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Acidité de Tahiti

Si vous n’avez jamais eu l’opportunité de gouter les petits citrons des Marquises ou ceux de Tahiti, alors ceci ne vous fera pas venir l’eau à la bouche. Ce fruit est important pour les Polynésiens puisqu’il est indispensable à la préparation du poisson cru. Le Citrus aurantifolia est petit, une peau lisse et fine, une chair verdâtre, juteux, acide et très aromatique. L’Aranui 3, le cordon ombilical qui relie les Marquises à Tahiti décharge toutes les trois semaines les sacs de citrons d’Ua Pou. A chaque voyage c’est près de trois tonnes de citrons que les cales de l’Aranui avalent aux Marquises et régurgitent à Papeete. Ils finiront sur les étals du marché.

citrus aurantifolia

C’est reparti, le sucre de coco ! Feront, feront pas ? L’Indonésie en produit et l’exporte, alors pourquoi pas la Polynésie ! Commerce bio, commerce équitable, allez, foncez ! Mais, il y a un mais, il faut grimper deux fois par jour au cocotier, il faut ensuite saigner la spathe (fleur de cocotier à peine ouverte) de manière précise. Les rendements en Indonésie sont de 300 à 600 g de sucre complet par cocotier et par jour. La variété cultivée en Polynésie, Cocos nucifera, est tout indiquée pour ce type de production. Il manque peut-être la volonté gouvernementale ou quelque autre volonté. Le coprah, subventionné à outrance pourrait être remplacé par le sucre, 100% bio dans lequel on glisserait une gousse de vanille de Taha’a, les ventes sur Internet exploseraient… Ce produit a un faible pouvoir glycémique, une teneur élevée en antioxydants, tout pour alimenter les diabétiques et toute personne soucieuse de sa ligne. On attend quoi ?

Papara a de gros problèmes d’eau. Les habitants réclament auprès de la mairie. Le ton monte et l’eau n’est toujours pas présente aux robinets. L’abattoir territorial sera privé d’eau par le maire de Papara. Plus de 70 porcs n’avaient pu être abattus à cause de ce manque d’eau, le maire ayant pris la décision de fermer la conduite d’eau de l’établissement, estimant qu’il ne figure pas dans le registre des abonnés du réseau hydraulique de la commune. On s’était rendu compte que l’abattoir avait une alimentation en eau pirate, qu’il était hors du réseau de la commune puisque connecté bien en amont du bassin de la Papeiti. Ah ! les coquins… Et à Papeari alors ? Nous valons moins que les porcs ?

roi pakumotu

Le roi Pakumotu Athanase Teiri s’était invité à Outumaoro avec ses sujets pour réinvestir le terrain qu’ils occupaient il y a peu encore. Mais, le comité d’accueil n’était pas à la hauteur de ses espérances : police, gendarmerie. N’ayant pu accéder à « ses terres », le vrai-faux roi qui souhaitait lever ses bannières et drapeaux pour célébrer l’anniversaire de son couronnement, a vainement tenté de négocier. Évidemment, bien que la trentaine de gendarmes n’ait aucun pouvoir sur lui (c’est le roi qui l’affirme), le roi a souhaité, avant de se retirer avec sa cour, faire une déclaration à sa nation. La mise en circulation, dès ce moment, sur les marchés financiers, d’un milliard de patu, la monnaie pakumotu (1 patu vaudrait 145 XFP). Il parait qu’à Wall Street on se masse le cervelet ! Autre annonce de taille, sur décision du roi, « toutes les dettes, emprunts bancaires et même condamnation en justice sont désormais effacés ». Heureux anniversaire, Majesté !

Hiata de Tahiti

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Monastère de Haghpat

Après Sanahin, le bus nous redescend sur la ville d’Alaverdi où un arrêt alcool pour les invétérés nous permet de côtoyer de près les grands ensembles tristes des années soviétiques.

