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Mosquée, alcool et chienne à Tahiti

Mosquée, pas mosquée ? Le jeune imam serait-il au chômage ? Le micro-trottoir dernier laisse incertain le projet de construction d’un tel édifice, les confessions religieuses restent vigilantes mais ne seraient pas défavorables à l’installation d’une mosquée. Alors peut-être ben qu’oui, peut-être ben qu’ non ? Arriverait-il le temps des Tahitiennes voilées de noir, couvertes des pieds à la tête ? En attendant, le Centre islamique de Tahiti (CIT) sis au 11 rue Gauguin à Papeete, récolte des fonds en métropole pour la construction de la « grande mosquée de Tahiti ». Le jeune imam parti en France depuis 6 mois voulait prendre l’avion de retour à Roissy, peut-être pour démarrer le ramadan à Papeete, les USA lui ont refusé le transit à Los Angeles. Qu’à cela ne tienne, il est quand même arrivé à destination en transitant par la Nouvelle-Zélande ! Quelques jours auparavant, deux individus (non identifiés) avaient déposé une tête de cochon devant le CIT.

burqa

On va enfin pouvoir picoler sans faire des kilomètres pour acheter la gnôle et le uaina (picrate) ! Le tribunal administratif a annulé l’arrêté interdisant la vente d’alcool. Ouf ! L’arrêté pris le 5 août dernier par l’ancienne mairesse est caduque. Deux sociétés avaient contesté le texte devant la juridiction, la brasserie de Tahiti et le supermarché de Papeari. N’oubliez pas que nous n’avons toujours pas d’eau au robinet… alors, Manuia (A la vôtre) ! En fait, je suis une mauvaise langue, nous n’avons de l’eau que pendant les semaines précédant les élections ! Cette année, nous avons été très gâtés avec toutes ces élections, mais depuis, la source a tari !

vahine seins nus offerte

Une chienne était retrouvée sous une voiture la gorge tranchée. Une riveraine l’a conduite chez la vétérinaire de garde. La chienne surnommée Blanc-Blanc avait été opérée durant deux heures et sauvée in extremis. Elle n’aura survécu que trois jours. Plainte ayant été déposée par la sauveteuse et la vétérinaire, la Police après enquête a retrouvé l’égorgeur. Cet individu serait un chômeur de 47 ans, originaire du Vanuatu qui aurait expliqué que sa bête lui causait des problèmes, aboyait et courait après les jeunes du quartier. Il se serait mis en tête de l’abattre et de la manger. Après quelques bières, muni d’une lame bien aiguisée, il s’est rendu près de sa chienne lui a tranché la gorge. Il l’aurait relâché en attendant qu’elle meure. Mais la chienne s’est sauvée et a pu être secourue. L’article 521-1 réprime ces faits : deux ans d’emprisonnement et 3,68 millions de XPF d’amende.

L’ouverture de l’hôtel « The Brando » fait craindre aux prestataires de services qui proposent des excursions en voilier à Tetiaroa, de ne plus y avoir accès. « Aujourd’hui nous sommes surveillés. Quand nous arrivons, ils nous demandent le nom des bateaux, le nombre de passagers » indique P. Gasparini, gérant de l’Escapade Charter Tahiti.

Le dessinateur de « l’Actu vue par P’tit louis » dans la Dépêche a été « remercié ». Le groupe Auroy (Dominique Auroy) c’est : l’Eau Royale, les vins de Rangiroa, les barrages, la Maroto, les éoliennes, Hachette Pacifique, le Royal Tahitien, etc, excusez-moi si j’en oublie, qui a acquis 66% des parts du quotidien polynésien. La Dépêche du dimanche est « en deuil », surement plus de moni (fric) pour les encres de couleur, si mince qu’elle pourrait passer entre un mur et son affiche sans la décoller avec un tout petit peu de remplissage insipide.

Hiata de Tahiti

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Toxiques polynésiens

Kava ou pas kava ? Vous connaissez la boisson du Vanuatu, narcotique naturel ? La communauté européenne, encore elle, a interdit la vente du kava en 2002. Le kava servait à la fabrication de médicaments pour remplacer les somnifères ou les anxiolytiques de synthèse pour traiter l’angoisse. A la fin des années 90, plusieurs cas d’hépatite toxique ont été attribués au kava – qui fut donc interdit sur le marché européen. Les scientifiques réunis en congrès ont tenté de démontrer que le kava est un produit sain. Leur étude a montré que des molécules situées dans l’écorce de la plante – dans les épluchures – ont un certain degré de toxicité. Le kava est consommé depuis des milliers d’années. Les parties toxiques ne sont pas utilisées quand le kava est consommé de manière traditionnelle. Alors, peut-on en déduire que l’on aurait vendu des épluchures à l’Europe ?

