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Dans le Pacifique

Le bain dans le Pacifique était pour moi une grande première.

mousse vagues Basse Californie

L’eau y est relativement froide, un courant remonte vers le nord, mais mousseuse à souhait sur la plage en pente douce où vient s’écraser la longue houle arrivée directement d’Asie sans presque rien rencontrer sur sa route.

vagues sur la greve Basse Californie

Le mouvement des vagues dessine de gracieuses ondulations sur le sable de l’estran.

ondulation plage Basse Californie

D’innombrables coquillages apportés par le flot, ramassés par personne, jonchent le sable.

plage coquillages Basse Californie

Je rapporte deux gros bigorneaux, dont l’un trône toujours dans ma bibliothèque. Ils sont de taille à écouter la mer dedans, parfaitement blanchis par les crabes et par l’eau.

vague Basse Californie

Le jour suivant, nous manœuvrerons les kayaks sur la mer pour bien les prendre en mains. Pour beaucoup d’entre nous, c’est une première fois et nous devons nous y habituer.

guide Basse Californie

Ce n’est pas compliqué, le barreur est à l’arrière, confortablement assis, les pieds sur deux pédales qui commandent grâce à des câbles le safran à l’arrière. Pied droit pour aller à droite, pied gauche pour aller à gauche. Il pagaie lui aussi mais son centre de gravité décalé le rend moins efficace que le pagayeur avant, sur un siège à dossier lui aussi, dont l’impulsion fait avancer principalement le bateau. Bien sûr, cela mouille un peu, l’avant recevant les embruns et l’arrière les gouttes des coups de pelle du premier.

kayak nautiraid Basse Californie

Mais il fait chaud et la peau nue aime bien ce frais régulier, d’autant que les gilets de sauvetage engoncent, même portés directement sur la peau.

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Pupu et noni de Rimatara

Le vent et la pluie ont régné en maîtres toute la nuit. Au lever, le plafond des nuages est très bas et il est fort possible que l’avion devant ramener à Papeete les quatre autres touristes ne puisse atterrir. Il paraît que cela arrive souvent ! Ils ont pu partir après que l’avion soit allé faire un petit tour et soit revenu…

LORI DE RIMATARA

Une petite éclaircie et nous avons bravé les éléments pour nous rendre au CJA à pied, histoire de nous délester des grammes supplémentaires accumulés suite aux repas plantureux. Nous sommes bien accueillies, on nous raconte ce que font les élèves ici, ce qu’ils deviennent ensuite. Les filles cuisinent, cousent des tifaifai (couvre-lit fait de pièces d’étoffe rapportées), du tressage, tandis que les garçons cultivent les légumes du fa’apu, font de la menuiserie et de la sculpture. Les objets exposés nous tentent mais nous sommes limités par le poids, 10 kg sur les lignes intérieures.

RIMATARA

Arrive la directrice du CJA, à qui notre guide a dit qu’une popa’a la connaissait. Facile de me reconnaître, car mon amie est polynésienne-chinoise, la peau blanche et les yeux bleus. Un bref rappel des faits : voyage en Nouvelle-Zélande avec ses élèves du CJA avec V. tandis que je tenais compagnie à J. à Mahina.

« – Ah ! oui, je te reconnais maintenant, nous avons tous mangé ensemble à notre retour de Nouvelle-Zélande… Le monde est petit ! Que fais-tu à Rimatara ? Tu n’étais jamais venue ?
– Si, si, une croisière avec l’Aranui !
– Ah ! oui, et alors vous ne pouviez plus remonter sur le bateau ?
– Exact ! De plus je connais ta cousine l’infirmière et son mari le gars du SDR…
– Ça alors ! Je vais vous ramener à la pension, il pleut beaucoup, montez ! »

P. nous pose encore mille questions et nous fait parcourir son île.

vahine seins nus

– D’abord, comme il bruine, c’est sûr que les mamas doivent ramasser les « pupu ».
– A la plage par ce temps ?
– Non. Mais tu viens de dire que ce sont des coquillages pour faire des colliers ?
– Oui, nous les appelons coquillages mais ce sont des escargots minuscules que les mamas ramassent dans les cocoteraies.
– Dans les cocoteraies, pas sur la plage ?
– Oui, sous les palmes ou les pierres dans les cocoteraies ! Lorsque la pluie est douce, ces petits escargots sortent, les mamas se rendent alors dans les cocoteraies pour ramasser ceux qui, plus tard, lavés à la potasse, séchés, percés et attachés sur un fil nylon formeront un élégant collier de couleur jaune, marron ou blanc. Un travail harassant payé une misère.

