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Uxmal

« Emergeant soudain des bois nous débouchâmes, pour ma plus totale stupéfaction, sur une vaste étendue dégagée parsemée de monticules, de ruines, de structures pyramidales et de vastes édifices bâtis sur des terrasses. Ces vestiges grandioses étaient bien conservés et richement ornés ». John Lloyd Stephens décrit ainsi sa visite à Uxmal en 1840 (p.249) Aujourd’hui inscrit au Patrimoine Mondial de l’UNESCO, Uxmal signifie « trois fois édifié » selon notre guide du site qui parle un bon français.

Il vient nous prendre à l’hôtel et nous dit bonjour en maya – je n’ai pas retenu l’onomatopée fort longue, ni n’ai pu la transcrire. Ce guide a appris la psychologie des Français : paradoxes pour attirer l’attention, anecdotes culturelles pour soutenir le discours, ironie en transition – il en use à loisir. Il évoque la « tache mongole » des Mayas qui disparaît à l’âge de deux ans et la particularité génétique de ne pas supporter le lait qui rapproche les Mayas des Asiatiques. « Si vous rencontrez quelqu’un avec un sourire : c’est un Maya ; s’il a l’air sérieux : c’est un Toltèque, un Olmèque ou autre Pastèque… S’il a des pesos dans les yeux, il est espagnol. »

Les Mayas d’Uxmal savaient gérer l’eau, ce pourquoi ils ont pu édifier une cité dans cette vallée sans puits naturel. L’approvisionnement en eau était assuré par les pluies, recueillies dans deux types de réservoirs : le bassin à ciel ouvert rendu étanche par de l’argile et la citerne souterraine surmontée d’une surface de captage en forme d’entonnoir. La gestion centralisée de l’eau a exigé sans aucun doute l’instauration de pouvoirs centralisés autoritaires. Le système, conçu pour s’adapter à la nature saisonnière des pluies, aux rios étiques et à l’absence de sources permanentes, était le seul moyen efficace de garantir des réserves en eau suffisantes pour assurer les besoins de la population et l’irrigation des champs. Planifier, construire, entretenir le système nécessitait une autorité pour contraindre les masses humaines à bâtir un système collectif.

L’eau reste d’ailleurs un problème au Mexique, surtout dans la capitale dont la pluviosité et les nappes souterraines ne couvrent que 2% des besoins. 67% de la consommation est puisée dans les nappes phréatiques, ce qui rend instable le sol et fait s’effondrer notamment le centre historique de Mexico de 30 cm par an ! Le solde provient d’aqueducs depuis les vallées voisines. Mais la mobilité du sol engendre des ruptures du réseau de distribution, donc des gaspillages, qui rendent le système peu efficace. Les grandes compagnies des eaux internationales, et surtout les premières mondiales que sont les françaises, sont sur les rangs pour créer un réseau efficace à Mexico.

Des datations au carbone 14 du bois ont permis de situer au 6ème siècle la fondation d’Uxmal dont l’apogée aurait été vers 900. Les linteaux de bois au-dessus des portes sont d’origine ; ils ont 1500 ans. « S’ils ont résistés, c’est parce qu’ils ont été cueillis à la pleine lune : pas de liquide, pas de termites », assène le guide. Il ajoute : « site religieux, il est difficile de le comprendre vraiment sans croire. » Le site est abandonné vers 1200 comme Chichen Itza, à l’époque où est fondée la nouvelle cité de Mayapan dans le nord du Yucatan. Les princes sont contraints de vivre dans cette nouvelle capitale où ils servent d’otages et de courtisans aux princes Cocoms. Stephens et Catherwood décrivent les premiers le site au grand public américain. Les premières fouilles sont entreprises en 1929 par Franz Bloom et les travaux de conservations ont commencé en 1943 ; ils sont toujours en cours.

Plus on s’éloigne des Aztèques, plus les civilisations méso-américaines paraissent traditionnelles. Aux petits groupes agricoles et artisans, aux relations égalitaires, succèdent des sociétés plus complexes, hiérarchisées, rassemblées autour de centres administratifs et religieux, pratiquant l’agriculture organisée, la gestion de l’eau et les échanges commerciaux. Mais la prédation humaine connaît ses limites quand le terrain n’est plus favorable. Une démographie trop forte engendre une intense utilisation des sols, ce qui les appauvrit en l’absence d’engrais apportés et les érode sous ce climat. Des disettes apparaissent qui engendrent des conflits entre les villes, les archéologues en ont la preuve. Ce climat de pénurie et de violence aboutit à une rupture entre le peuple paysan et son élite dirigeante et religieuse. Le commerce s’effondre, l’égoïsme croît. Chacun reprend ses billes et émigre vers des terres nouvelles. Les cités sont désertées. Le déclin rapide des Mayas s’explique probablement ainsi. Parfois, une conquête de peuples venus d’ailleurs achève le désastre. Ce fut le cas dans le nord des basses terres du Yucatan.

Nous commençons par la pyramide du Devin de 35 m de haut, appelée ainsi selon une légende de la superstition locale : un nain magicien l’aurait élevée en une seule nuit… Nombre d’oiseaux sont représentés, des colibris, des quetzals. Les oiseaux étaient vénérés par les Mayas qui croyaient qu’ils communiquaient avec les dieux. Les masques de Tchac sculptés sur la pyramide sont 52 comme les siècles mayas et les semaines d’une année. Les monstres sont les puissances cosmiques dont la gueule ouverte donne accès au monde surnaturel. Il suffit d’y entrer. Suit le quadrilatère des Nonnes, une cour de 65 m sur 45 m entourée de bâtiments allongés qui évoquaient les cellules d’un couvent pour les premiers voyageurs. Il fait bon, côté ombre, car le soleil commence à chauffer dur dès avant 10 h ce matin. Un gros lézard préhistorique se prélasse sur la pierre. C’est un varan qui ne craint pas les hommes. Le dessus des portes est décoré d’une frise où pointe le long nez de Tlaloc. Des statues de captifs, de singes et d’oiseaux sur fond géométrique sont d’un bel effet. Un dieu a face de hibou est figuré sur l’édifice est. « Sur l’esplanade vaste comme le soleil, le soleil de pierre danse et repose, nu, face au soleil nu », dit joliment le poète (Octavio Paz, « Liberté sur parole », p.40).

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Des îles au vent et sous le vent : Cap Vert

Désireux de prendre un air de printemps il y a vingt ans, j’inclinais en faveur des îles.On peut toujours le faire avec notamment Terre d’aventures. Le Cap Vert ? Encore faut-il apprendre où il se situe et quelle beauté il peut offrir. L’atlas m’apprend que l’archipel se situe dans l’Atlantique à quelques 500 km des côtes du Sénégal. 4033 km² de terres émergées en 10 îles et 5 îlots, dont 13% seulement sont composés de forêts, supportent 392 000 habitants, 137 000 chèvres et 111 000 cochons… 27,7 habitants sur mille naissent chaque année tandis que 8,6 sur mille meurent : il y a trop de monde pour les ressources limités, d’où émigration.

L’archipel est géographiquement africain, ethniquement noir métissé de portugais et autres marins. Ne dites jamais à un Capverdien qu’il est noir, il n’aime pas cela du tout ! 70% de la population est donc métisse, 28% franchement noire et 2% blanche. Le climat est aride, sahélien, tempéré par l’alizé de juillet à novembre. Ce vent circumterrestre qui souffle ici du nord-est a d’ailleurs fait baptiser par les marins les îles en deux groupes aux noms qui m’ont toujours laissé rêveur : les îles du vent (barlaventos) et les îles sous le vent (sotaventos). Découvertes et colonisées par les Portugais au XVe siècle lors de l’exploration des côtes africaines, l’archipel s’est appelé ainsi en référence au vert du cap Sénégal.

Les îles sont resté colonie portugaise jusqu’à l’indépendance de la Guinée-Bissau en 1975. L’archipel a servi de centre de transit entre l’Amérique, l’Afrique du sud et l’Europe, pour la pelleterie, le café et les esclaves. Il est aujourd’hui plaque tournante de la drogue… Le parti unique indépendantiste et marxiste a fait sécession en 1980 après un coup d’état en Guinée-Bissau, pour créer la Republica das ilhas do Cabo Verde.

L’essor de l’économie privée et la chute du mur de Berlin ont entraîné l’abandon du parti unique et l’instauration du multipartisme le 28 septembre 1990 pour suivre la mode mondiale. Le drapeau national est bleu atlantique, rayé aux deux tiers inférieurs de trois bandes, deux blanches entourant une vermillon, et surmontées au tiers supérieur de dix étoiles jaunes en cercle pour les dix îles.

Chaque île a sa spécialité : Fogo son volcan, Sal son aéroport international et ses rouleaux atlantiques, Boa Vista ses hôtels balnéaires, San Nicolau la pêche au marlin bleu attiré par le courant froid, Sao Vicente la musique et Santo Antao la randonnée. Ce sont ces deux dernières îles qui vont être la destination du voyage.

Le pays est pauvre, isolé, peu irrigué. L’agriculture n’a jamais suffit à nourrir la population, certaines îles n’ont pas d’eau. Pour cultiver, il faut compter sur les pluies quelques mois par an qui reconstituent les sources et irriguent les terres. Sécheresse et criquets pèlerins entraînaient des famines dont la dernière n’est pas si ancienne, 1959. On fait pousser surtout du maïs, mais aussi des haricots, des patates douces, des ignames. Canne à sucre, café et bananes sont endémiques. L’industrie est réduite, la principale est le chantier naval de Mindelo. Le reste n’est qu’artisanat : conserve de poisson, production de rhum et de grog, matériaux de construction. Paradoxalement pour un pays pauvre, ce sont les services qui sont les plus développés : ils réalisent 72% du PIB 1989. Mondialisation oblige, l’archipel sert de centre de transit aux échanges et de point stratégique pour l’entretien des bateaux et des avions, leur ravitaillement en carburant. Le tourisme se développe, aidé par la quasi-absence de saisons.

Le pays exporte surtout des bananes, du thon et de la main d’œuvre mâle. 450 000 immigrés établis dans les ports des pays maritimes d’Occident : à Boston aux Etats-Unis, à Lisbonne, à Rotterdam, à Gênes. Cet éparpillement de tradition, en sus du métissage, a créé une culture originale, ouverte sur le monde par force, catholique par religion mais au sens originel « d’universel ». Avec des traces d’animisme, un amour de la musique nostalgique (la morna), une langue créole (le crioulio) différente dans chaque île, des affinités avec l’Afrique et le Brésil, l’aspiration à l’Europe, surtout dans sa version portugaise… Faute de véritable passé d’où tirer fierté, l’avenir est l’espoir bien ancré dans les mentalités. D’où la disponibilité, la curiosité, l’affabilité des Capverdiens pour l’autre et pour l’ailleurs, l’amour des enfants et du grand large. Je m’en rendrais compte avec Terre d’aventures.

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Yves Bontaz, Le bal est fini

Un ouvrier devenu chef d’entreprise, un provincial de Haute-Savoie devenu entrepreneur mondial, lance à sa retraite un brûlot politique. Il déclare que rien ne va plus et que le petit jeu des politocards sortis de la même école et vivant dans les mêmes milieux a assez duré. L’échec retentissant de François Hollande en est la preuve : place à la société civile ! Elle est aussi compétente que les politiciens professionnels, surtout ceux qui prétendent parler au nom des « travailleurs » : Mélenchon, « que sait-il des travailleur» p.46 pour avoir passé seulement trois mois dans une usine dans sa jeunesse ?

