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Yves Bontaz, Le bal est fini

Un ouvrier devenu chef d’entreprise, un provincial de Haute-Savoie devenu entrepreneur mondial, lance à sa retraite un brûlot politique. Il déclare que rien ne va plus et que le petit jeu des politocards sortis de la même école et vivant dans les mêmes milieux a assez duré. L’échec retentissant de François Hollande en est la preuve : place à la société civile ! Elle est aussi compétente que les politiciens professionnels, surtout ceux qui prétendent parler au nom des « travailleurs » : Mélenchon, « que sait-il des travailleur» p.46 pour avoir passé seulement trois mois dans une usine dans sa jeunesse ?

L’essai est plein de bon sens et de gros réalisme. Il dit tout haut ce que tout le monde (sauf les politiciens) pense tout bas : finies les réformes, il faut un « choc » ! Mais, après le Brexit et Trump, la démagogie menace ; il faut donc que les initiatives citoyennes émergent, malgré la crainte de donner des parrainages (Yves Bontaz ne sera pas pour la troisième fois candidat aux présidentielles, faute d’avoir obtenu les 500 parrains représentatifs de chaque département).

Après une longue introduction biographique de 40 pages, le constat court sur 62 pages et il est sans appel : « Ni la gauche, désinvolte sous Mitterrand, Jospin et Hollande, ni la droite, prétentieuse sous Chirac et Sarkozy, n’ont eu le courage d’enclencher une seule réforme, pas une seule, susceptible d’améliorer notre compétitivité » p.49. En cause ? « Le dédain de l’économie appliquée, le dédain du bon sens économique » p.49. La France a 90 fonctionnaires pour 1000 habitants alors que l’Allemagne en a moins de 60 ; les Français payent 44% d’impôts en moyenne contre 26% pour les Suisses, 34% pour la moyenne OCDE et 38% en Allemagne ; les cotisations sociales représentent 11.6% du PIB français contre 6.6% en Allemagne et 4.1% au Royaume-Uni. Qui voulez-vous concurrencer avec ces boulets ?

L’Etat omniprésent sait mieux que vous ce qui vous convient ; il dépense sans compter, il gaspille plus que les voisins ; il handicape l’économie – y compris la demande des ménages. Un dirigeant d’entreprise fait le calcul : « Quand je donne 100€ bruts à l’un de mes salariés, ça me coûte, avec les charges patronales, 150€. Sur ces 100€ bruts, ce salarié va percevoir 70€ nets. Comme il va être imposé sur le revenu à environ 30% – soit 21€ d’impôts – il va donc lui rester 49€ de pouvoir d’achat. Mais (…) ce qu’il va dépenser sera soumis à une TVA de 20%. Ce qui fait qu’au final son pouvoir d’achat réel ne sera que de 39€. (…) L’Etat prélevant 110€ au passage » p.67. Imparable ! Et on se lamente encore sur la « misère » des services publics ? Ne serait-ce pas la misère de la gestion fonctionnaire ignare en économie ? De l’irresponsabilité hiérarchique où chacun se renvoie la balle ? Du mépris des citoyens qui ne contrôlent rien ? De la démagogie des syndicats – surtout la CGT qui rêve encore et toujours du Grand soir – et qui ne représentent qu’à peine 7% des salariés ?

Qui crée de la richesse ? – Les entreprises. « Faute d’offrir des emplois, on offre des aides sociales, mais cet argent que l’Etat distribue, il le reprend par le biais des prélèvements fiscaux (…) frein pour sortir de la crise » p.85.

Alors, que faire ?

Après 12 pages sur « la démocratie pervertie » et 12 pages sur « une diplomatie à la dérive » (où les interventions de François Hollande en Syrie, Irak et Mali ont suscité, selon l’auteur, les attentats islamistes), 12 pages de propositions.

Elles n’ont rien de révolutionnaires et prennent ici ou là les bonnes ou les moins bonnes idées en 19 mesures :

  1. Baisser les charges patronales de 20% sur tous salaires et de 30% jusqu’à 1.6 fois le SMIC.
  2. Augmenter la TVA de 2% pour compenser et taxer les importations (et éviter les délocalisations).
  3. Baisser l’impôt sur les sociétés à 25%.
  4. Supprimer l’ISF.
  5. Revenir sur la hausse des frais de succession Hollande.
  6. Réformer l’enseignement de l’économie
  7. Favoriser l’apprentissage.
  8. Réduire la vie politicienne à deux mandats au maximum.
  9. Baisser le nombre de fonctionnaires en n’en remplaçant qu’un sur trois (hors régalien).
  10. Etablir deux jours de carence pour les fonctionnaires, comme dans le privé.
  11. Limiter le droit de grève dans les services publics.
  12. Baisser les prestations chômage après 1 an.
  13. Supprimer les 35h pour revenir à 39 sans hausse de salaire.
  14. Sanctuariser l’agriculture.
  15. Relancer la révolution verte.
  16. Etablir des statistiques ethniques pour en finir avec les fantasmes et adapter les politiques.
  17. Faire du handicap une cause nationale.
  18. Incarcérer les condamnés à une peine inférieure à 2 ans.
  19. Conduire la politique étrangère sur les seuls intérêts de la France et pas sur « la morale ».