De petites boutiques individuelles sont installées dans des cabanes de planches à leur pied. On y vend des légumes, des fruits, du bazar. Légumes et fruits sont d’abondance en été, on y trouve choux, oignons, pommes de terre, poivrons, tomates, courgettes, melons, pastèques, ainsi que des herbes fraîches telles que l’aneth et la coriandre.

Une grand-mère tient à me faire photographier son petit-fils. Le gamin est joli et souriant, je me confonds en spaciba (merci en russe).

Les filles en profitent pour se faire le gamin en photo aussi. C’est l’inconvénient des groupes, on ne peut lier connaissance sans qu’aussitôt un essaim de touristes ne vienne piétiner de leurs gros sabots les fragiles attaches qui se tissent.

Nous déjeunons dans un restaurant à vacanciers où une tablée d’Italiens quitte juste les lieux. Nous faisons connaissance devant les toilettes. Parmi les entrées, nous avons cette fois une soupe de riz à la carotte râpée et aneth, avec de gros malassols, ces cornichons à la russe confits au sel. Suit un cigare de viande hachée cuit sur une broche avec ses légumes grillés au four, épluchés. En dessert, des mûres de saison et du chemin, au fromage blanc. L’eau gazeuse est de marque Jermuk. Nous n’avons cessé de voir des gens cueillir des mûres au bord de la route, petit seau de plastique à la main. En revanche, pas de mûre blanche du mûrier dans l’assiette, en vente dans de petits pots au monastère Haghpat.

Nous remontons à Haghpat pour la visite. C’est un gros monastère opulent construit dès 976, aux trois églises. Pourquoi trois ? Parce que les chrétiens arméniens ne célèbrent qu’une seule cérémonie à la fois dans leurs églises, pas une par chapelle comme cela peut se faire en pays catholique. Entre baptêmes, mariages et enterrements, il fallait bien trois lieux de culte pour contenter la paroisse. Haghpat comprend donc trois églises, l’une à la Sainte-Mère-de-Dieu, l’autre à Saint-Grigor (Grégoire, l’évangélisateur de l’Arménie), la troisième à Saint-Signe (le Signe fait aux rois mages).

Haghpat était le siège de l’évêché de Lori au XIe siècle. Il est devenu un rival du monastère de Sanahin en face et, en 1233, le cousin de l’évêque prit d’assaut la forteresse de Kaïan pour ses amis mongols. Ensuite, ces mêmes Mongols ont pillé les deux monastères… Haghpat fut pillé encore par Tamerlan au XIVe siècle, puis par les Ottomans au XVe siècle, enfin par les laïcs communistes soviétiques à la révolution. Sayat Nova, troubadour célèbre des années 1712-1795, fit sa résidence en ce monastère parce que tombé amoureux de sa sœur, la princesse Anna Batonachvili – enfin, c’est ce qu’on dit. Il y mourut, assassiné par l’armée d’Agha Mohammed Khan qui dévasta la ville de Tiflis et ses alentours, en 1795.

La première église qui se présente est saint Grigor, bâtie en 1023. Suit l’église saint Signe (saint Nechan), la plus vieille, élevée entre 976 et 991 par les frères Smbat et Gurgen. Elle est cruciforme, incluse en bâtiment rectangulaire, et surmontée d’un dôme dont les arcs forment une courbe gracieuse. Il reste des fresques, mais peu par rapport à l’original qui en était couvert. Il faut imaginer l’intérieur, aujourd’hui sombre et austère, tout illuminé de chandelles qui font danser les personnages colorés des murs. On distingue encore dans l’abside le Christ sur un trône avec les apôtres en-dessous.

