysdael ou Van Goyen ont rendu l’atmosphère particulière des canaux, des plaines humides et des ciels tourmentés.

Dans la partie d’art ancien, j’apprécie grandement les petits bijoux que sont les noix sculptées en buis de scènes bibliques ou d’église, comme les anges musiciens. Elles viennent de l’atelier d’Adam Theodrici et ont été réalisées entre 1500 et 1530.

De facture un peu plus ancienne, fin XVe siècle, le bon et le mauvais larron dansent sur leurs croix dans le même bois de buis.

Vers 1400, c’est un Christ au corps très étiré, en bois, qui vient de Bunde, un village près de Maastricht.

Le Dernier souper, vers 1520, provient d’Ulm et sculpte le Christ et ses apôtres lors de la Cène. Le très jeune Jean se penche pour baiser la main de Jésus, juste au-dessus du sexe, comme avide de dévorer déjà la chair du Christ qui est dans le plat devant lui, tandis que celui-ci donne à manger à Judas qui va le trahir. Les dix autres apôtres, tous barbus et à la chevelure ondulée, regardent ailleurs.

Étrange histoire que celle de saint Vitus, sculpté en bois vers 1500. C’était un gamin sicilien de 12 ans qui avait la foi chrétienne et n’a pas voulu abjurer malgré sa torture, flanqué nu dans un chaudron d’huile et de résine bouillantes. Il a survécu aux épreuves, soutenu par sa foi.

Autre étrangeté cet Episode de la conquête des Amériques par Jan Jansz Mostaert, peint en 1535. Dans un décor aride aux falaises sculptées par la mer, une horde d’indigènes tout nus qui surgissent de partout combattent une section d’Espagnols casqués, armés et vêtus de fer, fraîchement débarqués. C’est un choc des civilisations quasi extraterrestre.

La Vénus couchée de Lambert Gustris, vers 1540, est une belle femme nue voluptueusement allongée sur son matelas avec la main sur son sexe, tandis que d’autres femmes vaquent, habillées, à leur musique ou aux soins du linge, au fond de la pièce. Ce contraste érotique rend le spectateur voyeur d’une intimité qui, pourtant, devrait être morale, puisque les humains, dans les Provinces unies, « n’ont rien à cacher ». Les gamins s’amusent devant ; cela les émoustille.

Vers 1560, Pieter Pietersz offre à voir un Homme et une femme au fuseau qui est à la fois un portrait et une morale : l’homme sans conteste désire la femme, son regard exclusivement tournée vers elle et tenant un vase à la main, tandis qu’elle est tournée vers le spectateur, comme pour l’interroger sur ce qu’elle doit faire : choisir la vertu ou le vice. Mais elle a déjà choisi : son fuseau, clairement phallique et piquant au bout, s’est tourné vers son vagin.

C’est carrément un bordel que figure Pieter Aertsen en 1552, sous le titre gai de Danse de l’œuf. Il faut tout en dansant, retourner une écuelle en bois sur l’œuf qui roule, sans le casser. Tout le tableau désincite les mineurs à la débauche. Un jeune garçon se tient en effet sur le seuil et regarde.

Joachim Beucklaer, en 1566, présente une Cuisine bien garnie. Mais c’est la visite du Christ à Marie et Marthe, en tout petit et en gris, en fond de tableau, qui est le sujet principal. Le contraste entre la profusion de nourritures terrestres colorées et la voie spirituelle chrétienne austère en noir et blanc est mise en évidence pour édifier le spectateur.

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