L’essai est plein de bon sens et de gros réalisme. Il dit tout haut ce que tout le monde (sauf les politiciens) pense tout bas : finies les réformes, il faut un « choc » ! Mais, après le Brexit et Trump, la démagogie menace ; il faut donc que les initiatives citoyennes émergent, malgré la crainte de donner des parrainages (Yves Bontaz ne sera pas pour la troisième fois candidat aux présidentielles, faute d’avoir obtenu les 500 parrains représentatifs de chaque département).

Après une longue introduction biographique de 40 pages, le constat court sur 62 pages et il est sans appel : « Ni la gauche, désinvolte sous Mitterrand, Jospin et Hollande, ni la droite, prétentieuse sous Chirac et Sarkozy, n’ont eu le courage d’enclencher une seule réforme, pas une seule, susceptible d’améliorer notre compétitivité » p.49. En cause ? « Le dédain de l’économie appliquée, le dédain du bon sens économique » p.49. La France a 90 fonctionnaires pour 1000 habitants alors que l’Allemagne en a moins de 60 ; les Français payent 44% d’impôts en moyenne contre 26% pour les Suisses, 34% pour la moyenne OCDE et 38% en Allemagne ; les cotisations sociales représentent 11.6% du PIB français contre 6.6% en Allemagne et 4.1% au Royaume-Uni. Qui voulez-vous concurrencer avec ces boulets ?

L’Etat omniprésent sait mieux que vous ce qui vous convient ; il dépense sans compter, il gaspille plus que les voisins ; il handicape l’économie – y compris la demande des ménages. Un dirigeant d’entreprise fait le calcul : « Quand je donne 100€ bruts à l’un de mes salariés, ça me coûte, avec les charges patronales, 150€. Sur ces 100€ bruts, ce salarié va percevoir 70€ nets. Comme il va être imposé sur le revenu à environ 30% – soit 21€ d’impôts – il va donc lui rester 49€ de pouvoir d’achat. Mais (…) ce qu’il va dépenser sera soumis à une TVA de 20%. Ce qui fait qu’au final son pouvoir d’achat réel ne sera que de 39€. (…) L’Etat prélevant 110€ au passage » p.67. Imparable ! Et on se lamente encore sur la « misère » des services publics ? Ne serait-ce pas la misère de la gestion fonctionnaire ignare en économie ? De l’irresponsabilité hiérarchique où chacun se renvoie la balle ? Du mépris des citoyens qui ne contrôlent rien ? De la démagogie des syndicats – surtout la CGT qui rêve encore et toujours du Grand soir – et qui ne représentent qu’à peine 7% des salariés ?

Qui crée de la richesse ? – Les entreprises. « Faute d’offrir des emplois, on offre des aides sociales, mais cet argent que l’Etat distribue, il le reprend par le biais des prélèvements fiscaux (…) frein pour sortir de la crise » p.85.

Alors, que faire ?

Après 12 pages sur « la démocratie pervertie » et 12 pages sur « une diplomatie à la dérive » (où les interventions de François Hollande en Syrie, Irak et Mali ont suscité, selon l’auteur, les attentats islamistes), 12 pages de propositions.

Elles n’ont rien de révolutionnaires et prennent ici ou là les bonnes ou les moins bonnes idées en 19 mesures :

  1. Baisser les charges patronales de 20% sur tous salaires et de 30% jusqu’à 1.6 fois le SMIC.
  2. Augmenter la TVA de 2% pour compenser et taxer les importations (et éviter les délocalisations).
  3. Baisser l’impôt sur les sociétés à 25%.
  4. Supprimer l’ISF.
  5. Revenir sur la hausse des frais de succession Hollande.
  6. Réformer l’enseignement de l’économie
  7. Favoriser l’apprentissage.
  8. Réduire la vie politicienne à deux mandats au maximum.
  9. Baisser le nombre de fonctionnaires en n’en remplaçant qu’un sur trois (hors régalien).
  10. Etablir deux jours de carence pour les fonctionnaires, comme dans le privé.
  11. Limiter le droit de grève dans les services publics.
  12. Baisser les prestations chômage après 1 an.
  13. Supprimer les 35h pour revenir à 39 sans hausse de salaire.
  14. Sanctuariser l’agriculture.
  15. Relancer la révolution verte.
  16. Etablir des statistiques ethniques pour en finir avec les fantasmes et adapter les politiques.
  17. Faire du handicap une cause nationale.
  18. Incarcérer les condamnés à une peine inférieure à 2 ans.
  19. Conduire la politique étrangère sur les seuls intérêts de la France et pas sur « la morale ».

Voilà qui fleure bon le « radicalisme » florissant sous la Troisième République : du bon sens travailleur, le citoyen contre les pouvoirs, la base et la province contre les élites de Paris. Mais aussi le programme de François Fillon, dont il s’avère le plus proche, avec un côté Emmanuel Macron pour le réalisme économique.

Yves Bontaz a réussi à 14 ans le concours de l’Ecole nationale d’horlogerie en candidat libre avec son jumeau et en est sorti major à 19 ans. Il s’est mis à son compte dans le décolletage et a travaillé très vite pour les grandes marques automobiles, fondant des filiales dans divers pays. Son dogme : productivité et qualité ; sa méthode : s’organiser et intervenir où cela ne va pas. « Une théorie inverse de celle du politique » – persiffle-t-il p.28. Il a fondé un orphelinat, une école et un dispensaire à Madagascar, et un centre pour autistes en France. Il a donné des emplois à des milliers de gens, en Haute-Savoie, en France et dans le reste du monde. « Je suis un patron qui jamais, jamais, n’a oublié de privilégier le facteur humain dans la gestion de ses sociétés » p.35.

Tout le contraire des François Hollande et autres Nicolas Sarkozy, n’est-ce pas ?…

Yves Bontaz, Le bal est fini – Le programme choc d’un esprit libre, 2017, édition Jean Picollec, 144 pages dont 6 tableaux et graphiques, €13.99

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Tilman B. Drüeke et Bernard Moinier, Le sel dans tous ses états

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Le sel a mauvaise réputation, il causerait de la tension. Rien de plus faux que cette allégation. Elle est née d’études mal menées entre 1950 et 1970, par des médecins qui ont trouvé un créneau populaire pour se faire mousser, rencontrant l’aspiration générationnelle des classes montantes à se différencier des vieux. Traditionnellement, en effet, le sel aidait à la conservation des aliments – en l’absence de frigo – et était présent dans le lard, le jambon, la morue, les anchois, les harengs saurs, les cornichons en saumure, les olives, en bref dans tous ces aliments de base de la consommation populaire de nos grands-mères (nées au début du XXe siècle). Pour faire « moderne », il fallait aller contre.

Le livre, écrit à deux, comprend trois parties : la première est économique, la seconde médicale, la troisième alimentaire. Le professeur Tilman B. Drüeke a été 40 ans néphrologue et reste directeur de recherche émérite de l’INSERM. Bernard Moinier a été 25 ans secrétaire général de l’European Salt Producers’ Association et le délégué général du Comité des Salines de France, auteur de Sel et société, Le sel dans l’antiquité. L’état de la recherche scientifique médicale sur le sujet est loin d’être aussi clair que l’opinion le croit et, même si un lobbyiste est co-auteur, les arguments présentés sont nuancés et emportent l’adhésion rationnelle.

Le pain et le sel étaient pourtant la base de l’hospitalité chez les Hébreux, et le chlorure de sodium était du sperme cristallisé selon Hésiode. Son pouvoir générateur était mythique, on l’utilisait volontiers contre les maléfices, les Egyptiens en momifiaient leurs défunts, et la mer – d’où sortit Aphrodite (son nom signifie écume) – en contient 35 g par litre (39 g pour la Méditerranée et 275 g pour la Mer morte). Le sel, dans l’antiquité, c’était la vie. Et les animaux qui n’en trouvaient pas naturellement en étaient friands.

Dès les prémices de l’industrialisation, le sel est intervenu comme matière première : dans la conserverie de viande et de poisson, pour élaborer des savons, traiter les peaux, pour le verre et la métallurgie. Plus récemment, pour produire de l’eau potable par désalinisation (Arabie Saoudite). Les villes de Lons-le-Saulnier, de Salisbury, de Salzburg, viennent du mot sel ; des caravanes de sel transportaient la précieuse denrée au travers du Sahara.

Le sel a été exploité dès la plus haute antiquité selon trois procédés : l’agriculture (marais salants, sel de mer), les mines (sel gemme), l’ignigène (évaporation artificielle, sel de flamme). Aujourd’hui, la consommation de sel est faible pour les ménages (10%) et l’agriculture (aliments pour bétail) 15%, l’essentiel étant l’industrie chimique dont les adoucisseurs d’eau (46%) et le déneigement (30%).

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Le rôle du sel sur la santé est important : il maintient l’équilibre homéostatique des cellules, il contribue à l’excitabilité et aux contractions des muscles, il contrôle les secrétions hormonales, il forme l’acide chlorhydrique nécessaire à la digestion, il participe à l’équilibre acido-basique et au transport des sucres et des acides aminés.

Son rôle sur la pression artérielle est dû à ce qu’un apport en sel augmente le volume sanguin. Mais le sel n’est que l’un des facteurs de la « tension ». Selon des études récentes, 30 à 40% seulement des hypertendus seraient sensibles à une augmentation du sel – autrement dit, 60 à 70% ne voient aucun effet. Seuls les obèses sont plus sensibles, tout comme les consommateurs d’alcool. Les auteurs citent la fameuse étude PURE, conduite sur 102 216 sujets adultes non obèses de 18 pays différents, âgés en moyenne de 50 ans, et publiée en 2014 dans le New England Journal of Medicine. Sa conclusion ? « Une diminution de la consommation de sodium de 3 à 2 g ou moins par jour, soit de 7.5 à 5 g de sel ou moins par jour, entraîne une baisse de la pression artérielle négligeable, voire nulle » p.99. Pour faire baisser la pression artérielle, il vaut mieux consommer plus de potassium (dans les fruits et légumes) que de réduire le sel… L’étude française Nutrinet, faite chez 8 670 volontaires, publiée en 2015, a montré que « la pression artérielle n’était corrélée à la consommation de sel ni chez les hommes, ni chez les femmes » p.102.

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Pour la santé – qui est un équilibre – trop comme trop peu de sel nuit. Le minimum vital des apports en sel est de 1 à 2 g par jour. L’OMS (2007) préconise 5 g et l’Agence nationale de santé alimentaire en France (2008) 8 g par jour pour les hommes, 6.5 g par jour pour les femmes et les enfants. Les sportifs, les ouvriers soumis à des efforts et les jeunes qui se dépensent ont besoin de plus de sel que la moyenne, car il s’élimine par la sueur plus que par les urines.

En revanche, les sédentaires, les vieux et les obèses ont besoin de moins de sel, car ils éliminent moins et moins bien. Les patients atteints d’affection des reins, du cœur (insuffisance cardiaque) ou du foie (cirrhose), du diabète de type II, doivent aussi surveiller leur consommation de sel. Le rôle du sel dans l’ostéoporose, l’asthme, les calculs urinaires et le surpoids n’est pas prouvé.

