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Poisson cru à la tahitienne

Le poisson cru est un classique en Polynésie ! Dois-je encore en fournir la recette ? (Oui pour les Popa’a, me dit-on)…

Pour 8 personnes 800g de thon rouge très frais, 8 à 10 citrons verts (limes), 2 tomates, 1 concombre, 2 carottes, 1 oignon, 1/3l de lait de coco (1 noix de coco râpée environ), sel, poivre.

Détailler le poisson en morceaux de 1cm sur 2cm. Laver et couper les tomates et le concombre en lamelles. Éplucher et râper les carottes. Éplucher et émincer l’oignon très finement. Égoutter le poisson. Mélanger le thon, le jus des citrons, le sel, le poivre puis laisser mariner une dizaine de minutes. Retirer le jus, ajouter les crudités et mélanger le tout. Verser le lait de coco. Remuer et rectifier l’assaisonnement.

poisson cru tahitienne

Carpaccio de thon : Pour 8 personnes 1 kg de filet de thon rouge, 10cl d’huile d’olive (c’est mieux que l’huile de coco). 6 à 8 citrons verts, 50g de fenouil en graines, 15g de citronnelle, baies roses, oignons verts, sel, poivre.

Préparer les filets de thon en taillant des tranches très fines (astuce placer d’abord votre thon au congélateur !). Confectionner une marinade en mélangeant le jus des citrons verts, la citronnelle ciselée très finement, l’huile d’olive, un peu de sel et de poivre, les graines de fenouil. Étaler les tranches de thon. Verser la marinade sur le poisson. Disposer harmonieusement un peu d’oignon vert ciselé ? Quelques baies roses. Servir très frais.

carpaccio de thon citronnelle

Tartare de thon : Pour 8 personnes 1,4kg de thon blanc, 60g de cornichons, 40g de câpres, 1 échalote, 2 tomates, 1 gousse d’ail, une petite botte d’oignons verts, 2 citrons verts, 5c à soupe d’huile d’olive, sel, poivre.

Éplucher et ciseler finement l’échalote. Hacher cornichons et câpres le plus fin possible. Émincer l’oignon vert. Écraser l’ail. Presser les citrons. Monder, épépiner et tailler en dés les tomates. Débarrasser les filets de thon des parties sombres et des arêtes restantes. Couper le thon en petits dés (ne pas hacher au mixeur). Mélanger thon, condiments, légumes, sel, poivre. Remplir un petit bol de la préparation, démouler et servir frais.

tartare de thon tahitienne

Sashimi : encore un classique ! Pour 6 personnes 1kg de thon, ou espadon ou bonite très frais. 4 gousses d’ail. 1 c. à soupe de moutarde forte, 2 c à soupe de sauce-huître, 1 jaune d’œuf, 3cm de gingembre, 20cl d’huile, sel, poivre.

Lavez le poisson. Séchez-le avec du papier absorbant. Coupez-le en très fines lamelles avec un couteau bien aiguisé. Disposez ces lamelles sur un plat de service et mettez-les au réfrigérateur. Préparez la sauce : épluchez l’ail et écrasez-le au pilon dans un bol. Ajoutez la moutarde, la sauce-huître, le jaune d’œuf, sel, poivre. Épluchez le morceau de gingembre et râpez-le finement au-dessus du bol. Battez-le tout au fouet à main. Versez l’huile en filet, en continuant à battre comme pour une mayonnaise. Répartissez la sauce entre 6 petits ramequins. Servez le poisson cru avec la sauce à part et du riz à la chinoise.

[Selon les services de santé du Québec, le poisson est « source de protéines, il est la meilleure source d’acides gras oméga-3 à longues chaînes, ainsi que de vitamine D naturelle. Il est aussi riche en minéraux tels que le sélénium et l’iode. Il est généralement faible en gras saturés et en cholestérol. » Et L’Encylo-écolo n’est pas en reste ! / Argoul]

Alors, bonne santé et bon appétit !

Hiata de Tahiti

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Dans la sierra équatorienne

Papallacta se blottit dans un décor grandiose de roches et cascades. Aux abords du village des sources chaudes témoignent de l’activité volcanique des lieux. On se détend dans des piscines aux eaux sulfurées et aux températures plus ou moins chaudes.