"PUPU"

Elle nous conduit vers chez elle où son mari s’occupe du noni (Morinda citrifolia). Les planteurs viennent faire peser les drums remplis, reçoivent l’argent ; les récoltes seront regroupées dans de grands drums et expédiés à Tahiti via la goélette. C’est une société américaine qui achète le noni, elle en achète de moins en moins et à un prix de plus en plus bas… mais les Chinois seraient intéressés par le meilleur noni au monde, ce noni polynésien. C’est une plante médicinale connue depuis des lustres en Polynésie et qui exploitée comme ra’au (drogue, médicament) servant à faire murir les abcès, à traiter les panaris, les angines, les brûlures, les piqures de nohu (poisson-pierre), l’abcès du sein, l’orchite en usage externe. En usage interne, il traite la grenouillette, le diabète sucré, les fibromes et les empoisonnements par poisson toxique.

C’était une matinée très enrichissante et bien remplie ! Installons nous devant la télé pour le reste de la journée car il vente et il tombe des cordes. Ce soir, ce sera repas aux chandelles au restaurant de la pension car les lumières refusent de fonctionner et la panne n’est pas encore détectée.

Hiata de Tahiti

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Kauehi Lodge et visite au village

Kauehi Lodge est un endroit très calme, à 2 km de l’aéroport et à une dizaine de km du village de Tearavero. Nous prenons possession des lieux. Nous posons nos marques et discutons avec notre hôte des possibilités de découverte de l’atoll, l’hôtesse étant à Papeete pour le Salon du Tourisme. Nous ne serons que deux pensionnaires pendant cinq jours, la pension nous appartient !

KAUEHI LODGE SALLE DU PETIT DEJEUNER

Nous avons souhaité d’abord découvrir le lodge, explorer les environs immédiats, rencontrer les habitants du bord du lagon : une foule de requins à pointes noires, du plus petit au plus gros, qui inquiètent mon amie M. Elle s’imagine dévorée par les squales. Ils sont très curieux mais inoffensifs !

KAUEHI SALON

Des oiseaux : Chevalier errant de l’Arctique qui hiverne ici ; Noddi noir (Kirikiri) ; Sterne blanche (Kirahu) qui est une émanation des sœurs Hina-tu-a-ni’a (Gris qui veillait dessus, Hina-tu-a-ra’i (Gris qui veillait des cieux) , Hina-tu-a-uta (Gris qui veillait à l’intérieur) et Hina-tu-a-tai (Gris qui veillait en mer), Sterne à dos gris ( Kaveka) ; Sterne huppée (Tara), émanation des Dieux de l’air ; Grande frégate (Kota’a, Kotaha) émanation de ‘Ora-pa’a (guerrier intrépide)le grand esprit mouvant de l’océan et du dieu ‘Oro ; Sterne fuligineuse (Kaveka) ; deux aigrettes des récifs (Otu’u), l’une blanche, l’autre grise qui viendront nous saluer chaque jour. Il n’y a pas de chat, pas de chien à la pension. Jean-Claude nous concocte un délicieux lunch au thon cru, le soir le Chef sera aux fourneaux. Il cuisine toujours des poissons divers le plus souvent grillés, excellents. Il partagera le dîner avec nous, nous discuterons, l’interrogerons. C’est que toutes les deux nous sommes curieuses de tout connaître de Kauehi !

KAUEHI

Dimanche, nous respecterons l’heure du culte avant de nous rendre au village. La population du village de l’atoll est à 90 % catholique.

