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Vallée d’Artcha Maidan et gorges de la Sarimat au Tadjikistan

Notre nuit est chaude, dans le calme étonnant de la maison de terre. Ni les ânes, dont le braiment hystérique est vraiment laid, ni le chant matinal des coqs déplumés aperçus hier ne nous troublent. Le jour, par la fenêtre, nous réveille vers 6 h. Cela paraît tôt, mais nous nous sommes couchés dès la nuit tombée, avant 20 h. Les malades semblent aller mieux, altitude, fatigue et parasites cédant progressivement la place.

La bouillie d’avoine, servie ce matin pour caler les estomacs, rencontre un certain succès mais pas le saucisson, de porc cette fois, pour la minorité non-musulmane et essentiellement russe du pays. Rios nous dit « qu’en hiver » même les musulmans du pays se laissent tenter par la viande de porc puisqu’il n’y a rien d’autre d’assez gras à manger pour résister aux basses températures.

Lorsque nous quittons la ferme, c’est pour rejoindre la piste d’hier et la prolonger. Il fait plus frais au matin et c’est moins désagréable. Lorsque nous marchons au soleil il est très vite accablant, mais de larges plages d’ombre dues aux falaises nous ménagent des instants glacés. Nous longeons le même torrent, sur les bords duquel poussent des eucalyptus. Ils donnent de l’ombre pour les pauses.

Lors de l’une d’elles, nous rencontrons une famille russe de Saint-Pétersbourg. Leur origine est reconnaissable et je la donne à Lufti avant qu’il ne parle avec eux. Comment en juger ? Eh bien par ce chic décontracté de citadin cultivé, un rien branché à l’américaine, par lequel un Pétersbourgeois veut se distinguer des moujiks et surtout des administratifs Moscovites. Lufti en est soufflé. Outre le guide tadjik aux cheveux longs, les Russes sont quatre. Un jeune homme d’environ 18 ans est le plus flamboyant avec sa chemise blanche ouverte sur la gorge, son teint rose, ses lunettes noires et son foulard noué sur la tête en pirate. Elancé et musclé, il porte un gros sac à dos avec les affaires de sa mère (qui ne porte rien). Le garçon est le portrait du père en plus fin, avec encore cette grâce de poulain qui n’a pas fini de croître. Il est manifestement la fierté des parents, de sa mère qui lui pose la main sur le bras, du père qui le couve du regard. Sa sœur, plus effacée, semble un peu plus âgée.

La piste reprise, en sens inverse des Russes, les ânes ne tardent pas à nous rattraper et nous pausons pour les laisser passer. Une petite brise tiède sèche la transpiration dès que l’on s’arrête. Sur la basse continue du torrent s’élèvent des cris aigus d’oiseaux, rares parce qu’il y a trop peu d’arbres. Parfois poussent quelques têtes de coquelicot d’un rouge vif. Nous croisons quelques gamins montés sur des ânes et des adultes qui se rendent aux villages voisins.

Des bergeries de pierres sèches, aux toits en claie de bois recouvertes de terre, sont installées le long de la piste à un endroit.

Nous suivons la rivière, donc sa vallée appelée Artcha Maidan. Lors d’une pause, à la fin, je veux remplir ma gourde déjà vide de la chaleur du matin. Le groupe s’éloigne sur le sentier. Mais je glisse sur le rocher mouillé et me voilà à prendre un bain glacé dans le torrent à remous. L’eau est peu profonde et je me redresse bien vite, mais je suis trempé. Le soleil est tel que c’en est presque un bonheur. Je ne tarde pas à sécher, seul le slip restera mouillé plusieurs heures. Je comprends pourquoi les soldats dans la jungle n’en portent jamais : l’humidité qu’il garde, dans les plis serrés sur la peau, engendre irritations et mycoses.

Une heure plus tard, sous un gros bouquet de saules, au bord du torrent, nous nous arrêtons pour le pique-nique. Lufti veut rafraîchir la bouteille de Fanta, mais l’impétuosité de l’eau finit par l’emporter sans qu’il s’en aperçoive. La boisson fera peut-être le bonheur d’un gamin en aval ? Riz, salade de tomate-concombre-oignon, fromage fondu en rouleau, saucisson de porc et conserves de poissons font notre ordinaire.