Calderon, petit village, doit sa renommée d’avoir été longtemps le site d’un artisanat original en Amérique du Sud. Le masapan, sorte de pâte à sel avec laquelle on fabriquait de petites figurines peintes dans la masse et dont on ne connaît pas bien l’origine. Ces figurines sont traditionnellement placées sur les tombes en offrande le jour de Todos los Santos (Toussaint) et le Dia de Difuntos (1er et 2 novembre).

Dans la lagune de Colta, malgré la baisse des eaux, les roseaux sont toujours exploités pour faire des radeaux, les herbes aquatiques servent de pâturages. Avec l’altitude, la lagune a des couleurs étonnantes. Les eaux sont de moins en moins abondantes. En se retirant elles ont laissé des terres fertiles dans les fonds des terrains plats. Les cultivateurs y pratiquent des cultures intensives. Un monde à part, les communautés d’altitude : une piste glissante, des  maisons de terre aux toits de paille ou de zinc dispersées sur des sommets arrondis. Ici, les hautes terres sont densément occupées même les sommets au-dessus de 3600 m. La vie est rude, il fait froid, souvent humide, cultiver est un exploit, et récolter de quoi nourrir une famille entière. Une utopie ? Et pourtant…

A la sortie de Colta, la petite église de pierre de La Balbanera est la plus ancienne du pays, elle date du 18 août 1534. Elle a réussi à conserver quelques pierres debout après le séisme de 1797.

Guamote est une bourgade de 2000 habitants au sud de la province. Le jeudi est jour de marché et une foule affairée mais silencieuse emplit la ville. A la variété des ponchos, on mesure l’attraction de la foire sur les nombreuses communautés et villages voisins. Les marchandes n’hésitent pas à installer leurs herbes sur les rails du train. Le conducteur actionnera son sifflet pour prévenir de son passage.

Ah ! oui, avez-vous déjà mangé du cuy ? Avant la Conquête, c’était la principale source de protéines dans les Andes. Ici, pas d’animal de compagnie pour les enfants, le cochon d’Inde (cuy) est élevé pour être mangé, alors bon appétit ! Avec le quinoa, ultra nourrissant, ce seront 15% de protéines complètes, 55% de glucides et 4% de lipides qui accompagneront le cuy. Le riz des Andes appartient à la famille des chénopodiacées, tout comme les épinards et les betteraves. Cela pourra être arrosé de chicha.

Depuis Riobamba, nous entreprenons l’ascension du Chimborazo (6310 m)… enfin par tout à fait. En 4×4 jusqu’au premier refuge à 5000 m. L’air se raréfie, les poumons flambent même si le volcan enneigé est magnifique. Je choisirai de redescendre par le même moyen (facile) et d’admirer les lamas et les vigognes, tandis que d’autres trouveront l’énergie d’enfourcher un vélo-tout-terrain pour rejoindre l’auberge. Bravo ! (Mais il n’y a que de la descente).

Hiata de Tahiti

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Manger bien ou mal à Tahiti

Vous avez dit bio ? Je lis dans la Dépêche de Tahiti : « Extraits du conseil des ministres ; prise en charge du fret maritime des engrais et pesticides chimiques destinés à l’agriculture. Il s’agit de la prise en charge du fret maritime des produits nécessaires au développement économique et social aux produits suivants nécessaires aux agriculteurs doit permettre le développement des filières agricoles dans les îles autres que Tahiti. Le fret sera pris en charge également pour les amendements (fientes de poules, lisier de porcs, déchets de poissons, tourteaux de coprah …) Ah bon ? je n’y comprends rien ! Et vous ?

Palme d’or de l’obésité : Hip, hip, hip, hourrah ! Qui a reçu cette palme d’or ? Hein ? La Polynésie qui coiffe tous les Ultramarins sur le poteau. Le taux d’obésité infantile est de 34,1% au fenua. La Martinique est seconde avec 25,8%, la Guadeloupe troisième avec 25%, la Guyane affiche 18,3%. Les causes sont connues : sédentarité des populations, abandon de la cuisine traditionnelle au profit d’aliments raffinés, urbanisation, allongement de l’espérance de vie.

