Yves Bontaz, Le bal est fini

Un ouvrier devenu chef d’entreprise, un provincial de Haute-Savoie devenu entrepreneur mondial, lance à sa retraite un brûlot politique. Il déclare que rien ne va plus et que le petit jeu des politocards sortis de la même école et vivant dans les mêmes milieux a assez duré. L’échec retentissant de François Hollande en est la preuve : place à la société civile ! Elle est aussi compétente que les politiciens professionnels, surtout ceux qui prétendent parler au nom des « travailleurs » : Mélenchon, « que sait-il des travailleur» p.46 pour avoir passé seulement trois mois dans une usine dans sa jeunesse ?

L’essai est plein de bon sens et de gros réalisme. Il dit tout haut ce que tout le monde (sauf les politiciens) pense tout bas : finies les réformes, il faut un « choc » ! Mais, après le Brexit et Trump, la démagogie menace ; il faut donc que les initiatives citoyennes émergent, malgré la crainte de donner des parrainages (Yves Bontaz ne sera pas pour la troisième fois candidat aux présidentielles, faute d’avoir obtenu les 500 parrains représentatifs de chaque département).

Après une longue introduction biographique de 40 pages, le constat court sur 62 pages et il est sans appel : « Ni la gauche, désinvolte sous Mitterrand, Jospin et Hollande, ni la droite, prétentieuse sous Chirac et Sarkozy, n’ont eu le courage d’enclencher une seule réforme, pas une seule, susceptible d’améliorer notre compétitivité » p.49. En cause ? « Le dédain de l’économie appliquée, le dédain du bon sens économique » p.49. La France a 90 fonctionnaires pour 1000 habitants alors que l’Allemagne en a moins de 60 ; les Français payent 44% d’impôts en moyenne contre 26% pour les Suisses, 34% pour la moyenne OCDE et 38% en Allemagne ; les cotisations sociales représentent 11.6% du PIB français contre 6.6% en Allemagne et 4.1% au Royaume-Uni. Qui voulez-vous concurrencer avec ces boulets ?

L’Etat omniprésent sait mieux que vous ce qui vous convient ; il dépense sans compter, il gaspille plus que les voisins ; il handicape l’économie – y compris la demande des ménages. Un dirigeant d’entreprise fait le calcul : « Quand je donne 100€ bruts à l’un de mes salariés, ça me coûte, avec les charges patronales, 150€. Sur ces 100€ bruts, ce salarié va percevoir 70€ nets. Comme il va être imposé sur le revenu à environ 30% – soit 21€ d’impôts – il va donc lui rester 49€ de pouvoir d’achat. Mais (…) ce qu’il va dépenser sera soumis à une TVA de 20%. Ce qui fait qu’au final son pouvoir d’achat réel ne sera que de 39€. (…) L’Etat prélevant 110€ au passage » p.67. Imparable ! Et on se lamente encore sur la « misère » des services publics ? Ne serait-ce pas la misère de la gestion fonctionnaire ignare en économie ? De l’irresponsabilité hiérarchique où chacun se renvoie la balle ? Du mépris des citoyens qui ne contrôlent rien ? De la démagogie des syndicats – surtout la CGT qui rêve encore et toujours du Grand soir – et qui ne représentent qu’à peine 7% des salariés ?

Qui crée de la richesse ? – Les entreprises. « Faute d’offrir des emplois, on offre des aides sociales, mais cet argent que l’Etat distribue, il le reprend par le biais des prélèvements fiscaux (…) frein pour sortir de la crise » p.85.

Alors, que faire ?

Après 12 pages sur « la démocratie pervertie » et 12 pages sur « une diplomatie à la dérive » (où les interventions de François Hollande en Syrie, Irak et Mali ont suscité, selon l’auteur, les attentats islamistes), 12 pages de propositions.

Elles n’ont rien de révolutionnaires et prennent ici ou là les bonnes ou les moins bonnes idées en 19 mesures :

  1. Baisser les charges patronales de 20% sur tous salaires et de 30% jusqu’à 1.6 fois le SMIC.
  2. Augmenter la TVA de 2% pour compenser et taxer les importations (et éviter les délocalisations).
  3. Baisser l’impôt sur les sociétés à 25%.
  4. Supprimer l’ISF.
  5. Revenir sur la hausse des frais de succession Hollande.
  6. Réformer l’enseignement de l’économie
  7. Favoriser l’apprentissage.
  8. Réduire la vie politicienne à deux mandats au maximum.
  9. Baisser le nombre de fonctionnaires en n’en remplaçant qu’un sur trois (hors régalien).
  10. Etablir deux jours de carence pour les fonctionnaires, comme dans le privé.
  11. Limiter le droit de grève dans les services publics.
  12. Baisser les prestations chômage après 1 an.
  13. Supprimer les 35h pour revenir à 39 sans hausse de salaire.
  14. Sanctuariser l’agriculture.
  15. Relancer la révolution verte.
  16. Etablir des statistiques ethniques pour en finir avec les fantasmes et adapter les politiques.
  17. Faire du handicap une cause nationale.
  18. Incarcérer les condamnés à une peine inférieure à 2 ans.
  19. Conduire la politique étrangère sur les seuls intérêts de la France et pas sur « la morale ».

Voilà qui fleure bon le « radicalisme » florissant sous la Troisième République : du bon sens travailleur, le citoyen contre les pouvoirs, la base et la province contre les élites de Paris. Mais aussi le programme de François Fillon, dont il s’avère le plus proche, avec un côté Emmanuel Macron pour le réalisme économique.

Yves Bontaz a réussi à 14 ans le concours de l’Ecole nationale d’horlogerie en candidat libre avec son jumeau et en est sorti major à 19 ans. Il s’est mis à son compte dans le décolletage et a travaillé très vite pour les grandes marques automobiles, fondant des filiales dans divers pays. Son dogme : productivité et qualité ; sa méthode : s’organiser et intervenir où cela ne va pas. « Une théorie inverse de celle du politique » – persiffle-t-il p.28. Il a fondé un orphelinat, une école et un dispensaire à Madagascar, et un centre pour autistes en France. Il a donné des emplois à des milliers de gens, en Haute-Savoie, en France et dans le reste du monde. « Je suis un patron qui jamais, jamais, n’a oublié de privilégier le facteur humain dans la gestion de ses sociétés » p.35.

Tout le contraire des François Hollande et autres Nicolas Sarkozy, n’est-ce pas ?…

Yves Bontaz, Le bal est fini – Le programme choc d’un esprit libre, 2017, édition Jean Picollec, 144 pages dont 6 tableaux et graphiques, €13.99


En savoir plus sur argoul

Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.

Catégories : Livres, Politique | Étiquettes : , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,

Navigation des articles

Les commentaires sont fermés.