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La liberté : et celle des autres ?

Ils sont nombreux, ils sont braillards, les défilants à Paris et province qui réclament « la liberté ». Celle de NE PAS se vacciner, celle de NE PAS obéir aux normes sociales, celle de NE PAS avoir soin des autres en les contaminant volontairement en feignant de NE PAS le savoir. Une fausse liberté, comme on voit. Celle du NE PAS, de l’égoïste renfrogné en lui-même, tout hérissé de piquants antisociaux, qui se complait en son miroir et se fout de tout le monde.

La liberté s’arrête là où commence celle des autres.

Cet équilibre littéralement « révolutionnaire », car inscrit dans la Déclaration des droits de l’Homme, s’écroule désormais dans la poussée individualiste minable. Alors, brailler à « la dictature » quand on n’est même pas foutu de respecter le pacte démocratique, quelle bêtise ! Certes, « la gauche » avec ses incantions sempiternelles au « social », au « collectif » et au « tous ensemble » a une grosse part de responsabilité dans la crise morale et civique actuelle. La gauche des petits-bourgeois avides de devenir grands bourgeois, arrivistes du pouvoir sous Mitterrand et confits en leur « mission » sous Hollande. La gauche virée – et pour longtemps à mon avis – du pouvoir pour incapacité et mensonges, du « les yeux dans les yeux » de Cahuzac sur l’évasion fiscale au « tout faire contre le chômage » (en augmentant massivement les impôts de l’inepte Hollande – qui fit HEC, dit-on…).

Mais où est la droite en ces moments cruciaux ? La droite des patrons qui attend de voir, contente de « la reprise » (le CAC 40 est au plus haut !) malgré la désindustrialisation massive de la France qui se savait même plus produire de masques ni de Doliprane, la droite politique éclatée entre trois crocodiles incapables de s’entendre pour s’unir – enfin – pour gagner, la droite qui a eu ses mensonges, dont Fillon est le dernier avatar. Au lieu de reconnaître une pratique, certes douteuse mais couramment pratiquée par tous les politiciens ou presque, chercher à cacher, à dénier, à éviter. Est-ce ainsi que l’on se présente au pays pour le poste suprême de Commandeur ?

L’égalité est à gauche, qui dégénère trop souvent en égalitarisme ; la liberté est à droite, qui dégénère trop souvent en son contraire, l’autoritarisme. La tentation de commander est de tous mais celle de droite plus affirmée car pratiquée déjà en entreprise, alors que la gauche ne la pratique guère que dans le foutoir des partis.

Qu’est-ce donc que la liberté ?

Le paradoxe des braillards qui arpentent les places publiques et les avenues urbaines est qu’ils ne savent guère ce qu’est « la liberté » dont ils ont plein la gueule. Des fanatiques d’extrême-droite aux doctrinaires d’extrême-gauche, ce n’est qu’appel à la dictature : celle du « peuple » bien entendu. Autrement dit non pas le bon sens populaire partagé, la décence commune d’Orwell – mais les gourous qui font fureur, les appareils partisans qui captent les places et le pouvoir, les nazillons soviétiques gris et implacables car déresponsabilisés par leur Mission de faire le bonheur du peuple malgré lui dans un avenir qui ne cesse d’être plus radieux qu’il ne cesse de reculer. Ceux-là vont voter par ressentiment pour Le Pen club, le Méchant con aigri ou autres Ducons feignants en croassant « j’ai deux Zammour ».

Des anti-Macron qui sont colères de se voir renvoyer en miroir leur irrationnel, leur versatilité, leur médiocrité profonde, aux anarchistes Black bloc qui ne désirent que casser et détruire pour assouvir leurs pulsions et aux gilets gênes qui n’endossent cette carapace que parce qu’ils n’ont rien dessous : aucune personnalité, aucune responsabilité, aucun projet politique. Sont-ils libres ? Noir, jaune ou brun, l’uniforme fait « appartenir » – c’est une forme de servage bien loin de la liberté du bon sens citoyen.

Et puis la masse des suiveurs, pour qui brailler fait partie de la fête et du folklore franchouillard, manière de rappeler les piques et la prise de la Bastille – même si la Bastille d’aujourd’hui réside plutôt dans l’inertie conservatrice et fonctionnaire d’une administration aussi tentaculaire que paperassière et inefficace. Les Français payent le plus d’impôts de l’OCDE et n’ont que des services publics médiocres, voire moins bons que les autres, dans un millefeuille institutionnel qui répugne à décentraliser et à déléguer et qui multiplie les petits pouvoirs, donc les bureaux.

