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Dominique Venner, Un samouraï d’Occident

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J’ai trouvé par hasard en librairie ce guide de survie spirituelle d’un homme qui, jeune, s’est battu avec l’armée française pour défendre la grandeur du pays et qui a découvert, à peine adulte et après s’y être essayé des années, que la politique ne servait à rien d’autre qu’à la petite gloire des médiocres. Dominique Venner s’est alors plongé dans les études historiques et a fondé la NRH (Nouvelle Revue d’Histoire) en même temps qu’il publiait ses réflexions sur le temps long en divers livres. Un samouraï d’Occident apparaît comme un ouvrage longtemps médité, soigneusement rédigé, qui change des torchons à la mode vite jetés sur le papier et vite publiés avant d’être aussi vite oubliés…

Dominique Venner n’est pas dans le « mainstream », comme aime à le dire un Frédéric Martel qui n’a rien à voir (à ma connaissance) avec un quelconque ancêtre prénommé Charles. Venner n’aime pas le capitalisme marchand, ni le progressisme béat qui vise l’illimité en tout, ni les suites du christianisme souffrant et coupable déclinées en communisme, socialisme et autres gauchismes aussi vains que fondés sur l’illusion. Éternelle imposture de Platon qu’un Clément Rosset (que l’auteur ne cite pas) a dénoncée.

Avant de choisir la mort volontaire en samouraï le 21 mai 2013, accompagné d’un témoin plus jeune dans le chœur de Notre-Dame de Paris (édifié au-dessus des piliers des nautes, très ancien sanctuaire celte), Dominique Venner a vécu 78 années de vie intense, laissé cinq enfants et une cinquantaine d’ouvrages, dont certains remarqués : Histoire de l’Armée rouge (prix Broquette-Gonin de l’Académie française) en 1981, Dictionnaire amoureux de la chasse en 2000. Il avait rompu définitivement avec la politique en 1967 pour devenir « historien méditatif ».

Ce n’est pas son positionnement à droite qui m’intéresse, d’autant qu’il s’est beaucoup trompé (De Gaulle avait raison de rendre l’Algérie aux Algériens, ce peuple fier et musulman) ; ce ne sont pas non plus les pudeurs de vierge effarouchée des moralistes « de gauche » dont la position de Commandeur (juger avant d’analyser) est aussi vaniteuse que courte.

Ce qui m’intéresse est l’exemplarité d’un homme, le message spirituel qu’il porte, son élan positif.

Dominique Venner aimait la vie, mais surtout la vie belle, celle que les stoïciens recommandaient de chercher en cette vie même, sans se laisser enfumer par les illusions d’un lendemain chanteur ou d’un au-delà consolateur. Il considérait que le beau créait le bon, et non l’inverse, que ce n’étaient pas les « bonnes intentions » qui donnaient l’exemple mais les actes réels accomplis avec tenue. Il avait de la hauteur – non celle du mépris (il cite en femme exemplaire la concierge de l’Élégance du hérisson) – mais celle du temps long et du socle des valeurs. Nous, Occidentaux, ne sommes pas la planète (ni leaders des valeurs, ni missionnaires « plus avancés », ni maîtres élus par commandement divin) : nous ne sommes pas « universels ». Nous ne sommes que nous-mêmes, issus d’une longue culture qui a produit parfois de la civilisation, parfois de la barbarie, mais aussi légitime que les autres cultures – sans devoir se « fondre » obligatoirement en elles.

male domine institut d art a paris

Qui trop embrasse mal étreint, dit la sagesse populaire ; c’est pourtant ce que le christianisme en premier a promu, que la révolution des Lumières a exigé, que l’essor de la technique a permis, que le système socio-capitaliste a réalisé. Dans un chapitre intitulé La métaphysique de l’illimité, l’auteur montre que, dès la Genèse, Iahvé ordonne que les hommes (à son image…) « dominent les poissons de la mer, les oiseaux du ciel, toutes les bêtes sauvages et celles qui rampent sur la terre ». A Noé, sauvé des eaux, Dieu répète encore « multipliez sur la terre et dominez-la ». Les Lumières ont sécularisé cette injonction d’orgueil religieux au travers de l’Universel et de l’imposition des Droits de l’Homme au monde entier – droits identiques, homme abstrait (ce que contestent les musulmans, mais aussi les Chinois athées, les Brésiliens catholiques et les Japonais zen – entre autres).

