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Cathédrale de Monreale 2

Le cloître, attenant, est de style arabo–normand, très calme malgré l’afflux des touristes. Il a été construit en carré de 47 m de côté pour la paix des bénédictins sur ordre de Guillaume II. Les petites arcades de style arabe sont soutenues par 228 colonnettes ornées de mosaïques incrustées. Le rythme des ombres sur le dallage fait un bel effet sur les photos.

Leurs chapiteaux sont tous différents, présentant des scènes pieuses ou profanes. : feuilles corinthiennes, animaux, scène de vie rurale ou de chevalerie, acrobates, allégories sacrées, épisodes des Testaments. Nous passons des dizaines de minutes à les observer les unes après les autres. Le guide : « je ne peux pas toutes les commenter ! ». Une fontaine glougloute et donne de la fraîcheur, comme à l’Alhambra de Grenade.

Mérule a déjà fini son carnet à spirales et acheté un cahier en plus. Elle note tout. Déjeuner au Bricco e Baccho pour notre dernière cène.

Nous sommes en avance à l’aéroport et nous prenons notre avion du retour tranquillement. Le Boeing 787–800 n’est pas plein, contrairement à l’aller. Mon siège est confortable pour un charter Transavia parce que je suis placé près des sorties de secours sur les ailes. J’ai d’ailleurs la mission de tirer la poignée de la porte en cas d’évacuation ordonnée « trois fois » par l’équipage. Avec un soleil qui descend, on peut apercevoir le voile brumeux jaune au-dessus de la terre. Ce peut être de la poussière ou de la pollution.

Les trésors et les deux célibataires, Mérule et Fanny, prennent Orlyval avec moi pour rentrer dans Paris. À Antony, un jeune couple de 16 ans jeune et beau comme à cet âge m’ont laissé la place pour que je sois avec mes copines. Au moment des adieux, regard à la fois attentif et gêné de celles qui craignent qu’on leur demande un échange de mél ou de téléphone.

FIN

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Cathédrale de Monreale 1

La ville de Mont Royal a été élevée sur le mont Caputo, dominant la vallée de l’Oreto et la Conca d’Oro, la conque d’or, nom donné à la baie de Palerme. Nous visitons l’abbaye bénédictine Sainte-Marie la neuve, fondée en 1174 par le roi Guillaume II. C’est le chant du cygne de l’art normand de Sicile. La cathédrale Unesco est ornée à l’entrée d’une Porta Regia en bronze de Bonnano Pisano de 1186 ; avec ses 7,8 m sur 3,9 m, ce sont les plus grandes portes en bronze de leur époque. Elles comportent quarante panneaux qui représentent des scènes de l’Ancien et du Nouveau testament. La façade comporte deux tours, dont une inachevée, et un portique à colonnes. L’abside comporte des arcs entrelacés à colonnes de style normand avec des incrustations de calcaire et de lave noire de style byzantin.

L’intérieur est grand et justifie la queue qui cherche à entrer. Nous n’y sommes pas serrés dans ces 102 m de long entre les dix-huit colonnes antiques séparant les trois nefs. Les 6340 m² de mosaïques des XIIe et XIIe sont probablement l’œuvre d’artistes locaux, ou certains venant de Venise car elles sont moins sévères que les byzantines. Dans l’abside centrale le Christ Pantocrator, la Vierge et l’Enfant entourés d’anges, d’apôtres et de saints ; dans le chœur, la vie du Christ et les vies de saint Pierre et saint Paul. Le premier est le fondateur de l’Église, sur les ordres du Christ, le second est le fondateur de la Doctrine.

Dans la nef centrale la Genèse, dans les nefs latérales la vie du Christ. Une vraie bande dessinée pour illettrés de l’an mil (et incultes d’aujourd’hui).

Dans le sanctuaire est représenté le fondateur, Guillaume II, couronné directement par le Christ ; la main de l’Éternel donne sa bénédiction à l’orientale, avec les trois doigts ouverts. Sur une autre mosaïque, il offre la cathédrale à la Vierge assise sur un trône orné de pierres précieuses ; les anges descendent pour recevoir l’offrande. Le roi est habillé en Byzantin avec l’aube, la dalmatique ornée du laticlave et le supermeralis croisé sur la poitrine. A droite du chœur est disposé son tombeau en marbre blanc commandé en 1575, et le sarcophage de Guillaume 1er en porphyre rouge. A gauche du chœur dans un autel, le cœur de saint Louis, décédé de la peste devant Tunis en 1270.