Voilà qui fleure bon le « radicalisme » florissant sous la Troisième République : du bon sens travailleur, le citoyen contre les pouvoirs, la base et la province contre les élites de Paris. Mais aussi le programme de François Fillon, dont il s’avère le plus proche, avec un côté Emmanuel Macron pour le réalisme économique.

Yves Bontaz a réussi à 14 ans le concours de l’Ecole nationale d’horlogerie en candidat libre avec son jumeau et en est sorti major à 19 ans. Il s’est mis à son compte dans le décolletage et a travaillé très vite pour les grandes marques automobiles, fondant des filiales dans divers pays. Son dogme : productivité et qualité ; sa méthode : s’organiser et intervenir où cela ne va pas. « Une théorie inverse de celle du politique » – persiffle-t-il p.28. Il a fondé un orphelinat, une école et un dispensaire à Madagascar, et un centre pour autistes en France. Il a donné des emplois à des milliers de gens, en Haute-Savoie, en France et dans le reste du monde. « Je suis un patron qui jamais, jamais, n’a oublié de privilégier le facteur humain dans la gestion de ses sociétés » p.35.

Tout le contraire des François Hollande et autres Nicolas Sarkozy, n’est-ce pas ?…

Yves Bontaz, Le bal est fini – Le programme choc d’un esprit libre, 2017, édition Jean Picollec, 144 pages dont 6 tableaux et graphiques, €13.99

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Évasion fiscale et secret bancaire

Il est de bon ton aujourd’hui de confondre les deux dans l’opprobre, tant la moraline imbibe tout le médiatique. Mais il n’est pas exact d’amalgamer le tout en « paradis fiscal », comme le font si hardiment les Don Quichotte de la vertu.

1/ Une découverte ? – Certes non !

Le secret bancaire n’est pas nouveau, il fait partie de ces secrets professionnels dont le « secret de la confession » et le « secret médical » sont les plus emblématiques. Est-il immoral de ne pas appliquer « la transparence » à tout ce qui concerne la vie privée ou les affaires ? Les secrets de fabrication et de montages financiers doivent être protégés des concurrents pour être efficaces – tout comme la stratégie militaire.

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Les montages, trusts et fondations, étaient connus largement depuis des années… de ceux qui voulaient le savoir. Pardon de me citer, mais dans mon livre Gestion de fortune, publié en 2009, tout ce qui apparaît aujourd’hui comme des « révélations » aux médiatiques était expliqué en détail pages 147 à 181. Des informations étaient disponibles sans problème sur Internet. Encore fallait-il chercher, et vouloir le savoir.

Quand aux zones franches ou « paradis fiscaux » pour les entreprises, tous les États ont les leurs : le Delaware, le Wyoming et la Floride pour les États-Unis ; les Caïmans, Jersey, Gibraltar, les îles Vierges pour l’Angleterre ; l’Irlande le Luxembourg et l’Autriche pour l’Europe ; Hongkong, la Suisse, Singapour, Dubaï et l’Estonie pour tous… Et même Andorre pour la France, où l’alcool et le tabac sont moins taxés, et Monaco où les clubs de foot payent beaucoup moins d’impôts qu’en métropole !

2/ Pourquoi l’évasion fiscale ?

L’optimisation fiscale n’est pas un gros mot, mais la saine gestion de son patrimoine, ou de son bilan d’entreprise. Payer l’impôt, oui, le payer injustement, non. Il y a plusieurs raisons à l’évasion fiscale :

Le gaspillage : La réticence de nombre de contribuables français à payer plus d’impôts n’est pas celle des libertariens Américains pour qui l’État est un parasite ; les Français aiment l’État, mais ils aimeraient surtout qu’il soit moins gaspilleur et mieux organisé. Pourquoi cette productivité qu’on exige depuis trois décennies de chaque salarié du privé n’est-elle pas exigée aussi des fonctionnaires d’administrations publiques ? La perspective de payer pendant deux générations la gabegie des 40 dernières années en fait s’expatrier plus d’un.

L’hypocrisie : L’idée fait son chemin et les « leçons de morale » assénées sans cesse par les politiciens finissent par agacer. Ce n’est pas par hasard si un certain ministre des Finances est tombé récemment pour son compte dissimulé en Suisse : un banquier français résidant à Genève a clairement dit sur la radio nationale qu’il aidait les enquêteurs français parce qu’il ne supportait plus l’hypocrisie des politiques, le deux poids deux mesures de la parole et des actes.

L’injustice : Malgré le consentement à l’impôt pour les nécessités d’administration et de redistribution sociale, les salariés qui ont acquis à force d’épargne un bien, ou les créateurs d’entreprise qui ont fondé une société dont les produits sont utiles et qui créent des emplois, comprennent mal qu’on les taxe plus que dans les pays voisins – pour des services publics plutôt médiocres en comparaison.