La technique a envahi les industries (orientées « nouveauté »), domptée la recherche scientifique (qui ne recherche plus que ce qui est « utile » à vendre), commandé aux politiques (en leur offrant les gaz de combat, le char mécanisé, la bombe atomique et le F16 ou le Rafale – outils diplomatiques ou militaires) ; elle a permis au système économique d’efficacité maximale qu’est « le capitalisme » de faire renaître sans cesse le désir d’acheter d’autres biens plus puissants, plus petits, plus innovants, plus à la mode. Au détriment de la mesure en toutes choses, de l’harmonie avec la nature, de la sagesse humaine, des ressources planétaires limitées et des ravages de la pollution sur le climat et sur la santé de tous les êtres vivants.

L’Europe après la décolonisation semble sortir de l’histoire, hédoniste, obèse, gavée de gadgets et d’additifs alimentaires américains, bienveillante aux provocations idéologiques et cléricales d’où qu’elles viennent, sans ressort. Contre ce monde uniforme de vaches multicolores (Nietzsche) s’est élevé Dominique Venner ; il a protesté en samouraï en mettant fin à ses jours avec arme. Je ne partage pas ce pessimisme, ni nombre de ses analyses du temps présent (moins « décadent » qu’il ne le voyait), mais reconnais la grandeur du geste. Ce pourquoi ce livre-testament mérite considération.

Un demi-millénaire avant sa publication, Dürer gravait le Chevalier, la mort et le diable. Cette figure impassible de preux armé et armuré, indifférent à la fin dernière comme aux tentations maléfiques ici-bas, est l’un des modèles de Venner. L’autre est la figure – non-européenne – du samouraï : discipliné, entraîné, fidèle à son clan et à sa façon de vivre. Lui Dominique, est resté insoumis aux tentations faciles de notre temps, qu’on songe aux frasques sexuelles DSK ou Houellebecq, aux petits arrangements entre amis de la galaxie Hollande ou Sarkozy, à l’indulgence des juges dans les « petits » délits de banlieue, au déni des intellos bobos qui ne sont jamais sortis hors du quadrilatère de l’entre-soi luxe New York-Saint-Germain-Avoriaz-Saint-Tropez.

arbres au cordeau

En six chapitres rythmés en thèmes courts, Dominique Venner nous parle de la culture européenne qui vient de loin, de l’assemblée des guerriers de l’Iliade au Thing viking jusqu’à la Table Ronde issue de la culture celte. Elle est notre matrice de civilisation, qui a donné des hommes libres parce qu’ils étaient à la fois guerriers et propriétaires du sol. Le citoyen de 1789 renouvellera ce pacte volontaire des adultes responsables qui ont la volonté de faire société en commun et de défendre la patrie en danger. Contrairement au machisme hiérarchique introduit par l’Église chrétienne à la suite de saint Paul, la femme n’est pas dévalorisée dans cette civilisation : Pénélope et Hélène, déjà, sont maitresses d’elles-mêmes et exemples de vertu.

Notre Talmud, Bible ou Coran sont pour Venner ces deux « testaments » que sont l’Iliade et l’Odyssée. Le modèle de vie qui surgit est une triade : « la nature comme socle, l’excellence comme but, la beauté comme horizon » p.220. La nature telle qu’elle est ici et maintenant, immuable et changeante, force de vie et perpétuel renouvellement par la mort, ineffable grandeur et catastrophes. En découvrir les ressorts par la curiosité scientifique, méditer sur les fins humaines par l’intelligence et l’astuce, en admirer les merveilles minérales, végétales, animales, humaines, sidérales. Vouloir être beau comme la beauté reconnue, plus sain de corps, plus fort de volonté, plus intelligent – tel est le destin humain, une aspiration à devenir proche des dieux. Comme (je l’ajoute, Venner n’en parle pas) Thorgal dans la bande dessinée. Épuiser le champ du possible est réaliste ; chercher une vie éternelle est illusion. Mais éviter l’hubris – la démesure condamnée par la pensée grecque – qui est propre à notre civilisation technicienne depuis la Renaissance, cette volonté d’illimité consommateur, pollueur, gaspilleur, spéculateur, militaire, génétique… qui commence à nous perdre. « Je m’insurge contre ce qui me nie », dit Dominique Venner p.291.

