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Marine Le Pen pour 2012 ?

Article repris par Medium4You.

Droite, gauche, tout a changé avec la crise. 2012 ne sera pas 2007.

La question de la droite est celle du communautarisme national. La nuisance Le Pen ne se posait pas en 2007, car l’on sortait d’une quinzaine d’années Chirac (Premier ministre puis Président) et d’une dernière année Jospin catastrophique, le social s’usant dans la démagogie dépensière et clientéliste. Autant elle se pose avec la nouvelle Marine. Il n’y en avait en 2002 que pour le « social », sésame et mantra de la gauche d’époque, ce qui signifiait pour les trois quarts de la population votante des classes populaires et moyennes inférieures : du fric pour « tous » mais pas pour nous. Le « tous » était réduits aux zexclus et autres immigrés ghettoïsés. Sans que baisse la délinquance ni les incivilités, ni même la revendication communautariste islamiste, au contraire. Avec talent, Nicolas Sarkozy a récupéré ce ressentiment des « petits » avec le karcher et le travailler plus pour gagner plus. Il y avait là un projet concret de société, à court terme certes, mais comme patch acceptable au pacte républicain après l’ère des rois fainéants, de Mitterrand II à Chirac II.

Hélas ! Les pesanteurs de la toute-puissante Administration (décrets d’applications qui tardent ou ne sont jamais sortis, mammoutherie éducative, bureaucratie dantesque de la santé…), les lobbies de toutes sortes (surtout à l’UMP), l’euphorie de nouveau riche du candidat parvenu, la crise financière devenue économique et européenne, ont conduit Nicolas Sarkozy à faire du cosmétique. Des effets d’annonce non suivis d’effets concrets ; une « paix sociale » achetée à coup de millions sur les régimes spéciaux ; une tétanisation de l’emploi qui gèle tout allègement de subventions aux patrons et tout rabot de niche fiscale orientée entreprise. Quel sera le projet 2012 de la droite pour l’avenir ? Difficile de le dire. En tous cas pas la rupture comme en 2007. Marine Le Pen récupère les protestataires de droite.

La question de la gauche est celle du projet de société. Vouloir une Europe plus sociale avec souci des travailleurs, des familles et de l’environnement, investissement d’État dans les infrastructures que le marché juge non rentable, régulation du marché financier, priorité à l’éducation et à la formation, tout cela est bel et bon. Et probablement indispensable pour les assises d’un capitalisme durable. Mais prolonger l’État-providence en l’adaptant à la marge n’est pas en soi un projet. La politique exige autre chose, une claire vision du monde qui émerge et ses conséquences réalistes sur le vivre ensemble. Qu’est-ce qu’une bonne société ? Silence de mort à gauche. Est-ce le passé proche idéalisé des années pré-11 Septembre ? Les Trente glorieuses enfuies, où existaient deux blocs, les deux tiers de l’humanité dans le sous-développement et des frontières ? Est-ce le « mouvement social » depuis 1936 avec les zacquis sacralisés ? Qu’en est-il du projet de gauche dans ce nouveau monde globalisé où les deux tiers sous-développés émergent à la production ?

La gauche se pose en protestation permanente contre tout ce qui change l’âge d’or (fantasmé). Et comme brailler en manif est à peu près la seule expression « de gauche » qui reste, cela montre son impuissance à proposer. Au fond, la gauche proteste contre TOUT ce qui change. Est-ce autre chose que du conservatisme ? Il y avait bien eu un espoir avec Ségolène Royal et ses promesses de « démocratie participative ». Mais cela a tourné court, entre la légèreté de la candidate et les réticences d’un parti de vieux, principalement fonctionnaires, à penser autrement la vulgate marxiste de leurs années de jeunesse. Aujourd’hui, Ségolène Royal dit seulement « j’ai envie ». C’est bien, mais c’est peu. Envie de quoi ? D’un noir désir d’avenir en style Harlem ? Marine Le Pen va récupérer les protestataires de gauche pour qui entre les blancs bonnets et les gueulards sans avenir, elle reprétente « la France ». Et c’est quand même quelque chose de plus que la soupe Mélenchon, « la France ».

