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Yves Bréhèret, Les cosaques

Apparus vers l’an 800 sur les frontières sud de la Russie, les cosaques du Don et de la Volga sont devenus à la fois des révoltés perpétuels contre le pouvoir central, pionniers des confins et une cavalerie précieuse pour repousser les assauts des Mongols et les Turcs dans l’empire du tsar. Cavaliers émérites de la steppe, tout jeune homme s’entraîne au djiguite, la virtuosité à cheval qui permet non seulement de tenir en selle en tout temps, mais aussi d’éviter les lances ou les tirs, en restant toujours mobile.

« Ils ont surgi de rien, les vagabonds de la terre. Ils sont venus de la steppe balayée par les invasions » p.9. Le style est donné : lyrique. L’auteur conte une légende, moins historien que journaliste qui sait mettre en scène. Mais l’histoire populaire est un plaisir lorsqu’elle s’appuie sur des sources fiables ; l’étendue de la bibliographie en fin de volume rassure sur ce point.

Car les cosaques sont un peuple mythique. Petchenègues, Zaporogues, Ukrainiens, mêlés par les conquêtes et les viols d’indigènes, « ils ne forment pas une nation, ne sont pas issus d’une même race » p.10. Ce sont des pillards en liberté, mais chrétiens orthodoxes. De ces « bon sauvages », le grand Tolstoï en a fait un roman. Mais il se situe à son époque – romantique. Yves Bréhérèt se situe sur un autre plan ; il embrasse l’histoire pour chanter l’épopée des premières bandes qui s’établissent autour du Don et se terminent par la trahison anglaise en 1946, qui livre les derniers régiments cosaques « blancs » aux sbires de Staline.

Juste après 1968, qui méprisait l’armée et récusait toutes les formes d’autorité, l’éditeur Balland a composé une collection sur les « corps d’élite » des armées du monde. Dont, pour la Russie, les cosaques. Yves Bréhèret, grand reporter au Figaro est mort en 2016 ; il aimait l’armée et l’exaltation virile qu’elle procurait.

Les « oies sauvages » se trouvent des chefs successifs, les Atamans, Iermak Timotheievitch en marche vers l’est, Stienka Razine sur la Volga, Bogdan Khmelnitsky en Ukraine, Ivan Mazeppa dans la steppe, Emilian Pougatchev qui se dit tsar contre Catherine II, Matvei Ivanovitch Platov contre l’invasion de Napoléon, Iakov Pétrovitch Baklanov le diable du Caucase, Alexis Maximovitch Kalédine au sceptre brisé, Krasnov sous les Rouges, Boudionny pour la Révolution, Simon Petlioura pour l’indépendance de l’Ukraine contre Staline, enfin Helmut von Pannwitz le dernier Ataman des cosaques ralliés à Hitler.

La forme choisie, vivante, imagée, se lit avec bonheur. De nouveaux livres sont parus sur « les cosaques » depuis cette date, mais pas avec cette verve, ce plaisir de conter et d’embrasser la mentalité de ces guerriers qui commençaient à 15 ans, épris avant tout d’indépendance.

Yves Bréhèret, Les cosaques, Balland 1972, 366 pages et 68 photos noir et blanc, occasion €19.40

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