KAUEHI EGLISE ST MARC

Après neuf heures, JC nous embarque dans sa Land-Rover, nous passons devant l’aéroport désert, après 10 km environ nous arrivons à la porte du village. Nous avons traversé des cocoteraies plus ou moins bien entretenues, évité les fondrières de la route en soupe de corail et nous voici à l’entrée du « bourg ». La messe est dite, les gens sont retournés à la maison, certains font quelques emplettes aux magasins. En fait, il y a deux magasins, ravitaillés par la goélette tous les quinze jours. Notre première visite est pour l’église Saint-Marc, édifiée en pierres de corail taillées à la scie par les habitants et recouverte de chaux blanche. L’intérieur est surprenant, voyez vous-mêmes ! Beaucoup de couleurs, de fanions, les bambins de  l’école maternelle auraient-ils œuvré à la décoration de l’église ? Mais les lustres en nacre et coquillages nous prouvent, si besoin était, que nous sommes bien dans l’archipel des Tuamotu.

EGLISE DE TEARAVERO KAUEHI

Allons rendre visite à la Mairie (républicaine) proche de l’église (catholique). Solide bâtisse en pierres de corail, murs épais, jouxtant  la citerne d’eau douce, elle a encore fière allure mais un petit ravalement de son blason serait du meilleur effet ! C’est là, nous dit-on, que les habitants trouvent refuge lors des cyclones. Il semble que les cyclones des années 1980 (Veena et ses frères et sœurs) ont laissé des marques indélébiles. Mais la mairie a tenu bon. Vive la République ! Vive la Polynésie !

KAUEHI MAIRIE

Les vieilles maisons, en pierre de corail enduites et scellées à la chaux, ont été abandonnées pour les maisons en pinex – délaissées elles-mêmes pour des maisons MTR en parpaings et baies vitrées.

Direction le cimetière. Logique, non ? Surprise : JC nous indique que le cimetière est partagé en 4 « zones ».

  1. d’abord les hommes, mariés ou célibataires dans un premier « enclos »,
  2. puis les femmes, mariées ou célibataires dans un second enclos ;
  3. les enfants mort-nés ou n’ayant pas été baptisés à leur naissance dans le troisième enclos ;
  4. et dans le quatrième enclos les « pestiférés », les concubins, les homosexuels.

Ouah ! Cette ségrégation après la mort existe à Kauehi de nos jours encore ! Malgré la chaleur, cela fait froid dans le dos. En l’absence de curé, c’est un diacre qui officie. Il a demandé à ses paroissiens de réviser leur manière d’enterrer leurs morts. Un couple, même si l’un décède avant l’autre ne devrait-il pas rester réuni ? Refus catégorique des paroissiens, on continue comme par le passé ! Vous, les Popa’a vous en pensez quoi de ce sectarisme dans le cimetière de Kauehi ?

Hiata de Tahiti

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Sébastopol

Base conjointe de la flotte russe de la mer Noire et de la flotte ukrainienne, renégociée avec l’Ukraine jusqu’en 2017, c’est le président déchu Ianoukovitch qui a concédé Sébastopol à Poutine jusqu’en 2024. Le port a été fondé par Catherine II en 1783 sur un site favorable, puisque formé de huit baies en eau profonde, dont celle de Balaklava. Aujourd’hui, 340 000 habitants y habitent, Russes à 72%.

C’est en 1954 que Khrouchtchev a transféré l’oblast de Crimée – avec Sébastopol – à la république socialiste soviétique d’Ukraine. Sébastopol obéit donc en théorie à Kiev, mais sans faire partie de l’oblast de Crimée, qui est la seule république autonome d’Ukraine. Un peu compliqué… d’autant que la population aux trois-quarts russe continue d’être maîtres de la ville par la marine et ses activités. Selon certains politiciens, l’indépendance de l’Ukraine en 1991 a dégagé la Russie de ce « don socialiste » – et le droit des populations à disposer d’elles-mêmes, par un référendum, pourrait demander le rattachement à la mère-patrie russe.