La galerie renferme de nombreux khatchkars dont le chef d’œuvre nommé Aménaprkitch (Sauveur de tous) date de 1273. Il a été sculpté par Vahram et représente la Crucifixion. Le Christ, la Vierge, Marie-Madeleine, les douze apôtres et les anges précédaient (encore un record !) d’un siècle la Renaissance italienne. La face était enduite de couleur rouge obtenue grâce à la cochenille. D’autres khatchkars du IXe siècle montrent une croix en forme d’arbre de vie. Ce symbole païen a été récupéré par les chrétiens comme le cercle solaire pour baptiser les anciens symboles et les faire servir la Cause des Évangiles.

Les salles du monastère ont été souvent réutilisées depuis sa désaffection. La bibliothèque, qui visait à concentrer tous les manuscrits arméniens entre le 11ème et le 13ème siècle, a été brûlée sous Tamerlan puis encore sous les Arabes, les pierres en gardent des traces. Barbarie envieuse de l’ignare. Lors des invasions, les manuscrits étaient cachés dans les cavernes. L’Évangile de Haghpat a été composé par le moine du monastère Hakop à la demande de Sahak Anetsi en 1211. Il est connu pour ses enluminures séculières et religieuses. Il est aujourd’hui au Maténadaran, le musée des manuscrits que nous verrons à Erevan. Aux Mongols puis aux Arabes qui torturaient les moines pour savoir l’emplacement des cachettes, la légende veut qu’ils aient répondu par une phrase de l’Évangile : « Ne donnez pas aux chiens ce qui est saint, ne jetez pas vos perles aux porcs. » Les musulmans ont du apprécier… La salle a servi de silo à grains et à vin avec des jarres en terre enfoncées dans le pavement à l’ère matérialiste : vous n’avez pas besoin de livres mais de pain. L’église Saint-Signe a servi à moudre le grain comme en témoigne la base de la meule, creusée dans la pierre à même le sol.

La salle de bain des moines du XIVe, conservée, donne une idée des maisons paysannes traditionnelles en Arménie. C’est une construction basse aux murs de basalte ajustés sec, avec pour seule ouverture la porte. Le toit de poutres en encorbellement est couvert de lattes, puis de terre où poussent les herbes. Cette couche isole bien, hiver comme été. Un trou dans le toit offre la lumière et évacue la fumée par courant d’air avec la porte.

Au bas du monastère, à quelques centaines de mètres, s’élève un petit hôtel familial encore en cours d’aménagement. Dès l’entrée s’aligne une collection impressionnante d’alcools divers. J’ai pour ma part une vraie chambre single avec salle de bain attenante, une télé… mais pas d’eau chaude. Problème de gaz me dit-on. Qu’importe, même froide, la douche est loin d’être glacée et fait du bien.

Le dîner est superbement présenté, comme toujours les entrées mises en totalité avec les assiettes, ce qui donne une impression d’abondance qui met en appétit. Les tomates cuites épluchées côtoient les tomates crues au concombre et les haricots verts froids émincés à l’aneth. Il y a des jattes de crème aigre, de la macédoine, des rouleaux d’aubergine grillée garnies de carotte râpée à la crème, de la feta, des malassols. Le chaud est constitué de porc grillé barbecue, accompagné de pommes de terre cuites au four et de légumes à la grille tels qu’aubergines et poivrons. Les fruits servis en dessert, pêches, prunes et poires, sont trop verts.

Notre guide arménien a déniché en apéritif un alcool artisanal de prune qui doit titrer au moins 60°. J’en ai goûté, c’est un coup de fusil mais il y a un vieux parfum d’arrière bouche. Une installation vidéo sert de juke-box sous l’auvent cuisine où est installé le four et l’évier collectif. Les adultes paraissent bien en peine de relier les bons fils aux baffles et les gamins s’en mêlent. Il y en a quatre ou cinq, de 17 à 5 ans. Le 12 ans paraît le plus doué pour les fils. Chanter, danser, rester dans le bruit, ce n’est pas mon tempérament. Il faut de plus être bourré pour rire de n’importe quoi. Je me dégage donc des baffles dont l’une se dresse juste derrière mon oreille droite avant de m’éclipser discrètement.

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