Cotisations sociales sur le salaire brut, impôt sur le revenu sur le net, CSG sur le tout, TVA sur toute dépense, taxe sur l’alcool, le tabac, les sodas, les assurances, taxe d’habitation et taxe foncière, taxes sur l’épargne, impôt sur la fortune, sur les plus-values, sur la succession… la France est le pays qui taxe le plus le capital et l’un des rares qui conserve un ISF en Europe, tout en empilant les niches fiscales peu compréhensibles – et en commençant à remettre en cause les retraites. Mieux vaudrait un impôt faible largement réparti qu’un tel empilement.

Comment comprendre qu’un investisseur prenne 100% du risque sur la création d’une entreprise ou l’achat d’une action – et que le fisc lui ponctionne jusqu’à 75% du gain final ? Comment comprendre que des ménages arrivent à payer en impôts plus de 100% de leurs revenus annuels ?

L’instabilité fiscale chronique : Par idéologie, ou parce qu’il faut très vite de l’argent dans le puits sans fond des dépenses publiques, l’impôt est modifié : pas moins de 23 fois en 30 ans pour la réduction accordée aux dons à des œuvres d’intérêt public par exemple ! L’investissement d’entreprise comme la gestion d’un patrimoine privé ont besoin de la durée pour un calcul correct du risque. L’hyperactivité fiscale doit s’apaiser pour que le financement de projets puisse redevenir « normal » en drainant « normalement » l’épargne – selon le mantra d’un récent candidat à la Présidentielle.

3/ L’évasion fiscale fait diversion sur le secret bancaire

L’éthique de secret professionnel des banquiers n’est qu’un outil, et nul ne peut accuser le marteau si l’on se tape sur les doigts. Il est donc – comme la langue d’Ésope – la meilleure et la pire des choses. Les politiciens agitent l’immoralité des fraudeurs particuliers, suivis aveuglément par les médias, tandis que le danger systémique – pourtant le pire – est soigneusement passé sous silence.

Le secret bancaire a son utilité, tous les pays y trouvent intérêt.

Les États en premier, qui peuvent financer ainsi leurs opérations discrètes sur « fonds secrets ». Et pousser leurs champions industriels nationaux, voire signer de gros contrats en « intéressant » les dirigeants – ce qui s’appelle la corruption.

Les partis politiques, qui trouvent à l’extérieur ce que les limitations de la loi interdisent dans le pays pour financer les campagnes électorales et l’agitation idéologique.

Les entreprises internationales, qui peuvent légalement optimiser leur compte d’exploitation selon les principes d’efficacité de la gestion ; mais qui peuvent également créer des coentreprises ou racheter des cibles avec la discrétion nécessaire pour ne pas faire monter les enchères.

Les mafias évidemment, qui blanchissent l’argent sale et financent la corruption.

Les particuliers enfin, qui profitent des circuits, mais n’en sont pas les principaux bénéficiaires. Ils apparaissent, après l’affaire Cahuzac, comme les boucs émissaires commodes de l’incurie des contrôles, de l’impéritie politique et des intérêts croisés – voire des liens incestueux entre politique et finance particulièrement forts en France où les dirigeants sortent en majorité de trois grandes écoles seulement.

Mais l’opacité des transactions dans les territoires souverains empêche tout contrôle des flux et des montants de capitaux engagés. Hedge funds, banquiers d’affaires, capital-risque, sociétés hors bilan, spéculateurs sur les matières premières créent une économie parallèle non régulée qui peut exploser à tout moment.

Qui détient la dette française, ou américaine ? Pour combien ? Qui détient les produits dérivés à effet de levier en cas de baisse ou de hausse des taux ? Qui vend quoi à qui ? Nul ne le sait dans cette « banque de l’ombre ».

Au total, personne n’a vraiment intérêt à voir disparaître le secret bancaire, malgré le danger que représente son opacité et même si les États sont aujourd’hui plus que jamais à la recherche de fonds pour rembourser leurs dettes.

  • Le secret bancaire est une liberté, contre l’État Big Brother, contre l’espionnage du concurrent, la jalousie du voisin, ou les visées de la belle-mère.
  • Le secret bancaire est aussi un risque, comme toute liberté : celui d’une énième bulle de la finance – très grave cette fois car les États n’ont plus les moyens d’y faire face.

L’évasion fiscale doit être combattue mais plus encore le risque systémique.

Pour éviter que le secret serve à l’évasion, il serait nécessaire que les États écoutent un peu mieux leurs contribuables, particuliers comme entreprises, qu’ils mettent fin à l’insécurité fiscale, qu’ils jouent la coordination internationale et qu’ils proposent une porte de sortie honorable, même si l’on ne veut pas user par fausse vertu du mot tabou « d’amnistie ».

Mais pour éviter la banque de l’ombre, seuls des accords internationaux d’interdiction sont possibles. Qui le veut vraiment ?

Au fond, la chasse aux particuliers fraudeurs est un affichage commode qui masque la volonté de ne rien faire de la plupart des politiques…

L’auteur de cette note a passé plusieurs dizaines d’années dans les banques. Il a écrit ‘Les outils de la stratégie boursière‘ (2007) et ‘Gestion de fortune‘ (2009). Il se consacre désormais aux chroniques, à la formation et à l’enseignement dans le supérieur.