Elles sont belles mais dangereuses, plantes souvent toxiques, parfois mortelles. Poinsettia (Euphorbia pulcherrima) ou Etoile de Noël. L’ingestion est dans 90% des cas asymptomatique (diarrhées, vomissements) eczéma et démangeaisons si contact avec la peau. Datura stramonium appelé pomme-épineuse, herbes-aux-taupes, chasse-taupe, herbe du diable, endormeuse, pomme poison, trompette des anges, trompette de la mort. Toutes les parties sont toxiques : vomissements, hallucinations, arrêt cardiaque allant jusqu’au décès. Thevetia peruviana ou bois-lait, son latex est très toxique, ses graines parties sont toxiques, l’ingestion d’une simple feuille peut s’avérer mortelle pour un enfant et un adulte, en raison des troubles provoqués. Jatropha podagrica ou pignon d’Inde ou médicinier, les baies et la sève sont toxiques… Demeurez vigilants !

A Rurutu (îles Australes), le jury du Heiva et la population ont dégusté une préparation d’autrefois. Des racines de ti (cordyline) sont cuites dans un four. Ce four est recouvert de feuilles de purau imbriquées les unes dans les autres pour former un couvercle. Les racines cuites sont découpées en tranches et offertes. Autrefois friandise pour les enfants, sucre pour les aliments, se gardant plusieurs mois, cette racine était bénie des dieux. Dans les temps anciens, la racine de ti était utilisée pour ses apports en sucre. Du temps des goélettes, les voyages duraient plusieurs semaines, voire plus. Il fallait prévoir une nourriture qui puisse se garder. Les protéines étaient fournies par le poisson, les vitamines et la force par le taro, le coco pour les corps gras et le ti pour l’énergie vitale. Si aujourd’hui les besoins ne sont plus les mêmes, le rituel demeure et sort à l’occasion des fêtes de juillet.

Hiata de Tahiti

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Georges Guille-Escuret, Les mangeurs d’autres

Montaigne, largement cité par l’auteur, avait tout dit du cannibalisme, condamné par religion et morale au nom de notre supériorité de « peuple élu » du « seul vrai Dieu » et de notre « progrès » de « civilisation ». Je l’avais évoqué en 2008. Les cannibales seraient des sauvages et nous des civilisés. Ce qui nous différencie est ce qui distingue la nature de la culture. Mais est-ce bien la vérité ? N’est-ce pas plutôt une idéologie ?

Selon Guille-Escuret, « Par elle-même, une idéologie n’invente rien : elle arrange les images, gomme des contrastes, ajoute des compléments issus de ses références préférées, mais elle ne crée pas. Sa fonction consiste à protéger un ordre établi de la pensée en transformant l’inconnu en connu et en digérant l’inédit à coup de réminiscences » p.182. L’indignation couvre l’indigence de la description et l’incapacité mentale à penser le nouveau comme à réfléchir sur soi-même. « A cet égard, les explorateurs français se montrent assurément les plus pénibles, qui répètent les clins d’œil jusqu’aux tics, soulignent leurs ironies en caractères gras et présupposent avec leurs lecteurs des complicités voltairiennes aux dépends de tous les primitifs qui croupissent à mille lieues de la fine fleur cartésienne de Saint-Germain » p.185.

Heureusement, il y a Montaigne : « Je pense qu’il y a plus de barbarie à manger un homme vivant qu’à le manger mort, le faire rôtir par le menu, le faire mordre et meurtrir aux chiens et aux pourceaux ». Manger son ennemi est le respecter, vouloir par mystique assimiler son esprit et sa force vitale ; le torturer comme sous l’Inquisition, sous Staline et Hitler ou dans les geôles du Lao gai, c’est l’asservir, le mépriser, en faire un animal domestique, voire un objet d’esclavage. Le sauvage serait alors moins « barbare » qu’on ne croit, et le « civilisé » bien plus qu’on ne dit. Surveiller et punir vaudrait-il mieux que chasser et manger ?

