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2016, soleil à Tahiti

Pour 2016, je lis les prévisions de Madame Mahana (soleil) :

soleil tahiti

Le député Jean-Paul Tuaiva au tribunal pour détournements de fonds publics. Le 28 avril le tribunal correctionnel nous en dira plus.

Pour Gaston, les casseroles Haddad-Flosse, l’affaire Anuanuraro et celle du SED, wait and see.

Une nouvelle grille tarifaire et une baisse au 1er mars pour EDT (EDF polynésien).

Un nouveau record à battre, le nombre de danseurs de ‘ori tahiti (danse tahitienne) détenu par le Mexique depuis le 5 septembre 2015 avec 1 500 danseurs. Ce n’est plus une prévision puisqu’en ce sabbat du 30 janvier, les Polynésiens ont battu un nouveau record avec 2 980 danseurs à Atimaono.

François Hollande en Polynésie en février. Merci qu’il n’oublie pas son carnet de chèques.

hamac a tahiti

Au moins 25% de la population polynésienne a été touchée par l’épidémie de chikungunya qui aura duré 5 mois, fait une quinzaine de morts et fait apparaître le manque de préparation et de lutte anti-moustiques des responsables de la santé.

Déjà 160 détenus indemnisés pour « conditions indignes de détention ». L’État a été condamné à verser plus de 40 millions de XPF en l’espace de 26 mois. L’indemnité moyenne est de 250 000 XPF, peut atteindre 576 000 XPF. Au 1er septembre 2015, 443 personnes s’entassaient dans les 147 cellules de la maison d’arrêt de Nuutania à Faa’a, une occupation estimée à 268%. D’ici l’ouverture de la geôle de Papeari prévue courant 2017, 800 nouveaux dossiers pourraient être présentés par d’anciens détenus.

Un meurtre à Bora Bora, un meurtre gratuit. A Bora Bora, l’île joyau de la Polynésie. C’était un week-end. Un homme rentre chez lui, il est poursuivi, agressé, battu à mort, sa voiture volée sera retrouvée dans le lagon ; évasané, cet homme jeune décédera à l’hôpital du Taaone. C’est la colère dans la population, 5 000 personnes habillées de blanc dans les rues de Papeete crient « plus jamais cela ».

L’Assemblée de Polynésie fêtera ses 70 ans le 11 mars. Ça va guincher.

Hiata de Tahiti

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Martin Amis, La maison des rencontres

martin amis la maison des rencontres

La maison en question est au goulag sous Staline. Les détenus mâles peuvent y rencontrer les détenues femelles avec lesquelles ils sont mariés. Sur autorisation de l’administration des camps et sous l’œil minuté des instances d’État. Certes, Martin Amis ne cesse de se renouveler. Après l’Angleterre – sa patrie – il s’est essayé au roman noir américain ; le voici déguisé en Russe du dernier siècle. Bien qu’assez court, ce roman n’est pourtant pas des meilleurs.

Martin Amis réussit assez bien à se mettre dans la peau d’un zek, ce Russe moyen, patriote et apolitique, envoyé au camp de travail pour avoir prononcé un jour le mot Amérique – alors qu’il désignait une femme. La stupidité administrative s’ajoute à la paranoïa stalinienne et au système de surveillance d’État généralisé pour bâtir cet « avenir radieux » chanté par Marx, Lénine et Staline. Jusqu’au poussah abêti Brejnev, qui affirmait « le socialisme » réalisé… Si c’est cela le socialisme, il a bien fait de mourir, même si son cadavre bouge encore dans les esprits des idéologues jacobins.

Deux frères dans le même camp, l’un protège l’autre, l’autre justifie l’un. Ils sont amoureux de la même femme, Zoya, une Juive – donc suspecte à la xénophobie russo-stalinienne. Mais être juif n’est pas pire qu’être intellectuel ou penser par soi-même, en petit-bourgeois. Seul compte l’accomplissement du socialisme, les plans réalisés à 150% et le chant des littérateurs salariés de l’appareil de propagande comme cet Ananias, mari post-brejnévien de Zoya.