sebastopol famille russe

La guerre de Crimée a opposé depuis 1853 l’Empire ottoman (allié à la France, à la Grande-Bretagne et au royaume de Sardaigne) à la Russie qui voulait annexer Constantinople, les Détroits du Bosphore et des Dardanelles. Les Anglais voulaient barrer aux Russes la route de la Méditerranée et Napoléon III voulait empêcher une coalition comme celle qui a déposé Napoléon 1er en s’alliant avec l’Angleterre, tout en prenant prétexte de défendre les intérêts catholiques et français en Orient à propos des Lieux Saints. Après la victoire de l’Alma, Français et Anglais mirent le siège devant la puissante forteresse russe de Sébastopol le 27 septembre 1854. 185 000 assiégeants, emmenés par le général Canrobert, auront à affronter les rigueurs de l’hiver et les tentatives de sorties du colonel russe Franz Todleben. Les Russes se retireront de la citadelle en août 1855 avant de demander, quelques mois plus tard, la paix. Cette victoire a été le fruit d’une alliance franco-britannique improbable après sept siècles de conflit entre les deux pays. La Russie a capitulé après la prise par le général Mac-Mahon le 8 septembre 1855 de la tour Malakoff à Sébastopol. Le traité de Paris du 30 mars 1856 prévoyait l’intégrité de l’Empire ottoman, la neutralisation de la mer Noire, interdite à tout navire de guerre, la libre circulation sur le Danube et l’autonomie des principautés de Moldavie, Valachie et Serbie. L’amorce de la future guerre de 14…

Sebastopol GoogleEarth

Dans la plaine de vignes qui s’étend sous nos yeux, avant la ville, il est difficile de croire qu’ici s’est déroulée la furieuse bataille de Balaklava, si présente à l’esprit d’Hester, l’héroïne des romans policiers victoriens d’Anne Perry (éditions 10/18). Ici, le 25 octobre 1854, s’affrontèrent Russes et Anglais. Les cavaliers britanniques de Lord Cardigan repoussèrent une contre-attaque russe devant Sébastopol. Les Cosaques ne réussirent pas à s’emparer de la base anglaise de Balaklava. Le siège dura jusqu’au 10 septembre 1855. Les Anglais furent poussés au panache par leurs badernes de chefs durant la fameuse « charge de la brigade légère ». Elle aboutît au massacre, systématique et programmé. Toute l’imbécillité militaire à l’œuvre : la rigidité, l’étroitesse d’esprit, l’arbitraire. Quel « héroïsme » peut-il y avoir à seulement obéir ? Quel « héroïsme » à pousser les cavaliers à se faire hacher menu ?

sebastopol port

Le général Russe Wrangel à la tête de « l’Armée Blanche » s’incline à Sébastopol le 16 novembre 1920 face aux bolcheviks. « L’Armée Rouge », qui a forcé l’isthme de Pérékop, s’est emparée de la ville et a contraint Wrangel et ses alliés à battre en retraite. La victoire des Bolcheviks mit fin à la guerre civile qui enflammait la Russie depuis la révolution d’Octobre 1917 et a consacré Lénine – sonnant par là même la fin de l’indépendance de l’État d’Ukraine, rattaché à l’URSS, bien que disposant d’un siège à l’ONU. Ficelles roublardes du socialisme.

sebastopol souvenir de la guerre

Mais la ville est surtout célèbre pour avoir résisté aux Nazis durant la Seconde Guerre mondiale. Les troupes allemandes et roumaines avancèrent dans les environs de la ville par le nord et lancèrent leur attaque le 30 octobre 1941. L’attaque échoua ; les forces de l’Axe débutèrent alors le siège de la ville et lancèrent des bombardements. Une seconde offensive terrestre échoua en décembre 1941. Sébastopol résista pied à pied à plus de 250 jours de siège, d’octobre 1941 à juin 1942, puis occupée. La ville ne fut libérée après un combat sanglant qu’en mai 1944. Sébastopol est l’une des huit Villes-Héros de l’Union soviétique avec notamment Moscou, Kiev et Odessa.