Une jolie petite bestiole nommée également cent-pieds ou centipèdes. Ici, nous avons la joie de rencontrer Scolopendra subspinipes et Scolopendra morsitans. Environs 20 cm de long pour ces dames. Myriapodes (mille pattes) qui appartiennent à l’embranchement des Arthropodes, pattes articulées et squelette externe. Venimeuses et dangereuses selon l’endroit de la morsure. Elle est équipée de crochets à venin articulés qui forment une paire de tenaille acérée au niveau de la tête. La bête est craintive, non agressive, elle ne mord que pour se défendre. Redoutable carnassier, elle se nourrit d’insectes rampants : araignées, fourmis, cafards qu’elle chasse la nuit. Elle adore les lieux sombres, humides, rocailleux. Elle s’invite dans les maisons occasionnellement. Elle visite les salles de bains ou dans les lits s’ils sont posés à même le sol… (Avis à la population !)

Elles peuvent vivre entre 5 et 7 ans. La reproduction est surprenante. La gestation dure 9 mois ½ avant la ponte d’une vingtaine d’œufs. La femelle les place au frais sous une pierre. Une quinzaine de jours plus tard, l’éclosion des œufs a lieu. Les jeunes d’un centimètre et demi vont se nourrir et muer jusqu’à leur taille adulte. S’il vous arrivait d’être mordu, il est recommandé de plonger le plus rapidement possible la partie atteinte dans l’eau la plus chaude possible. En randonnée, la flamme d’un briquet fera l’affaire (comme pour les guêpes, la température inhibe le venin). Si vous faites une réaction allergique, direction immédiate aux Urgences.

Atlas en mains, vous découvrirez un archipel polynésien, au centre du Pacifique, au sud de l’Équateur, proche des Kiribati. Cet archipel vient de nouer des relations diplomatiques avec Erevan… et reconnait la République autoproclamée du Haut-Karabakh, une région de Transcaucasie source de tensions entre l’Arménie et son voisin l’Azerbaïdjan. Grand de 26 km et peuplé de 11 000 habitants. Voici la preuve objective d’un fonds de commerce qui repose sur le business des reconnaissances diplomatiques. Kiribati et le Vanuatu usent du même monnayage de souveraineté.

Hiata de Tahiti

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Le Clézio, Raga

L’océan Pacifique recèle une myriade d’îles. Parmi elles, l’archipel des Nouvelles-Hébrides en Mélanésie, devenu indépendant en 1980 sous le nom de Vanuatu. L’une des perles de l’archipel est l’île Pentecôte, appelée ’Raga’ en langue locale. C’est là qu’un beau jour de 2005, la frégate ‘La Boudeuse’ a débarqué Jean Marie Gustave Le Clézio à sa demande. Il voulait aller au plus loin possible – donc aux antipodes. Sur une île, bien sûr, puisque lui-même est îlien de Maurice. Au cœur d’un continent inconnu. En effet, ‘Raga’ est sous-titré « approche du continent invisible ».

Invisible, ce continent marin l’est autant par l’absence de reconnaissance internationale (combien de divisions ? aurait demandé Staline) que par l’indifférence de ses explorateurs (qui ne cherchaient que leur imaginaire). Après avoir cherché « les Indes » (et trouvé l’Amérique), ils se sont mis à chercher le continent-équilibre qui compenserait la masse des terres au nord. Les îles n’ont été pour les marins que des réservoirs d’eau, de fruits et de femmes. Parce que les gens du cru étaient affables et s’offraient, ils ont cru trouver leur « paradis », ce jardin d’Eden où les fruits poussent naturellement tandis que filles aux seins pommés et garçons à la nudité svelte se pâment en amour sur demande. Les marins et les explorateurs n’ont donc pas « vus » la réalité, mais seulement leurs fantasmes. Certains ethnologues ont même inventés des mythes structurels, tel ce ‘culte du Cargo’ qui, semble-t-il, n’existe pas. Ils ont tourné le Gol, ce rite de fécondité qui fait se jeter du haut d’une tour une liane au pied, en attraction folklorique.

Pourtant, reconnaît Le Clézio qui est allé les voir, le peuplement des îles est une véritable épopée humaine. Elle a exigé du courage, de la foi et de multiples inventions, telles la pirogue à balancier, les voiles en fibres de pandanus et le repère aux étoiles. Ce n’est pas le hasard des courants et des vents qui ont fait s’échouer les hommes sur les îles, comme ce qu’a tenté de démontrer Thor Heyerdhal. « Le désir était au cœur de ces hommes, de ces femmes, il les poussait vers l’avant, il leur faisait voir un monde nouveau dont ils avaient besoin » p.14.