Méfions-nous cependant du sel caché : 70% des apports quotidiens proviennent des préparations industrielles (charcuteries, fromages, pains et viennoiseries, soupes, eaux minérales, conserves). Le jambon cuit contient par exemple 20 g par kilo, le boudin noir et le foie gras 15 g, les biscuits de 1 à 2 g, comme certains fromages. La plupart du sel mis dans l’eau de cuisson des légumes ou des pâtes n’est pas ingéré.

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Le sel peut être un vecteur de produits insuffisants dans la consommation publique : l’iode, le fluor, le fer, l’acide folique peuvent être adjoints au sel de table comme cela se pratique en Suisse, en Allemagne et dans d’autres pays où des carences ont été constatées.

Ce petit livre très complet, précis malgré un peu de jargon médical, comprend 148 références bibliographiques, la réglementation française relative au sel, nombre de tableaux et schémas, et des contacts utiles. Non, le sel n’est pas ce grand méchant aliment que l’on dit ; il est nécessaire au bon équilibre physiologique et avive le goût pour certains aliments. La sagesse est, comme pour toute chose, de tout un peu : pas d’excès, pas de tabou. Sauf si l’on est atteint d’une maladie des reins, du cœur ou du foie, évidemment.

Tilman B. Drüeke et Bernard Moinier, Le sel dans tous ses états – vrai/faux sur un aliment trop critiqué, 20165, EDP Sciences, collection Alimentation et santé, 205 pages, €24.90

e-book format Kindle, €17.90

Attachée de presse Guilaine Depis, 06 84 36 31 85 balustradecommunication@yahoo.com

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Croisière sur l’Aranui : Rapa !

L’Aranui III longe enfin les falaises de Rapa ; il se présente à l’entrée de la baie d’Ahurei ; il est 10 heures. Dès avant l’accostage, l’accueil est déjà extraordinaire ! Les poti mara (barcasses) viennent à notre rencontre, fleuris et décorés. La musique et les danseurs s’activent sur le quai. Ces derniers frappent le sol avec des bouquets d’auti (Cordyline australis, longues feuilles vertes en lame), leur visage est peint en blanc. L’Aranui une fois à quai, l’échelle de coupée installée, ils frappent vigoureusement sa plate-forme. Le Tavana (maire) de Rapa descend le premier, suivi par l’Etat. Les tambours résonnent, les chants s’élèvent, les autorités sont couronnées. Place au petit peuple, maintenant ! J’ai reçu là la plus belle couronne de tout mon voyage ; elle est faite de tagètes, d’hortensias, de bougainvillées, de lys blanc, de piments rouges, des fruits orange des faras et de miri, le basilic de Tahiti. Le collier a été longtemps suspendu sur mon balcon à Papeete, avec tous les autres colliers du voyage.

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Rapa veut dire ”en dehors“, à l’extérieur ; elle est hors normes, à mi-chemin entre l’isthme de Panama et de la Nouvelle-Zélande, à 1074 km de Tahiti. Pas d’aérodrome, une goélette passe environ tous les deux mois, quand elle passe. C’est la plus jeune des îles Australes ; son relief est accidenté. Le mont Peranu culmine à 650 mètres ; il est le point le plus élevé de l’ensemble des Australes ; six autres pics dépassent les 400 m. Pas de coraux, l’eau est trop froide. Ses côtes sont découpées par douze baies. Celle d’Ahurei ressemble à un fjord : 2 km de long, 100 m de large, des fonds de plus de 50 m ! Le port est ainsi le mieux protégé de tout le Pacifique sud. Les ruines archéologiques montrent les restes de sept forteresses (pa), construites sur d’imposantes terrasses de pics volcaniques.

RAPA  (Australes)

A l’exception de la Nouvelle-Zélande, ce genre de structure n’a été retrouvée nulle part ailleurs en Polynésie. Rapa est la seule île de Polynésie française à être en-dessous de la zone tropicale. Elle est située sur le passage des dépressions subpolaires en hiver austral. Il y pleut toute l’année, 2645 mm en moyenne, principalement en saison chaude, cet été austral dans lequel nous sommes en janvier et février ! L’ensoleillement est faible et il peut pleuvoir jusqu’à 60 jours d’affilée… L’été, il y fait environ 20° mais l’hiver, le thermomètre peut descendre jusqu’à +5°. L’agriculture est donc généreuse sur Rapa. Tout pousse, sauf l’arbre à pain, le papayer et le cocotier. Les femmes cultivent le café, le taro, le chou, les pommes, les oranges, les pêches. Ici, on vit en autarcie : saumons, langoustes, moules, huîtres, crabes, bêches de mer (holothuries), crevettes, oursins, composent l’ordinaire avec, à l’occasion, du bœuf, de la chèvre et du mouton sauvage qui vivent dans les montagnes.

Une fois débarqués, nous nous retrouvons tous dans les deux ‘trucks’ du ramassage scolaire pour nous rendre à la Mairie. Pied à terre, nous attendons les autorités. Les équipes de football, de basket, de handball, en tenue sportive, font une haie d’honneur jusqu’à la Poste et la Mairie. Les sportifs dansent le hakka ; les enfants des écoles, vêtus de pagnes d’auti et torse nu, et leurs maîtresses, entament une vibrante Marseillaise, puis l’hymne polynésien, tandis que montent les drapeaux. Discours du Tavana, réponse émue de la Haussaire (Haut-Commissaire).

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A table maintenant ! Dans la salle des sports, les Rapa ont disposé tables et chaises. Le menu est alléchant : langoustes grillées, poisson grillé, poulet grillé, popoï (pâte tirée du fruit de l’arbre à pain), framboises, pêches, goyaves, oranges, bananes. Certains touristes étaient tellement affamés par la houle incessante depuis 48 heures que, tout en ayant fait provision de deux langoustes, ils en ”bouffaient” déjà une troisième sur place avant de rejoindre la table et s’y empiffrer des réserves dans leurs mains. Il est bien sûr de notoriété publique que, sur l’Aranui, les passagers crèvent de faim ! Ce qui fit dire à un Rapa : « on nous avait annoncé 160 passagers, mais il y en a au moins 250 ! »

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Le soir, Pierrot Faraire nous offrira un spectacle, avec sa troupe des Tamariki Oparo qui gagna le 1er prix de danse lors du Heiva 2006. Mais auparavant, l’Etat décorera le Tavana, puis Pierrot, le directeur d’école et néanmoins maître de ballet. De retour sur l’Aranui, c’est la soirée tahitienne. Tous les Rapa sont invités à bord. Ils sont environ 500 dans les deux villages de Haurei et Area. Beaucoup ne viendront pas car ils ne se sentent pas à leur aise, « c’est pas un monde pour nous », disent-ils. Punch, buffet, spectacle et musique par l’équipage, danses jusque tard dans la nuit.

Le lendemain matin, pluie diluvienne… on peut retourner au village. Il faut être de retour pour midi. Les mamas montent à bord les bras chargés de colliers de coquillages. L’émotion est visible chez les Rapas qui voient très peu de monde, isolés comme ils sont. Elle est visible aussi chez les touristes, qui découvrent ici un bout du monde. Pierrot fait chanter tout ce peuple tandis que les mamas nous couronnent. Les Rapas redescendent ; l’Aranui III siffle trois fois ; il se détache lentement du quai. Les Rapa dansent toujours ”Faut pas pleurer“, mais les larmes sont bien dans tous les yeux, est-ce le vent ? Les matelots sanglotent comme des enfants qui iraient à l’école pour la première fois. Tout le monde pleure, comme le ciel, sur le quai comme sur le bateau. Tino, le pilote surdoué d’une des barges, sanglotera vingt minutes, inconsolable.

rapa

A 13 nœuds et demi de vitesse, l’Aranui part pour un voyage de retour de 52 heures. Il met cap à l’est car la dépression Arthur est sur Raivavae. La mer est déjà bien agitée, il n’est pas nécessaire de foncer droit dans l’œil d’Arthur. Deux dépressions pendant ce périple, cela mériterait bien une médaille, non ?

Tel était le voyage inaugural et terminal de l’” Aranui III ” aux Australes.

Hiata de Tahiti

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Sucre tabac et distillerie de Cuba

Il faut attendre que le soleil tombe, durant les vingt derniers kilomètres avant Santiago, pour distinguer enfin quelques détails du paysage que nous traversons. Les travailleurs rentrent des champs, les écoliers de l’école. D’autres jouent déjà au ballon, en short, jeunes corps caramel souples et vifs. Il fait plus chaud ici qu’ailleurs dans la région, en témoigne la végétation différente dont les agaves, les cactus et les arbres à pain. Nous croisons des charrettes et des camions ; tous ont la benne remplie de cannes à sucre frais coupée. Il y a une récolte par an.

ecoliers caramel cuba

Le bus est arrêté sur la route par un train à sucre en manœuvre. Il avance, lentement, puis recule, peut-être pour aller chercher on ne sait quel aiguillage en aval. Tout cela en prenant son temps, de façon bien bureaucratique. Le socialisme ne connaît pas la productivité, les travailleurs ne seront pas plus payés s’ils font bien, alors…

fatigue cuba

Les champs de cannes en cours de coupe poussent dans toute la région centrale. Les wagons qui servent à transporter les cannes sont vieux et rouillés, garnis de barreaux comme des cages. Ils conduisent la récolte des champs jusqu’à l’usine sucrière du village de Los Rios, commune de Palmas Soriano, le nom même de la marque de rhum goûtée hier. Sergio nous vante Cuba, « sixième pays au monde à introduire le chemin de fer sur son territoire, le deuxième des Amériques ». Mais ni les voies ni le matériel ne sont entretenus depuis l’aide soviétique des années soixante. Des wagons diesel, véritables bus sur rail, transportent les ouvriers aux champs, faute de camions.

distillerie 19eme cuba

Les deux cheminées de la sucrerie fument à plein régime, vomissant du noir productiviste comme jadis, sans aucun souci pour la pollution. Le travail reste toujours la valeur suprême de l’idéologie ouvrière, et peu importe la modernité. Dans la région de Cienfuegos subsistent encore de vieilles locomotives à vapeur alimentées au charbon, nous dit Sergio. Elles servent toujours à l’industrie sucrière et certaines datent de 1874. Sur les 11 969 km de lignes, seules 147 sont électrifiées.

locomotive sucre cuba

Curieusement, l’industrie sucrière, la plus importante activité agricole de l’île, n’emploie environ que 300 000 personnes. C’est peu. Il faut ajouter le café, le cacao, le tabac, les bananes, les productions vivrières. Mais tout cela représente peu sur l’ensemble de la population, 25% (qui ne produit que 7% du PIB). Même si l’on enlève les moins de 14 ans encore à l’école, et les quelques trop vieux pour travailler, l’agriculture emploie relativement peu de monde à Cuba. L’industrie est réputée employer 24% de la population pour 37% du PIB (il faut bien distiller le rhum et rouler les cigares !) mais ce sont surtout « les services » qui emploient 51% de la population, signe d’une administration pléthorique et de l’importance de l’agitation politique sur la production même de richesses. Le secteur d’État représente en 1998 75% des actifs et le taux de chômage « avoué » est quand même de 4.3% en 2013 : quelle réussite pour un État « socialiste » !

esclave enchaîné cuba

Pour le tabac, les labours s’effectuent à la charrue tractée par des bœufs en juillet. Le tabac est semé en septembre et repiqué mi-novembre. La récolte a lieu en janvier suivant, feuille à feuille. Elles sécheront dans des maisons de bois aux toits de palme où l’air circule bien sans qu’il n’y fasse jamais trop chaud, cela pendant cinquante jours. Les feuilles de tabac seront alors mises en ballots dans des écorces de palmier pour vieillir par fermentation de six mois à deux ans. Ensuite, ce sont le plus souvent des femmes qui reprennent les feuilles une à une, ôtent les nervures et les classent par taille, teinte et texture en les posant sur leurs cuisses. Il faut cinq ans pour former une spécialiste du classement. Mais les femmes ne roulent pas les cigares sur leurs cuisses, c’est un mythe ! Les fabricants spécialisés doivent faire de 100 à 140 cigares par jour. Dans les manufactures, un lecteur assis face à eux leur lit un roman ou le journal pour les éduquer !

