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Jean Christophe Rufin, L’Abyssin

jean christophe rufin l abyssin
L’histoire se déroule au temps de Louis XIV. Si elle évoque l’Abyssinie, nom Grand Siècle de l’Éthiopie chrétienne, c’est plus comme une contrée fabuleuse que comme un pays réel. La majeure partie des 699 pages du roman parle d’ailleurs peu du pays mais beaucoup plus de la France et de sa prétention. A cette grande époque, Louis XIV est un dieu-soleil autour duquel tout doit tourner, même les mouches, les ordres religieux et le Pape.

Nous avons donc un jeune homme : curieux, hardi, aventureux, aimant ses semblables. Accolons-y une jeune fille : élevée au couvent, dépucelée par la vie qu’elle observe, obstinée, aimant une seule personne. Flanquons le couple de quelques faire-valoir, Maître Jurémi, huguenot exilé et Françoise qui a eu des malheurs. Voilà pour les héros. Les anti-héros sont un Consul de France, tout empli de sa propre importance comme le veut sa charge “à la française”, quelques intrigants autour de lui et divers Jésuites et Capucins. Comme dans Molière, la jeunesse va s’opposer à la vieillesse, la fille au père qui veut la marier contre son gré, autant épris de noblesse que de fatuité, la modernité légère à la pesante tradition.

Et, comme il se doit, l’amour triomphera des convenances et des intrigues.

Jean-Baptiste Poncet, apothicaire exerçant la médecine sans être diplômé de faculté, est heureux au Caire, dans ces échelles du Levant qui offrent à un jeune homme sans naissance et sans fortune toute l’initiative qu’il peut prendre. Tout jeune qui se rend aujourd’hui en Californie, à Sydney, Singapour ou Tokyo pour fuir l’inertie française, le malthusianisme des postes et l’esprit de caste – allait hier en orient, où les Turcs appréciaient le savoir pratique.

Tout le contraire du consul de France au Caire, homme sans qualité nommé par naissance et faveur, que sa fille retrouve sans l’avoir connue, élevée au couvent depuis ses sept ans. Le consul et père fait venir en recommandé un gentilhomme pour établir la demoiselle, malgré les soupirs de l’intrigant et odorant Macé son adjoint. Mais Monsieur le Consul de Maillet voit sa fille Alix en décider autrement – et se faire déflorer exprès pour empêcher le contrat. Elle s’enfuit avec son amant Jean-Baptiste qui sait si bien séduire les plantes, les bêtes et les cœurs vrais.

Avant ce happy-end, la quête du jeune homme doit quand même se dérouler selon les rites : se qualifier pour concourir, vaincre les épreuves, et mériter la belle – tout comme dans les contes.

Une suite d’intrigues force ledit Jean-Baptiste à monter une ambassade hasardeuse vers cette Éthiopie qui déteste les prêtres venus de Rome et dont nul n’est jamais revenu. Jean-Baptiste en reviendra parce qu’il ne se prend point au sérieux, nommé ambassadeur auprès de Louis XIV par le Négus lui-même. Il ne profitera pas de ce titre arraché de haute lutte pour se hausser du col, une tentative en ce sens échouant sous les intrigues. Jésuites, Capucins et autres ordres “moraux” sont plus soucieux de politique que de foi et pratiquent bien peu cette charité chrétienne qu’ils vantent aux autres à longueur de sermons. Le lecteur ne manquera pas d’y voir une certaine caricature de socialistes, que l’auteur a fréquentés assez dès l’ère Mitterrand pour en connaître les ressorts.

Ce livre au titre éthiopien parle de l’image jésuitique de l’Éthiopie par les savants de cour (travers très français). Il parle de haute politique accouchant de souris (entre autres parasites). Il parle de la France en son miroir, arrogante, se poussant du col, infatuée, ne considérant la “mondialisation” d’époque que si elle consent à tourner autour de son soleil. Tout Français pourvu d’un statut appartient à une caste ; il prend dès lors « une expression d’importance, c’est-à-dire, car les deux choses sont fort voisines pour l’apparence, un air offensé et comme indigné par l’outrecuidance de ces indésirables intrus » p.515.

Jean-Christophe Rufin a ainsi de ces expressions qui sont autant de bonheurs de lecture. Elles rendent ce roman d’aventure digne d’être lu. Bien écrit, enlevé, assez gros pour durer le temps d’un voyage, il manifeste que l’auteur aime ses personnages – et c’est là tout, si l’on veut qu’un roman soit bon.

Jean-Christophe Rufin, L’Abyssin, 1997, Folio 699 pages, Prix Goncourt du Premier Roman, Prix Médicis 1997, €10.20

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Ile du Soleil et La Paz

Nous arrivons sur la presqu’île bolivienne de Copacabana au bord du Lac Titicaca. La visite de la cathédrale s’impose. La vente de l’eau bénite, c’est à droite. Très joli monument recouvert de faïences. Les visiteurs désirent-ils une voiture, une maison ? Il suffit de le demander à la vierge noire et de déposer un cierge.

Un catamaran nous mène à la Isla del Sol (l’île du Soleil). Elle abrite d’intéressantes ruines précolombiennes : le complexe culturel Intiwata. Selon la tradition orale, le dieu Soleil se serait réfugié lors du « Chamaj Pacha », le temps du déluge et de l’obscurité. Manco Kapac et Mama Okilo, ses enfants, débutèrent ici le périple qui les amènera plus tard à fonder Cuzco.

Retour sur la terre ferme et direction La Paz, 4200 m d’altitude. Capitale administrative, fondée le 20 octobre 1548 par l’Espagnol de Mendoza, elle est la capitale la plus haute du monde. C’est aussi la seule ville où les riches, au lieu d’être en haut de la ville, résident tout en bas (où l’altitude se fait moins sentir) et les pauvres tout en haut ! Elle est entourée d’une centaine de pics enneigés de plus de 5000 m de haut et est dominée par l’Illimani.

La ville est riche en marchés. Il existe même un mercado de los Brujos, un marché des sorciers. On trouve là des herbes, des pierres magiques, des potions, des fœtus de lamas, tout pour soigner les maux. Le mercado de Buenos Aires est un marché aux spécialités par rues. En principe, les mercredis et samedis s’y déroule le Thanta Khatou où l’on vous vendra des marchandises volées. Et si vous n’avez pas le cœur sensible vous pourrez visiter la rue de la viande !

La vallée de la Lune est située à 12 km du centre. C’est un canyon dont les eaux ont érodé la roche en centaines de cheminées de fées et pitons filiformes.

De La Paz, nous nous rendons à Puno, 3870 m, visiter les ruines de Tiahuanaco. Une architecture monumentale. A l’intérieur du temple semi-souterrain de Tiahuanaco, les effrayantes têtes sculptées rappellent les têtes massues de Chavin de Huantar.

Il existait certainement un lien entre les cultes célébrés dans les deux centres religieux. Le centre du patio est occupé par trois monolithes. La culture Tiwanaku se développera durant 3000 ans à partir de la région du lac Titicaca. Cette civilisation répandit dans les Andes son savoir-faire dans les domaines de l’agriculture, des mathématiques, de l’astronomie, de l’ingénierie et disparaîtra mystérieusement au cours du 11e siècle.

Les Aymaras, en parfait accord avec leur environnement andin et lacustre, obtinrent de très hauts rendements agricoles grâce à leur irrigation, les suka collos, et à la maîtrise de la culture d’un précieux tubercule, la pomme de terre. Puno est l’embarquement pour les Iles flottantes des Ouros et l’île de Taquilé.

Hiata de Tahiti

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