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Pepita Dupont, La vérité sur Jacqueline et Pablo Picasso

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Jacqueline Picasso, née Roque, est peu connue. Beaucoup moins que les enfants naturels du peintre qui ont beaucoup agi en justice pour se voir reconnaître des droits sur la fortune et sur les œuvres. Mais l’Andalou de Malaga, né en 1881, s’il collectionne les femmes, ne reste fidèle qu’à la dernière : Jacqueline.

Il la rencontre en 1952 à la boutique de poteries Madoura à Vallauris ; il a 71 ans et elle 26 mais elle ressemble à « la jeune femme assise dans un harem qui tient le narguilé des Femmes d’Alger d’Eugène Delacroix » p.59. Elle ne lui donnera pas d’autre enfant, ayant été mal opérée d’une appendicite et déjà mère d’une petite Cathy, mais ils se marient en 1961 dans l’intimité à Vallauris. Pablo Picasso avait attendu que sa première épouse de 1918 et mère de son fils Paulo, Olga, décède en 1955 : on ne divorce pas chez les Espagnols de mœurs catholiques.

Avant d’écrire ce livre de témoignage, Pepita Dupont, née à Genève en 1952 a été à l’École Supérieure de Journalisme de Paris entre 1969 et 1973 et a collaboré à une revue surréaliste, Supérieur inconnu. Elle a été reporter à Paris Match pendant 37 ans, de 1973 à 2010.

« Tout est faux sur Jacqueline Picasso ! » commence-t-elle son livre p.7.

delacroix femmes d alger detail

Elle fait la rencontre de l’épouse de Picasso en 1983 avant de devenir une amie durant quatre années, jusqu’au suicide de Jacqueline en 1986. Cette biographie vise à réhabiliter la personnalité de cette femme discrète et remarquable ; à remettre les pendules à l’heure après les contrevérités complaisamment répandues dans les médias par les héritiers et leurs affidés, tous avides d’argent ; à porter témoignage sur ces années complices.

C’est dire si cette biographie est affective, bien que documentée à l’américaine – et passionnelle, bien que fondée sur des entretiens enregistrés, des témoignages et des lettres. Le lecteur n’y trouvera peut-être pas « la » vérité en soi, mais une vérité amicale, peut-être très favorable mais en tout cas sincère.

Jacqueline Picasso et elle meme peinte par pablo

Car le mérite de ce livre sur l’épouse d’un monstre en peinture, décédé dans sa 92ème année, est qu’il est aussi un livre sur l’art :

  1. Nous y rencontrons les impressions d’artiste, l’optimisme de la lumière, la joie du vivant, l’originalité des objets et des êtres vue par le regard Picasso : « À La Californie, Jacqueline porte aussi en guise de bracelet l’ancienne chaîne d’arrêt d’eau de la baignoire. On aurait d’ailleurs dit une gourmette de chez Hermès » p.76.
  2. Mais aussi le travail forcené (Picasso a produit près de 50 000 œuvres), la générosité du don, les affres et la facilité du peintre en pleine possession de son art.
  3. Et l’avidité du fric, les mendiants de dessins et la cour qui se serait volontiers créée autour du Maître « qui vaut de l’argent » (paroles d’une petite fille qui a beaucoup peinée Picasso). « Mes enfants s’impatientent », dira-t-il à Piero Crommelynck l’année de ses 89 ans (p.173).

Jacqueline a donc été pour Pablo le havre qui le libérait des contingences matérielles, celle qui organisait ses repas, ses soins de santé et ses expositions, toute cette intendance qui agace le créateur. Différente des compagnes précédentes, notamment de Françoise Gilot (surnommée « Julot » par le Maître pour ses liaisons ailleurs) qui pensait rivaliser avec Picasso en peinture.

picasso et jacqueline

Car Jacqueline et Pablo s’aimaient, malgré la différence d’âge. Jacqueline n’a pu supporter la solitude sans lui, malgré ses œuvres à elle dédiées accrochées tout autour d’elle : elle s’est suicidée dans un moment de déprime en 1986. L’automne est redoutable au chagrin et aux souvenirs.

Un brin people mais pas trop, cette biographie affective d’une femme peu connue se lit d’un trait. Le style vivant de Pepita Dupont a beaucoup de charme. Et il était utile de réhabiliter une vérité de femme contre la seule vérité de l’argent. Le livre a fait l’objet de procès – mais l’auteur s’en est sortie la tête haute.

Pepita Dupont, La vérité sur Jacqueline et Pablo Picasso, 2007, collection Documents éditions Le Cherche-Midi, 286 pages, €22.80

Pepita Dupont traduite en espagnol Barcelone 2014

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Les clowns politiciens

Cela fait une semaine que les clowns occupent les médias pour leur théâtre d’ego. Les clowns de droite. A-t-on idée des ravages que fait dans l’opinion un tel histrionisme ? Les bobos de l’élite parisienne matamorent dans une guéguerre de bac à sable comme s’ils avaient deux ans !

Alors que la récession économique menace, que la pression fiscale de gauche assomme TOUS les revenus grâce à la CSG, impôt qui serait plus « juste » parce que prélevé sans état d’âme sur n’importe quel revenu (même celui des chômeurs et des allocataires de solidarité !) avec le même pourcentage – alors que la TVA (qui a 3 taux différents) est un CHOIX de consommation… La « justice » de gauche n’est pas la mienne. Le « pareil pour tous » n’a jamais été de la « justice » mais de la flemme d’État pour ceux qui sont au pouvoir.