Cohiba cigars in disaplay. Havana (La Habana), Cuba

Le « habano » – nom du cigare cubain (on dit aussi « puro ») – est le mélange de cinq types de feuilles : trois pour la tripe (le milieu du cigare), un pour la capote (enroulée autour de la tripe) et un pour la cape (l’enveloppe extérieure, visible, la plus précieuse). L’originalité d’un havane dépend du pourcentage de feuilles choisies pour lui donner sa force (ligero), son arôme (seco) et sa combustibilité (volado). L’assemblage est aussi important que pour un grand cru de vin. Ce sont les maîtres assembleurs qui connaissent les dosages adéquats pour chaque type de cigare de la marque. Les cigares une fois terminés sont regroupés par cinquante et laissés à reposer dans une grande salle pendant plusieurs semaines. Ils sont ensuite classés en fonction de 64 nuances de couleurs et rangés en dégradé du plus sombre au plus clair. Bagué un à un (signe de leur authenticité !) ils sont déposés dans leur boite définitive, en cèdre comme il se doit. Nous trouvons des Cohiba, des Lanceros, des Siglo V, des Coronas et des Romeo y Julietta n° I à IV, des Montecristo n°1 à 3, des Esplendidos, des Partagas…

cigares cubains

rhum legendario aniejo cuba

Mais nous attend plutôt la dégustation de rhum, avec incitation à l’achat. Il s’agit d’une production de Santiago dont le nom est Palmas Soriano. Ce n’est pas Bacardi. Le vieux rhum (5 à 7 ans d’âge) n’est pas fort, 38° degrés seulement contre 55° aux Antilles, il a un goût de rhum Negrita sucré et allongé. Il est assez parfumé mais ne vaut ni un cognac ni un whisky malté. On nous en sert un demi-centimètre dans un gobelet en plastique pour goûter. L’idée est de déclencher un achat de rhum, cigare, café, cacao, photos en noir et blanc du Che (dont la célébrissime prise par Korda en 1960), en bref, tous les produits qui sont aujourd’hui l’image de Cuba dans le monde. Françoise « n’aime pas le rhum » et j’ai ainsi double ration… à peine de quoi me rincer le gosier.

rhum legendario cuba

La fabrique achète du jus de canne qu’elle laisse un peu fermenter. Elle procède ensuite à une distillation double, puis filtre le résultat dans des cuves à charbon actif pour éliminer les impuretés. Le vieillissement s’effectue en fûts, à 75° d’alcool. Pour atteindre le titrage officiel à 38°, on ajoute « simplement » de l’eau déminéralisée ! Le rhum se déguste mieux avec un café et un havane, selon le gros Noir qui veut faire de l’humour. « Les femmes ? – après, rit-il. » Les 38 employés de la fabrique sortent quelques 6000 bouteilles chaque jour. Le bar à dégustation et vente se trouve à l’étage et nous y passons plus de temps qu’à la visite…

Le Havana Club de 7 ans d’âge est pour moi le meilleur des trois rhums que nous avons goûtés, sec et parfumé. L’« Aniejo Reserva » Havana Club simple et le « Ron Legendario Aniejo » sont, parmi les rhums bruns, moins bons, trop fades et trop sucrés pour mon goût. Quant aux rhums blancs, ils ne sauraient se boire seuls ; ils servent surtout aux cocktails.

Nous reprenons donc le bus l’après-midi. Sur le trajet depuis l’hôtel, nous passons à la demande de Sergio qui veut nous les montrer, dans les quartiers chics aux maisons du début du 20ème siècle entourées de jardins. Celle de la famille Bacardi est un presque château, très cossu. Sur un stade, des adolescents s’entraînent au base-ball, le sport national. Aux arrêts de bus se pressent des filles superbes, belles jambes, fermes poitrines et grands sourires. Dans les rues, les adolescentes ont le regard effronté et parfois l’expression directe envers les mâles occidentaux. Une adolescente en débardeur me propose d’acheter un cigare à la sauvette et je lui réponds que je ne fume pas ; elle me répond du tac au tac, en espagnol, qu’elle fumerait bien le mien, de cigare. Elle a accompagné cette remarque d’un bruit de bouche et d’un regard suggestif vers ma ceinture. Le sexe, partout vous suit, peu pour le désir, surtout pour le fric… tant le Cuba socialiste manque de tout.

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Destination Cuba

Les États-Unis et Cuba pourraient rouvrir leurs ambassades avant le sommet des Amériques, au Panama, qui se tiendra les 10 et 11 avril. François Hollande devrait se rendre à Cuba… C’est assez pour me faire ressouvenir de mon voyage dans l’île Caraïbe, il y a quelques années. La fin de l’isolement de l’un des derniers pays « communistes » de la planète n’est pas encore pour demain, Fidel Castro se dresse toujours en statue du Commandeur ; mais la fin est proche. Évidemment, Cuba est sur la liste des États soutenant ou finançant le terrorisme ; son retrait de cette liste doit d’abord être soumis au Congrès, dont les deux chambres sont dominées par les Républicains – franchement hostiles au régime Castro. Mais une levée d’embargo profiterait à l’agriculture américaine : un million de tonnes de blé est acheté chaque année par Cuba au Canada et à l’Europe. Il serait moins cher de le transporter depuis la Floride, en face. De quoi susciter la convoitise capitaliste…

Fidel castro dictateur

Dans la navette aéroport, à Madrid, je repère deux minettes venues de Paris ; elles se rendent à La Havane. Elles sont « graves » comme dirait l’Adolescent : minaudantes, miaulantes, affichées, supersapées, électriques et narcissiques, elles veulent aller représenter Paris dans les îles. Leur conversation – assez fort pour que tous autour les entende – sinon ce n’est pas drôle – ne porte que sur les garçons : « et Untel, il t’a appelé ? Attend, je vais lui téléphoner. Et Machin ? » Leur but est d’aller tout prosaïquement se faire brancher par les bien montés coupeurs de cannes. S’offrir au tiers-monde, n’est-ce pas faire preuve d’abnégation « dans le vent » ? Le tee-shirt de l’une d’elle annonce la couleur : « Besame mucho !« . En espagnol, cela signifie quelque chose comme baise-moi à mort…

Nous arrivons alors qu’il est 5h du matin en France ; il n’est que 23h à La Havane. Le décalage horaire nous épuise car nous avons tous mal dormi dans l’avion bien rempli, trop serrés, environnés de bruit. Le vol a fait le plein à Madrid de tout un groupe d’Espagnols, des jeunes de 18 ou 19 ans en vacances. Ils sont à mi-année d’entrée en faculté ou en école de commerce, ils se connaissent tous et discutent par groupes. L’un de leur centre est un couple de madrilènes branchés, beaux comme des dieux et aussi à l’aise. Ils s’aiment, se caressent au vu de tous, mignons comme tout. Leur douceur attire les filles comme un aimant et les garçons par rivalité. Ils font cellule et sont en même temps de plain-pied avec les autres, parlant et riant, jouant aux cartes. L’amante porte des cheveux noirs coiffés à la Jeanne d’Arc, un body gris moule sa poitrine appréciable. L’amant a de beaux cheveux aux reflets vénitiens qui lui retombent en mèche sur le front. Il en joue d’un geste machinal et charmant pour les repousser en arrière. Il montre des avant-bras et des épaules de véliplanchiste, bien pris dans une chemise de vichy bleu. Ils apparaissent particulièrement juvéniles et vulnérables au milieu des autres, grands machos aux barbes déjà bleues ou executives femelles au physique de paysannes du Middle-west, qui les accompagnent.

Cuba carte notre circuit

L’aéroport de La Havane est conçu comme une publicité pour le régime. Il est clean, moderne et international – pas du tout « socialiste » comme on peut le redouter. Une aire de jeu pour tout-petits, côté départs, s’aperçoit par la vitre. En revanche, malgré le nombre de fonctionnaires présents aux innombrables guichets, la queue à l’immigration dure longtemps. Il leur faut vérifier le faciès de tous ces étrangers, comparer les passeports avec les listes « noires » établies pour détecter les « espions de la CIA », je suppose.

De l’autre côté, nous accueille un Sergio local parlant français. Il nous déclare être d’origine espagnole, pour se poser au-dessus des métissés, la grande hantise caraïbe. Placide et enveloppé, nous verrons qu’il aime parler ; il débite déjà son discours uniforme au micro, dans le car qui nous emmène à l’hôtel Kohly. Nous n’y passons qu’une nuit courte, de minuit à 5h. L’obscurité est ponctuée des rythmes de la boite de nuit de l’hôtel, en pleine activité hebdomadaire en ces heures du samedi au dimanche. Suivent, au petit matin, des cris et des rires exacerbés des danseurs qui vont se finir dans la piscine. On entend de grands splash et les réflexions de la meneuse, une fille à voix de ventre. Exaspération sensuelle, exténuation physique, rauquerie du désir, tout cela passe par les voix dans le silence de nos insomnies.

L’en-cas du petit déjeuner exige de ne pas être pressé car il arrive un à un, selon les commandes, et parcimonieusement. Le café est à l’italienne, dans des tasses minuscules, peu fait pour abreuver la soif matinale. Les tartines semblent venir de Madrid tant elles se font attendre. Le beurre en plaquettes, lui, est importé de France.

Un autre bus nous mène à l’aéroport domestique Waijay, pour le vol intérieur jusqu’à Santiago. Le jour se lève à peine, mais il monte vite. Nous sommes juste au-dessous du Tropique du Capricorne. Les rues de La Havane sont encore désertes dans le gris de l’aube. Il pleut un peu. Mais quelques personnes attendent déjà aux arrêts de bus et un vendeur de beignets s’installe dans sa guérite. Circulent de rares automobiles. Je remarque quelques vieilles américaines, mais pas aussi rutilantes que sur les photos du tourisme. En fait, La Havane les use plus vite que le reste du pays. Sur les murs, les seules publicités sont révolutionnaires.