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Ce pourquoi il nous incite à vivre en philosophe par le contrôle des désirs, passions et ratiocinations. C’est par le stoïcisme, dernier feu de la pensée antique avant le christianisme, que l’auteur se tourne pour trouver cette « vie bonne » dont Montaigne sera un éminent relais. Ce qui compte n’est pas de philosopher en érudit livresque, mais de donner l’exemple par sa vie même. Il s’agit d’un « exercice sur soi, une transformation spirituelle et une modification du comportement dont les effets sur l’âme sont analogues à ceux que produit l’entraînement sur le corps d’un athlète » p.239. Épictète, esclave, ou Marc-Aurèle, empereur, peuvent tous les deux suivre cette ascèse. Mathieu Ricard, bouddhiste tibétain, ne dit pas autre chose… même si l’auteur ne le cite pas, trop enfermé sur son univers très classique.

Bien qu’on le voit borné en références, obsédé par la volonté de montrer que tout est déjà pour les Européens en Europe, ce testament bien écrit, sainement rythmé, serein dans ses idées longues, offre une vue rafraîchissante sur nos interrogations historiques et sur notre destin. Le tous-pareils sur toute la planète est-il souhaitable ? Ou ne prépare-t-il pas la domination paisible et insidieuse du Big Brother consumériste (demain religieux ?) surveillant tous les désirs, toutes les déviances, forçant le consensus pour consommer, voter, bien penser ?

Paris luxembourg marchand de masques

En perles sur ce bracelet bien trempé, sept conseils pratiques à appliquer soi-même :

1/ construire sa citadelle intérieure en tenant un carnet de réflexions et d’observations sur le monde et les êtres,
2/ chaque jour se mettre en retrait pour lire un peu,
3/ pratiquer un sport de plein air ou de combat (selon l’âge et les dispositions) pour vivifier « l’énergie, le courage ou le souci d’excellence » p.302,
4/ marcher dans la nature pour garder le contact avec les éléments, le végétal et les bêtes (désormais « êtres sensibles » selon la loi),
5/ redécouvrir les hauts lieux de notre civilisation, Delphes, Brocéliande, Alésia, le Mont Saint-Michel, Sils-Maria…,
6/ cultiver la beauté pour soi-même, nuages, nuit étoilée, statue, tableau,
7/ retrouver les rites de saison et leur fondement dans le cycle de la nature, créer son almanach familial comme hier les livres de raison.

Dominique Venner, Un samouraï d’Occident – le bréviaire des insoumis, 2013, éditions Pierre-Guillaume de Roux, 317 pages, €23.00
Un article honnête sur Dominique Venner dans L’Express
Une analyse politique conventionnelle du monde.fr

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Partis extrémistes ou partis de gouvernement ?

Le choix est plus grave qu’il n’en a l’air : ce sont moins les programmes qui comptent (un catalogue de yakas) qu’un choix entre décision représentée et décision imposée. Nos institutions sont représentatives. Elles sont républicaines car demandent leur suffrage au peuple res publica = la chose publique). Mais sont-elles « démocratiques » (demos = le peuple) ? Oui si l’on accepte que le peuple soit représenté, non si la représentation ne donne pas le peuple en sa diversité. C’est ce que contestent les partis extrémistes, mal représentés dans les institutions.

Ils n’ont pas forcément tort – mais leur donner entièrement raison serait dangereux.

Car qu’est-ce que « le peuple » ? Deux conceptions s’affrontent : la somme des individus et la masse indifférenciée des citoyens. La Révolution de 1789 était clairement en faveur des individus, réputés rationnels donc autonomes, et porteurs de droits universels par eux-mêmes avant la race, la religion, la nation ou la famille. La république terrible de 1793 était clairement pour la masse, la « souveraineté nationale » étant un bloc au-delà de tout individu, traduit uniquement par ses représentants, eux-mêmes dirigés par une secte étroite autour d’un leader charismatique (Robespierre). Montesquieu contre Rousseau, la France n’en a jamais fini avec cet écart.

Montesquieu était pour les contrepouvoirs, afin que chaque individu puisse s’épanouir librement, dans le cadre de lois pesées, soupesée et contrôlées par des institutions séparées : les droits de l’Homme l’emportaient sur les droits du peuple citoyen.