Or la France n’est pas dans le cas de la Tunisie, qui émerge par les émeutes de 23 ans de pouvoir autoritaire clientéliste. La « révolution » fait peut-être bander la gauche, mais Nicolas Sarkozy n’est élu que depuis 4 ans. Même si Michèle Alliot-Marie aurait mieux fait de se taire en proposant au Président Ben Ali le savoir-faire français en matière de maintien de l’ordre (elle vient de rectifier), le grand chambardement n’est qu’un fantasme dans la mesure où la société civile n’est pas brimée en France comme elle l’est en Tunisie. D’autant qu’il s’agit pour l’instant, selon une analyse marxiste, d’une révolution bourgeoise de classe moyenne éduquée hantée par le chômage et la corruption des élites, révolution faite en 1789 déjà. L’individualisme « postmoderne » fait en France du chacun pour soi et de la laïcité publique un état de fait.

Ce pour quoi l’essor Le Pen est un symptôme qui va compter cette fois en 2012. Nous l’avons écrit, le vieux raciste pétainiste s’est métamorphosé en femme moderne qui fait de l’intégrisme républicain son credo. De quoi revitaliser le pacte national, après tout bien aimé des Français. Bien sûr, il y a du fascisme dans le projet Le Pen. Il ne faut pas avoir peur des mots à condition de les définir. Qu’est-ce que le fascisme ? Le primat de la force sur le droit, de la Nature (devenue religion) sur la culture (comme processus de civilisation des instincts). Cela se traduit par un darwinisme national (on disait hier « racial ») et un darwinisme social. Les étrangers et les faibles sont rejetés, boucs émissaires faciles de tous les maux de la société. Il s’agit bel et bien d’un communautarisme, mais français, blanc, chrétien.

L’Ennemi, c’est l’Arabe. Il est le symbole de l’immigré, du pauvre, du musulman – au fond tout ce qui n’est pas « national » et – pire ! – celui qui a chassé la France du département français d’Algérie. Plus largement, l’ennemi est tout ce qui permet à l’Arabe de venir et de rester en France en revendiquant ses coutumes : 1789 qui fait par principe (après l’Évangile…) les humains tous égaux entre eux sur la terre, le libéralisme qui relativise les cultures, le socialisme marxiste qui néglige les idées et les coutumes pour se focaliser uniquement sur la production et les « moyens », la mondialisation anglo-saxonne qui permet le libre-échange des hommes.

D’où pour les Le Pen, père et fille :

  • Refus de la mondialisation
  • Refus de l’Union européenne
  • Refus de la société multiculturelle

Cela parle aux chômeurs ouvriers, jeunes ou seniors ; cela parle aux déclassés, diplômés précaires, petits commerçants, agriculteurs endettés, épargnants lésés. Comme sous Mussolini, c’est le Peuple (entité idéale) contre les élites, les petits contre les gros, les nationaux contre les étrangers allogènes.

La France va-t-elle suivre cette démagogie qui joue des peurs et des fantasmes, prenant ancrage dans la crise économique et l’enrichissement indu de quelques-uns ? Nous ne le croyons pas. Marine Le Pen, puisqu’elle a gagné ses « primaires », va certes engranger des voix protestataires.

  • Hier elles allaient au parti communiste, sans que les Français ne veuillent une dictature stalinienne ;
  • Demain elles iront au Front national sans que les Français ne veuillent une dictature fasciste.

Car l’ambiguité Le Pen est là : si les Français sont volontiers bonapartistes, autoritaires et caporalistes, ils sont héritiers de la Révolution et les Lumières. Les populistes souhaitent – n’en déplaise à la gôch ! – un Sarkozy+ et pas un néo-Mussolini. Le fascisme, quelle que soit son origine (mussolinien, hitlérien, franquiste, salazariste, pétainiste), est anti-1789, national-conservateur, pas universel-émancipateur : il souhaite le retour à la société organique où le Chef incarne le Peuple comme entité ethnique, religieuse et culturelle (une foi, une loi, un roi). Pour les Français d’aujourd’hui, l’intégrisme républicain oui, le racisme, non ; la souveraineté oui, la sortie de l’euro, non ; l’interdiction du voile oui, les tabous sur le nombre de Noirs ou d’Arabes délinquants, non.