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Le malentendu Mélenchon

La France vaniteuse et légère encense un mouton noir parmi une pléthore de moutons blancs en costume-cravate. L’inverse de l’Italie où la population comme la classe politique ont pris conscience de la gravité de la crise, après des années d’illusionnisme Berlusconi. Jean-Luc Mélenchon veut tout et son contraire ; il le tonitrue en brandissant le drapeau rouge des traditions. Dans ce folklore, beaucoup se reconnaissent… mais ils sont trop différents pour jamais s’amalgamer. Mélenchon pratique la politique « à l’ancienne », comme on le dit de l’andouillette ; mais ses partisans sont pour la plupart des jeunes, libertaires anarchistes – uniquement dans le présent.

La raison du bouffon

Les protestataires ne manquent pas dans les pays occidentaux depuis que sévit la crise. Les États-Unis de Bush et de Goldman Sachs ne sont décidément plus un modèle, aussi stupides dans la confrontation des cultures que dans la gestion de l’économie. L’Europe de l’Union est un gros « machin » impuissant qui doit prendre la moindre décision à 27 sans qu’il y ait une quelconque homogénéité. L’Eurozone est une union pratique plus efficace, mais dont le volet de convergence économique et fiscale a été laissé en déshérence par les politiciens de droite comme de gauche depuis Maastricht (1992). Les populations, dopées à l’endettement cigale, se sont trouvées fort dépourvue lorsque la bise fut venue. Elles se croyaient maîtresses du monde, plus avancées moralement, mieux expertes en gestion économique et en innovations… et patatras ! Voilà que l’Inde et la Chine, le Brésil et l’Afrique du sud, commencent à leur tailler des croupières. Certains s’en sortent, avec patience et discipline, conduisant des réformes pour s’adapter dans la durée : la Suède, le Danemark, le Canada, l’Allemagne… D’autres s’effondrent, comme feu l’empire romain : tous les pays riverains de la Méditerranée, dont peut-être la France.

Il y a donc partout des protestataires de l’austérité, du ressentiment contre la finance internationale, les banques, les politiciens en place. Ce sont les Grecs en résistance, les Indignés, les Pirates… et les Mélenchoniens. Car la gauche radicale a régulièrement échoué à rassembler les revendications populaires depuis des décennies. Trop intello, trop hédoniste, trop alter, trop écolo… Mélenchon a le talent de faire croire qu’il gagne, alors qu’il rassemble à peine plus que le total des voix de gauche extrême à chaque élection. Mais il remplit la fonction tribunicienne hier tenue par Georges Marchais puis par Jean-Marie Le Pen. Les proximités sont plus proches que l’on croit. Jean-Luc, comme Jean-Marie, fait haine ; les deux sont des enfants élevés sans père, comme Merah. La crise exacerbe les tensions, pousse donc les partis à la radicalité, ce pourquoi Sarkozy assume la droite, le centre avec Bayrou implose et Hollande flageole. Arrive qui ? La grande gueule « de gauche », franc-maçon que « tout le monde » attend, des bobos intellos aux profs stakhanovistes, et des fonctionnaires moyens aux jeunes en rupture, souvent ouvriers non qualifiés « grâce » à notre merveilleux système scolaire : sénateur socialiste, ex-ministre de Jospin et député européen Mélenchon !

Dans sa bio soigneusement repeignée sur Wikipedia, on apprend que le politicien du peuple a peut-être travailloté comme ouvrier durant ses études (arrêtées à la licence, juste avant les années recherche personnelle), mais qu’il a surtout été élu depuis 1983. A-t-il jamais effectué son service militaire, année « citoyenne » s’il en était ? Silence sur le sujet… Il vit de la politique, est payé par la politique, ne produit que de la politique depuis 30 ans. Que connaît-il du « vrai » monde du travail, de l’entreprise, de la production ? Affectif au point de prendre les expressions des masques nô, licencié de philo, un temps prof, vaguement journaliste, il préfère les grands mots. La révolution, le peuple, l’avenir, la dignité, le citoyen, ça fait bien. Ça chante dans les manifs et les meetings.

Mais pour réaliser quoi ?

Augmenter le SMIC, baisser l’âge de la retraite, distribuer du pouvoir d’achat… mais rester dans l’euro. Comment donc financer la dette abyssale sans les grands méchants marchés financiers ? « Je prends tout » aux riches est un slogan facile, qui ne se réalise qu’une fois s’il advient. Mais alors, plus d’entrepreneurs au-dessus de l’artisan, plus de financement extérieur, plus de convergence européenne – et certainement plus d’euro ! Il faut savoir ce qu’on veut : ou un programme coréen du nord (fermer les frontières et imposer l’égalité par la force) – ou un programme coréen du sud (ouvert au monde et compromis avec les forces mondiales, négociations avec les partenaires européens, et l’enrichissement personnel qui est la seule source du progrès – tous les pays du socialisme « réel » l’ont parfaitement montré).