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Chapelle palatine

La chapelle palatine de Roger II, bâtie en 1132 et consacrée en 1140, est dédiée à saint Pierre. Elle est ainsi nommée parce qu’elle se trouve dans le palais du roi. L’ensemble est particulièrement somptueux, synthétisant toutes les formes d’arts de la Méditerranée en l’an mil : architecture romane mais colonnes antiques, arcs brisés arabes dans la nef, mosaïques byzantines du XIIe, marbre et pavement de la Rome de Cosme, coupole byzantine. Le pavement de marbre aux motifs stylisés est typiquement arabe. Son plafond en bois à muqarnas arabes présente une suite de caissons finement décorés. Trois nefs et trois absides, chœur surélevé. Le trône de Roger II se trouve tout au fond de l’église, en face de l’autel.

Des mosaïques byzantines sur fond d’or ornent les murs et le chœur avec un Christ Pantocrator surmontant une Vierge orante, les Évangélistes, les Prophètes, les Archanges, les Anges, saint Pierre et saint Paul – tout ce petit monde est disposé hiérarchiquement autour du Fils de Dieu. Les artistes sont probablement venus du Moyen-Orient tant leur style est maîtrisé. Les mosaïques du vaisseau sont des scènes tirées de l’Ancien testament. Le Christ bénissant tient l’Évangile ouvert à la page où se trouve la phrase en grec et en latin : « Je suis la lumière du monde, celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la Vie. » Dans la Création des animaux, manque le serpent. L’entrée du Christ a Jérusalem voit des enfants se mettre nus pour paver le sol de leurs vêtements. Saint Pierre marche aux côté du Christ et saint Jean derrière.

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Palais normand de Palerme

Au petit-déjeuner, nous avons des fromages de Sicile fades, ce pourquoi ils ajoutent parfois des épices, mais ils restent caoutchouteux. Des œufs sur le plat au jaune pris, du jambon cru salé, mais des gâteaux variés : un cake à l’orange, un quatre-quarts aux pommes, une tarte à la pâte d’abricot très sucrée. Certains offrent également des morceaux de pizza, des œufs durs, des salades, des tomates crues.

Cette journée du retour ne se passe pas sans quelques visites le matin. Nous partons à huit heures et notre programme est chargé jusqu’à l’avion.

Nous commençons par le palais normand Unesco sur base phénicienne du septième siècle, un ksar arabe du Xe transformé par les Normands en palais royal au XIIe. Son prestige a été retrouvé au XVIe siècle sous les vice-rois espagnols et sous les Bourbons. Aujourd’hui c’est le siège de l’assemblée régionale de Sicile.

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Quartiers de Palerme

Nous repassons dans les ruelles étroites du quartier de la Kalsa, les restes de la Palerme arabe. L’endroit était hier sale et populaire, il est aujourd’hui de plus en plus rénové et bobo. Mais une rue au marché typique est devenue le lieu de la fripe et de la malbouffe, avinée et assourdissante le soir, comme le dit le guide. La voie des Latrines ? des laitiers ? des Lattarini ? La via Lattarini a sa plaque écrite en trois langues, comme au temps des Normands : en latin, hébreu et arabe.

Le café Stagnitta, près de la piazza Bellini, est le préféré du guide ; il vient y acheter son café en grains pour le moudre à la maison. Le Financial Times lui a consacré un article, vantant la maison ouverte en 1928.

Place de la Vergogna (de la honte), en réalité piazza Pretoria, trône une gigantesque fontaine de marbre aux nombreuses statues imitées de l’antique, œuvre de Camilliani et de Naccherino (1555-1575). La honte parce que le prince n’avait plus assez de fonds pour finir et à intrigué pour la faire financer par le Sénat de Palerme.

Juste après elle, la place des Quattro Canti, la rencontre des quatre quartiers historiques de la ville par le croisement des via Vittorio Emanuele et Maqueda. Elle fut tracée en 1620 sous le vice-roi espagnol. Pourquoi une fille porte-t-elle une robe moulante parme qui met en valeur ses seins en avant et ses fesses en arrière ? Son mec tatoué de partout en tee-shirt rouge vif, casquette rouge et baskets rouges, tatoué de partout, ne se rend pas plus compte qu’elle de l’apparence qu’il a. Une sorte d’affirmation de soi naïve, insolite, contente de soi. Il faut s’aimer fort pour se présenter ainsi au naturel, sans chercher à corriger ses défauts.