  • Nos institutions actuelles sortent en grande partie de Montesquieu, elles se méfient des parts et des partis, elles privilégient le débat mais laissent la main à l’Exécutif.

Rousseau était pour l’enthousiasme fusionnel où les personnalités s’abolissent en un élan citoyen qui emporte toutes les différences : la mobilisation générale était constamment requise.

  • La VIe République de Mélenchon voudrait une Assemblée unique mobilisée en permanence, avec un Exécutif soumis et référendum révocatoire des élus.
  • Napoléon 1er puis III, Pétain puis Marine Le Pen, préfèrent un Exécutif tout-puissant, justifié par des assemblées à leur botte, elles-mêmes sous le contrôle d’un parti unique.

melenchon le pen

La modernité promeut l’individu ; elle cherche à le « libérer » de ses appartenances de naissance pour lui offrir le choix de sa raison. L’idée est que chaque être humain est doué d’une faculté de penser et que tout ce qui empêche son libre exercice est à mettre en lumière et contrôler. Ce que contestent les collectivistes de toutes obédience : les intégristes religieux pour qui la seule raison est celle des commandements de Dieu, les communistes pour qui les lois scientifiques de l’Histoire s’appliquent malgré l’illusion du déterminisme personnel, les jacobins robespierristes pour qui la volonté générale prévaut sur toute volonté individuelle (la générale étant exprimée soit par les braillements de la rue manipulée, soit par l’orchestration d’un parti efficace, soit par une mobilisation militante de tous les instants et à tous les niveaux).

L’idéal de l’individu moderne est celui de Karl Marx : l’épanouissement des potentialités humaines contre toutes les contraintes religieuses, politiques, sociales, alimentaires, voire biologiques. De fait, la libération des Lumières aboutit au libéralisme politique, puis au laisser-faire économique, enfin à l’individualisme libertaire des mœurs – voire à l’égoïsme libertarien du refus de l’État. Karl Marx, lorsqu’il appelait à libérer l’Homme était un libérateur libéral, libertaire et libertarien – puisqu’il pronostiquait la disparition de l’État. Une partie de la gauche conserve cet idéal, une autre veut l’imposer de force – toujours dans l’avenir – en assurant le viol de l’Histoire par quelques-uns. Or si l’Histoire est « scientifique », elle va à son pas et personne ne peut la forcer ; si le volontarisme politique force le changement, il est amené à vouloir immédiatement un Homme nouveau contre le Vieil homme qui résiste. Donc à changer la société par décret : ce que fit Pol Pot sans état d’âme, avec les conséquences qu’on sait.

Mais la gauche n’est marxiste en politique que comme elle est keynésienne en économie : ne prenant que ce qui justifie sa prise de pouvoir. Être « de gauche » est un tempérament qui est légitime ; c’est être pour la justice, la solidarité et le souci de l’avenir. Mais adhérer aux partis de gauche est une autre histoire ! La gauche française a été prête à tout pour obtenir le pouvoir : la terre aux paysans en 1789, les manifs en 1848, la grève générale et les attentats antisystème sous Napoléon III, l’inféodation à Moscou dès 1920, l’État-providence et sa nostalgie après 1945, enfin aujourd’hui l’aspiration écologique d’apaisement – vision du monde typique de pays vieillissant qui s’épuise à courir après la jeunesse.

L’extrême de la gauche a toujours été dans la surenchère et refusé tout compromis. La gauche normale est fraternitaire, d’inspiration chrétienne ; la gauche extrême est mystique, dans l’illusion lyrique de faire l’histoire et de changer l’homme. La gauche institutionnelle respecte le régime et admet que les élections renvoient ses représentants jusqu’à une prochaine fois ; la gauche extrême croit la souveraineté populaire équivalente à la souveraineté divine et veut imposer par la force la volonté générale (qui n’est la volonté que de quelques-uns).

Or la démocratie directe est une belle utopie, qui fonctionne en cité restreinte (Athènes, le thing viking en Islande, la Commune de Paris, la Suisse des référendums aujourd’hui). Les pays étendus et complexes ne peuvent fonctionner ainsi par consensus immédiat. Certes, avec l’Internet et le niveau éducatif, le parlementarisme traditionnel doit composer avec l’initiative populaire : sondages, études, blogs, média, comités de citoyens, associations, élections, référendums. Il est possible et souhaitable d’introduire plus de participation des citoyens aux institutions comme le préconise Pierre Rosanvallon.