L’électeur, qui a parfaitement compris les suffrages sous la Ve République, envoie un « message » aux politiciens qui, de toute façon, gouverneront. S’il existait une proportionnelle à l’Assemblée, il y aurait plusieurs dizaines de députés du Front national. Mais ils devraient en ce cas débattre publiquement et proposer ce qui est possible (et pas un fantasme). Leur score fluctuerait en fonction de leur réalisme et des alliances qu’ils seraient capables de nouer en fonction des circonstances. Pour la présidentielle, c’est autre chose. Nous l’avons vu en 2002, Le Pen n’a guère ramassé plus que son plein de voix du premier tour au second. Chirac n’était pas aimé, mais mieux valait Chirac.

En 2012, le Front national risque donc de diviser la droite au premier tour, mais la gauche encore plus. Marine apparaît plus charismatique que Martine devant le populaire, et moins technocrate féministe que Ségolène. Mélenchon divisera plus encore à gauche, surtout si DSK ne se présente pas. Au second tour Nicolas Sarkozy, malgré ses défauts, a des chances de l’emporter – par division à gauche et par montée de l’extrême à droite. Il ne s’agit pas de ‘whishfull thinking’ mais du point de vue de l’analyste politique : le président actuel pourrait apparaître en rassembleur, modéré, avec la légitimité du sortant.

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Prédire ou prévoir ?

Article repris par Medium4You.

En ce début d’année, les prédictions vont bon train. Les prévisions sont plus précautionneuses. Il est vrai qu’affirmer ce qu’on croit est plus facile qu’analyser ce qui est possible. Il y a entre les deux tout le fossé qui sépare l’irrationnel du rationnel. Prédire ressort de la foi, prévoir de la science. Oh, bien sûr, tout n’est pas rationnel dans le réel, puisque l’irrationnel existe – et qu’il est tout aussi réel ! Mais l’Occident a choisi, juste après la Renaissance, de confier son sort au rationnel plutôt qu’à la foi, et il s’en est plutôt bien trouvé.

Depuis Descartes, mais il n’est pas le seul, chacun sait bien qu’il vaut mieux douter des dogmes (fussent-ils présentés comme « scientifiques ») et observer les choses par soi-même et à fond, plutôt qu’ajouter foi à des rumeurs, des racontars, voire de purs contes de fées. Dès l’âge de raison, tout petit Français ne croit plus au père Noël et il est rare qu’il passe l’adolescence sans remettre en cause notre Père qui est aux cieux. Aucun précepte biblique ne tient face à une jeune fille en fleur. Dieu n’a rien à voir avec la science, il est au-delà ; la science n’a pas besoin de l’hypothèse du Grand Horloger pour fonctionner. Au contraire : les intégrismes islamique ou créationniste mélangent les dogmes de la foi et la quête scientifique, ils veulent figer le mouvement du savoir au profit de leur propre pouvoir. Rien n’empêche un scientifique d’être croyant, mais il s’agit d’un autre ordre.

Ceci posé, le rationnel n’est ni froid ni né de rien. S’il est calculateur et vérificateur, avançant par examens, hypothèses et preuves, son premier mouvement naît de l’instinct ou de la passion. Nietzsche l’a bien montré, qui fait de la poussée vitale l’origine de la curiosité pour explorer le monde. Pas de recherche sans envie, ni de découverte sans obstination, toutes choses peu rationnelles au fond, car elles vont au rebours du principe d’économie qui fait de la paresse l’état le plus satisfaisant de l’humain.

C’est pourquoi les « prévisions » d’Élisabeth Teyssier sont aussi risibles que vagues. Dire que « l’opposition sera très présente en 2011 », c’est enfoncer une porte ouverte l’année de la campagne pour les présidentielles ! Que Sarkozy soit « innovateur » et « fougueux », ce n’est pas la peine d’aller chercher le Verseau ascendant Bélier pour le constater ! Que DSK ait une « forte libido », pas besoin d’en référer au Taureau pour le savoir, la presse fait ça bien mieux. Et que Madone Ségolène soit Vierge ascendant Verseau ne nous apprend vraiment rien… La meilleure preuve que ces astrologues sont des charlatans a été apportée il y a des années par la fameuse Madame Soleil, qui sévissait sur une radio : la seule chose utile qu’elle n’ait jamais « prévue » a été son contrôle fiscal. Pourtant, pas besoin d’être sorcier pour émettre l’hypothèse que si on ne déclare pas tous ses revenus…