Nous terminons la journée par un retour au premier jour, à la cathédrale, fondée en 1170 mais lourdement corrigée aux XVIIIe et XIXe siècle. L’extérieur côté chœur est décoré d’incrustations de basalte noir aux motifs géométriques, de style arabo–normand. La cathédrale a été bâtie sous Guillaume II, mort sans héritier en 1189. La chapelle de Rosalie présente une châsse en argent et un portrait par un peintre qui aimait à se croire célèbre.

En passant, l’église du Gesu, élevée entre 1564 et 1633, à la coupole baroque du XVIIe et au décor de stuc et marqueterie de marbres sicilien du XVIIIe siècle baroque exubérant. Un mariage s’y tient. Les murs sont en mosaïque de marbres polychromes, les putti sont en stuc, des peintures ornent tous les endroits laissés libres. C’est un peu lourd, incite au fusionnel, à l’unisson du regard, sans aucun recul.

Je ne suis pas fâché d’en finir pour ce soir après avoir arpenté tant de rues et vu tant d’églises, admiré tant de décors.

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San Cataldo de Palerme

À côté de la Martorana, après le déjeuner, nous revenons voir l’autre église Unesco, San Cataldo. Saint Catalde est né au VIIe siècle en Irlande, à Munster ; devenu abbé, il pèlerine en Terre sainte et est élu, sur le chemin du retour, évêque de Tarente. Construite en 1160 en style-arabo-normand, elle a pour caractéristique un plan carré, un véritable cube de pierre surmonté de trois coupolettes rouge vif comme en orient arabe. Ce sont les trois petites excroissances d’une chapelle du palais transformée en église de style arabo–normand. Les ouvriers étaient en effet Fatimides et ont orné l’intérieur d’un pavement de marbre serpentin et de dalles de porphyre rouge. On peut apercevoir une nette séparation entre le chœur aux mosaïques et la nef agrandie ornée de peintures. Les mosaïques présentent la vie de la Vierge en trois étapes, l’Annonciation, la Naissance du Christ, la Dormition.

Entre les deux, une affiche sur un mur : « Turisti, fatevi una vita ! » – touristes, ayez une vie ! Il est vrai que voyager n’est pas seulement se déplacer pour jouir d’un autre endroit, mais se former et développer ses connaissances par sa curiosité.

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La Martorana de Palerme

Nous visitons l’église de la Martorana, Sainte-Marie de l’Amiral (au patrimoine de l’Unesco). Dame Eloisa della Martorana institua à la fin du XIIe un couvent auquel l’église fut cédée en 1433 par Alphonse d’Aragon. Amiral (qui vient de l’arabe émir) car Georges d’Antioche, émir de Roger II, la fit construire en 1143. Elle ferme à 13 heures, place Bellini, ce pourquoi nous devons la voir avant le déjeuner. La visite aussi une famille du Nord ou de Normandie, plutôt populaire et chaleureuse. Le père est un peu gros mais les deux garçons d’environ 20 et 18 ans, sont sveltes et juvéniles. Tous deux portent une boucle dans la narine et des cheveux platinés. L’aîné porte la chemise ouverte jusqu’au sternum, qu’il ne boutonnera qu’une fois entré dans l’église. Il est exubérant et se contorsionne lorsqu’il se signe devant l’autel, exagérant le mouvement et ondulant du dos, geste de foi incongru parmi les touristes.

La façade est baroque 17e mais l’édifice est en croix grecque et présente des mosaïques byzantines sur fond d’or. Le Christ en majesté est cette fois visible, flanqué de huit prophètes et de quatre évangélistes. Une mosaïque à droite de la nef montre Roger II couronné par Jésus, sans passer par le pape. Tous les hommes sont pécheurs, donc doivent arborer l’air sévère, en attente de la sévérité de Dieu, selon l’esthétique byzantine. En face à face, l’émir Georges est aux pieds de la Vierge et humblement aplati. La coupole est bâtie sur un octogone. Ce passage architectural du plan carré de la nef au plan circulaire de la coupole via la forme octogonale est symboliquement le passage de la terre au ciel.

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Églises et oratoires de Palerme 2

Dans l’église de Saint-Dominique, le tombeau du juge Falcone. Il est fleuri et orné de petits papiers d’encouragement ou de poèmes de la piété naïve populaire. L’église ferme à 13 h.