Cuba slogans revolutionnaires

Avec ses syllabes pleines et ses voyelles qui claquent, l’espagnol sonne ferme et définitif. Le slogan remplace la réflexion, ne reculant pas devant le jeu de mots ou l’association d’idées. Hasta la victoria (jusqu’à la victoire, phrase favorite du Che) sonne comme Hasta la vista (au revoir) ! Nous longeons des maisons basses entourées de quelques arbres qui ont l’âge de la Révolution, parfois munies d’un patio ouvert sur la rue. La banlieue près de l’aéroport domestique s’achève en casernes, usines et baraques. De jour, le soleil brille sur tout cela et donne un air riant aux choses. Dans l’atmosphère d’aquarium de cette aube au ciel bas, cette banlieue nous semble plutôt glauque, comme un bricolage fatigué. L’activisme factice remplace l’enthousiasme déclinant comme ce « Vive le Nième anniversaire de la Révolution ! » qui orne le mur face à l’entrée de l’aéroport domestique.

descamisados cuba

Françoise se dit « linguiste », ce qui fait quand même plus distingué que « prof d’anglais », vous ne trouvez pas ? Elle avoue d’ailleurs avoir des copies à corriger dès son retour… Mais elle angoisse. Elle ne sait pas si le passeport qu’elle présente « est le bon » (en a-t-elle un « vrai-faux » dans une autre poche ?). Elle s’aperçoit qu’elle n’a pas d’« autre gourde » (en dehors d’elle, je suppose ?), ni de canif, alors qu’elle s’est inscrite dans un groupe de randonnée ! Une Anne-Laure a les yeux à fleur de tête et le museau froncé d’un pékinois. C’en est irrésistible, d’autant qu’elle en a la naïveté hargneuse. Elle consulte en marketing et semble vouloir dès la première heure « prendre le groupe en main ». Elle occupe n’importe quel silence que lui laisse (parcimonieusement) Françoise pour nous raconter tout ce qui pourrait lui permettre de se présenter à son avantage. Ainsi, elle a « des amies cubaines » et vient ici souvent, parfois avec son frère qui a vaguement des idées révolutionnaires. Elle-même habite le 8ème arrondissement de Paris et est assistante en marketing pour une boite chic du boulevard Haussmann. En général, elle commence ses interventions de consultante en lançant à chaque patient un ballon tout en lui criant des insultes (passionnant !). Elle n’a pas pris le même avion que nous car elle « voulait voir ses amies » et a pris plutôt « un vol direct Air France », un jour plus tôt, qui ne lui a rien coûté avec les miles qu’elle a accumulé dans ses déplacements professionnels… C’en est saoulant ! Les autres sont plus discrets ; un Philippe deviendra même un ami.

Deux décollages et une escale plus tard, nous voici à l’aéroport de Santiago de Cuba. Il y fait chaud bien qu’une brise réussisse à descendre du nord. Sur le bord de la route, un petit à la main de son père en a ôté son tee-shirt. Nous nous apercevrons bien vite que cette attitude de quitter la chemise est très courante ici – se poser en Descamisado fait éminemment révolutionnaire ! Les automobiles qui circulent ici sont des Lada ou des Moskvitch ; les plus récentes sont japonaises. Je note quelques Fiat, Renault et Citroën. Un bus accordé à notre groupe nous pique au sortir de l’avion. Le chauffeur se prénomme Ricardo.

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Bruno Le Maire, Jours de pouvoir

bruno le maire jours de pouvoir
De 2010 à 2012, Bruno Le Maire se retrouve ministre de l’Agriculture des gouvernements Fillon sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy. « La vérité du pouvoir est dans son exercice », déclare l’auteur en liminaire. Dans ces notes au jour le jour, il varie la focale, passant de l’ONU et du G20 aux minuscules exploitations dans les villages de montagne ou le terroir normand. Inlassablement, il pérégrine, comme si « la politique » n’était que féodalité poursuivie malgré la république : être là, serrer des mains, connaître d’homme à homme. Il ne dit pas tout mais il en dit beaucoup – à qui sait lire en filigrane. « La politique nourrit mon écriture et elle la bride. La littérature tend son miroir à mon action politique et elle la juge » p.299.

Les mesures ? Les projets ? La vraie politique, que De Gaulle appelait la « Grande politique » ? Pschitt ! Les agriculteurs sont divisés en autant de groupuscules hostiles les uns aux autres qu’ils cultivent de parcelles ; tous réclament « des aides » – depuis des décennies – il n’y en a jamais assez ; donnez-leur quelques sous, durement négociés avec les pays européens et après compromis avec les pays émergents, ils sont déçus et reportent aussitôt leurs votes sur l’opposition. Les marchés agricoles doivent-ils être régulés pour éviter la spéculation ou pour faire monter les prix ? Ces querelles de chiffonniers sous perfusion permanente seraient d’un ridicule avéré si les campagnes ne représentaient pas un électorat vital pour un candidat UMP.

Quant aux pays européens, Allemagne en tête, ils ne peuvent que juger frivole cette ardeur franchouillarde à s’entre-déchirer entre petites provinces et petits intérêts locaux alors que la crise – mondiale ! – fait rage, que la finance – sans frontières ! – règne et que des pays très peuplés comme la Chine, l’Inde, le Brésil veulent – légitimement ! – nourrir leur population, exporter le surplus et se faire une place dans les échanges mondiaux.

L’agriculture, décidément, ce n’est pas un ministère mais un observatoire sur la cour de récré.

Bruno Le Maire y réussit assez bien, ne prenant jamais position, écoutant les uns et les autres, laissant travailler les technocrates, négociant ce qu’il faut sur instructions présidentielles, dans les contraintes sévères du Budget. Défenseurs du paysage et de la qualité des produits et des terroirs, les paysans ? Peut-être, mais pas écologistes pour un sou ! Le fait qu’ils exigent du ministre qu’il bouge sans cesse d’un coin à l’autre de l’Hexagone pour aller les rencontrer, en avion, hélico, TGV, auto, produit beaucoup de carbone pour rien. Passer une demi-heure ici à serrer des mains, une heure là à écouter une réunion syndicale, une autre demi-heure ailleurs – et parfois dans la même journée – pour « constater » la sécheresse, la grêle, les inondations… à quoi cela sert-il à l’ère des communications audiovisuelles instantanées ? Quand reste-t-il au ministre le temps de penser l’intérêt national, d’étudier des solutions à long terme, de décider les étapes, dans cette agitation permanente de l’urgence et cette drogue des aides d’État dont pas un agriculteur ne semble plus pouvoir se passer sa vie durant ?

Autour du steak agricole bien saignant, l’auteur ajoute quelques accompagnements sur sa vie politique, des portraits ciselés des ténors qu’il décrit sans prendre position (réservant l’avenir), une louche de sauce européenne et un assaisonnement intime avec ses enfants.

L’un des plaisirs du livre est le Sarkozy dans le texte, ce parler voyou qui ne met jamais les négations (« faut pas » pour il ne faut pas »), ce côté touchant du président lecteur plus cultivé que les médias à 80% de gauche l’ont dit, mais aussi touche-à-tout qu’ils l’ont dit aussi, avide d’être aimé mais solitaire dans l’exercice du pouvoir. « Il a pour les enfants, ou pour tout ce qui touche aux enfants, une disponibilité, une sincérité qui cadrent mal avec les portraits qui sont faits de lui » analyse Bruno Le Maire p.344.

Sur Alain Juppé : « Lui qui passe pour un homme froid et cassant, je le vois surtout simple, direct dans ses jugements, sans double fond, soucieux avant tout de la France. On le dit sec, il est pudique. On le croit vaniteux, il a cet orgueil des personnes qui refusent les humiliations. Blessé à vif par une condamnation injuste, il en garde une méfiance instinctive du risque politique, de ces coups de poker qui permettent de prétendre à la première place (…) Pour le sens de l’État, je ne lui connais aucun rival à droite » p.49.

Bruno Le Maire enrobe sa chronique de sauce européenne, bateau à la dérive, sans pilote dans la cabine. Que serait l’agriculture française sans la PAC, politique agricole commune ? Mais c’est aussi « une évidence pour moi que seule une intégration politique plus poussée, sur des bases idéologiques différentes et suivant des modalités de décision simplifiées, pourra nous sortir définitivement de la crise ; mais c’est une autre évidence que nous n’en prenons pas le chemin et que personne ne sait plus quel est le projet de société, encore moins le projet politique européen » p.334. Une fois ces généralités pleines de bonnes intentions énoncées, nous n’en saurons pas plus. Ce n’était pas l’objet du ministère, mais nous aurions aimé connaître plus précisément ce que proposerait Bruno Le Maire sur les institutions européennes. En revanche, il le dit bien, il est très facile de faire de Bruxelles un bouc émissaire de ses lâchetés politiques – tous gouvernements confondus ! « En définitive, l’Europe se construit moins à Bruxelles qu’on le prétend. Son avenir dépend avant tout de l’implication des États membres et de leurs représentants élus » p.84.

Le piment du texte est ces quelques notules amoureuses saupoudrées de ci de là envers chacun de ses enfants, quatre petits garçons de moins d’1 an à presque 12 ans que le ministre n’a pas assez le temps de voir et dont, pour le dernier, il décrit d’une belle plume la naissance (p.333).

Ces années forment la suite de son expérience de niveau moindre 2005-2007, relatée par Des hommes d’État. Ce livre-ci est plus réfléchi, plus composé peut-être, chaque thème étant soigneusement dosé pour dire sans trop en dire, pour n’oublier personne sans se fâcher avec quiconque, pour chroniquer au jour le jour tout en balisant la mémoire des fils qui n’ont retenu que ses absences. La lecture en est fluide, passionnante, faisant pénétrer au cœur du réacteur politique où, finalement, il ne se décide pas grand-chose tant les politiciens sont désormais « agis » par des forces impersonnelles. Hollande était insignifiant (il le reste) ; il été élu parce que la majorité en avait assez du caractère agité de Sarkozy. Au fond, peu importent les programmes, seuls comptent les hommes, plus encore lorsqu’ils sont parfaitement impuissants à changer ce qui survient.

J’aime cette mesure donnée aux choses, cette attention aux petits faits vrais des êtres et de la vie, cette sensibilité aux paysages et aux sons. Tant de politiciens sont des bêtes de cirque qu’un peu d’intelligence en politique apparaît comme précieuse. Malgré les jaloux, les envieux et les médiocres. Leçon d’Édouard Balladur à l’auteur, le 16 février 2012 : « Vous savez, les gens intelligents, en politique, on ne les aime pas, c’est comme ça, il faut en prendre son parti » p.461. Tant pis pour les médias qui préfèrent ce qui brille : je préfère pour ma part ce qui réfléchit.

Il est curieux que l’éditeur Gallimard ait laissé passé des coquilles énormes comme 4×4 écrit systématiquement 4 3 4 ou G20 écrit parfois B20 et une fois G120 ! Les correcteurs sont-ils de plus en plus illettrés ou sont-ils politiquement sectaires pour saboter ainsi un livre ?

Bruno Le Maire, Jours de pouvoir, 2013, Folio 2014, 521 pages, €8.50

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Les œufs peints de Kolomiya

A Kolomyia, sur la rivière Prout, nous allons visiter le musée des œufs peints. Sa façade est en forme d’œuf, bien que sous échafaudage cette année. Les œufs peints sont une tradition orthodoxe pour Pâques. On les appelle « pisanki », mot qui vient du russe « pisat », écrire.

Kolomiya oeufs peints

Les décors sont très fins, en forme de croix, de cœur, de poisson. Les vitrines s’étalent sur deux étages. Tous les styles s’y côtoient, avec des explications en cyrillique ; c’est assez instructif, même sans comprendre un mot des étiquettes, et plutôt joli.

Kolomiya oeufs peints personnages

Les décors délicats aux couleurs assemblées sont des œuvres d’art, dernier refuge de l’artisanat traditionnel sous le communisme. Quand les cocos s’y mettent, ils ne font pas l’œuf mais jouent les maîtres coqs.

Kolomiya oeufs peints b

Nous allons visiter la poste, un grand bâtiment de béton moderniste utile aux quelques 68 000 habitants de la ville. Les guichets sont ouverts et les postières vendent diverses choses en plus des timbres : des magazines, des sucreries, des enveloppes, des cartes postales ou de téléphone.