sebastopol monument stalinien

Son centre-ville est tout à la gloire de la guerre et visité par des colonies de jeunes russes venus du nord, guidés par les moniteurs patriotes. Ces collégiens tardifs sont tous en tee-shirt jaune-orange. Les filles à la mode en nouent le bas sur leur ventre, pour libérer nombril et reins. Un monument de béton stalinien exalte le héros mâle, prolétaire aux muscles carrés, sourcils froncés, main en avant-garde, apportant le Progrès au bout du fusil, au-dessus de stèles commémorant les médailles acquises par les Villes-Héros. Sur la place s’élève la statue de l’amiral Paul-Stéphane Nadjimov.

sebastopol jeunesse

La baie abrite la base navale de la flotte de la mer Noire, partagée depuis 1997 entre la Russie et l’Ukraine. Cette base navale a eu une annexe réservée aux sous-marins d’attaque, creusée sous la montagne de Balaklava.

sebastopol bateaux de guerre russes

Elle est aujourd’hui abandonnée faute de pouvoir sortir les sous-marins par les Dardanelles, étroitement surveillées par l’OTAN.

sebastopol marins

Mais le commandement de la base navale et les organisations russes continuent de contrôler la ville, dominant le commerce et la vie culturelle. Le transfert de Sébastopol à l’Ukraine n’a jamais vraiment été accepté, ni par la société russe, ni par les autorités militaires, qui ne le considèrent toujours que comme provisoire.

sebastopol marechal nadjimov

Je préfère quant à moi la vie qui va, à l’autoritarisme botté. Des gamins de Sébastopol, fils costauds de militaires russes, ont ôté polo et jean, quitté leurs sandales, pour plonger dans les eaux du port cueillir les coquillages qui prospèrent au fond. Ce sont de gros bigorneaux appelés en russe raban dont l’intérieur est orange corail.

sebastopol gamins russes plongeurs

Les bigorneaux sont fort jolis et les juvéniles au corps souple, lissé par l’eau, n’hésitent pas à les vendre quelques hryvnias (la monnaie locale, prononcer grivnia) aux touristes. Ils jouent pour se faire de leurs charmes ingénus auprès des féminines moscovites ou kiéviennes, croisant les bras pour faire ressortir leurs pectoraux, des gouttes d’eau de leur chevelure roulant comme des perles sur leur peau dorée.

sebastopol gamins russes torse nu

Les vacancières parties, deux d’entre eux vont regarder s’éloigner, au bout du ponton, le navire à voiles Véga qui recule au moteur. Car la ville est vouée à la mer et tous les gamins sont marins dès l’enfance.

sebastopol goelette vega

Puis ils plongent une dernière fois en bermuda de ville et ressortent ruisselants, avant de récupérer leurs sacs à dos et décamper, baskets à la main, laissant l’eau goutter sur les pavés, vers chez eux, au centre ville. C’est l’été des vacances.

sebastopol gamins russes

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Bretagne, région française

Sur ces finis terrae celtiques passe le vent et pousse la lande. Les gens d’ici vivent comme respire l’océan : dessus à marée haute pour traquer le poisson, dans ses découverts à marée basse pour ramasser ses coquillages, sécher son sel et ratisser ses algues. Le temps change avec l’ampleur de la marée et la lumière se modifie avec les heures.

Ici, plus qu’ailleurs, on a conscience que le monde change sans cesse, comme la vague, et qu’il faut s’y adapter ou périr. La région tout entière témoigne de reconversions successives : la pêche, le commerce, les primeurs, le tourisme, l’océanographie. Et ce n’est sans doute pas fini. En cette province ouverte sur le large, la population sait se prendre en main et ne pas tout attendre de l’État protecteur. Le taux de réussite au bac est l’un des plus élevés de France, les écoles de commerce y sont florissantes et réputées, destinées à une jeunesse qui rêve moins qu’ailleurs d’être fonctionnaire, Ouest-France est le quotidien le plus vendu de l’Hexagone. A sa lecture, on comprend vite ce qui fait son succès : un style simple, bien illustré, des rappels pédagogiques à l’instar de l’inusable « Almanach du Marin Breton », des nouvelles locales, des articles de fond sur les débats de société et une actualité internationale expliquée en mots simples et directs.