Église San Francisco d’Assisi va fermer elle aussi. Un gothique XIIIe avec huit statues allégoriques de Serpotta datant de 1723. Le guide nous traîne en coup de vent voir la quatrième chapelle à gauche de l’entrée, due à Francesco Laurana et Pietro de Bontade en 1468.

Le bedeau me dit curieusement que les photos sont interdites, sauf avec les smartphones. Règlement stupide qui ne tient aucun compte des pixels désormais très élevés des appareils récents. Pour protéger quoi ? Quels droits ? La foi n’est-elle pas pour tout le monde ?

En face de l’église, la Focacciera de San Francisco, le seul commerçant de Palerme qui a refusé de payer le pizzo, l’impôt, à la mafia. Nous irons à six, sauf les deux trésors et la Mérule, y déjeuner de linguini au poulpe et à l’encre de seiche pour moi, avec une granita au café en en guise de café.

Un kid blond en short, l’air décidé, attend sa mère qui traîne pour acheter le pique-nique à la Focaccia qui fait aussi boulangerie. Il peut avoir dans les 12 ans et il est bien pris dans son T-shirt rouge arborant un taureau, animal qui lui sied à merveille.

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Églises et oratoires de Palerme 1

Nous allons visiter à pied l’oratoire de Santa Cita de la confrérie du Rosaire. Il comprend des stucs de Giacomo Serpotta. Il illustre les 15 mystères du rosaire et est orné partout de putti jouant. Anthony Blunt, le fameux critique d’art anglais, pédé et espion soviétique (c’est presque un pléonasme), l’un des Cinq de Cambridge (Kim Philby, Guy Burgess, Donald Duart Maclean, Anthony Blunt et John Cairncross), trouvait ces putti nus les plus beaux de toute l’Europe. Il avait du goût. Je ne sais pas s’il a trouvé au-delà du rideau de fer des êtres aussi charmants.

La Bataille de Lépante est illustrée en ronde-bosse avec deux enfants au-dessous, de part et d’autre d’un trophée dont les trois mousquets sont tournés vers le vaincu  : un enfant chrétien à gauche, le vainqueur qui lève les yeux et ouvre sa poitrine, et un enfant musulman à droite, le vaincu qui baisse les yeux et garde son bras droit sur son ventre.

Mais l’oratoire de San Lorenzo est encore meilleur, les putti de Serpotta en 1723 osant allègrement jouer à des jeux érotiques. L’un caresse le ventre de l’autre tandis qu’il piétine le zizi d’un troisième, un autre empoigne carrément la queue de son copain qui ouvre la bouche dans un hoquet de surprise, deux se regardent langoureusement, tout nu, deux autres dans le même appareil s’embrassent à pleine bouche. Les Franciscains de 1699 n’y voyaient pas malice.

Les vies de Saint-François et de Saint-Laurent, en plus sérieux, se font face. Les anges adolescents sont moins joueurs et plus pudiques, bien que quasi nus sauf un linge qui s’accroche aux parties ; on le regrette presque.

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Musée archéologique de Palerme 2

Six métopes du VIe siècle avant sont recueillis ici en triade delphique : Artémis, Léto et Apollon. Un métope montre Héraclès terrassant le taureau de Crète, un autre l’enlèvement d’Europe, et deux métopes Déméter et Coré.

Les trois métopes du temple C taillés dans du tuf blanc vers 520 avant, montrent le quadrige du Soleil, Persée tuant Méduse, Héraclès châtiant les brigands Cercopes. Les Cercopes sont des enfants nains de Théia, fille d’Ouranos, qui ressemblent à des singes. S’étant moqué d’Héraclès, il les attacha la tête en bas et les transporta sur son épaule, ce qui leur permit de voir la pilosité noire de son cul. Leur mère les avait avertis qu’un certain Melampygos (fesses-noires) leur chercherait noise. Il faut dire qu’ils avaient tenté de voler les armes du héros pendant son sommeil.

Deux fragments du temple F montrent Dionysos menaçant un géant et Athéna en terrassant un autre. Les métopes du temple E en tuf et marbre de Paros vers 460 avant, sont consacrés à la lutte d’Héraclès contre une Amazone, aux noces de Zeus et d’Héra, et à Artémis transformant Actéon en cerf parce qu’il a osé la voir nue, Athéna et le géant Encelade. Chacun remarquera – et moi le premier – la recherche de l’expression et du mouvement.