La liberté est-elle de faire tout ce que l’on peut en se foutant du monde – et des autres ? Non pas. Notre Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789 stipule en son article 4 que « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi. » Une limite déjà dans les écrits antiques et dans la Bible, qui veut que « ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse ».

Le bal des egos égoïstes

Les braillards antivaccins apparaissent donc pour ce qu’ils sont : non pas des vertueux qui « résistent » à une « dictature » du sanitaire mais de purs égoïstes pour qui leur pomme compte plus que celles de leurs concitoyens, voisins et amis. A quand une stupide « marche contre le Covid ? », aussi vaine que danser pour faire venir la pluie ?

Oui, tous nous en avons marre du coronavirus, des restrictions, des empêchements à voyager, à socialiser et à « faire la fête » ! Mais cela fait-il de nous des meurtriers en puissance ? Le soignant qui refuse de se faire vacciner risque de contaminer ses patients malgré la multiplication des gestes barrières – l’expansion des maladies nosocomiales à l’hôpital bien avant le Covid montre que les « professionnels » peuvent faire des erreurs, être fatigués, se dire que « dans « l’urgence » ça peut passer. Non, ça ne passe pas. Seul le vaccin protège le mieux – pas à 100% mais plus que celui contre la grippe. Sauf les immunodéprimés – mais ceux-là, les antivax se disent qu’ils peuvent crever.

La liberté de faire ce qu’on veut sans contraintes veut dire que l’on rejette toute règle. C’est dès lors la loi de la jungle. Sans règles, pas de société ; sans civisme, pas de cité. Si tu me contamines par volonté de ne pas te protéger, je te tue – telle est la loi de la jungle, la même que celle du talion. Dans notre société de droit, je fais un procès pour « mise en danger de la vie d’autrui » ; si c’est votre enfant qui est mort par la faute d’une inconsciente anti, vous risquez de vous faire justice vous-même, c’est illégal mais tentant. Ceux qui ont le sida et qui contaminent les autres parce qu’ils ne leur disent pas sont condamnés dans de nombreux pays. Et même en France. C’est la même chose pour le Covid comme pour ceux qui conduisent sans permis.

Dans une société, tous sont liés. Ceux qui transgressent volontairement les règles de la société se mettent hors la loi et doivent être bannis ou punis.

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Sortez les sortants !

Article repris par Medium4You.

Les électeurs sont allés massivement s’exprimer à plus de 80% malgré les vacances « colère », l’abstention n’a pas gagné. Les partis qui résonnent dans l’opinion sont les fronts : Front national et Front de gauche. Aussi butés et têtus que des taureaux machos. Aussi en panne d’idées concrètes utilisables, hors des slogans. On note donc dans ce premier tour l’envol du populisme, la lassitude pour les partis de gouvernement et l’effondrement du centre.

Envol du populisme

Surenchère de droite : le vote Le Pen, à près de 20%, est un message clair pour ‘sortir les sortants’, cette élite bobo-cosmopolite qui ne répond rien à la crise. La jeunesse peu éduquée (grâce au syndicat socialiste de l’Éducation nationale qui bloque toujours toute réforme), les sans-diplômes sans-relations sans-mérite, se disent que les sans-papiers, sans argent et sans-logis, chéris de la gauche bobo, comme les nantis de tout, chéris de la droite bobo, ne valent pas qu’on les soutienne. Les ouvriers votent Le Pen.

Surenchère de gauche : le vote Mélenchon est une tentative de donner un sens. Sauf que le ton hystérique et les mensonges (selon Marianne, Vigie 2012, le Véritomètre, Sud-Ouest ou les vidéos traquantes) rendent peu crédible le personnage. Il est tombé autour de 12%, bien en-deçà des fausses promesses des sondages… Le gueulisme radical est dans la ligne des amuseurs médiatiques qui se moquent de tout en restant soigneusement à l’intérieur du système : « tout contre ». Les ouvriers ne votent pas Mélenchon, mais les profs déclassés oui. Mais certains ont trouvé plus utiles de voter Hollande. Mélenchon apparaît d’autant plus braillard et fusionnel qu’impuissant, proclamant tout et son contraire. Les facétieux lui mettent souvent une petite moustache sur les affiches de campagne.

