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Information trompeuse

« Dans d’autres pays, nous constatons la présence d’un nombre considérable d’organes de presse concurrents. Chaque journal tire de son côté et cette déconcertante diversité de tendances engendre dans l’esprit de l’homme de la rue une confusion complète ; dans notre pays véritablement démocratique, une presse homogène est responsable devant la nation de la justesse de l’éducation politique qu’elle fournit. Les articles de nos journaux ne résultent pas de telle ou telle fantaisie individuelle mais constituent un message adulte et soigneusement préparé adressé au lecteur qui, de son côté, le reçoit avec le même sérieux et la même profondeur de réflexion »

Ces phrases sont-elles de Trump ? Elles ne le peuvent, étant trop bien écrites. Sont-elles de Mélenchon ? Elles le pourraient. Elles résument parfaitement la position du président de la France insoumise comme celle du président des Etats-Unis national-identitaire : qui n’est pas avec moi est contre moi et « les médias » sont mes ennemis (sauf ceux que je possède… dans tous les sens du terme). Les fake news sont des news si je décide qu’elles le sont car je ne crois pas à « la » vérité – sauf celle de Dieu, du Parti ou du Peuple.

Ces phrases sont de Vladimir Nabokov dans Brisure à senestre, chapitre XII, p.744 Pléiade. Elles ont été écrites entre 1942 et 1946 et reproduisent le discours totalitaire soviéto-nazi de l’époque.

« Nos journaux sont complètement et absolument indépendants par rapport à toute influence qui ne correspond pas aux intérêts du Peuple auquel ils appartiennent et qu’ils servent à l’exclusion de tout autre maître ».

Seul « le Peuple » a raison et ce qu’il pense est donc « la vérité » en soi – que moi, dictateur ou chef de parti, est évidemment bien le seul à « révéler » en son nom. L’indépendance n’est qu’un mot ; elle n’existe que si elle suit la ligne, sinon elle est qualifiée de propagande. En témoigne Mélenchon et son média qui ne cesse de publier des nouvelles orientées, grossies, déformées – dans le sens de l’illusion idéologique. Moins on sait, moins on doute ! Tout comme Trump et tous les dictateurs qui trompettent.

Il existe des faits et des interprétations, des événements réels et diverses façons de les voir, ainsi que divers jugements qui sont des opinions. Le média objectif n’existe pas, la seule façon honnête d’approcher la vérité du réel est de multiplier les points de vue et d’aller voir ceux qui ne pensent pas comme vous.

Quant au Peuple, il n’a pour opinion commune qu’un ramassis moyen de préjugés et de connaissances ancrées et répétées entre soi dans les groupes divers qui composent le pays ; le Peuple n’est pas la vérité en marche et n’est dépositaire d’aucune sagesse des nations. Le fantasme du Peuple homogène qui aurait des idées homogènes dont rendrait compte une presse homogène a un nom : cela s’appelle le totalitarisme. Rêvé par les catholiques révocateurs de l’Edit de Nantes, par les fascistes adeptes de feue la gloire romaine, par les communistes œuvrant pour la « dictature » du prolétariat, par les nazis croyant imposer la supériorité de la « race » aryenne, par les islamistes pour qui seul l’islam est la solution à tout et au reste, par le « politiquement correct » du puritanisme petit-bourgeois qui a abouti, en réaction, au trumpisme national-identitaire.

La pensée unique est un danger car elle se paye de l’illusion et du mensonge. Or qui décolle du réel risque de retomber lamentablement et cruellement lorsque le réel s’impose à lui.

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Les clowns politiciens

Cela fait une semaine que les clowns occupent les médias pour leur théâtre d’ego. Les clowns de droite. A-t-on idée des ravages que fait dans l’opinion un tel histrionisme ? Les bobos de l’élite parisienne matamorent dans une guéguerre de bac à sable comme s’ils avaient deux ans !

Alors que la récession économique menace, que la pression fiscale de gauche assomme TOUS les revenus grâce à la CSG, impôt qui serait plus « juste » parce que prélevé sans état d’âme sur n’importe quel revenu (même celui des chômeurs et des allocataires de solidarité !) avec le même pourcentage – alors que la TVA (qui a 3 taux différents) est un CHOIX de consommation… La « justice » de gauche n’est pas la mienne. Le « pareil pour tous » n’a jamais été de la « justice » mais de la flemme d’État pour ceux qui sont au pouvoir.

Sur la droite, plusieurs remarques :

Faire voter les militants seulement et pas les sympathisants (comme au PS) ridiculise les médias et les sondages, qui font l’amalgame sans réfléchir ; les résultats ne peuvent qu’en être biaisés. Qui connaît « les militants » de l’UMP ?