Sur la droite, plusieurs remarques :

Faire voter les militants seulement et pas les sympathisants (comme au PS) ridiculise les médias et les sondages, qui font l’amalgame sans réfléchir ; les résultats ne peuvent qu’en être biaisés. Qui connaît « les militants » de l’UMP ?

La désorganisation desdites élections (qui ne portaient que sur quelques 200 000 personnes) ne sont pas à l’honneur des politiciens UMP. N’ont-ils jamais vu une seule élection ? Méprisent-ils autant « le peuple » que de leur faire faire la queue pour voter comme sous l’URSS ? N’ont-ils rien vu, rien prévu, rien pensé ? Ont-il laissé faire les « petites mains » incapables parce qu’eux sont « au-dessus » de cette « intendance » ?

Plus la base est large, moins il y a possibilité de fraude. Réserver le vote aux seuls militants, c’est donner la tentation à certains groupes partisans de truquer les résultats. On a vu la différence entre le congrès de Metz et la primaire socialiste. La droite est-elle incapable d’observer ce que font ses adversaires et d’en tirer des leçons ?

On ne vote pas pour un chef de parti comme on vote pour un candidat à une primaire présidentielle. La droite, consciemment mais à tort, affecte de confondre les deux. Copé est probablement plus ferme et plus pugnace comme chef de parti que Fillon. C’est ce qu’on demande à l’UMP quand on est militant. Quant à être le prochain candidat à la présidentielle, il y a une marge. Le profil n’est absolument pas le même. On le voit avec Hollande, bien loin de son modèle Mitterrand. Il apparaît comme président de « la gauche », voire du seul PS, alors qu’il devrait l’être de TOUS les Français. Ce que les gaullistes ont toujours su faire… jusqu’à Sarkozy.

Le rassembleur à droite n’existe pas encore. Mon avis est que Nicolas Sarkozy, qui a été rassembleur sans conteste, ne peut revenir, même comme « recours ».  Il a fait son temps. Copé apparaît pour l’instant comme un apparatchik, pas un homme d’État. Fillon a l’image d’un velléitaire pour qui il suffit de se présenter pour rallier les suffrages, ce qui n’est pas légitime après 5 ans de suivisme obéissant comme Premier ministre de Sarkozy.

C’est qu’on a changé d’époque et les politiciens semblent ne pas le savoir. Le quinquennat est une nouveauté absolue en France. Le chef de l’État y devient non plus le monarque au-dessus des partis qu’avait voulu de Gaulle (concept auquel ni Chirac ni Jospin n’ont jamais rien compris), mais le rassembleur de son camp contre le camp d’en face. Ce qui implique un parti offensif pour attirer les mécontents du gouvernement en place, mais aussi une capacité à ménager le centre, sans lequel AUCUNE élection française présidentielle ne peut se gagner. Le nouveau rôle du Premier ministre n’est donc plus celui qu’avait défini Pompidou avec de Gaulle : il n’est plus la courroie de transmission entre Exécutif et Législatif, mais l’exécuteur des décisions présidentielles, comme un Secrétaire d’État américain.

La grâce de Hollande (à peine plus d’un pourcent) a été le rejet de Sarkozy, absolument pas sa capacité à se concilier le centre. Comme si la leçon Ségolène Royal avec François Bayrou en 2007 n’avait pas été apprise. Jean-François Copé va-t-il faire la même erreur ? Ce pourquoi François Hollande n’a pas (encore) l’image de président légitime de « la France » : c’est lui qui doit décider, et pas laisser discuter et attendre, ni laisser faire.

Je ne suis militant dans aucun parti, mais si j’étais UMP, nul doute que je quitterai le navire rouillé et ingouvernable pour me rallier à l’union centriste (ou à Marine Le Pen si l’extrémisme devait être ma tasse de thé). La leçon du vaudeville dérisoire de cette semaine est donc la régénération du centre (auquel Fillon devrait faire les yeux doux s’il était fin politicien) et le confort de l’extrême-droite, qui se réjouit de l’avoir bien dit.

Sauf que les cartes sont brouillées : les « spécialistes » ont l’air de dire – l’air de rien – que la droite de gouvernement est coupée en deux, une partie voulant droitiser à la Patrick Buisson et faire alliance avec Le Pen, l’autre partie restant libérale et sociale comme feue l’UDF. Mais les résultats des votes des seuls militants (et pas des sympathisants !) ne permet pas de l’affirmer. Les militants ont voté pour un organisateur ferme, un chef de parti capable de tenir tête à l’idéologie de gauche et de tenir ses troupes dans les Assemblées. Sans préjudice du prochain candidat à la présidentielle que personne ne voit encore surgir aujourd’hui. Il y a des copéistes qui ne voteront pas Copé comme président, et des fillonnistes qui ne voteront pas Fillon.

Et il manque surtout le rassembleur pour 2017… Pas grave, la gauche n’en avait pas jusqu’à un an avant les présidentielle. Mais elle avait des politiciens aptes. Avec ce qui vient de se passer, on ne voit de moins en moins à droite.

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