Kolomiya la poste

Kolomyia est le centre urbain de la culture Goutsoul. Fondée au 13ème siècle, la ville fut annexée par les Polonais en 1340, ce qui lui donna son essor commercial. Elle fut prise en 1589 par les Turcs, puis reprise par les Polonais, enfin prise à nouveau par les Turcs en 1620 qui la brûlèrent jusqu’aux fondations et firent de tous ses habitants survivants des esclaves… avant de rendre le terrain aux Polonais. Autres temps, autres mœurs.

Kolomiya cafe

On ne peut pas comprendre la révérence envers l’autorité et le sentiment de « forteresse assiégée » des Russes et de leurs républiques géographiquement satellites sans en référer à l’histoire. Jusqu’au 19ème siècle ces pays vivaient au Moyen-âge ; en 1917 encore la féodalité y restait prégnante et l’autocratie la règle. Aujourd’hui, pas question d’intégrer la Turquie, cet ennemi héréditaire musulman à la religion particulièrement intolérante, dans une quelconque union avec la Russie ou l’Ukraine. On les comprend.

Kolomiya eglise

Les Goutsouls, habitants des Carpates, parlent une langue incompréhensible aux autres Ukrainiens. La Russie a reconnu l’ethnie comme peuple à part entière au 18ème siècle, dans l’immense fédération. Ils vivaient de l’exploitation de la forêt, de l’élevage et de l’agriculture, conservant ainsi sans changement des traditions millénaires. Leurs maisons sont en bois, plus facile à trouver et à utiliser que la pierre dans ces montagnes, et les églises sont particulièrement soignées.

goutsoul jeune homme torse nu

Depuis l’indépendance de l’Ukraine en 1991, les Goutsouls récusent le nom qui leur est donné : ils aspirent à se fondre dans la population ukrainienne « normale » et à émigrer vers les villes. Comme partout, l’exode rural affadit les traditions et les particularismes. Il n’y a guère que les écolos, ces gauchistes réactionnaires, qui voudraient figer tout progrès et faire revenir l’humanité à l’âge d’or pré-néolithique. Les Russes, les Ukrainiens et tous les peuples ex-soviétiques ont la mentalité des années 1960 en Europe, tournée vers l’optimisme, la consommation et la jeunesse. Bien loin de nos nostalgies vieillissantes.

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L’échec du socialisme réel

Staline est mort en le 5 mars 1953, il y a 60 ans, dans les larmes du journal communiste français. On veut surtout s’en souvenir comme l’un des vainqueurs de la Seconde guerre mondiale. Mais il n’a pas été pour rien dans l’échec du « socialisme réel » (ainsi les régimes communistes nommaient-ils leur pratique gouvernementale). Lequel socialisme devait n’être qu’une étape provisoire du communisme – toujours resté une utopie.

Staline mort Humanite

Le messianisme historique vient clairement de Marx. Il provient de sa croyance absolue d’avoir raison, d’avoir découvert les Lois de l’Histoire et le processus de transformation des sociétés humaines. Une telle certitude “scientifique” pousse les disciples au fanatisme. Le système sera porté à éliminer les importuns, par le massacre, la famine, le goulag ou l’exil.

Le cynisme socialiste vient de Lénine. Le léninisme se veut la science marxiste appliquée. Vladimir Ilitch a toujours su adapter la stratégie aux possibilités du moment, et reculer pour mieux avancer par la suite. Mis en minorité, il nie la signification du vote et sort de l’Iskra peu après le Congrès de Bruxelles. Puisque les Bolcheviks y sont minoritaires, le journal ne représente plus la majorité “réelle”, et Lénine transporte le centre du parti ailleurs. Il fera de même lors de la prise du pouvoir, en dissolvant l’Assemblée constituante.

La ‘politique du possible’ a été mise en pratique par Staline. Il n’a fait que prolonger le cynisme léniniste de façon systématique et avec absence de scrupules. Il a appliqué ce que Zinoviev nomme le “principe le l’Impératif” : « s’étendre dans toutes les directions possibles; pénétrer partout, dans toutes les organisations, les pays, les continents; avoir des hommes à soi partout; jeter le trouble, brouiller les cartes, semer la zizanie; faire exécuter les “sales” besognes par autrui; travailler à créer sa supériorité; intimidation; chantage ; promesses; mensonges; accepter, tout en continuant à agir comme on l’entend ; impliquer tout le monde dans son jeu; renforcer la “cinquième colonne” par tous les moyens ; voler les découvertes et les inventions; monter des spectacles grandioses, dans le but de tromper et de mystifier. Staline a fait de Lénine “l’homme devenu mausolée” et de “sa pensée un bunker théorique dans lequel on peut se retrancher à tout moment. »

La dictature partisane soviétique est née de cette réduction de la croyance en philosophie, de la philosophie théorique en pratique politique, de la politique en obstination et paranoïa d’un groupe restreint tremblant devant le Secrétaire général Staline.

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La politique de puissance vient des conditions historiques : du refus des peuples à se laisser “libérer”, telle la Pologne en août 1920. Pillage des peuples, frontières rectifiées, finlandisation et intervention militaire sont les procédés gradués et concentriques de la consolidation de l’ego stalinien. Alexandre Zinoviev dit du système soviétique qu’il a une tendance générale à l’expansion, qu’il « est comme l’eau dès qu’il y a une fissure ».

L’échec économique est dû à la négation de toute réalité économique pour motifs idéologiques. La politique a toujours raison et Marx a « scientifiquement » découvert les Lois de l’Histoire. La nature comme les hommes doivent s’y plier. Lénine espère en 1917 le miracle de la Révolution mondiale en trois semaines. Staline attend des miracles de la collectivisation des terres et de l’industrialisation forcée. Khrouchtchev croit au miracle économique de l’exploitation des terres vierges. Brejnev croit aux miracles engendrés “scientifiquement” par l’introduction de la chimie dans l’agriculture. Gorbatchev dira que les dirigeants ont craint de faire confiance aux hommes pour réaliser le socialisme – mais il n’était pas question que les masses, “ignorantes” et “secrétant du capitalisme à chaque minute”, prennent en main leur destin : c’était le rôle de leur “avant-garde éclairée“, le Parti.

La réalité ne colle jamais avec l’idée. Les prophéties ne se réalisant pas, il fallait sauver avant tout la doctrine et le système. Le responsable, c’est l’ennemi, bouc émissaire commode qu’il faut dénoncer et détruire – sans cesse. La coercition commence avec Lénine, qui a écrit de sa main l’essentiel des articles du premier Code pénal soviétique. Aidé de Trotski qui crée la Tcheka, ancêtre du KGB, et organise l’Armée rouge, impitoyable en 1919 aux insurgés de Makhno et en 1921 aux marins de Cronstadt. Staline développera les camps et un système policier universel fondé sur les complots permanents. Khrouchtchev puis Brejnev qualifiera les dissidents de malades ; ils les enverront « soigner » leur mécréance envers le Parti omniscient en hôpitaux psychiatriques.

Il faut donc « mobiliser » tout le monde et tout le temps. Le socialisme est une guerre de tous les instants contre tous et tout. L’utopie doit vaincre le réel puisqu’elle est crue « scientifique ». Pour Vladimir Boukovsky, l’URSS « n’est même pas un État dans le sens habituel du mot, mais une base militaire et un centre de subversion universel. Toutes les structures sont organisées en fonction de cet objectif, et le système ne peut exister qu’en état de guerre permanente ».

Les gloses pour partager les responsabilités et chercher à quel moment le socialisme a “dérapé”, n’ont pas de sens : la foi est totalitaire parce que les affidés sont certains d’avoir raison. Le parti n’a pu survivre que parce qu’il s’est montré impitoyable aux errements et aux compromis. L’idéologie n’a pu s’adapter que parce que le marxisme est aussi une théorie pour l’action. L’idéologie est un sentiment d’appartenance à « une cohorte cooptée de privilégiés à haut risque », selon l’expression d’Annie Kriegel.

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On perçoit ce regret “de gauche” que l’utopie n’ait pas été mieux servie. Charger Staline de l’échec du socialisme « réel » permet de conserver une image pure des origines de la Révolution et de la « pensée Lénine », voire de la philosophie historico-économique de Marx. Les ressources de la dialectique remplacent l’élan. L’évolution historique étant un processus qui avance en surmontant les contradictions, il est toujours aisé de faire du présent un moment charnière d’”intensification” des contradictions qui oblige à une vigilance accrue. L’entreprise prométhéenne du Progrès, bien ancrée parmi les militants du parti tient au volontarisme léniniste. Les Bolcheviks considèrent que la conscience peut agir sur l’histoire (d’où leur confiance dans les vertus d’un parti hautement centralisé). Cette vision des choses n’était pas contenue dans Marx, puisque Plekhanov et les Mencheviks considéraient la révolution comme le fruit d’un développement historique naturel. Jacques Attali l’attribue à la mauvaise influence des bismarckiens sur le parti communiste allemand.

Toute la littérature populaire des années 1920 met en scène le conflit entre les forces du Progrès (la Science, la Culture, les jeunes athées, les paysans pauvres et les ouvriers agricoles alliés du prolétariat urbain), et les forces réactionnaires (la religion, le paysan riche, le commerçant, le pope, l’étranger). François Hollande et son gouvernement anti-riches et pro-recherche aujourd’hui obéit à la même ligne mythique. Dans cette vision manichéenne l’illettré, aidé du militant du parti, accède aux Lumières. Au concret, il faut commencer par transformer la nature. C’est la manie obsessionnelle de Staline après la Deuxième Guerre mondiale avec le Plan de 1949, les théories de Mitchourine sur les caractères acquis et celles de Lyssenko sur l’agrobiologie. Il s’agit de pousser à l’extrême la quête occidentale résumée par Descartes de se rendre « maîtres et possesseurs de la nature. » Le poète Vladimir Maïakovski traduisait ainsi cet élan prométhéen du socialisme enfant :

     « Nos pieds, c’est la fuite foudroyante des trains ;
     Nos mains, ce sont les vents qui soulèvent la poussière du monde,
     Nos signatures, ce sont les navires – nos ailes, les avions. »

Il y avait de la grandeur là-dedans ; mais aussi du mépris pour l’humain. Trois générations, 60 ans après la mort de Staline et presqu’un siècle après la révolution d’Octobre, on voit ce qu’il en fut : une caste de vieillards chassés par la biologie, des catastrophes écologiques sans nom (Tchernobylmer d’Aral), une économie en ruines, une fuite massive des citoyens de l’Est dès que le Mur est tombé. Et une aspiration des peuples ex-socialistes à suivre le capitalisme le plus pur, le modèle américain des mafias, affairistes et cow-boys sous Poutine

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Manger bien ou mal à Tahiti

Vous avez dit bio ? Je lis dans la Dépêche de Tahiti : « Extraits du conseil des ministres ; prise en charge du fret maritime des engrais et pesticides chimiques destinés à l’agriculture. Il s’agit de la prise en charge du fret maritime des produits nécessaires au développement économique et social aux produits suivants nécessaires aux agriculteurs doit permettre le développement des filières agricoles dans les îles autres que Tahiti. Le fret sera pris en charge également pour les amendements (fientes de poules, lisier de porcs, déchets de poissons, tourteaux de coprah …) Ah bon ? je n’y comprends rien ! Et vous ?