Notre bon journal national ‘Le Monde’ a le titre un tantinet prétentieux après avoir ouvert ‘Ouest-France’. Ce ‘Monde’ pourrait s’appeler « Paris Rive-Gauche » tant il apparaît depuis la province « provincial » dans sa façon de voir. Ne semblent y écrire que des profils formatés et la parole ne paraît donnée qu’au cercle restreint de ceux qui parlent entre eux, entre Montmartre et Montparnasse – pour ratisser large.

Carantec était autrefois un port coincé entre la mer et l’église. Il s’est développé avec la migration saisonnière des lemmings touristiques et est devenu banlieue dortoir « à l’ancienne » dans le style inimitable des années socialo-soixante-dix. Ce mélange « nouveau riche » de fils d’ouvriers petits-fils de paysans dégrossis à la culture d’État, qui a surgi à cette date dans la société française, a produit les « poutres apparentes », le « colombage de granit » les « tourelles d’angle » la « haie d’hortensias » de rigueur et les productions en série d’instruments de marine inutilisables qui jonchent les murs intérieurs. Cette génération qui consomme a généré la nostalgie du « bon vieux temps » comme un prêt à conter, le merveilleux à sa porte.

Un mythe s’est formé que n’a pu qu’à peine entamer les récits vrais des Pierre Jakez-Hélias et autres Jean Récher. Rares sont ceux qui les ont lus ou les lisent. Il n’est pas jusqu’aux recettes de cuisine, étiquetées « de grand-mère » qui ne soient des resucées franco-françaises à base de primeurs d’ici. Car les vraies recettes régionales sont rares dans un pays resté très maritime et longtemps pauvre. Quant au breton, très peu le parlent si nul ne veut l’avouer.

Une dame « de Paris » qui se croyait seule dans la queue des billets pour entrer au cairn de Barnenez, a longuement cuisiné le guichetier d’un certain âge qui n’aspirait manifestement qu’à poursuivre son existence de collectivité sans se soucier de bretonniser ni de jouer au devin. « Vous parlez breton ? » – le ton employé, déjà, formulait implicitement la réponse – « euh… Oui, bien-sûr, un peu, comme tout le monde. – Bon, je m’appelle Menou et je voudrais savoir ce que cela signifie en breton. Vous le savez ? » Avec ça, difficile de ne pas fournir une réponse, même idiote. La mythologie de la-province-des-ancêtres-qui-a-une-tradition joue ici à plein.

Cet agacement que je manifeste ici ne vise pas les Bretons de Bretagne mais les étrangers au pays, surtout ces Parisiens en quête éperdue de « racines » et de « ressourcement ». Si la Bretagne est si belle, pourquoi diantre l’avoir quittée ? Et pourquoi ne pas la reprendre telle qu’elle est plutôt que d’y plaquer ses illusions perdues ?

Parce que belle, elle l’est. De plus accueillante et emplie d’une histoire qu’il n’est nul besoin de fantasmer. La réalité suffit largement. Les druides celtes, les Gaulois Vénètes anti-Romains, le duché médiéval, les enclos paroissiaux financés par les marchands de toile, l’épopée des découvreurs, des commerçants et des corsaires, la chouannerie, la résistance plus forte ici qu’ailleurs, la diversification agricole lorsque la pêche eut moins rendu…

Oh, bien-sûr, dans la lignée d’un certain féminisme américain, « on » a voulu faire du druidisme l’origine perdue de la Femme matriarche, mythe s’il en est… Tout comme le régionalisme soixante-huitard a voulu faire du druide l’ancêtre de l’écolo. Et comme le regain religieux d’aujourd’hui redécouvre « la Tradition » ici bien conservée avec messes en breton, respect au Pape et clergé dynamique. Ce ne sont que modes de passage. Le patrimoine breton en son entier mérite d’être valorisé et c’est ce qui est fait !

