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Tous pêcheurs à Tahiti

Article repris par Medium4You.

Poisson d’eau douce importé d’Amérique du Nord et du Vietnam, faut-il interdire la consommation du panga ? Élevé en masse au Vietnam, la bête est sous les feux de la critique sur Internet. L’autre jour c’était de la part des autorités : « Manger trop de thon, c’est pas bon », donc le panga est le poisson des cantines scolaires et des sociétés de restauration. Le Président Temaru vient de signer une convention avec la société chinoise « Jinghim Invesments » pour un vaste projet d’aquaculture au pays. Pourquoi ne pas le faire avec les propres variétés de poissons d’eau de mer du fenua ? Dans une grande surface de Tahiti vous payerez 995 CFP le kilo de tranches dégelées de panga contre 1395 CFP le kilo de thon blanc. Y’a pas photo ! Et toujours dans le poisson, le gouvernement Temaru interdit la commercialisation du mako ! Ce requin dit mako ou requin-taupe bleu appartient à la même famille que les grands requins blancs. Il est de couleur bleu-nuit sur le dessus et blanc en dessous. Hydrodynamique, sa taille maximale est de 4 m quand même.

panga

Aux Tuamotu, à Anaa chaque jardin avait un cocotier qui était destiné à recevoir les queues des poissons que le pêcheur clouait à son retour. On exposait ses trophées pour informer ainsi le reste de la population. Les ancêtres remerciaient de cette façon dame Nature. Ce sont les queues des poissons du large qui sont clouées, les grosses prises, pas les poissons du lagon. Il faut respecter un sens : on les cloue par rapport à la mer et au lever du soleil, jamais du côté du tombant du soleil. Toujours vers l’Est ! Et si, en période d’abondance « matarii ni’a » on a pris beaucoup de poissons, la coutume veut que ces prises soient partagées avec la famille et les amis. Quand le pêcheur monte sur son bateau et arrive au lieu de pêche, il prie Dieu. Ne pas partir pêcher si l’on s’est disputé ! Pour la pêche à la tortue, les rituels étaient encore plus stricts et nombreux. Il ne fallait pas avoir de rapport sexuel la veille, pas de dispute, faire attention au matériel de pêche, pas de bruit dans la maison, personne ne devait enjamber le matériel. Au retour à la maison, il fallait enterrer les restes des prises dans le sable, les poissons comme les tortues, ne jamais les jeter à la mer. Autrefois on clouait la tête de la tortue les yeux face au lagon. Si l’on faisait ça, on était sûr d’en avoir tous les jours. Les jeunes d’aujourd’hui « oublient » ou n’ont cure de ces superstitions.

Un deuxième evoxymetopon poeyi a été péché au large de Tetiaroa. Et de deux ! La bestiole mesure 2m10 pour 5 kg, capturée à 190 m de profondeur. Et si l’on faisait un recensement de cette espèce dans les eaux polynésiennes, ça vaudrait peut-être un autre « prêt » en euros, non ?

troca coquillage

13 ans après la dernière campagne la pêche au troca a été rouverte à Hao durant le mois de novembre. Les quotas ? 192 kg par travailleur, payé 300 CFP le kilo. A la fin du mois on peut espérer une rémunération de 57600 CFP. La nacre extraite de ces coquilles servira à fabriquer des boutons. Les hommes plongent, les femmes nettoient. Le résultat devra être parfait, coquille vide, sans odeur, nettoyée.

Les Maoris de Nouvelle-Zélande luttent pour sauver l’anguille géante, espèce menacée d’extinction. Anguilla dieffenbachii est la plus grosse anguille d’eau douce du monde. Elle peut atteindre 2 m de long, peser 20 kg et vivre plus de 100 ans. Autrefois prospère dans les lacs et les rivières, elle est aujourd’hui au bord de l’extinction. Si cette anguille est un géant si fragile c’est qu’elle n’atteint sa maturité sexuelle qu’après des décennies de croissance. Les plus chanceuses quittent alors les lacs et les rivières, gagnent l’océan et parcourent des milliers de kilomètres pour se reproduire une seule et unique fois dans les profondeurs du Pacifique et y mourir.

anguilla dieffenbachii

La Living Oceans Foundation termine ses recherches aux Tuamotu et à la Société.  Alors docteur, quelles nouvelles ? Des différences notables entre les deux archipels. Beaucoup des récifs autour des îles de la Société ont été endommagés par l’étoile de mer épineuse, Acanthaster Planci ou dévoreuse de corail, dite Teramea tandis que ceux des Tuamotu sont en bonne santé en général. Les récifs des Tuamotu contenaient une plus grande diversité d’espèces de corail, plus âgées et plus grandes que celles trouvées dans les Iles de la Société.

