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Michel Déon, Bagages pour Vancouver

Dans cette suite de Mes arches de Noé, l’auteur conte ses rencontres, ses maîtres littéraires et ses anti-modèles. Ainsi de Coco Chanel, dont il a écrit avec elle une biographie, qui ne sera pas publiée tant la modiste affabulait et avait peur que cela se sache. Ou Dali, provocateur par timidité, devenu un ami après qu’il eut traduit sa Vie secrète mais qui a mal fini, vendant à l’encan son talent en se contentant de signer une feuille blanche. Il découvre Sagan, mais elle signe chez Julliard ; Christine de Rivoyre sera publiée grâce à lui. Elle lui fera découvrir l’Irlande, puis sa future femme.

L’auteur évoque aussi sa « face cachée » en la personne de Charles Orengo, directeur littéraire de Plon, qui a poussé son premier roman Je ne veux jamais l’oublier au rebours du diktat existentialiste qui régnait alors. Et la joyeuse bande des « hussards » de la Revue de la Table ronde loin de « l’aimable mystification politico-littéraire » (p.134) d’un Sartre régnant sur les lettres comme un censeur stalinien. « La revue Les temps modernes », rappelle Michel Déon, « évoquait une sorte de tribunal révolutionnaire permanent. Encadré de lieutenants au doigt sur la gâchette, Sartre condamnait sec, sans convoquer la défense ni accorder circonstances atténuantes ou sursis » p.127. « Sartre dogmatisait avec une hargne aveugle sans mesurer que tout ce qu’il s’acharnait à détruire en lui-même et autour de nous risquait d’être reconstruit au sein d’une nouvelle tyrannie bien plus inhumaine que celle qu’il accusait » p.128.

Mais la leçon d’alors n’a pas été retenue par les mélenchonistes et autres tyranneaux anti-tout qui savent mieux que tous ce qui vaut pour tous. « La politique est l’art du relatif et du possible, tout ce qu’un doctrinaire ne supporte pas et contre quoi il enrage de se sentir toujours impuissant, toujours pris au dépourvu » p.128. Et ces bourreaux de bureau, ces philosophes de tribune, se contentent de tonner, ils ne mettent jamais leurs mains pures dans le cambouis. « Je ne sais pas qu’un seul de ceux qui luttèrent avec parfois du talent pour la ‘libération’ de l’Indochine ou l’indépendance de l’Algérie soit allé à genoux demander pardon à ces peuples troqués contre le confort de la métropole à des dictateurs ou des militaires auprès de qui le père ou la mère Ubu sont l’image de la raison et de la morale » p.182.

Passent alors les compagnons littéraires, Fraigneau, Nimier, Blondin, Jacques Laurent, plus ou moins oubliés, sauf des happy few. Et les nuits parisiennes où les rencontres du monde entier étaient bizarres, mais il fallait se coucher tard.

Pour les maîtres, Stendhal, bien-sûr pour l’écriture et l’Italie, mais aussi Giono pour le héros et Chateaubriand pour les voyages. Sauf que « le voyage est d’abord oubli de soi et jamais Chateaubriand ne s’oublie » p.237. Mais l’émotion grecque reste intacte : « A l’apparition du Parthénon, le cœur s’arrête. L’Occident a commencé sur cette colline. Le soleil écrase la ville lépreuse, exhausse le monument des monuments » p.241. Pour Montherlant, « c’est entre les lignes qu’il faut découvrir un des objets de sa quête : l’aventure est amoureuse. Plus que souvent, cette aventure reste inachevée, mais elle laisse dans la mémoire le goût d’un rêve ininterrompu que l’imagination prolonge, embellit, mène à son terme ou transcende » p.244.

C’est ainsi que l’auteur écrit ses romans : « Le départ est un paysage, une voix, une silhouette, une couleur de cheveux ou d’yeux, quelques mots perçus au vol, et même souvent une page d’un auteur aimé, un tableau que pour des raisons inexplicables on préfère » p.247. Tout est prétexte à rêver et inventer. « Chaque livre est une histoire d’amour commencée dans l’exaltation, poursuivie dans la peine et l’hésitation, terminée dans la sagesse » p.248.