Ces deux partis de tribuns agitent « le peuple », mais il y a malentendu sur la le « pouvoir du peuple » : la démocratie. Le pouvoir libéral est individualiste et universel, préservant la liberté et l’ouverture au monde ; le pouvoir collectiviste est fusionnel, exigeant l’égalité citoyenne par la mobilisation permanente. Qu’elles soient « nationales » ou « populaires », ces démocraties ne sont en rien proches de la nôtre. Leur légitimité ne réside en effet plus dans « le peuple » mais dans « la révolution ». Le premier est godillot et masse de manœuvre, la seconde est mouvement permanent, initié et guidé par des « grands » leaders. Ce fut le cas du Comité de Salut public sous Robespierre, de la Commune de 1871, du parti bolchevique qui dissout l’Assemblée régulièrement élue en 1917, des partis fasciste et nazi, des Mao et Castro, enfin des Conseils de la révolution des printemps arabes. L’avant-garde est composée de ceux qui braillent le plus fort et en imposent aux indécis. Ce pouvoir de chef de bande s’arroge tous les droits : la révolution avant tout, éventuellement (et trop souvent) contre le peuple.

Lassitude pour les partis de gouvernement

L’exaspération, la passion, l’aspiration au changement, font que la raison citoyenne des Lumières se trouve fort déplumée. Les deux candidats de gouvernement ne rassemblent qu’autour de 54% des exprimés. Le réalisme, la modération, l’art du compromis sont contestés par ceux qui se veulent « en résistance ». Le cap est difficile, eux sont à même de mieux le passer que les populistes, mais on sent la lassitude. L’avenir ne sera pas rose pour qui gagnera le second tour.

La crise aurait pu permettre à Nicolas Sarkozy de parler des enjeux du monde et de définir la place de la France. Il aurait pu défendre un projet de compétitivité par contraste avec François Hollande et le tropisme dépensier du projet socialiste. Le travail nécessaire était un thème porteur. Son bilan n’était pas mauvais, malgré certaines erreurs, mais son style personnel a suscité de la haine. Il n’a pas utilisé la crise, préférant le transgressif droitier pour tenter de récupérer l’électorat populaire de Marine Le Pen. Il a donc perdu les centristes. Il n’a pas mis en avant les atouts de son bilan, mais encore et toujours sa personne, comme s’il voulait qu’on l’aime malgré ses trop gros défauts. Ce masochisme suicidaire ne l’a pas servi. Il est deux points en dessous de son rival de gauche, vers 26%.

Inspiré jusqu’à la caricature par François le Grand (Mitterrand), on se demande si François le Petit (Hollande) parviendra à exister. S’il a eu raison d’éviter la confrontation avec Le grand Méchant Luc (Mélenchon), il n’a fait qu’imiter Mitterrand avec Georges Marchais. S’il a lancé le défi au petit Nicolas (Sarkozy), il n’a fait qu’imiter Mitterrand avec Valéry Giscard d’Estaing. Monsieur ‘Normal’ a du mal à apparaître autrement qu’assez fade. Ses 28% lui permettent de faire bonne figure, mais plutôt contre Sarkozy que pour son équipe socialiste.

Effondrement du centre

La posture du solitaire orgueilleux de François Bayrou ne l’a pas servi. Être « au-dessus » des partis est une force lorsqu’on a une légitimité historique : où est la sienne ? quel est son bilan ? Avec moins de 9% des voix, Bayrou fait mentir les sondages. Comme en 2007 et comme Mélenchon aujourd’hui, il a suscité un effet de mode, retombé au dernier moment.

Outre le caractère indécis du personnage, le centrisme se heurte au grand écart des populations confrontées à la crise. Repli sur soi, identité, souveraineté, que dit Bayrou sur le sujet ? Le problème identitaire n’est pas seulement un mot de Sarkozy : il atteint toute l’Europe (Breivic) et l’Amérique d’Obama. Le déni de gauche bobo ne rendent pas moins réels le gauchissement du parti démocrate (avec le mouvement Occupy Wall Street) comme la droitisation du parti républicain (avec les Tea parties). Les démocrates tendent vers l’anarchisme et les républicains libéraux vers les libertariens… La modération devient à notre époque un fatal handicap.

Le premier tour est tombé le jour de saint Alexandre… mais le second tombera le jour de sainte Prudence. Faut-il y voir un signe ? Le rapport droite/gauche se situe à 47 contre 49%, en faveur du changement. Comment cet éclatement extrémiste des votes se traduira-t-il durant les Législatives de juin ?

(Estimation Ipsos/Logica Business Consulting/France Télévisions/Radio France à 20h52, susceptibles de modifications à la marge)

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