Sieste sous le saule aux feuilles vert-doré. Certaines sont trouées par quelque insecte et le soleil joue dans leur dentelle. La brise qui monte dans la vallée les agite doucement, fracassant la lumière comme dans un kaléidoscope. La chaleur est intense par intermittence, lorsque l’astre réussit à percer le feuillage.

Nous poursuivons la vallée par les gorges qui se resserrent autour du torrent, les gorges Sarimat. Puis nous bifurquons brutalement à la perpendiculaire pour attaquer directement la montée. Notre déshydratation est telle que nous avons du mal à grimper les dernières pentes – les plus dures selon le topo d’hier. De petites pommes acides nous rafraîchissent un peu dans le premier tiers, mais nos pauses nécessaires se font chaque fois plus longues. Cela fait déjà onze heures que nous marchons depuis ce matin, avec deux pauses d’une heure à une heure et demie. Le circuit, tel que décrit dans la brochure, est trompeur. Il accumule les temps de marche (que les soviétiques comptent hors de toute pause, au contraire de nous !), les dénivelées (nous partons de 1700 pour arriver à 3000, soit 1300 m dans la seule après-midi), et l’altitude (aucune adaptation, direct à plus de 3000 m le premier jour…).

Nous montons donc ces dernières heures à pas lents, dans la chaleur, vers les bergeries d’altitudes situées sous le col. J’ai descendu trois gourdes d’un litre aujourd’hui, en plus du litre habituel de thé ou café du petit-déjeuner ! Avec la soupe et les boissons du soir, cela fera largement 5 litres.

Des enfants en brochette nous accueillent, en contrebas des bergeries. Ils sont au courant de notre venue, plusieurs treks par an passent rituellement ici. Lufti les connaît bien à force de passages. Les enfants adorent cet événement dans leur existence toujours pareille. Ils vivent rythmés par les saisons : d’avril à octobre en altitude à garder les troupeaux ; le reste du temps en bas, au village.

Nous ne voyons que les plus petits, jusque vers l’âge de dix ans. Les autres sont à l’école ou au travail avec les adultes.

Parvenus aux bergeries, après une forte pente, nous sommes invités à entrer dans une cabane. Elle est tout en longueur, éclairée seulement par la porte. Les pierres sèches laissent filtrer quelques rais de lumière et passer des filets de vent, parfois. Le feu de bois fume, allumé près de la porte. Des tapis usés et terreux sont installés au sol, mais l’altitude semble-t-il les immunise de parasites. Le toit est bas, plat, fait de troncs d’arbres posés sur les murs et étanchéifiés tant bien que mal au torchis. Assis en tailleur tout autour du tapis central, nous buvons le thé rituel (j’en descends six tasses !), mangeons le yaourt de brebis, des abricots et des pommes fraîches du coin. Des bonbons brillants et du sucre candi, achetés en magasin, donnent à l’accueil traditionnel un éclat moderniste. Ils montrent que l’URSS a posé son empreinte. Les petites filles, prenant très au sérieux leur rôle de futures maîtresses de maison, sont aux petits soins pour nous, surtout pour les garçons.

Il nous reste encore une quarantaine de minutes de montée raide après cet intermède de repos. Le camp est installé sur un pâturage à peu près plat, au milieu des bouses, sous le col Tavassang à 3300 m, que nous passerons demain.

Je m’empresse de monter la tente, avec Bénédicte, afin de pouvoir me poser à plat sur le dos, sans plus rien à grimper, et écrire quelques pages reposantes. Le vent thermique qui coule du col nous glace et, dès qu’elle est montée, nous sommes bien sous la tente.

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Ragazzi des plages

torses nus plage

Délurés sont les très jeunes Italiens. Pas très sportifs en général. Mais de toutes les couleurs de cheveux, la péninsule étant un carrefour en Méditerranée.

torse nu jeune et vieux

Certains rappellent David, celui de Michel-Ange, en plus tendres et plus jeunes. Quelques années avant d’être épais et poilus comme papa et grand-papa.

slips de plage

Mais la plage est l’aire de jeu du jour entier. Petits et grands s’y promènent et s’y reposent, heureux d’être là, en compagnie, sans même se connaître.

ragazzi torse nu

Les ragazzi locaux restent en bande. Amicaux et sensuels pour attirer les filles. Qui ne s’y frottent qu’en bande elles aussi.

gamin torse nupréados

 

Le petits machos s’entraînent déjà pour paraître plus grands.