Palme d’or de l’obésité : Hip, hip, hip, hourrah ! Qui a reçu cette palme d’or ? Hein ? La Polynésie qui coiffe tous les Ultramarins sur le poteau. Le taux d’obésité infantile est de 34,1% au fenua. La Martinique est seconde avec 25,8%, la Guadeloupe troisième avec 25%, la Guyane affiche 18,3%. Les causes sont connues : sédentarité des populations, abandon de la cuisine traditionnelle au profit d’aliments raffinés, urbanisation, allongement de l’espérance de vie.

Elles sont belles mais dangereuses, plantes souvent toxiques, parfois mortelles. Poinsettia (Euphorbia pulcherrima) ou Etoile de Noël. L’ingestion est dans 90% des cas asymptomatique (diarrhées, vomissements) eczéma et démangeaisons si contact avec la peau. Datura stramonium appelé pomme-épineuse, herbes-aux-taupes, chasse-taupe, herbe du diable, endormeuse, pomme poison, trompette des anges, trompette de la mort. Toutes les parties sont toxiques : vomissements, hallucinations, arrêt cardiaque allant jusqu’au décès. Thevetia peruviana ou bois-lait, son latex est très toxique, ses graines parties sont toxiques, l’ingestion d’une simple feuille peut s’avérer mortelle pour un enfant et un adulte, en raison des troubles provoqués. Jatropha podagrica ou pignon d’Inde ou médicinier, les baies et la sève sont toxiques… Demeurez vigilants !

A Rurutu (îles Australes), le jury du Heiva et la population ont dégusté une préparation d’autrefois. Des racines de ti (cordyline) sont cuites dans un four. Ce four est recouvert de feuilles de purau imbriquées les unes dans les autres pour former un couvercle. Les racines cuites sont découpées en tranches et offertes. Autrefois friandise pour les enfants, sucre pour les aliments, se gardant plusieurs mois, cette racine était bénie des dieux. Dans les temps anciens, la racine de ti était utilisée pour ses apports en sucre. Du temps des goélettes, les voyages duraient plusieurs semaines, voire plus. Il fallait prévoir une nourriture qui puisse se garder. Les protéines étaient fournies par le poisson, les vitamines et la force par le taro, le coco pour les corps gras et le ti pour l’énergie vitale. Si aujourd’hui les besoins ne sont plus les mêmes, le rituel demeure et sort à l’occasion des fêtes de juillet.

Hiata de Tahiti

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Atouts Tahiti

On a vendangé a Rangiroa et il y avait du beau monde – agricole – en visite dans la vigne. Sept hectares de terre cultivée, et maintenant on lorgne sur le bio…

Atation ! On a expliqué à ces huiles qu’il y a trois sortes de cépages : l’Italia, le Carignon rouge et le Muscat de Hambourg. Ces trois types de raisins sont utilisés pour fabriquer le blanc de corail et le rosé nacarat tandis que le blanc moelleux est un mélange d’Italia et de Muscat de Hambourg. Pour le blanc sec, seul le Carignon rouge est utilisé. Le vin rouge n’est plus fabriqué actuellement.

Le ministre de l’Agriculture espère que l’on pourra orienter la culture du raisin de table puisque les ceps poussent bien aux Tuamotu. Il paraît qu’on en importe 300 tonnes par an. Avant de visiter la vigne ces messieurs avaient gouté au nectar de Rangiroa avec poisson cru au lait de coco et poisson pané.

Rendez-vous avec Vénus à Tahiti ? [Ne songez pas aux vahinés, mais quand même… Arg.]

Le 5 juin prochain survient un événement astronomique exceptionnel parce que rare, le passage de la planète Vénus devant le soleil. Ce phénomène a lieu lorsque la Terre, Vénus et le Soleil sont alignés. Cet événement ne se produit que deux fois par siècle. Le prochain aura lieu en 2117.

A Tahiti, on prépare la caisse enregistreuse, on attend le client, quoi !

Mais cette rencontre a une symbolique particulière ici. En effet, cette rencontre a été observée pour la dernière fois à Tahiti par le navigateur James Cook lors de son voyage dans le Pacifique Sud en 1769.

C’est la Pointe Vénus qui deviendra le centre international d’échanges culturels et scientifiques autour du transit de Vénus, avec une centaine de chercheurs du monde entier dont deux prix Nobel en physique et en astrophysique.

Chez les anciens Polynésiens, Vénus se nommait Taurua Nui (étoile du matin ou étoile du soir), première à se lever et dernière à se coucher. C’était aussi l’étoile du dieu Tane. Vénus est connectée à la fécondité, à la sexualité, au sang, à la circoncision.

Hiata de Tahiti

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Élucubrations écologiques polynésiennes

Une société de la place, à Tahiti, cherche à acheter des rori cuits et congelés. La technologie de traitement est fournie, l’équipement est payant. Si vous avez un intérêt dans ce commerce voici les tarifs offerts : Rori titi 1000 FCP le kilo ; Rori anana 1000 FCP le kilo ; Rori récif 300 FCP le kilo ; Rori vermicelle 300 FCP le kilo. Rappel : le rori est une holothurie. Et le FCP est le Franc Pacifique. Bonne chance à tous ceux qui sont intéressés !

Le ministre de l’agriculture du Fenua veut répandre son usage car le vétiver a mille vertus. Connu surtout par sa fragrance, il est désormais reconnu pour ses nombreuses applications. Ses racines plongent jusqu’à 6 mètres de profondeur. Voilà un moyen naturel (bio, écolo, divin, ce que vous voulez…) pour freiner l’érosion des sols, surtout dans l’archipel des Marquises. Ces terres pourraient servir à la culture d’arbres fruitiers (s’ils étaient ensuite plantés, entretenus, récoltés, expédiés…). Mais cet herbacé vétiver peut fournir également un excellent fourrage. La plante peut atteindre 2 m de haut et possède la faculté de pousser dans un environnement salin. Peu cher, se multipliant rapidement,  le vétiver sera-t-il la panacée aux maux dont souffre la Polynésie française ?

Un enfant de 11 ans a mis le feu à son fare… parce que sa mère ne le gâtait pas assez. Le feu a détruit un autre fare et un habitant en colère a frappé au visage un mutoi (flic). Le feu donne chaud dans la société de consommation locale où tout est dû.

Vous connaissez cet atoll de Tetiaroa, à quelques miles de Papeete et ancienne propriété de l’acteur Marlon Brando. Une association, Conservation Tetiaroa, recherche dans toute la Polynésie des plantes qui étaient présentes sur l’atoll et qui ont disparu. Tetiaroa est le seul atoll des Iles du Vent et ses 6 km2 sont rattachés à la commune de Arue. Par temps clair, des hauteurs de Tahiti on distingue nettement Tetiaroa. C’est un lagon de 7 km de diamètre cerné de 13 motu. Ce fut également la résidence d’été, jadis, de la famille Pomare (reine du pays). Cherchant ses mutins déserteurs, le capitaine Bligh l’avait découvert en 1789. En 1962, durant le tournage du film ‘Les Mutinés de la Bounty’, Marlon Brando tombe amoureux de l’endroit et en 1965 négocie un bail emphytéotique. Il est devenu ainsi « propriétaire » de Tetiaroa pour 99 ans. En 2012, ouverture prévue de l’hôtel The Brando qui « serait le plus écologique au monde » d’après les concepteurs du projet. A surveiller !

C’est les rats (scélérats !) qui ont eu raison des plantes de Tetiaroa. Il semble que deux des plantes typiques de ces rivages polynésiens aient été retrouvées : le ‘Ofai (Sesbania coccinea subsp.atollensis var. parkinsoni) arbuste endémique des îles de la Société, et le Rama (Ximenia americana var. americana) arbuste indigène en Polynésie française trouvé uniquement dans les îles de la Société et des Tuamotu. Menacées dans leur milieu naturel en raison des rats, de la coprah-culture, de l’urbanisation du littoral, de certaines activités touristiques, de la perte des savoirs culturels, de la perte du savoir de l’utilisation des plantes…. Encore présent en 1973 à Tetiaroa, l’Ofai a complètement disparu depuis, il était encore en 1983 sur l’atoll de Tupuai. Le Rama donne des fruits comestibles. Il est très rare, mais peut être trouvé dans quelques sites littoraux de Bora Bora. Sauvez, sauvez ce qui peut encore l’être mais pressez-vous !

Aujourd’hui, 80% des granulats utilisés dans la fabrication du béton proviennent du lit des rivières ou des abords. Bien qu’une délibération officielle interdise l’extraction dans les cours d’eau, la direction de l’Equipement a accordé au fil du temps des dérogations. Le CESC, en 2010, remarquait que seuls 225 779 m3 d’agrégats étaient autorisés mais que 758 000 m3 ont été extraits sans compter les volumes qui ont « chappé » (échappé en langage local) à tout contrôle et ceux qui n’ont pas été déclarés. Les conséquences écologiques sont dramatiques. Plus on creuse le lit d’une rivière, plus le courant augmente, plus les berges se creusent et deviennent instables. Les lieux de ponte des poissons et des crustacés sont détruits. Si au fond du lagon se dépose un millimètre de terre, 90% des organismes (oursins, algues, éponges) sont tués. Il faudrait agir, vite, vite, vite… mais en Polynésie on ne se presse que très lentement ! [Surtout pour l’environnement. Mieux vaut le fric tout de suite pour consommer tout de suite que le paradis d’équilibre qui fait partie du mythe occidental. Suicide lent par dépression coloniale ? – Argoul]

On ne se presse jamais… sauf pour faire la fête. Au milieu de tous ces militaires qui défilaient sur les Champs-Élysées le 14 juillet dernier à Paris, il y avait 280 stagiaires et bénévoles des trois océans et parmi eux 32 Polynésiens ont battu le pavé. Le puissant hakka de l’équipe militaire de rugby faisait vibrer les spectateurs. Originale, la démonstration de force des jeunes Pacifique !

Et sauf pour l’accueil. Le 22 juillet à 0h05, les Australiens ont débarqué : viva Australia ! J’ai préparé les chambres ; 60 litres d’eau Vaimato attendent d’éponger leur soif ; 5 kilos de papayes espèrent être dévorées ainsi que 3 kilos de bananes; 5 pots de confitures de goyaves et de jacquier dans le frigo ; il y a aussi un grand sac de cocos verts (excellents pour nettoyer les reins). Vous pensez que nous attendions un avion complet d’Australiens ? Pas du tout, seulement deux couples ! David, Rob et leurs femmes respectives. Oui, le conducteur de notre camion-bus et son assistant lors de nos voyages en Australie. J, le frère de David a tout vu en grand …

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Dans la vallée sacrée

La vallée sacrée est celle du fleuve Urubamba. En la suivant, on y découvre de magnifiques paysages, des fêtes villageoises, des restes archéologiques. En particulier le village arc-en-ciel de Chincheros, village d’une grande homogénéité, puis les salines pré-incas de Maras.

Ollantaytambo est un petit village indien installé au milieu de ruines précolombiennes. La forteresse  qui domine le village  a été bâtie à l’apogée de l’Empire Inca ; elle  est installée au sommet d’un escarpement surveillant l’entrée nord-ouest de la vallée sacrée. C’était un grand temple où les derniers souverains incas venaient peut-être de temps à autre avec la cour et les dignitaires. Un centre thermal ou un lieu sacré ? Les « magasins », accrochés au roc et adossés les uns aux autres étaient des constructions allongées et quadrangulaires, dotées de nombreuses fenêtres et devaient être coiffées d’un toit. Probablement des réserves pour denrées alimentaires.