Le pire est quand la magie réclame la caution de la science ! C’est mélanger les ordres et faire du savoir scientifique une croyance au même titre qu’une religion. « Cela m’a pris plus de sept heures de travail, déclare Élisabeth Teyssier. J’ai étudié le thème astral de chaque personnalité, en fonction de ses date, heure et lieu (latitude/longitude) de naissance. J’ai ensuite utilisé mon programme informatique utilisant les données de la Nasa. Puis j’ai réalisé une interprétation symbolique, qui s’appuie sur des observations multimillénaires, a partir de ces données mathématico/astronomiques. C’est ainsi que possède un astrologue digne de ce nom. » Ben voyons ! Observez combien chaque mot magique est flanqué d’un mot scientifique dans ce discours ! Lieu et latitude/longitude, thème astral et programme informatique, naissance et données de la Nasa, interprétation symbolique et données mathématico/astronomiques. Ajoutez à cela « les heures de travail », qui flattent l’esprit bourgeois, le mot « étudié » qui fait sérieux, et voilà l’astrologie promue au rang de science. Alors qu’il y a belle lurette que l’astronomie a relégué les fantasmes des astrologues dans l’ère de la magie toute comme les chimistes ont enfoncé les alchimistes.

Cela ne serait que divertissement de foule, de quoi rire à la veillée, si les mêmes causes ne produisaient les mêmes effets. Tout l’occultisme des années 30, le magnétisme hypnotique d’un certain Hitler, la magie folklorique des mythes germaniques et les fantasmes obsessionnels de race pure ont submergé la science officielle. On en a fait de la politique pour mieux manipuler les masses. Ah ! ces feux de camp pour la jeunesse et ces cathédrales de lumières des meetings, ce sport sain prôné contre l’étude talmudique des livres, cet ordre dans les rues et ce Monumenthâl de l’architecture ! Sauf que c’est un nègre, Jesse Owens, qui a battu les champions germaniques entraînés par leur foi mythologique aux Jeux olympiques. Et que c’est l’industrie de ces vulgaires Yankees, passablement juifs, qui a vaincu la Grande Allemagne et son règne prévu pour mille ans.

En 2010, on nous refait le coup avec le climat, l’Académie des sciences se cachant de tous les citoyens pour juger politiquement correcte la thèse officielle. De quoi pousser les écolos un peu plus vers la mystique et l’honnête citoyen, considéré comme infantile et mineur, à la paranoïa du Complot et du ‘on nous cache des choses’. Déjà, tout politicien dont la bouche est pleine du mot ‘transparence’ se voit rire au nez et soupçonner de pratiquer le contraire. « Expedita ! » dit-on plus simplement dans Harry Potter, avec ce joli mouvement du poignet prêté aux gens douteux.

C’est que la magie revient depuis le début des années 1980. Est-ce la crise du pétrole et l’avènement de l’obscurantiste iranien Khomeiny ? Tous les intégrismes se sont réveillés, le catholique comme le juif, l’hindou comme le sikh et, évidemment, l’islamisme. Un moment, durant les décennies 1950 et 60, la fiction a connu son essor par la science. Elle prenait le relais du XIXème siècle positiviste avec le Golem, Frankenstein et Jules Verne. Le merveilleux était de supputer ce que connaissance et technique allaient pouvoir créer. Mais la science-fiction recule depuis des années au profit du fantastique. La première série des Star Trek était plus technique que passionnelle, bien que le « sabre laser » appartienne au folklore magique, aucun rayon n’ayant d’épaisseur mais agissant sur un point. La seconde série a réagité tous les « pouvoirs », réduisant la science au bricolo nomade des étoiles qui aide le héros. On ne tourne plus ‘Retour vers le futur’, ni ‘Rencontre du troisième type’, ni même ‘E.T.’ – mais le ‘Seigneur des anneaux’, ‘Histoire sans fin’ et ‘Harry Potter’, sans parler des vampires sexy de ‘Twiligtht’. ‘Ma femme est une sorcière’ était drôle, personne n’y croyait – mais les ados suceurs de sang, si.

Dès lors, on comprend mieux le succès médiatique des bateleurs à grand gueule, de Mélenchon à Marine Le Pen, en passant un temps par Sarkozy. Qu’elle est bien pâle DaMartine face à KriegsMarine, ou le Besancenot propret face au Mélenchon de bruit et de fureur !

Vous avez dit Führer ?

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