L’insurrection civique, cela fait joli, mais concrètement ? Qui va canaliser ce vaste foutoir défouloir soixantuitard pour le traduire en intérêt collectif ? Un parti d’avant-garde ? Un leader maximo ? Un néo-Chavez ? Mélenchon se garde bien de trancher, lui qui admire tant Chavez que Morales, lui qui méprise les langues régionales et encense la politique du PC chinois colonisant le Tibet. Autoritaire, centralisateur, jacobin. Ses héros sont Robespierre et Saint-Just, grands humanistes français comme chacun sait. Quand la raison délire, elle n’atteint pas que la finance : sûre du Vrai, du Bon, du Bien, elle cherche à l’imposer à tous, malgré les résistances et les différences. Cela donne le rasoir républicain, la mission coloniale, le j’veux voir qu’une tête ! de l’administration à la française, le communisme léniniste, la Tcheka de Trostki, l’apanage Castro ou Kadhafi… Rien de ce que désire vraiment la base électorale du PDG, ce parti Mélenchon au sigle curieux pour des anticapitalistes.

Pour le comprendre, il faut aller voir ailleurs

Si l’on regarde aux États-Unis, la sociologie électorale montre un divorce croissant entre Boomers et Millenials. Les Boomers sont la génération baby-boom, nés entre 1946 et 1964, majoritairement Blancs anglo-saxons protestants et éduqués. Les Millenials sont la génération portable-mobile-internet-jeux vidéo, nés entre 1980 et 2000, beaucoup plus multiculturels, moins éduqués et racialement divers. Les premiers prennent leur retraite, les seconds entrent dans la vie active. La politique va en être changée. Les communicants agacent, puisqu’ils n’en savent pas plus que le citoyen lambda au vu des années Bush qui vont des attentats du 11-Septembre à la crise financière, en passant par l’occupation de l’Irak. L’Amérique, florissante sous Clinton, est en ruine lorsqu’arrive Obama. Que veulent les Millénials ? Revenir aux valeurs de l’Amérique, au self-made man et à l’esprit novateur. Mais avec plus d’État qui règle (et moins de politiciens). Cela donne à gauche Occupy Wall Street et à droite les Tea parties. Tout cela très libertarien…

Si l’on regarde en Allemagne, voici que monte le parti Pirate, qui entre aux parlements régionaux de Berlin et de Sarre. Il allie les alter, les Verts, les geeks et les protestataires. Tous militent pour la libéralisation d’Internet et leur seul programme est « méfiance » envers les politiciens. Leur insurrection civique consiste à prôner la transparence de tous les débats politiques et sociaux via le net. L’approfondissement du libéralisme vers l’anarchie plutôt que la centralisation bismarckienne…

Si l’on regarde en Espagne, Los Indignados pacifiques et vaguement hippies se radicalisent, aidés par les Black Blocs aux marteaux brise-vitrines. Anarchistes, antimondialistes, égalitaires et libertaires, ils sont contre la contrainte financière, les puissances anonymes et pour reconquérir la politique. Pas vraiment jacobins !…

En tout cela, un point commun : l’hyper individualisme postmoderne. Mélenchon, avec ses revendications collectivistes à l’ancienne fait vieux ringard face à ces courants. Le système politique doit se restructurer, la liberté personnelle est cruciale, l’exigence de participation citoyenne plus criante comme l’avait déjà montré en 2007 Pierre Rosanvallon. Les partis traditionnels échouent à convaincre. En cela Mélenchon a raison d’appeler à faire de la politique autrement… mais pas comme il la voudrait, pourtant.

Le malentendu

Quand on est né en 1951 on n’est plus vraiment jeune, bien qu’empli de ressentiment envers l’autorité parce que le père a divorcé quand il avait 11 ans, parce que le PS l’a « humilié » en donnant un faible score à son courant. Quand on a occupé depuis trente ans les fromages de la République, nanti d’un patrimoine frisant l’ISF et d’un revenu égal à cinq SMIC. Quand on a voté oui à Maastricht et qu’on reste député européen. Quand on se dit trotskiste lambertiste (dont une fraction a soutenu Marcel Déat en 1941, socialiste autoritaire devenu collabo parce qu’antilibéral et anti-anglais, ministre du Travail de Pétain). Quand on est pétri de toutes ces contradictions, comment convaincre dans la durée ? Le rassemblement des mélenchonistes apparaît bien hétéroclite : geeks du divertissement immédiat qui admirent le bouffon comme naguère Coluche ; bobos du « pas assez à gauche ma chère » de 2002 qui ont éjecté Jospin sans même y penser au profit de Le Pen pour le second tour ; nostalgiques de leur jeunesse gauchiste 68 bien enfuie ; volontaristes politiques qui croient encore qu’il suffit de dire « je décide » ; écolos militants qui prônent l’austérité morale ; cégétistes anars qui vivent la lutte des classes à ras d’usine ; militants organisés du parti communiste qui veulent recycler leur méthode…

Il y a une vraie interrogation sur la politique. Elle a été portée par Ségolène Royal en 2007, par les Verts de Cohn-Bendit aux dernières Européennes de 2009 et, hors de France, par le mouvement Occupy Wall Street, les Grecs en résistance, Los Indignados et les Pirates – sans parler de l’humoriste élu maire de Reykjavik en Islande. De la transparence, de la participation, du libertaire : loin, très loin, de Mélenchon ! Qu’il soit à la mode est-il un effet de la société du spectacle ? Son « message » une communication de plus ? Un malentendu ?