C’est probablement la thèse que défend Georges Guille-Escuret, même si son ouvrage de synthèse (complément d’une sociologie du cannibalisme en deux volumes) est moins destiné aux profanes qu’aux « cher collègues » en anthropologie. Le « redoublement du même » de Françoise Héritier, cité sans autre précision, fait ainsi appel à un jargon pro et à une spécialisation que peu de lecteurs peuvent avoir… En sept chapitres, Guille-Escuret « déconstruit » l’idée commune sur le cannibalisme et cherche à restituer le contexte significatif du fait chaque fois observé. Ce qui ne va pas sans traits d’humour. Par exemple : « en Océanie comme en Afrique : la chair du Blanc serait plus salée qu’aucune autre. C’est un motif de dévalorisation en Océanie et, au contraire, de valorisation en Afrique » p.165. Mais trop souvent la phobie occidentale envers le cannibalisme refuse de voir pour en faire tout de suite une essence. Les sociétés cannibales seraient sans histoire, croit-on, uniquement préoccupées de protéines : « de la viande ! de la viande ! » s’exclament les Nègres en découvrant Stanley, l’explorateur anglais bien connu…

Alors comment rendre compte du cannibalisme en évacuant les présupposés et les toiles d’araignée idéologiques ? « Bon gré mal gré, Harner s’impose comme l’auteur de la première théorie scientifique correctement énoncée – ce qui ne veut nullement dire ‘vraie’ ou ‘vérifiée’ – sur l’organisation sociale d’un cannibalisme » p.206. Matérialiste, il suppute la valeur nutritionnelle de la chair humaine, la relie à une logique sociale fondée sur le cycle des saisons et à la carence du milieu en protéines animales comme à la pression démographique, réservant ce surplus aux classes dirigeantes (Michael Harner, The ecological basis for Aztec sacrifice, American Ethologist, février 1977).

Mais comment qualifier le fait de manger les autres, ses semblables ? « Anthropophage » existe, venu du grec, qui signifie mangeur d’homme – mais à ce titre un crocodile peut l’être. « Cannibale » vient des peuplades caraïbes rencontrées par Christophe Colomb et signifie toute absorption du pareil – horreur « inouïe » pour l’époque chrétienne. Le terme sociologique est « allélophagie », se manger les uns et les autres, terme neutre sorti des phobies de la « civilisation » des auteurs antiques, comme des phobies de la « raison » des auteurs modernes. « Homophagie », qui signifie manger son propre sang, appartient au vocabulaire rituel et est moins usité. L’usage populaire et médiatique du vocable « cannibale » est donc idéologique : il s’agit d’une répulsion de moderne pour les pratiques jugées archaïques, d’un dégoût méprisant de peuple civilisé pour les enfants sauvages, d’un déni moral des profondeurs intimes de la psyché. Après tout, pense l’idéologie, la « civilisation » n’est-elle pas qu’un dressage de pulsions de nature qui demeurent dans nos abysses mentales, voire génétiques ?

« Nous, ethnologues, avons tous souhaité ‘excuser’ le cannibalisme : en l’oubliant, en le niant, en le désinfectant, en lui trouvant des déterminations naturelles ou des justifications culturelles. Mais, surtout, en le maintenant chez les autres, sans prendre la peine de refuser en soi cet ‘autre’ qui se glorifie de ne pas être cannibale en dissimulant ce qui l’a amené à ce rejet » p.89. Car le cannibalisme surgit dans les sociétés en crise. Tout ne vaut pas tout, comme se complaisent à dire les relativistes culturels, ces paresseux du concept, bobos repus et content d’eux, contre lesquels l’auteur se déchaîne avec délectation : « une ambiance complice, caractérisée par le regain spectaculaire d’un relativisme échevelé, conduit par un postmodernisme qui se donne à admirer comme une avant-garde prête à prendre les devants tous azimuts » p.120. Ou encore : « Le relativisme contribue à forger ce qu’il combat en participant à la fabrication de l’illusion hiérarchique qu’il prétend ensuite démentir. Pour le plus grand bonheur des scientismes grossiers, qui s’appuient sur cette participation avant de démentir le démenti » p.180.

Une bien belle étude, qui nous ramène aux tabous de NOTRE culture, et notamment à ce qui nous constitue : notre « identité ».

Georges Guille-Escuret, Les mangeurs d’autres – civilisation et cannibalisme, mars 2012, éditions EHESS, Cahiers de l’homme n°41, 292 pages, €20.90 

Émission ‘A plus d’un titre’ d’Alain Louyot sur France Culture en réécoute (passer les 30 premières minutes) 

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