gamin en slip plage

Les préados se démènent, avant et après le bain, mais toujours autour du bain, le moment de la journée où leur peau s’érotise, bien plus que le regard, qui ne vient que vers 13 ans. Ils se plongent dans la vague, se roulent dans le sable, s’étreignent en luttes amicales, laissent la brise du soir hérisser le derme sur leur poitrine.

jambes et torse nu

La jeunesse brûle son énergie à la plage. Elle fait le plein de soleil, se sensations et de liberté avant l’hiver. Qui est là aujourd’hui.

adolescent torse nu

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Felouques

Nous avons bien visé : lorsque nous quittons le temple d’Edfou, nous croisons les hordes de touristes tout rouge et en short qui déboulent des bateaux pour visiter le temple. Nous avons eu la chance d’y voir très peu de monde. Dommage qu’un gardien rustre se soit empressé de soulever de son balai des nuages de poussière en balayant l’intérieur juste quand nous visitions.

felouque du nil

Nous gagnons les bords du Nil, le troisième fleuve du monde long de 6671 km dont près de 1200 km en Égypte. Les felouques sont quatre, flanquées d’un bateau à moteur de taille respectable qui nous servira de salle à manger. Un déjeuner nous attend et nous prenons place tandis que l’engin décolle de la rive et commence à voguer sur le Nil pour rejoindre les esquifs à voile un peu plus loin. Le moteur n’a pas de coque et le bruit est assez fort mais nous parlons peu et mangeons bien. Divers plats sont apportés sur la table, rondelles de tomates et de concombre, aubergines grillées, larges frites à l’ancienne, pâtes, épinards.

inscription arabe sur felouque du nil

Dji nous présente les équipages : deux matelots par felouque, plus Adj, un juvénile de 16 ans qu’il a vu naître et grandir en prenant pension dans sa famille lors de sa première installation en Égypte. Aujourd’hui, c’est un jeune mâle vigoureux et de belle prestance, à la peau dorée et aux yeux noirs ornés de longs cils. Sa lèvre arbore une ombre de moustache, apanage du mâle arabe, sa démarche est royale. Il a toujours connu Dji dans sa famille et le considère comme un parent. Il a d’ailleurs un geste d’affection délicat en lui empruntant sa longue écharpe égyptienne pour la nouer autour de son cou.

felouquier sur le nil

Nous partons. Comme Gérard Labrunie, dit « de Nerval », voyageur désintéressé, sensible à la beauté des choses et des gens, qui fit le trajet en cange sur le Nil en 1843. Chaque felouque fait 13 m de long, 5 m au plus large, et porte un mât à corne de 23 m de haut une fois entièrement déployé. En dessous de la lourde barre de notre felouque, qui porte le nom de Louxor, est calligraphié en rouge d’un arabe appliqué : « Allah est le plus grand ». La voile est composée de bandes de grosse toile cousues ensembles. Elle est de forme trapézoïdale, tendue sur une longue corne qui se relie au premier tiers du mât. La brise est faible mais suffit à pousser les bateaux à contre-courant. Ils glissent avec lenteur et grâce sur l’eau à peine ridée, remontant sans effort le courant avec le majestueux silence des cygnes. C’est à peu près le seul moment du séjour où nous serons à la voile ! Par flemme, sous prétexte que nous somme toujours au plus près « des horaires », nous ne reverrons pas la voile, et nous le regrettons tous.

course en felouque sur le nil

Nous remontons lentement le long des rives, croisant des bateaux-usines dont les fenêtres des cabines nous apparaissent comme autant de grottes funéraires creusées dans les parois verticales de leurs bords. La lumière descend sous un ciel couvert. Elle devient nacrée. Un dernier rayon jette un éclat d’or sur le vert des rives où l’herbe, les roseaux et les palmes déchirent la couleur. Des oiseaux passent au ras de l’eau, tout blanc, le bec en avant : des ibis ? Hélas, il n’y en a plus sur le Nil ; ce sont sans doute des aigrettes. Un lourd vol de canards chasse vers la rive, nous les avons dérangés dans leur pêche.

felouque nil

La nuit tombe et nous stoppons sur une rive. Les felouquiers plantent dans l’herbe un gros crochet de fer en guise d’ancre et d’amarre à la fois. Nous dînons sur le bateau à moteur, arrêté enfin, dont les bancs sont aménagés et garnis de coussins. La conversation porte sur l’Islam, sur les temples, sur les interprétations classiques et sur celles recourant aux mystères de l’initiation.

notre felouque sur le bord du nil

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