Au fond, à qui profite le crime ?

Mais à bon entendeur… La montée Mélenchon profite à Nicolas Sarkozy : tout comme François Mitterrand avait excité le Front national pour faire perdre la droite, tout comme la gauche caviar avait snobé Jospin pour faire advenir Le Pen en avril 2002, la surenchère Mélenchon repousse le centre vers Nicolas Sarkozy au détriment de François Hollande. Et qu’on ne vienne pas m’objecter qu’au second tour ce petit monde va se rallier : avez-vous jamais vu des têtes de linotte penser au-delà du présent immédiat ? C’est l’abstention à gauche qui va gagner, avec la surenchère ; à l’inverse la droite va se ressouder contre le gauchisme Robespierre. Sarkozy pourrait gagner : n’est-ce pas la stratégie du billard, encouragée en sous-main par les ex-UMP qui se disent « impressionnés » par le Mélenchon ?

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Aurons-nous un krach de l’immobilier en France ?

L’immobilier sert à se loger, il dépend en ce cas des moyens que l’on a d’acheter ou de rembourser ses emprunts avec ses revenus réguliers. Mais il sert aussi de placement, pour sa retraite, loger un enfant étudiant ou jeune travailleur, ou pour éviter les placements financiers et le dépôt d’actifs en banque. Il faut donc distinguer les deux approches si l’on veut comprendre le marché immobilier 2011. Si se loger reste toujours crucial, placer est moins urgent. Le marché immobilier devrait donc consolider, sans pour cela qu’un krach se produise en France.

La demande de logement est toujours forte en raison de l’évolution

  • démographique (taux de fécondité soutenu, mariages tardifs, existence prolongée),
  • sociale (plus de familles monoparentales, mutations et déménagements, crainte pour sa retraite)
  • désir d’habiter « la plus belle ville du monde » dans le cas particulier de Paris (les comparaisons en euro du prix au m² restent favorables) ou la province française (pas chère comparée à l’anglaise, l’allemande ou l’italienne du nord).

La demande de placement a explosé à la suite de la crise financière systémique née à l’été 2007 des malversations bancaires : prêts subprimes et produits dérivés devenus invendables. Les banques ont failli craquer et nombre d’entre elles ont été mises sous oxygène par les États. Parmi les investisseurs, un mouvement de panique s’est produit, consistant à diversifier ses banques, à retirer les valeurs en liquide pour les placer en or physique ou en œuvre d’art dans un coffre chez soi, et à sortir des actifs boursiers pour acheter des valeurs réelles (terres, vignobles, parts d’entreprise, immobilier).

Pour se loger, on ne compte pas. Ou plutôt, le rendement locatif n’est pas la mesure qui convient, ce pourquoi quelques-uns parlent de « bulle » alors que l’investissement n’est pas ce qui mène actuellement le marché immobilier en France. Le ratio des revenus et aides sur le prix (ce qu’on appelle le taux d’effort) est premier. La situation a été plutôt favorable depuis 2009 avec la baisse des taux à un niveau historiquement bas, la fiscalité Scellier, prêt à taux zéro et le crédit d’impôt pour les intérêts d’emprunt, tandis que le revenu net réel continuait tout doucement d’augmenter contrairement à quelques pays voisins, malgré la crise  et avec une faible inflation.

Cette situation change en 2011.

L’inflation revient et les taux d’intérêt bas sont derrière nous, même s’ils ne devraient pas grimper brutalement à horizon prévisible. Certains évoquent une crise de dettes souveraines qui obligerait la BCE à faire monter très vite les taux pour défendre l’euro et conserver son pouvoir anti-inflation. Nous n’en sommes pas là, la situation reste raisonnablement sous contrôle. La restructuration exceptionnelle de la dette d’un pays, ou sa sortie provisoire de l’euro, pourraient être des sas de décompression pas encore utilisés en cas de crise. Quant aux revenus, ils ne vont pas grimper au-delà du minimum en raison d’une croissance en veilleuse, d’un chômage élevé persistant et de mesures fiscales nécessaires pour réduire le déficit d’État.

Côté placement refuge, ceux qui voulaient diversifier leurs actifs l’ont déjà fait. Le marché des actions se maintient, avec des résultats honorables compte-tenu des progrès de productivité et de réduction des coûts. Le marché des obligations n’est pas fier, mais le rendement comparé des loyers immobiliers est obéré de plus en plus par la hausse des taxes, des mises à niveau pour performance énergétique ou sécurité (ascenseurs, détecteurs de fumée, bilan thermique…), du prix des syndics et des impayés dus à la crise.