L’éphèbe de Sélinonte est une petite statue en bronze du Ve siècle avant.

Le sourire de la Gorgone est reconstitué ; ses terres cuites protégeaient les temples sur les frontons.

Dans un couloir, une statue romaine de l’empereur Claude, régnant de 41 à 54 de notre ère, un fragment de torse mâle délicat de la même période, et deux sarcophages puniques de Cannita.

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Musée archéologique de Palerme 1

Nous allons en bus jusqu’au musée archéologique situé dans un ancien couvent bâti au XVIIe siècle pour les Oratoriens de saint Philippe Néri. Seul le rez-de-chaussée est visitable, le reste est en restauration. Une manif de collégiens braille on ne sait quels slogans au mégaphone, dans une atmosphère bon enfant. L’Opera dei pupi de Palerme est sis dans une ruelle, célèbre attraction de marionnettes siciliennes.

Après le petit cloître d’accueil du musée, où trône une statue de marbre musculeuse sur une fontaine du XVIe, nous pouvons voir la pierre de Palerme, un basalte orné de hiéroglyphes égyptiens datant de 2900 avant notre ère et qui donne tous les noms de la cinquième dynastie de 3200 à 2900 avant.

Mais le clou du musée est la salle de Sélinonte, visitée aussi par une classe de jeunes Allemands du supérieur férus d’histoire grecque. Les étapes de la construction des temples et la reconstitution des VIe et Ve siècles avant de la ville sont démontrées.

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Palerme, musée Abatellis

Nouvel arrêt, dans la ville de Palerme cette fois, pour voir en coup de vent (en moins d’une heure) le musée régional dans le palais Abatellis. C’est hors programme et il doit fermer à 18 heures. Il recèle quelques trésors. Notamment une grande fresque du XVe siècle du Triomphe de la Mort où les Importants sont représentés en beaux costumes, la main à la ceinture au-dessus du pubis, signe des dominants. Ils sont touchés par les flèches du squelette qui chevauche le cheval squelettique et se retrouvent en bas du tableau, tout navrés. Dont le pape, la gorge transpercée d’une flèche. Les belles femmes aux robes à la mode et aux bijoux étincelants de même. Sur la gauche, les pauvres, vieux, handicapés, bancroches, lépreux, restent tel qu’ils sont : en bas. Deux personnages regardent le spectateur, le peintre et son fils préparateur. Nul ne connaît leur nom. Le thème est tardif car la dernière Grande peste date de 1348.

Le buste d’Eleonore d’Aragon de Francesco Laurana, œuvre délicate du XVe.

La Vierge de l’Annonciation d’Antonio da Messina se trouve ici. Le tableau est sobre, délicat, symbolique. La Vierge élève une main qui s’effraie tandis que l’autre accepte. Elle a le visage en ovale, le voile bleu et la lumière qui vient de l’arrière, comme probablement l’archange annonciateur. Il n’est pas représenté, ce qui est nouveau dans l’art, pour mettre l’accent avant tout sur la jeune fille.

Trois saints d’Antonio da Messina sont aussi exposés, saint Augustin, saint Grégoire et saint Jérôme.

La Madonne au Bambin et trois anges est de Jean Gossaert, de Maubeuge, fin XVe. Il présente toute la progéniture de putti dodus et roses à demi déshabillés, de la maternité triomphante. Tous chantent de joie et à la gloire de l’Enfant.

Sur le Corso Umberto, le long de la mer, la jeunesse fait du vélo, du foot, du cricket, des abdos, elle court. Tous exercent leur corps sur la pelouse face aux vagues, comme un lointain écho à la palestre athénienne. Les corps, dans le sud, sont assez libres, plus que dans les pays contaminés par la pruderie anglo-saxonne. Il n’est pas rare de voir des lycéens en débardeur sortant du lycée, des filles au ventre nu ou portant leur chemise nouée sans soutien-gorge.

Pour nos deux dernières nuits, nous revenons au même hôtel qu’à l’aller, le Principe di Villafranca, où l’on nous redonne d’ailleurs exactement les mêmes chambres.