A Pisac, c’est dimanche, jour de marché ! Après Machu Picchu, Pisac est le site archéologique inca le plus complet. On y voit plusieurs séries de terrasses agricoles, des habitations, des entrepôts défendus par des tours et forteresses. Le groupe monolithique qui domine l’ensemble serait un intihuatana (endroit où l’on attache le soleil). Ce quartier sacré aurait servi d’observatoire astronomique. Les constructions sont protégées par une enceinte et disposées sur trois terrasses. Les plus remarquables sont le temple du Soleil qui renferme un calendrier solaire et le temple de la Lune aux grandes portes en forme de trapèze. La vue depuis l’Intihuatana est splendide.

Les terrasses cultivées sont une des caractéristiques du monde inca dont l’économie reposait essentiellement sur l’agriculture. C’est probablement aux Huaris et à d’autres cultures plus ancienne que les Incas ont emprunté les techniques d’irrigation et de drainage des terrasses cultivées qui leur ont permis d’asseoir leur puissance économique sur les produits  de la terre. Parmi les quelques 40 plantes cultivées par les Incas dans leurs champs, citons : la pomme de terre, le maïs, les haricots, le manioc, l’arachide, le poivron, la tomate, le cacao, le riz de montagne, la courge, produits consommés régulièrement !

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Ile du Soleil et La Paz

Nous arrivons sur la presqu’île bolivienne de Copacabana au bord du Lac Titicaca. La visite de la cathédrale s’impose. La vente de l’eau bénite, c’est à droite. Très joli monument recouvert de faïences. Les visiteurs désirent-ils une voiture, une maison ? Il suffit de le demander à la vierge noire et de déposer un cierge.

Un catamaran nous mène à la Isla del Sol (l’île du Soleil). Elle abrite d’intéressantes ruines précolombiennes : le complexe culturel Intiwata. Selon la tradition orale, le dieu Soleil se serait réfugié lors du « Chamaj Pacha », le temps du déluge et de l’obscurité. Manco Kapac et Mama Okilo, ses enfants, débutèrent ici le périple qui les amènera plus tard à fonder Cuzco.

Retour sur la terre ferme et direction La Paz, 4200 m d’altitude. Capitale administrative, fondée le 20 octobre 1548 par l’Espagnol de Mendoza, elle est la capitale la plus haute du monde. C’est aussi la seule ville où les riches, au lieu d’être en haut de la ville, résident tout en bas (où l’altitude se fait moins sentir) et les pauvres tout en haut ! Elle est entourée d’une centaine de pics enneigés de plus de 5000 m de haut et est dominée par l’Illimani.

La ville est riche en marchés. Il existe même un mercado de los Brujos, un marché des sorciers. On trouve là des herbes, des pierres magiques, des potions, des fœtus de lamas, tout pour soigner les maux. Le mercado de Buenos Aires est un marché aux spécialités par rues. En principe, les mercredis et samedis s’y déroule le Thanta Khatou où l’on vous vendra des marchandises volées. Et si vous n’avez pas le cœur sensible vous pourrez visiter la rue de la viande !

La vallée de la Lune est située à 12 km du centre. C’est un canyon dont les eaux ont érodé la roche en centaines de cheminées de fées et pitons filiformes.

De La Paz, nous nous rendons à Puno, 3870 m, visiter les ruines de Tiahuanaco. Une architecture monumentale. A l’intérieur du temple semi-souterrain de Tiahuanaco, les effrayantes têtes sculptées rappellent les têtes massues de Chavin de Huantar.

Il existait certainement un lien entre les cultes célébrés dans les deux centres religieux. Le centre du patio est occupé par trois monolithes. La culture Tiwanaku se développera durant 3000 ans à partir de la région du lac Titicaca. Cette civilisation répandit dans les Andes son savoir-faire dans les domaines de l’agriculture, des mathématiques, de l’astronomie, de l’ingénierie et disparaîtra mystérieusement au cours du 11e siècle.

Les Aymaras, en parfait accord avec leur environnement andin et lacustre, obtinrent de très hauts rendements agricoles grâce à leur irrigation, les suka collos, et à la maîtrise de la culture d’un précieux tubercule, la pomme de terre. Puno est l’embarquement pour les Iles flottantes des Ouros et l’île de Taquilé.

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Les Incas du Pérou

On ne connaît pas l’origine des Incas. Certains les font venir des hautes plaines de l’Amazonie, d’autres du Lac Titicaca… Les Incas ont fondé vers 1200 Cuzco, « le nombril du monde » en quechua. Le grand temple du Soleil est devenu les fondations du monastère Santo Domingo. Douze dynasties incas se seraient succédé à Cuzco. Atahualpa appartiendrait à la treizième. Le premier Inca historique est Pachaculec-Inca-Yupan (1438-1471). « Renversement de l’ordre du monde » signifierait son nom. Les Espagnols découvrirent la ville de Cuzco rebâtie par lui.

Les Incas dominaient un immense empire couvrant le Pérou, la Bolivie, l’Equateur, et une partie de la Colombie et du Chili d’aujourd’hui. Les traces de cette civilisation sont partout, chez les gènes des 10 millions d’indigènes parlant le quetchua, dans les objets des musées, dans les ruines du bâti antique. Les Incas ont beaucoup apporté à l’agriculture et à l’architecture. Comment ne pas être admiratif devant les ouvrages colossaux constitués d’impressionnantes pierres taillées et ajustées qu’on ne peut, entre deux blocs, y glisser la lame d’un couteau ?

Sur les crêtes, ils ont construit Machu Picchu, Pisac, Sacsahuaman, des cités-forteresses approvisionnées et surveillées par tout un réseau de chemins et de sentiers d’approche. Les travaux des routes commencés sous la civilisation Chimu se sont poursuivis. Ils les ont agrandis jusqu’à 11 000 km, une route suivant la côte, l’autre la cordillère.

Si la religion catholique a été adoptée par la majorité des peuples d’Amérique du Sud, l’animisme a conservé ses rites millénaires : lorsqu’on passe un col, vous verrez votre chauffeur descendre de voiture ou de car et poser un caillou blanc sur un tas déjà constitué. Le jour des morts on fait libation sur les tombes, on apporte aux défunts à manger, on trinque avec la tequila, on leur fait donner une aubade. Le lutin bossu et grassouillet (ekeko), censé apporté la richesse, est béni ainsi que tous les autres le 24 janvier à La Paz. Le demi-dieu de l’abondance est porteur de tous les désirs en représentations miniatures tels enfants, nourriture, argent, automobile Mercédès. Les poupées du Pérou en laine, coton et fibres végétales n’étaient pas des jouets mais des idoles rituelles. Les guérisseurs font toujours office de médecins.

La musique demeure l’une des plus belles qu’il m’ait été donnée d’entendre que ce soit dans les auberges, les fêtes populaires, sur une place publique.

Les tambours, (cajas et tinyas), percussions, sifflets, ocarina, flûtes de pan (antaras), flûtes droites (quenas), guitare et violon accompagnent les chanteurs et danseurs de valse créole et marinera.

Hiata de Tahiti

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Au pays du grand nuage blanc

Article repris par Medium4You.

Hiata, de Tahiti, est allée se promener en janvier de cette année en Nouvelle-Zélande avec ses amis tahitiens. voici le récit de son voyage, en plusieurs épisodes.

La Nouvelle-Zélande est l’un des pays les plus isolés au monde. Les Maoris, premiers arrivants, la nommèrent Aotearoa « la terre du long nuage blanc ». Les îles de la Nouvelle-Zélande s’étirent entre 34° et 47° de latitude Sud et se situent sur le passage des 40ème rugissants, nommés ainsi pour ces vents qui balaient ces régions australes. La mer de Tasmanie, large de 1600 km, les sépare de la terre la plus proche, l’Australie. La fougère argentée (ponga) l’un des symboles du pays apparaît sur le maillot des All Blacks ! Il y a environ 180 millions d’années, la Nouvelle-Zélande appartenait à un vaste continent le Gondwana, avec les actuels Antarctique, Australie, Inde, Afrique et Amérique du Sud. La Nouvelle-Zélande se situe dans le Pacifique Sud à 1600 km de l’Australie et à 10 000 km de San Francisco et de Tokyo.

Deux îles principales (île du Nord et île du Sud), superficie 270 530 km², population 4,2 millions d’habitants. Les deux tiers des Néo-Zélandais habitent l’île du Nord. La capitale administrative et politique, Wellington, se trouve à la pointe méridionale de l’île du Nord, au centre géographique du pays. Le détroit de Cook, large de 20 km, sépare les deux îles. La Nouvelle-Zélande est une nation d’immigrants et la dernière terre à avoir été peuplée par l’homme. Il y a environ 1000 ans les Maoris s’y installèrent, les Européens il y a 350 ans seulement !

La Nouvelle-Zélande est subtropicale au nord, tempérée ou fraîche au sud, arrosée à l’Ouest et sèche à l’Est. Les volcans sont au centre de l’île du nord. Les paysages de Nouvelle-Zélande sont très variés. Sur son socle rocheux vieux de 600 millions d’années, des plissements, des éruptions volcaniques, des tremblements de terre ont façonné les paysages. La formation des Southern Alps ne date que de 3 millions d’années ! Le littoral s’étire sur 18 200 km, la lande couvre 10% du territoire, la Bay of Islands renferme 144 îles, les fjords au Sud-ouest du pays entaillent la côte sur 1000 km. Le plus profond descend à 420 m et le plus long mesure 40 km.

Faune et flore fascinent le visiteur : kauri aux immenses troncs rectilignes dans le Northland, kiwi au long bec fouisseur, ponga ou fougère argentée, gecko, manuka ou tee-tree, nestor kea, espèce de perroquets réputés pour leur intelligence, albatros royal à l’envergure majestueuse, pohutukawa ou arbre de noël des néo, otarie à fourrure…

62% des terres du pays sont consacrées à l’élevage et à l’agriculture et assurent 50% des revenus à l’exportation : pommes, poires, pêches et autres fruits à noyaux, raisins, pamplemousses, avocats, pepino, kaki, tamarillo, framboises, fraises, mûres, cerises ; des céréales : blé, avoine et orge ; autres ail, lavande, tournesol peignent la campagne. L’élevage ovin (40 millions de moutons, bovin (9 millions) donne laine, viande, produits laitiers, peaux. Le cerf est élevé dans 5000 fermes pour sa viande et ses bois très recherchés en Asie. Chèvres, autruches, émeus complètent le tableau.

Les vins de Nouvelle-Zélande sont renommés. La plantation des premières vignes remonte à 1830 et des Français ont planté en vigne la presqu’île de Banks dans le Canterbury (île du Sud) dès 1840. Le Northland élève le merlot, les environs d’Auckland le cabernet sauvignon. Le Marlborough (île du Sud) est la plus importante région viticole de Nouvelle-Zélande. Il produit des sauvignons blancs, des chardonnay et des mousseux. Le Wairarapa (Sud de l’Ile du Nord) offre son pinot noir. L’Otago (île du Sud) domine le marché mondial du pinot noir malgré ou grâce à une saison de maturation courte. Des Croates de Dalmatie sont à l’origine de la modernisation de la viticulture près du centre d’Auckland (île du Nord). Note personnelle : le pinot noir a été de loin mon préféré parmi les vins que j’ai goûtés ! J’attribuerai – avec beaucoup de modestie vu mes capacités de goûteur- une meilleure note aux vins Nouvelle-Zélande qu’à leurs cousins australiens.

Hiata de Tahiti

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