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Pêcher la morue norvégienne

Il était prévu au programme une sortie de pêche sur le Vesterfjord – mais avec supplément de prix. Nous sommes quelques-uns à tenter l’expérience.

Les cabillauds sont très fréquents dans ces eaux des îles, traversées par de forts courants marins. Les morues migrent annuellement dans les eaux des Lofoten depuis la mer de Barents, et cela depuis 10 000 ans. Des traces de pêche régulière de janvier à avril sont attestées depuis l’ère viking. En 1030, la célèbre bataille de Stilklestad entre le roi norvégien du nord Tore Hund et le roi Olaf le saint a été gagnée par le nord, qui défendait ses pêcheries. Ce n’était que partie remise, puisque le sud a mis la main sur les Lofoten en 1120, le roi Øystein établissant la première ville autour de la première église. A la fin des années 1200 et jusqu’en 1750, les Norvégiens furent dépossédés de leurs droits à exporter le poisson par la ligue hanséatique menée par l’Allemagne. Les pêcheurs ont alors sombré dans la pauvreté. Ce n’est que vers 1900 que l’exportation directe depuis les villages fut autorisée. La paix après les guerres napoléoniennes sur le continent, l’arrivée de la pomme de terre et le vaccin contre la variole ont permis une explosion démographique dans le sud norvégien, et une émigration jusque vers les Lofoten. De riches marchands ont acheté des terrains et des droits de pêche, fixant les prix jusqu’en 1857 où une loi a imposé le libre commerce.

port de sorvagen Lofoten

La morue est consommée fraîche ou conservée soit salée en tonneaux, soit séchée à l’air ; le foie est mis à part, conservé tel quel ou pressé en huile pleine de vitamines pour les voyages marins ; les têtes entrent dans la soupe. On dit que la Norvège est le seul pays où l’argent ait une odeur… celle de la morue. Mais on le dit aussi à Pigalle où les maquereaux mettent en ligne d’autres proies pour la pêche.

morue sechee

Nous pourrons préparer nos poissons pour le dîner. Prix de la sortie (sortie bateau + instructeur + prêt du matériel de pêche) : 250 NOK par personne (33€). Je pensais qu’il s’agissait d’un caboteur norvégien mais pas du tout ! Il s’agit d’un canot à moteur pour six personnes, loué et piloté par le propriétaire français des rorbus. Toujours rien de culturel, pas de pêche traditionnelle, aucun contact avec les Norvégiens.

lieu de peche Lofoten

Les nuages se lèvent avant midi et le temps frais sur la mer se transforme aussitôt que paraît le soleil en étuve et réverbération. Nous avons trop chaud et heureusement qu’il n’y a pas de houle, nous aurions eu sinon le mal de mer. Inutile d’aller loin de la côte, ce sont sur les fonds éclairés par la lumière que les prédateurs se nourrissent le mieux. Je n’ai quasiment jamais pêché à la ligne et l’on m’explique les règles : filer l’hameçon lesté de son plomb en forme de sardine brillante jusqu’au fond, en contrôlant avec le frein que le fil ne s’embrouille pas ; une fois mou, remonter de quelques tours au moulinet ; puis faire se lever le plomb d’un mouvement des bras sur la ligne.

ligne a cabillaud Lofoten

Nous commençons par ne rien attraper. Qu’à cela ne tienne, changeons d’emplacement ! Entre une bouée et la côte, ça mord : une donzelle attrape son premier poisson, un brosme rouge plein d’arêtes que l’on relâche aussitôt. Elle pousse des glapissements de petite fille apeurée devant ce poisson qui se débat et ne veut surtout pas le toucher. Le manger, oui, le détacher, non ! Elle compatit, mais trouve plaisant de tirer la ligne à la surface, poisson ferré.

cabillaud peche Lofoten

Puis c’est une suite de lieus jaunes. Autre emplacement, un cabillaud ! Il est gros, lourd, et se tortille, difficile de l’amener sur le pont sans qu’il se détache. De fait, ce sera notre seule grosse prise, d’autres ont réussi à s’arracher de l’hameçon avant la surface. Je crois avoir touché quelque chose de gros, mais ce n’est que le fond qui a accroché, par la dérive du bateau. Je finis par ramener une algue. Autre endroit et, cette fois, j’ai à peine le temps de filer la ligne qu’un lieu mord, puis un autre et un autre. Nous avons bientôt une quarantaine de poissons, dont une morue. Nous arrêtons là, nous aurons largement de quoi dîner ce soir et demain.

peche du jour Lofoten

Il nous faut encore vider les prises sur l’étal du ponton. Les filles se désistent, c’est gluant et presqu’encore vivant, pouah ! Ce sont les deux garçons qui s’y collent, dont moi. Nous lavons les poissons vidés au jet, puis nourrissons les mouettes des déchets. Elles ne semblent pas affamées, il y en a plein le port aux heures de pêche.

vider les poissons Lofoten

Pas de poissonnerie en Norvège, sur les côtes ; chacun va pêcher son poisson tout seul, comme on va cueillir un fruit au verger. Allemands et Polonais viennent jusqu’ici en camping-car pour louer des canots et pêcher de quoi remplir les congélateurs, nous apprend le chef. Leur pêche est quasi-industrielle, ils en revendent une partie chez eux à prix d’or.

cabillaud avant apres

Qu’importe, nous avons bien dîné !