Certes, la pierre protège de l’inflation, à condition d’entretenir le bien. Le long terme montre que la plus-value est en gros inflation+1%. Mais si l’inflation revient, elle ne s’envole pas, scrutée par tous les économistes, les marchés et les banques centrales. Et lorsque l’inflation est basse, le cycle de l’immobilier est plus sensible aux taux d’emprunt et à la sécurité du placement. Celle-ci va du bien placé facilement vendable à la fiscalité du patrimoine (donc l’ISF, les taxes foncières et d’habitation, les droits de mutation et de succession). Les taux remontent et la fiscalité aussi, ce qui réduit l’intérêt de l’actif immobilier sans toutefois l’abolir.

Alors, krach ou pas ?

Nous ne croyons pas au krach français dans l’immobilier. Les particuliers n’empruntent pas à taux variable comme dans les pays anglo-saxons, mais à taux fixe. Ils ne prennent donc pas un crédit revolving qui leur permet d’extraire du revenu supplémentaire de la hausse de leur bien immobilier, mais remboursent régulièrement à un taux maximum de 30% de leurs revenus annuels. Les banques françaises sont restées traditionnelles à cet égard, ce qui leur a évité les déboires spéculatifs des banques irlandaises, espagnoles et anglaises.

Le cycle ?

Il est en général de 6 à 10 ans, déterminé par l’endettement. La durée moyenne de détention du logement est en moyenne de 7 ans en France, ce qui explique le cycle. Il ne faut pas oublier que lorsque l’inflation est très basse, l’emprunt est plus difficile à rembourser puisqu’il ne s’allège pas au fil des années. En contrepartie, les taux d’emprunt sont bas aussi (bien que toujours supérieurs à l’inflation), ils permettent un endettement plus long, jusqu’à 25 ans. La durée du cycle actuel en est évidemment affectée.

Le dernier creux immobilier de 1997 a connu son top en 2007. La correction 2008-2009 a duré 18 mois, ce qui paraît peu puisque la précédente avait duré 5 ans. Mais la situation n’est pas la même :

  • Nous avons vu la faible inflation et l’allongement des emprunts
  • Les banques avaient fait de la spéculation immobilière en tant que promoteurs au début des années 1990 – pas à la fin des années 2000.
  • L’attrait du placement refuge après les années de bulle des actions était beaucoup plus fort que dix ans avant (krach 2000 des actions technologiques, krach des subprimes 2007).
  • La comparaison en euro des prix français par rapport aux pays voisins est nouvelle dans ce cycle (l’euro n’existe que depuis 2000), ce qui valorise notre territoire vaste et assez peu peuplé, ou le prix comparé du m² parisien par rapport à Londres, Berlin ou ailleurs.
  • La rareté du foncier dans Paris engendre une offre faible qui maintient des prix élevés pour les bons emplacements.
  • Par rapport au cycle précédent, l’effet transport (TGV et avion low cost) a favorisé l’achat de résidences secondaires ou de fermettes par les étrangers.
  • Il n’y a ni emballement généralisé et autoentretenu des ventes, des prix et du crédit, ni comportements spéculatifs allant jusqu’à revendre plus cher des promesses de vente comme en 1989 !

Mais il ne faut pas extrapoler la situation française d’après la situation parisienne. Nous devrions avoir un dégonflement des prix global, mais pas de krach brutal ni généralisé. L’immobilier bien placé et socialement désiré restera un bon placement, soit de prestige si l’on veut l’habiter, soit d’investissement si l’on veut le louer. Se méfier donc des prix soufflés dans des quartiers loin des centres, mal isolés et soumis aux transports aléatoires. Mais se souvenir que ce qui est rare est cher.

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Nicolas Sarkozy aux abois

Article repris par Medium4You.

Chronique d’une défaite annoncée ? Depuis quelques semaines, le Président à la cote de popularité la plus basse de la Vème République multiplie les « signes » médiatiques en faveur du peuple. Cette agitation est loin de la force tranquille de qui sait son destin. Il apparaît comme le lapin Duracell qui tressaute, mécanique, alors qu’aucune âme ne l’anime. Croyez-vous que « le peuple » sera dupe ?

Côté extérieur, après avoir raté la Tunisie (il est vrai remplie d’Arabes), le Président enfile ses bottes de militaire gaullien pour forcer la main à l’Union européenne et à l’ONU en Libye. Sauf qu’il s’agit d’éradiquer Kadhafi et que lui interdire le ciel ne saurait suffire. Dans l’univers médiatique, éradiquer sa télé aurait été un premier pas efficace, mais que connaît le « chef des armées » de la chose militaire ? Donc le Kadhafi parade devant les caméras, diffuse ses propos enflammés sur les ondes. Et l’OTAN bombarde vaguement des carcasses en mouvement, alors que les vraies armes sont planquées dans les mosquées, les hôpitaux et les écoles, derrière un paravent de civils pour pousser à la « faute morale ». C’est qu’on ne fait pas la guerre en philosophe, selon le mauvais conseil de ce Bernard-Henry, Monsieur le Président… On fait la guerre pour la gagner, ou alors on ne fait pas la guerre et on palabre, laissant alors les diplomates faire leur boulot sans interférence brouillonne de qui vous savez.