Le « récit » que fait l’auteur de son exploration physique et littéraire tourne vite en « essai » sur ce qui tient à cœur à Jean Marie Gustave : l’accord d’un peuple avec une terre et l’impérialisme de la civilisation (occidentale). Charlotte est une « femme en lutte » contre l’homme qui la bat ; elle réinvente le troc d’œuvres artistes contre la monnaie. Dans les bibliothèques, l’auteur recueille les descriptions des explorateurs, missionnaires et anthropologues.

D’une écriture plus fluide qu’auparavant, avec un vocabulaire enrichi, s’égrènent en neuf chapitres les étapes de cet itinéraire initiatique d’auteur :

  1. Raga, situation de l’île ;
  2. Le voyage sans retour, rêve de l’épopée ancestrale ;
  3. Le ciel austral, métaphysique habituelle depuis ‘Le chercheur d’or’ et ‘Désert’ ;
  4. Melsissi, la rivière de l’île qui relie les hauteurs à la côte ;
  5. Blackbirds, ces navires noirs qui venaient enlever des hommes pour la traite esclavagiste aux mines d’Australie et de Nouvelle-Calédonie jusque dans les années 1900 – la honte de ‘la civilisation’ ;
  6. Taros, ignames et kava, ces plantes endémiques soignantes et nourricières ;
  7. Dieu, dieux, ombres, du message désecclésialisé du Christ aux dieux anciens et aux poétiques légendes ;
  8. L’art de la résistance, à l’Occident prédateur, à la civilisation matérialiste, à la domination mâle ;
  9. Îles, qui se referment sur leurs trésors, « Suis-je moi aussi une île ? » p.118.

L’île du continent invisible est une quête et un mythe leclézien. « Raga la muraille de lave aux sommets cachés par les nuages. Raga la mystérieuse, où ils ouvriront des chemins neufs, en frissonnant de crainte, entre les tombeaux des anciens disparus » p.26 Elle est le trésor d’enfance, le souvenir ancestral de l’île Maurice, mais aussi la quête incessante du bonheur par le littérateur, « le simple accord entre un être et l’existence qu’il mène » comme le disait Camus (Les Noces). « A Raga, on est pénétré à chaque instant par le sentiment diffus, inexplicable, de la divinité » p.77.Dans le village de la montagne, « les habitants de ces lieux se sont détournés du progrès et de la vie moderne, ils se sont retournés vers ce qui les avait toujours soutenus, la connaissance des plantes, les traditions, les contes, les rêves, l’imaginaire – ce que les anthropologues ont schématisé sous le nom de ‘kastom’, la tradition » p.32. Voilà du plus pur Le Clézio.

Depuis ce conservatisme anthropologique, littéraire et sympathique, pétri d’humilité chrétienne et écologiste, féministe et altermondialiste – tout ce qui plaît tant à l’air du temps – l’auteur approuve et désapprouve. Il aime les chercheurs « qui ont ouvert les yeux de l’Occident sur la richesse et la complexité des peuples de l’Océanie, sur leur science de la navigation et leur agriculture hydraulique, sur leur art, leur culture, leur cosmogonie » p.119 Il stigmatise « le pire, c’est tout ce qui s’est ensuivi, la profusion de reportages, récits d’aventures, films documentaires à sensation (…), toute cette scorie qui a contribué à donner aux Européens l’image d’un monde perdu, habité par des anthropophages survivants de l’âge de pierre, obsédés par la magie et ignorants de la civilisation » p.121

N’allez pas sur ces îles, vous allez les contaminer avec tout ce que vous êtes ; laissez-les vivre comme elles l’entendent, respectez leur être. Tel est le message universel de Le Clézio : « Les sociétés des grands socles continentaux, malgré leurs religions ‘révélées’ et le caractère soi-disant universel de leurs démocraties, ont failli à leur tâche et nié les principes mêmes sur lesquels elles s’étaient établies. L’esclavage, la conquête, la colonisation et les guerres à l’échelle mondiale ont mis en évidence cette faillite » p.128. Est-ce un hymne à l’enfermement et à l’identité figée ? Peut-être pas : Jean-Marie Gustave Le Clézio reste sur l’étroite crête où balancent l’écologie, entre acceptation harmonisée et refus conservateur. Il y est allé, lui, dans ces îles. pour les ouvrir au monde, les faire connaître avec les yeux d’aujourd’hui.

Lisez donc ce petit livre, il vous donnera le sens du relatif qui manque tant à la bonne conscience.

Le Clézio, Raga approche du continent invisible, 2006, Points Seuil, 133 pages, €5.22

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