Ne pas hésiter à se lancer. Car malgré le poids des maîtres et des exemples, les incitations de l’amitié, l’imagination doit se nourrir de neuf. Ce pourquoi – dernière phrase du livre – « Le moment est venu de faire ses bagages pour Vancouver ». L’auteur, pour se renouveler, va passer un mois avec les Indiens Haislis « à pêcher, chasser, marcher ».

Ecrit d’une plume alerte, comme avec jubilation pour la vie qui a passé à cent à l’heure, ce court essai de biographie littéraire en dit beaucoup sur l’auteur, mais aussi sur son époque.

Michel Déon, Bagages pour Vancouver, 1985, Folio 1987, 252 pages, €8.20

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Lijiang et Dali

Lijiang est le chef-lieu du District autonome Naxi. Le peuple Naxi, soit environ 300 000 personnes parlent le tibéto-birman ; la ville est classée au Patrimoine mondial de l’Unesco. Détruite par un tremblement de terre en 1996 (7 sur l’échelle de Richter) mais reconstruite à l’identique. Un labyrinthe de ruelles, pavées, bordées de canaux : jolies maisons de bois et de terre battue, les avant-toits sont incrustés de poissons et de symbole de chance, les ruelles pavées de grosses pierres, 300 ponts enjambent les canaux, pas de voitures, les plantes des montagnes ornent les maisons, les commerces. A la nuit tombée, les toits s’illuminent. Les femmes Naxi sont habillées de bleu, une couleur qui évoque le ciel ou de noir.

Les Naxi étaient une tribu matrilinéaire, les biens étaient transmis au plus jeune enfant de sexe féminin. On est là sur les contreforts de l’Himalaya, au nord-ouest de la province du Yunnan à 2415 m d’altitude. Visites du Temple lamaïste Yufengsi ; le village Baisha, ancienne capitale du clan Mu, seigneurs des Naxi est devenu un petit village tranquille. Certaines constructions remontent au 15ème siècle, dynastie des Ming, et renferment des peintures murales de l’époque. Un reflet du caractère pragmatique des Naxi, leur grande tolérance religieuse : dieux tantriques, bouddhistes, bodhisattva mahayana, immortels daoïstes, chamanes naxi s’y côtoient en toute harmonie. Il semble que la Révolution culturelle ait endommagé les fresques murales datant des dynasties Ming (1368-1644) et Quing (1644-1911).

LE MARBRE DE DALI

Proche de Lijiang, Dali est à la fois le nom de la région et celui de la capitale de la préfecture autonome bai. Région prospère grâce à ses terres fertiles, des dépôts de marbre, le lac Erhai très poissonneux, des petits cours d’eau pour irriguer les champs. Le groupe dominant sont les Bai (blancs). Les femmes bai portent des tuniques rouges, des tabliers multicolores et des chapeaux aux formes complexes avec des pompons et rubans tressés. La ville est jolie avec ses bâtiments en pierre, ses murs blanchis, ses toits d’ardoise.

LES TROIS PAGODES DALI

Au nord de la ville on aperçoit trois pagodes dont le plus haute (72m) de forme carrée date du 9ème siècle, de style Tang. Les deux autres (42m) datent du 13ème siècle et sont octogonales. On trouve une marbrerie où la pierre de la région, taillée, est polie de manière à faire ressortir les motifs naturels qui ressemblent à des nuages ou à des montagnes. Depuis plus de 1200 ans, ce marbre est extrait des montagnes d’Azur.

Nous nous rendons dans le village Xizhou de l’ethnie Bai. Durant le spectacle donné par les jeunes de cette ethnie dans une ancienne maison de commerçant, on nous offre trois thés. Les dances : Straw hat dance, Music wire played at your door, Craftmen of Bai Etnic minority, Wedding ceremony of Bai people, Nipping the bride. Suivra une visite dans un atelier de batik.

LIJIANG NOTRE HÔTEL

Retour à Dali, tandis que d’autres fouillent les boutiques à la recherche d’un trésor, nous partons à trois accompagnés de Yan visiter une église catholique construite en forme de temple chinois, la vieille ville, la Porte de l’Ouest, le musée de Dali, dont certaines pièces intéressantes ne sont, hélas pas mises en valeur. Toujours sous la pluie, nous regagnons le Landscape Hotel.

Hiata de Tahiti

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