Côté intérieur, le Président a compris qu’il avait besoin de fusibles. Il n’a plus François Fillon, qui joue sa partition en solo et dont il bien envie de se débarrasser, dernière lubie qui ajouterait à son côté agité s’il y cède. Fors le Premier ministre, reste le ministre de l’Intérieur, qui peut dire du Le Pen tout en disant qu’il n’a jamais dit ce qu’il a dit. Comme disait Goebbels, plus c’est gros, plus ça passe. Après tout, ce qui reste dans les esprits est la « posture ». Dans les faits, rien ne se passe, comme cette loi mal ficelée contre la burqa. Elle viole la liberté d’expression et reste inapplicable dans les rues. Encore des velléités, une agitation vaine. C’est ce qui exaspère le plus « le peuple » les demi-mesures : ou bien c’est interdit (comme se promener tout nu) et on arrache le voile inique en public, ou bien la liberté le permet et on n’en fait pas tout un foin, ce qui fait rire à Washington et jusqu’au FMI !

Côté économique, le Président n’ose pas plus assumer ses choix de société. Il aurait dû supprimer l’impôt sur la fortune dès 2007, il l’a laissé en ravalant l’usine à gaz du bouclier (qui ne profite qu’aux très très riches). Il va donc le « réformer », comme d’habitude trop peu trop tard, toujours velléitaire. S’il est si « symbolique » cet impôt, pourquoi en parler ? Laissons les choses en l’état, chacun s’y habitue et acceptons les exils fiscaux. S’il est contreproductif alors que tous les pays de l’euro l’ont supprimé, pourquoi ne pas les imiter ? On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre, Monsieur le Prédisent.

Côté social, la dernière lubie est cette fameuse « prime » de 1000 euros par salarié – y compris dans les très petites entreprises – si elles « distribuent un dividende ». Pourquoi tout le monde est-il contre si cette idée est bonne ? Or aussi bien le MEDEF que la CGT trouve la chose stupide. La seconde parce qu’il vaudrait mieux augmenter les salaires ; le premier parce qu’il existe une négociation entre partenaires sociaux et qu’il se demande ce que l’État vient encore faire là-dedans, chien brouillon dans un jeu de quilles fragile. D’autant qu’il existe déjà intéressement, participation, épargne salariale et bonus. Certains sont bloqués cinq ans ? Que le législateur décide qu’il en soit autrement et voilà tout, l’État n’a pas à décider par caprice ce que chaque entreprise peut faire de ses bénéfices entre l’investissement, les salariés et les actionnaires. Autant proposer une distribution annuelle d’actions, inscrite au contrat de travail, ce serait plus juste. Quant aux économistes, ils raillent l’idée simpliste :

  • confondre les entreprises du Cac40 et les PME,
  • confondre les actionnaires avec des spéculateur étrangers alors que 60% des actionnaires des 40 valeurs sont des rentiers français et que 98% des PME TPE le sont aussi,
  • confondre le rendement d’une action qui serait « capitaliste » donc « immoral » et celui d’un emprunt d’État qui – lui – serait de l’endettement public incontrôlé mais « moral »,
  • confondre le rendement moyen annuel du Cac40, de 3,8% selon Patrick Artus (pas vraiment à droite comme économiste…), et le rendement annuel de 3,7% d’un emprunt d’État (beaucoup moins risqué).

En bref, une mesure brouillonne, surgie d’une fantaisie c’est-à-dire de nulle part, ni pensée ni testée – encore une lubie d’histrion, du simple marketing démagogique : « n’importe quoi pourvu que ça mousse ».

Le pire est encore cette révélation d’épreuves « secrètes » pour des étudiants juifs aux concours de grandes écoles. Parce qu’ils sont pratiquants, ils ne « peuvent » concourir à la date de la Pâques juive. Est-ce au Président de donner des ordres pour les accepter quand même ? Évidemment on dément à l’Élysée mais les langues se délient du côté de la « communauté ». La décision paraît si « vraie », si bien adaptée aux lubies du probable candidat pour 2012, qu’on la croit volontiers. La laïcité ? C’est pour les autres, pas pour les « copains » ni pour la « famille ». L’égalité républicaine ? Oui pour les Juifs, non pour les Arabes. La question est moins de savoir si des aménagements sont possibles pour respecter les croyances, comme d’éviter de mettre un concours le jour de Noël, à l’Aïd ou à la Pâques juive, que le secret qui l’entoure. Le « c’est pas moi, c’est personne » des écoles, administrations et services de l’Etat qui ne veulent pas assumer le bon plaisir présidentiel est honteux. Reste l’impression d’un passe-droit réservé à une étroite communauté, comme par hasard chérie du Président condidat.

Cet ensemble de foucades présidentielles depuis quelques semaines non seulement ne constitue pas une politique mais montre que Nicolas Sarkozy est aux abois. Parti comme il est, il va perdre, il le pressent malgré ses tartarinades. Dommage que son camp ne veuille pas le voir et lui choisir un remplaçant dès aujourd’hui. On court mieux la poste quand on change de cheval avant qu’il ne crève sous vous. Il faudrait que Marine et Nicolas arrivent tous deux au second tour pour que l’actuel Président ait une chance de revenir pour cinq ans. Je n’y crois pas.

Une vision plus indulgente de Jean-Louis sur la Sarkopolitik.

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