Hiata de Tahiti

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Maurice Revelli, Un banc sur la plage

Cela commence par un meurtre, cela se poursuit par un émerveillement. Le ton est donné, nous sommes entre Nick Carter et Delly. Un jour un homme, sur une plage, rêve au lever du soleil. Une femme l’aborde, timidement, début d’une belle histoire d’amour. Mais le rose va s’affronter au noir. La femme est l’ex d’un gangster de la côte ; jaloux, il ne supporte pas qu’un autre la touche. D’où ses intimidations répétées, qui dérapent parfois dans le crime… Mais c’est que notre héros ne s’en laisse pas conter !

Le summum est atteint juste au milieu du livre. Vers la page 156, le lecteur ébahi découvre que le personnage principal sait parler aux femmes, réussit sa résilience après un deuil, pratique depuis 40 ans l’aïkido, le karaté, le kendo et quelques autres sports de combat, n’a jamais peur, repère l’ennemi au sixième sens, étend tous ses adversaires en moins de deux. Il a en outre tout compris à l’économie et à la société. Cela fait beaucoup, un trop. Nous sommes dans le western où le bon écrase la brute et le truand pour un happy end bien moral. L’époque rêve-t-elle tant de superhéros ou les commentaires tous dithyrambiques sur Amazon sont-ils de complaisance ?

Mais, passées ces quelques pages d’outrances auxquelles on ne réussit pas à croire, l’action reprend, efficace et bien menée. Pas un temps mort après la lourde philosophie plaquée comme elle vient. Clémence est belle, idéale et astrophysicienne ; elle a une relation fusionnelle avec son fils Thomas, battu avec elle par son ex-mari corse. Gilles a trois enfants déjà grands, une ex-épouse adorée décédée dans un accident de la route. De ces fragilités vont naître un « grand amour », distillé comme il se doit, à petite dose.

Je retiens l’atmosphère du sud, faite de convivialité, de pragmatisme, de relations quotidiennes près du terrain. Dans la ville de S. où il vient chaque été depuis dix ans, Gilles retrouve de la chaleur humaine. Les copains lui font déguster des plats de saison et jouer aux boules ; les copines veulent le marier ou lui confient leurs filles pour une randonnée. Le gendarme, ex-élève assidu d’aïkido du maître, est prêt à l’aider. Que faut-il de plus au bonheur ? Ce ne sont pas les petits malfrats en mal d’identité des cités en proie au chômage qui vont se mettre en travers du chemin. Il suffit de les regarder dans les yeux et de contrer leurs attaques désordonnées. Ce n’est pas le grand banditisme qui va s’imposer, l’amour est en-dehors du circuit commercial de ces affairistes particuliers.

Les forts sont-ils vraiment forts ou le font-ils seulement croire ? Comme l’écrivait La Boétie, l’ami de Montaigne, la servitude est volontaire et seule l’amitié permet de vivre libre. Refusez le jeu de violence des malfrats, des économistes, des politiciens – et vous voilà libres. Maurice Revelli met cette philosophie en scène dans la vie privée de son héros. Nino le gamin de banlieue refuse de suivre la horde poussée au crime ; Clémence refuse la violence conjugale ; Maurice refuse le chantage ; Léa refuse le viol ; Gilles refuse qu’on lui impose quoi que ce soit, de renoncer à se marier comme de se marier. « La vraie force (…) serait bienveillante car juste et équilibrée, apaisante aussi », déclame l’auteur, fort de la leçon des arts martiaux (p.446). Un repère qui sert de modèle à ceux qui se cherchent, pas tous irrécupérables.

Belle histoire, bonne action, optimisme philosophique : il n’en faut pas plus pour faire un bon livre de plage.

Maurice Revelli, Un banc sur la plage, 2011, éditions Baudelaire, 451 pages, €23.12 

Qui est Maurice Revelli ?

L’auteur de ce premier roman est né en 1955 et a écrit des nouvelles, primé au concours 2011 de Roussillon-en-Provence. Fils de maçon, c’est la mort de son père qui a déclenché son questionnement sur la vie. Une élève d’aïkido l’a poussé à écrire. Il pratique cet art martial depuis 16 ans et l’enseigne comme 3ème dan. Ancien ingénieur devenu directeur d’une usine de fourneaux pour cuisiniers professionnels dans la Drôme, aujourd’hui chômeur et guitariste à l’occasion dans le groupe Holly Stone Combo.

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