Les offices du tourisme sont prévenants et documentés, les animations, les centres, les musées, les églises, l’artisanat, les criées – tout se visite et s’offre à qui veut bien aller y voir. Bien mieux que dans le Sud où l’individualisme exacerbé des habitants clôture et se protège. La Bretagne, à l’inverse, accueille, entreprend, met en valeur. Ici, les artistes locaux en poterie, bijoux, aquarelle, peinture à l’huile, sculpture et autres incitent à venir les voir dans leur atelier. Ils ne sont pas seulement anonymes dans des boutiques comme sur la Côte d’Usure.

Je trouve heureux que le tempérament français se soit ancré dans l’imaginaire en Bretagne depuis les années 1960. « Astérix et Obélix », les premiers pacsés de la bande dessinée, remplacent les Auvergnats (vins & charbon) et autres maçons de la Creuse comme Français-symboles populaires. Le village « qui résiste encore et toujours à l’envahisseur » est situé sur la carte astérixienne non loin de cette Carantec dans laquelle je me trouve. Un hommage à l’un des nombreux réseaux de résistance qui, profitant de leur parfaite connaissance des rochers, des courants et des lunes, firent passer en Angleterre des clandestins et des aviateurs alliés abattus par la mer, au nez et à la barbe des Allemands, ces lourds terriens trop confiant dans leur technique et leurs patrouilleurs au large. Le réseau Sibiril a réussi ainsi quelques 200 évasions entre 1940 et 1944. Le petit musée maritime en rend compte par des cartes, des photos, des lettres et des objets d’époque.

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Voyage aux Gambier 3 : Akamaru et Taravai

Partons maintenant pour Akamaru. Après les paquets de mer, voici un quai désert, une longue allée engazonnée soigneusement entretenue qui nous conduit à l’édifice.

C’est une splendide église romane à double clocher.

Notre-Dame de la Paix est longue de 24 m et large de 9, elle date de 1844. Le chœur est magnifique, des bois précieux, des dorures et des nacres font une magie dans un lieu presque irréel. Le lieu sacré est en excellent état et toujours utilisé par les religieux de Rikitea.

Encore de nombreux paquets de mer en pleine face, les vagues deviennent de plus en plus grosses. Un petit arrêt pour recueillir du sable couleur curry. L’île est dotée de sable de différentes couleurs, blanc, noir et orange, de quoi inspirer les créateurs de tableaux de sable.

Puis nous reprenons le tape-cul. Il faut mériter l’église Saint-Gabriel à Taravai, mêmes dimensions que Notre-Dame de la Paix. De style gothique, le portail d’entrée est décoré de gros sept-doigts (coquillages pêchés dans le lagon). L’intérieur n’est pas décevant, des vitraux de couleurs, l’autel magnifique en bois de reva. Elle fut construite en 1868. Que de merveilles découvertes ce jour ! Cela valait bien quelques douleurs dorsales et du sel plein la face.

Les religieux des Gambier ont dessiné les plans de leurs édifices, ont cherché les matériaux nécessaires, ont appris aux autochtones avec plus ou moins de réussite à bâtir, à décorer avec peu de matériel. Ils ont arraché aux lointaines barrières de corail des blocs de pierre qu’ils ramenaient au moyen de radeaux sur le lagon. Ils fabriquaient la chaux sur place, à partir du corail qu’ils brûlaient dans des fours. Ils cherchaient les bois à brûler mais aussi ceux pour fabriquer des autels, des portes, le bois de uru pour les charpentes. Les façades des églises comportaient corniches, connes, pilastres, fresques, triglyphes, gouttes, oves, cannelures, cimaises.

Les décors les plus spectaculaires sont les nacres de Saint-Michel de Rikitea, les boiseries de Saint Gabriel ainsi que celles de Notre-Dame de la Paix. Ces méthodes seront redécouvertes et utilisées pour la restauration de la cathédrale Saint-Michel de Rikitea.

Hiata de Tahiti

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