L’auteur a puisé aux meilleures sources publiées sur le goulag, le stalinisme et la période Brejnev – mais son roman a quelque chose de lisse, de seconde main, qui empêche de compatir. Nous sommes loin de Dostoïevski, malgré ce que la quatrième de couverture voudrait nous faire croire. Il se trouve que je connais bien l’histoire de l’URSS pour y avoir consacré une thèse : les récits de Kolyma de Soljenitsyne et Chalamov sont bien plus percutants que ce que nous conte Martin Amis. Même comme prétexte à une histoire humaine, on ne voit guère ce qui est le ressort du roman : est-ce le suicide assisté d’un peuple tout entier ? Pourquoi donc écrire en 2006 précisément sur un système qui s’est écroulé en 1991 ?

C’est un fait que la Russie a massacré allègrement ses serfs sous l’Ancien régime, puis ses soldats en 14, puis ses élites dans les années 20, ses paysans dans les années 30, ses soldats à nouveau dans les années 40, ses Juifs et ses intellectuels dans les années 50, puis à nouveau ses soldats dans les années 80 en Afghanistan, jusqu’aux 186 enfants tués de Beslan et aux 129 civils du théâtre de Moscou en 2002, pris en otage par des Tchétchènes. Poutine ne fait pas plus dans la dentelle pour prendre le pouvoir « démocratiquement », d’opportunes explosions d’immeubles dans les banlieues des grandes villes en 1999 (à Riazan, des membres du FSB sont reconnus et arrêtés, puis relâchés) permettant la dose de terreur suffisante pour assurer la victoire de sa conception de la Sécurité. Martin Amis : « En Russie, un homme risque neuf fois plus qu’un Israélien de mourir de mort violente. S’il s’en sort, il vivra à peu près aussi longtemps qu’un habitant du Bangladesh. Il existe un phénomène démographique : le village des babouchkas – les jeunes sont partis et les hommes sont morts » p.248.

Tout cela est bel et bon, mais quelle est l’histoire ? Elle n’est pas vraiment claire. Deux frères perdus, des mariages impossibles, une sexualité à jamais stérile, et lorsque l’enfant paraît, unique, il est sacrifié « pour la patrie » dans un lointain pays sans intérêt majeur et par une confusion d’aiguillages… L’esclavage d’État dégrade la personne ; elle n’a plus d’initiative, donc plus envie de vivre, ni de se reproduire.

L’auteur s’élève en faux contre cette phrase – tirée de Nietzsche – selon laquelle « ‘Ce qui ne te tue pas te rend plus fort’. Pas du tout ! Pas du tout. Ce qui ne te tue pas ne te rend pas plus fort. Cela te rend plus faible, et te tueras plus tard » p.279. Mais c’est toute la différence – essentielle – entre l’Allemagne et la Russie : la première s’est relevée du nazisme et de la guerre ; la seconde reste enfoncée dans le stalinisme et le souvenir de la guerre.

Hormis cette réflexion, somme toute utile, il n’y a guère de romanesque dans ce livre.

Martin Amis, La maison des rencontres (House of Meetings), 2006, Folio2009, 293 pages, €7.03
Les autre romans de Martin Amis chroniqués sur ce blog

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En prison à Tahiti

Papeari, 6 km de long, 4000 habitants, sur la côte ouest de Tahiti, à 50 km de Papeete. L’île s’étend entre Mataiea et Taravao. La côte ouest entre Papeete et Paea est actuellement  grillée, une seule allumette suffirait à embraser collines et maisons. Le vent de nord-est quasi présent se chargerait de colporter l’incendie.

Papara marque le début de la végétation luxuriante et verdoyante  malgré une sécheresse qui perdure. A Papeari, depuis plusieurs semaines l’eau a déserté les robinets. Il faut se lever à 2 heures du matin pour se doucher, laver la vaisselle, mettre le linge dans la lessiveuse (la machine à laver le linge). Qu’en sera-t-il quand il y aura 600 vies de plus à Papeari ?