Mais les professionnels de la politique installés résistent, voulant garder pour eux ce pouvoir qui les valorise. L’électeur français le constate : il est très difficile de limiter le cumul des mandats, de contrôler les fonds alloués aux députés, d’obtenir la transparence sur leurs patrimoines. L’élu, en France, se croit oint de Dieu, la fonction valant sacralité. Ce qui n’est guère démocratique… Si jamais les élus en question placent la volonté générale avant la légitimité du fonctionnement des institutions, si le volontarisme politique doit l’emporter sur les procédures qui garantissent tempérance et contrôle – vous comprenez vite quel danger existe pour la représentation du peuple.

La tyrannie démocratique de Robespierre n’est pas loin, pas plus que celle de Hitler, de Staline, de Mao, de Pol Pot ou de Khomeiny. Au nom du peuple, au nom du Bien (qui est soit la race, soit la classe qui doit accoucher de l’Histoire à venir, soit l’orgueil national, soit la pureté d’existence, soit les commandements de Dieu), la démocratie se transforme en chose du peuple inféodée à une croyance et à ses clercs. L’Iran est une république – mais islamique ; l’URSS aussi était une république, fédérative et populaire, tout comme la République populaire de Mao. Le peuple n’est en ce cas plus composé d’individus mais embrigadé dans la religion collective. C’est autrement dit un retour à cet Ancien régime qui imposait à un pays donné un roi, une foi, une loi et déclarait la guerre de religion à tous ceux qui ne se conformaient pas aux mœurs et coutumes du royaume.

melenchon et bachar el assad

Ce pourquoi Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen sont à mettre dans le même sac. Malgré leurs différences de croyances, le résultat institutionnel est le même : j’veux voir qu’une tête ! L’instance derrière les institutions a, pour ces politiciens, tous les droits sur la société et sur l’individu. Une fois les leaders manipulateurs élus, les citoyens n’ont plus qu’à se taire, les élections seront trustées par les militants ; toute opposition sera éradiquée sans pitié comme anti-collective, contre le projet politique volontariste de la croyance, imposé par la force.

Jacques Julliard le montre admirablement : « A la lumière de la Commune de Paris, on mesure mieux qu’il ne s’agit que de deux modalités, l’une libérale, l’autre dictatoriale, de la même entéléchie : celle du pouvoir – c’est-à-dire la distinction des gouvernants et des gouvernés, le principe d’autorité appliqué à l’administration des hommes, le grand mensonge soigneusement entretenu, qui fonde la domination des politiques, des administrateurs, des patrons, des généraux, des juges, des prêtres, des intellectuels, sur la société tout entière » Les gauches françaises, p.303. La Commune de Paris était résolument CONTRE la dictature du prolétariat, CONTRE la représentation sans contrôle citoyen, CONTRE les professionnels de la politique qui sont très vite imbus de privilèges. Le citoyen d’aujourd’hui :

  • peut concevoir la professionnalisation de la politique – mais lutter pour qu’elle n’aille pas trop loin ;
  • accepter la représentation – mais assurée de contrôles (l’Assemblée par le Sénat, les lois par le Conseil constitutionnel, l’exécution du Budget par la Cour des comptes, la conformité au droit européen par la Cour de cassation, les droits de l’homme par la Cour européenne de justice, et les partis par les élections régulières) ;
  • mais il ne peut accepter la dictature partisane, qu’elle soit de droite ou de gauche, jacobine ou xénophobe.

On voit bien comment les professionnels de la politique peuvent confisquer la représentation nationale à leur profit pour assurer une dictature molle de leurs intérêts : c’est ce qui se produit en France, pays centralisé, endogamique, où les réseaux sont étroits et tenus, où les médias sont peu capables de faire un travail professionnel de vigilance et d’investigation. C’est aux citoyens que nous sommes de demander des comptes – en refusant surtout la surenchère des beaux-parleurs qui font sonner les grands mots pour préparer leur petit pouvoir personnel ! Garder le régime, mais le surveiller – l’extrémisme serait bien pire.

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