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Cathédrale de Palerme

Palerme a été fondée par les Phéniciens, un comptoir dans un « bon port » (panormos). La flotte de Carthage, battue à Himère par les Grecs en 480 avant, s’y réfugie. Au cours de la première guerre punique, elle est conquise par les Romains en 253 avant, puis par les Ostrogoths en 535 après, une fois l’empire romain effondré. Reprise par Bélisaire pour Byzance, Palerme est conquise par les arabes en 831 jusqu’à ce que les Normands s’en emparent en 1072. Les Hohenstaufen en sont maîtres en 1194, puis les Angevins en 1266, puis les Aragonais en 1282 et les Espagnols.

Devant la Porta Nuova, puis devant la cathédrale, le guide égrène la litanie des comtes et des rois, des remaniements et des styles. Nous ne visitons pas toute la cathédrale, fondée par Guillaume II vers 1135, prévue le dernier jour, mais nous allons voir notamment les tombeaux royaux.

Deux tours encadrent la façade du XIVe ornée d’un portail gothique et reliée par des arcs à un clocher refait au XIXe. A gauche de la façade, la loggia dell’Incoronata des XIIe et XVIe, où les rois se présentaient au populo après leur couronnement. Fuga au XVIIIe a remanié le Duomo, notamment par une coupole contestable, qui écrase le bâtiment. Nous entrons dans la cathédrale par le côté droit, début XVe.

Dans les chapelles (visite payante), les tombeaux des souverains de Sicile. Celui en porphyre rouge de Frédéric II Hohenstofen la « stupeur du monde » (1250), celui d’Henri VI (1197), celui de Roger II (1154), celui de sa fille Constance (1196).

La chapelle à droite du chœur contient les reliques de sainte Rosalie dans une châsse en argent de 400 kg, datant de 1431. Elle est la patronne de Palerme. Rosalia Sinibaldi est née vers 1125 au sein d’une famille noble normando-sicilienne et morte en 1160. Son père fut sauvé à la chasse par un comte qui demanda sa main. Malgré ses 14 ans, elle vit dans son miroir le visage de Jésus et refusa le mariage. Elle s’est retirée en ermite dans une grotte des monts Sicanes, sur les terres de son père, avant d’émigrer vers une autre grotte du mont Pellegrino, au-dessus de Palerme. Durant la peste de 1624, aucune sainte n’est parvenue à guérir la ville, seule Rosalie apparut à une femme qui but de l’eau de san Pellegrino et fut sauvée. La peste s’est arrêtée l’année suivante et ce « miracle » a fait de Rosalie l’une des trois grandes saintes de Sicile avec Lucie de Syracuse et Agathe de Catane. Après la découverte de son corps le 15 juillet 1624 et pour remercier la Sainte d’avoir sauvé leur ville de la peste, les Palermitains ont pris l’habitude de la célébrer durant un festival de six jours appelé U Festinu, du 10 au 15 juillet de chaque année. Mais elle n’a guère fait de miracle durant la pandémie de Covid 19. Ses festivités ont été annulées.

Des lycéens visitent le monument aussi, tous en T-shirt sauf un débardeur, certains en uniforme. Mais la couleur unique du tee-shirt ou du débardeur fait uniforme. Quelques filles arborent leur ventre nu. Les élèves sont sympathiques avec leur professeur malgré leurs hormones de 16 ans. L’enseignement général n’est que jusqu’à 15 ans et, dès le lycée, les adolescents choisissent leur spécialité : lettres, sciences, économie, langue. Ils ont seulement quatre matières, aucune autre. Ils sortent un peu plus faibles que les élèves français en culture générale mais les matières qu’ils préfèrent sont mieux assimilées avant l’université. Ils parlent par exemple bien mieux les langues que les Français, les pratiquant en intensif. Côté vacances, ils ont trois mois l’été de mi-juin à mi-septembre, mais seulement une semaine à Noël et une semaine à Pâques. Pas plus. Il est mauvais de se déshabituer à travailler.

Le bus passe devant le Palais de justice, imposant, de style mussolinien, net et carré. Mais il s’avère beaucoup trop petit tant il y a de procès. le guide nous dit qu’il y a à Palerme autant d’avocats qu’à Rome. Une annexe a été bâtie derrière.

A l’hôtel Principe di Villafranca, via Giuseppina Turrisi Colonna, une fois les chambres prises (sans ascenseur) et les bagages déposés, un peu rafraîchis, nous allons dîner au Vino Divino, Piazza Sant’Oliva. Le restaurant est original, les murs couverts de casiers à vins de Sicile et d’Italie. Il sort par son menu de la trilogie italienne des pâtes, risotto et pizza. Nous avons une friture en entrée, puis un demi-filet de dorade (trop cuit) sur une purée de potiron, et une salade de fruits en dessert. Les boissons sont à notre charge, nous prenons évidemment de l’eau en bouteille, et un bon vin blanc de Sicile à six euros le verre. Il est bio.