Or Papeari est siège de la nouvelle geôle. L’Etat farani constate, enfin, que la prison de Nuutania (ville de Faa’a, maire Oscar Temaru, président actuel du gouvernement polynésien) est obsolète. Un record peu enviable. Prévue pour 150 prisonniers, on en dénombre aujourd’hui 440. Certes, ils sont un peu serrés à Nuutania, mais là-bas sous les tropiques, on vit surtout dehors, doivent penser les technocrates à Paris. Espérons qu’ils ont de l’eau les taulards, car faire la queue pour se laver, faire la queue pour les vespasiennes, faire la queue pour s’humecter la bouche. Que des histoires de queues en prison… cela pourrait créer des mouvements de foule. Le défi est lancé.

Ce sera à Papeari que l’Etat construira cette nouvelle prison. Attention, autre style : plus de hauts murs, plus de miradors, quelques grillages, une clôture végétale ; à l’intérieur,  cellules individuelles avec toilette et douche,  salle de fitness, appartements pour recevoir la famille ; le tout bourré d’électronique. Gare à la panne, gare à la panne ! Comptez avec moi 400 condamnés sur 10 hectares de terrain, plus le personnel, tout ce monde vivra à côté des habitants du cimetière. Et alors ? Aita pe’a pe’a (ça ne fait rien)? Mais si.

L’Etat n’a pas tenu compte des tupapa’u (revenants). Les soirs de pleine lune, ces locataires descendent à la mer et doivent impérativement être de retour avant le lever du jour. Alors  Messieurs les Farani (Français) vous  tirez les premiers ? L’histoire se répète. Serait-ce donc « Messieurs, les Ma’ohi, tirez les premiers » ou « Messieurs les Ma’ohi, tirez les premiers ». (Ma’ohi = autochtones de Polynésie). Une simple virgule peut tout changer… Et si les résidants de la prison prenaient l’habitude d’accompagner les parcours des tupapa’u avec des toere (tambour à lèvres en bois) des pahu (tambour à membrane) des tariparau (tambour européen) ? Ouah ! Cela plairait peut-être aux tupapa’u mais certainement pas aux pauvres oreilles des riverains, car il y a des riverains.

Pourtant,  les « indigènes » de Papeari sont des plus gâtés. Constatez vous-mêmes. Ils bénéficient déjà de la présence de la poudrière, du chenil de l’armée (ils aboient bien, les canidés !), du dépotoir Paihoro qui les gratifie de fragrances « immondices » gratuites, d’un terrain de moto-cross où les  pétarades se répètent tous les jours de la semaine y compris le dimanche, pourtant jour de repos. Au secours les verts ! Toujours à Papeari, le jardin botanique H. Smith aux arbres magnifiques mais qui souffre cruellement de soins, le Musée Gauguin qui attend avant de s’effondrer complètement des toiles… ou de bonnes reproductions des œuvres du Maître pour combler les vides de ses murs.

Monsieur « Prison », venu de Paris vendredi 30 septembre, présentait les avantages de cette super geôle à la mairie de Teva i Uta. Une petite explication pour les popa’a : Papeari est la commune associée de Mataiea et forment ensemble la commune de Teva i Uta. Les panneaux « Non à la prison à Papeari » ont fleuri le long de la route mais l’Etat impose son diktat  et demeure inflexible.

Début des travaux 2013, ouverture de l’hôtel 7 étoiles en 2016. Confidence, cet hôtel serait membre de la chaîne internationale « Mieukalamaison ». Les Ma’ohi et les Popa’a de Papeari se sont regroupés en association ou en petit comité contre ce projet. Ils se heurtent à la volonté du pouvoir. Ils ont parfois l’impression que les détenus sont mieux considérés qu’eux et que s’ils n’acceptent pas cette Bastille, ils n’auront qu’à aller voir ailleurs.

Oscar, l’Indépendantiste : « Si nous étions indépendants, il n’y aurait pas de prison ». Ainsi si l’indépendance est acquise demain, il n’y aura  plus ni voleurs, ni violeurs, ni assassins, etc. Chiche.

C’est qu’avec tous ces soucis, nous devenons un peu taravana (fam : timbrés).

Vos commentaires sur la future prison de Papeari seront les bienvenus, et pourquoi pas vos astuces pour faire capoter ce projet ou le faire déplacer dans un endroit moins idyllique ?

Hiata de Tahiti prend congé, portez-vous bien.

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