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Pêcher à Tahiti

Il est des pêcheurs polynésiens passionnés comme I. Certain sont nés pêcheurs déjà dans le ventre de leur mère. I. pêche toutes de sortes de poissons en respectant la nature, pas de surconsommation, il pêche ce dont il a besoin. Il chasse au fusil à harpon sur les patates, à la canne, au filet, au trident, à la traîne, il pêche aussi la langouste dans les périodes autorisées. Il pratique le rama komaga qui consiste à ramener le poisson en eau peu profonde puis à l’assommer avec un bois ou un couteau.

Pour le rama (pêche au flambeau), une pêche de nuit récifale, il utilise aujourd’hui le morigaz (lampe tempête) ou le moripata (lampe torche). Autrefois, on attachait des feuilles de cocotiers séchées (niau) pour servir de torche et éclairer le pêcheur. A chacun sa technique.

S’il veut attraper des rougets ou des carangues, il utilise des mouches ; si ce sont des mérous alors ce sera une queue de bernard-l’ermite ; pareil pour les bonites ou les veve (mérous de récif) ; avec le nylon, il attrapera thons, thasards, ruhi (carangues noires), mahi mahi (dorades coryphènes).

Avec le moulinet, c’est une pêche plus sportive et physique qui permet d’attraper de grosses prises plus au large comme les espadons. Il pêche au paru ce qui lui permet d’atteindre les poissons des profondeurs supérieures à 200 m. Avec son potoru (harpon à 3 dents) ou son pumaha (harpon à 4 dents) il tire sur ce qui se présente depuis le récif à marée basse. Il appâte les balistes avec des bénitiers (coquillages, pas récipients d’église). Avec son bateau, il pratique la pêche rodéo qui consiste à suivre les balistes en zigzaguant entre les patates de corail. Il pourrait parler de ses pêches pendant des jours et des jours. C’est un être passionné, qui respecte les traditions, sa culture tout suivant le mode de vie contemporain.

Le cycle de reproduction de l’anguille est encore mal connu. Les jeunes anguilles vivent dans les rivières des vallées. Au moment de la reproduction, elles commencent une migration qui durera de cinq à dix ans pour les mâles et entre douze et vingt ans pour les femelles. Elles vont rejoindre le site de reproduction dont le lieu reste encore peu précis dans le Pacifique. Après la reproduction, les individus décèdent. Les larves à tête plate qui naissent en mer seront ramenées vers les côtes par les courants marins. Il leur faudra environ 6 mois pour parcourir cette distance, elles se métamorphoseront en civelles près des côtes. Elles colonisent les embouchures des cours d’eau entre octobre et avril, avec un pic à la nouvelle lune de décembre. Une civelle mesure 50 mm de long pour un poids de 100 mg. Dix-neuf espèces d’anguilles connues dans le monde sont menacées d’extinction. Il y a une surpêche en Europe. Un marché économique important 230 000 tonnes de poissons vendues par an dont 70% aux consommateurs japonais. Un kilo de civelles a atteint 2 millions de FCP ! A vos porte-monnaie…

A Fidji, un chef traditionnel affirme que les Chinois vident la côte de ses ressources. Les hommes d’affaires chinois paieraient les villageois pour obtenir le droit de pêcher comme bon leur semble, poissons, crustacés, bêches de mer. Ils pilleraient le thon également, au grand dam des locaux. Ils ont pillé le Pacifique Nord, ils poursuivent dans le Sud. Aux Salomon, au Vanuatu, les gouvernements accordent trop de licences, à Fidji également. Les bateaux chinois sont partout à Fidji, aux Salamon, au Vanuatu, à Kiribati. Et après ?

Les 2600 océanographes réunis en Australie ont prévenu que les récifs coralliens dans le monde étaient en train de décliner rapidement et ont appelé à agir de manière urgente sur le changement climatique pour sauver ce qu’il en reste. La grande barrière de corail en Australie, qui est pourtant un des écosystèmes marins les mieux protégés au monde, a enregistré un déclin de 50% de ses coraux en un demi-siècle. Plus de 85% des récifs dans le triangle asiatique des coraux sont menacés directement par des activités humaines, telles que le développement des régions côtières, la pollution et la surpêche. (Le triangle asiatique = Indonésie, Papouasie-Nouvelle guinée, Philippines, Salomon, Timor oriental. Il couvre près de 30% des récifs coralliens du monde et abrite plus de 3000 espèces de poissons).

Hiata de Tahiti

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