Une averse chaude nous mouille lorsque nous sortons du restaurant à la nuit tombée. Notre hôtel est le Principe de Villa Franca, autrement dit le prince de Villefranche. Il n’est qu’à quelques centaines de mètres.

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Vers la Sicile

Partons en voyage. Ce sera un long voyage tant le pays est culturellement dense.

Le Boeing 737–800 est plein. Ce sont des touristes français pour la plupart.

Arrivé à Palerme, il fait chaud, 24° à l’ombre, mais de la pluie est tombée le matin. L’atmosphère est donc quasi tropicale avec une odeur salée de mer, laquelle moutonne sous un petit vent.

Le guide a la cinquantaine et porte une grosse boucle à chaque oreille. Il est diplômé d’histoire de l’art et vit à Palerme, étant guide agréé italien. Peut-être a-t-il même pris la double nationalité. Il a fait ses études à Paris avant de les poursuivre à l’université de Palerme, en italien.

Le bus nous conduit au centre-ville où nous irons voir la cathédrale avant de rejoindre l’hôtel vers 18h40.

Le guide est intarissable. Il nous défile au micro toute l’histoire de l’île en vingt minutes, du paléolithique supérieur à nos jours, des restes d’Homo Sapiens dans une grotte au-dessus de Palerme aux Sicanes, successeurs des Cyclopes selon Thucydide en 2000 avant, des Elymes vers 1200 avant qui seraient des Troyens enfuis, des Sicules indo-européens vers 1500 avant, des Phéniciens qui multiplient les comptoirs au IXe siècle avant, des colons grecs au VIIIe siècle (Naxos en 757 par les Eubéens, Syracuse par les Corinthiens), les Romains qui envahissent l’île en 241 avant, avec Verrès propréteur en Sicile en 73 accusé d’abus de pouvoir, de détournement de fonds, de vol d’œuvres d’art par Cicéron lui-même, les Vandales qui s’emparent de l’île en 478 de notre ère, puis les Byzantins en 534, en 827 l’invasion arabe appelé par le rebelle Euphémios – encore un traître – et la Fatimides jusqu’en 1040 et les Normands jusqu’en 1194 où l’empereur germanique Henri VI s’en empare jusqu’en 1266 où les Anjou arrivent jusqu’en 1282 où ils sont chassés à Pâques par les « vêpres » siciliennes ; ce sont alors les Aragon jusqu’en 1503 puis les Espagnols jusqu’en 1735, puis les Bourbons jusqu’à ce que Garibaldi les chasse en 1860 pour intégrer la Sicile à l’Italie.

Dès l’aéroport, nous sommes accueillis par les photos du juge Falcone, assassiné le 23 mai 1992 par la mafia qui a fait exploser carrément l’autoroute (sur laquelle nous passons) avec 600 kg de nitroglycérine. Deux piliers rouges délimitent l’endroit exact où la voiture a sauté, tuant le juge, sa femme ainsi que sept de de ses gardes du corps. 57 jours plus tard, ce sera le tour du juge Borsellino. C’est à cette époque que la population a basculé contre la mafia.

L’Église est restée muette – jusqu’à Jean-Paul II, et malgré le père Frittita qui aidait la mafia et « pardonnait » volontiers – au nom de Dieu évidemment – et ne fera que… quatre jours de prison. Les politiciens de la Démocratie soi-disant « chrétienne », étaient corrompus. Une pancarte sur la falaise en face arbore « Mafia no ».

Devant le rail de récupération des bagages, le juge est présenté en photos noir et blanc à 3 ans, 14 ans, 18 ans, puis adulte barbu. Si la mafia sicilienne n’existe quasiment plus, d’autres mafias existent en Italie et se fondent peu à peu dans l’économie, notamment numérique, devenant invisibles.

La mafia est née selon le guide de l’unité italienne. Les nobles expropriés ont engagés des mercenaires pour défendre leurs terres. Ces milices sont devenues une mafia à leur profit, un système parallèle d’autorité en résistance à l’État central. Mais elles prenaient racines dans les habitudes du banditisme local, bien antérieur à l’unité italienne.

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