La désorganisation desdites élections (qui ne portaient que sur quelques 200 000 personnes) ne sont pas à l’honneur des politiciens UMP. N’ont-ils jamais vu une seule élection ? Méprisent-ils autant « le peuple » que de leur faire faire la queue pour voter comme sous l’URSS ? N’ont-ils rien vu, rien prévu, rien pensé ? Ont-il laissé faire les « petites mains » incapables parce qu’eux sont « au-dessus » de cette « intendance » ?

Plus la base est large, moins il y a possibilité de fraude. Réserver le vote aux seuls militants, c’est donner la tentation à certains groupes partisans de truquer les résultats. On a vu la différence entre le congrès de Metz et la primaire socialiste. La droite est-elle incapable d’observer ce que font ses adversaires et d’en tirer des leçons ?

On ne vote pas pour un chef de parti comme on vote pour un candidat à une primaire présidentielle. La droite, consciemment mais à tort, affecte de confondre les deux. Copé est probablement plus ferme et plus pugnace comme chef de parti que Fillon. C’est ce qu’on demande à l’UMP quand on est militant. Quant à être le prochain candidat à la présidentielle, il y a une marge. Le profil n’est absolument pas le même. On le voit avec Hollande, bien loin de son modèle Mitterrand. Il apparaît comme président de « la gauche », voire du seul PS, alors qu’il devrait l’être de TOUS les Français. Ce que les gaullistes ont toujours su faire… jusqu’à Sarkozy.

Le rassembleur à droite n’existe pas encore. Mon avis est que Nicolas Sarkozy, qui a été rassembleur sans conteste, ne peut revenir, même comme « recours ».  Il a fait son temps. Copé apparaît pour l’instant comme un apparatchik, pas un homme d’État. Fillon a l’image d’un velléitaire pour qui il suffit de se présenter pour rallier les suffrages, ce qui n’est pas légitime après 5 ans de suivisme obéissant comme Premier ministre de Sarkozy.

C’est qu’on a changé d’époque et les politiciens semblent ne pas le savoir. Le quinquennat est une nouveauté absolue en France. Le chef de l’État y devient non plus le monarque au-dessus des partis qu’avait voulu de Gaulle (concept auquel ni Chirac ni Jospin n’ont jamais rien compris), mais le rassembleur de son camp contre le camp d’en face. Ce qui implique un parti offensif pour attirer les mécontents du gouvernement en place, mais aussi une capacité à ménager le centre, sans lequel AUCUNE élection française présidentielle ne peut se gagner. Le nouveau rôle du Premier ministre n’est donc plus celui qu’avait défini Pompidou avec de Gaulle : il n’est plus la courroie de transmission entre Exécutif et Législatif, mais l’exécuteur des décisions présidentielles, comme un Secrétaire d’État américain.

La grâce de Hollande (à peine plus d’un pourcent) a été le rejet de Sarkozy, absolument pas sa capacité à se concilier le centre. Comme si la leçon Ségolène Royal avec François Bayrou en 2007 n’avait pas été apprise. Jean-François Copé va-t-il faire la même erreur ? Ce pourquoi François Hollande n’a pas (encore) l’image de président légitime de « la France » : c’est lui qui doit décider, et pas laisser discuter et attendre, ni laisser faire.

Je ne suis militant dans aucun parti, mais si j’étais UMP, nul doute que je quitterai le navire rouillé et ingouvernable pour me rallier à l’union centriste (ou à Marine Le Pen si l’extrémisme devait être ma tasse de thé). La leçon du vaudeville dérisoire de cette semaine est donc la régénération du centre (auquel Fillon devrait faire les yeux doux s’il était fin politicien) et le confort de l’extrême-droite, qui se réjouit de l’avoir bien dit.

Sauf que les cartes sont brouillées : les « spécialistes » ont l’air de dire – l’air de rien – que la droite de gouvernement est coupée en deux, une partie voulant droitiser à la Patrick Buisson et faire alliance avec Le Pen, l’autre partie restant libérale et sociale comme feue l’UDF. Mais les résultats des votes des seuls militants (et pas des sympathisants !) ne permet pas de l’affirmer. Les militants ont voté pour un organisateur ferme, un chef de parti capable de tenir tête à l’idéologie de gauche et de tenir ses troupes dans les Assemblées. Sans préjudice du prochain candidat à la présidentielle que personne ne voit encore surgir aujourd’hui. Il y a des copéistes qui ne voteront pas Copé comme président, et des fillonnistes qui ne voteront pas Fillon.

Et il manque surtout le rassembleur pour 2017… Pas grave, la gauche n’en avait pas jusqu’à un an avant les présidentielle. Mais elle avait des politiciens aptes. Avec ce qui vient de se passer, on ne voit de moins en moins à droite.

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