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Tendres cousines de David Hamilton

Jeune adulte, j’avais beaucoup aimé ce film, sorti en salle en 1980. Il est tiré directement du roman de Pascal Lainé paru l’année d’avant, lui-même inspiré d’Apollinaire avec Les exploits d’un jeune Don Juan. Le Pop club de José Artur en avait fait l’éloge, un soir après 22h sur France-Inter. Pudeur, tendresse et délicat libertinage font de ce film léger, à la française, une initiation érotique émouvante d’un adolescent, dépaysée dans le temps du passé.

Julien (Thierry Tevini) a « 14 ans et 5 mois » lorsqu’il revient à la ferme familiale en pleine Beauce, pour les vacances de l’été 1939. La puberté l’a grandi brutalement, en témoignent ses vêtements étriqués qui le serrent et qu’il porte déboutonnés. S’il a grandi, la pension de curés ne l’a pas musclé, comme lui dit gentiment une servante. Il a gardé sa bouille ronde d’enfant, sa « peau de fille » comme lui déclare une autre et surtout ses cheveux longs en casque. C’était la mode de la fin des années 1970, dans le courant androgyne et antimacho qui régnait alors, mais je ne suis pas certain qu’un adolescent en pension religieuse aurait eu le droit de porter la même coiffure en 1939. Cela le rend mignon, mais pas vraiment adulte. Or il est amoureux de sa cousine Julia (Anja Schüte), une blonde de 16 ans fort bien faite, mais qui elle-même est amoureuse de Charles (Jean-Yves Chatelais), fils à papa enrichi dans les sanitaires, à qui est destinée la sœur de Julien, 18 ans et voix croassante, qui ne rêve que crèmes et falbalas.

Maladroit et agissant comme un enfant, Julien offre à sa cousine un… couteau suisse, comme si elle était un copain scout. Sa grande sœur sera tout aussi maladroite avec son fiancé Charles lorsque celui-ci sera mobilisé, elle lui donnera… un gros ours en peluche « porte-bonheur » ! C’est dire combien l’ajustement entre garçons et filles n’est pas favorisé par la société catholique et bourgeoise où chacun se voit cantonné à son rôle immémorial.

Le lourd printemps de Beauce a mis la ferme en émoi et les multiples servantes, ne portent rien sous leur robe – Julia se met même nue dans les herbes hautes pour prendre le soleil (et aguicher Charles). Régisseur et palefrenier profitent du cheptel féminin, tout comme Charles, doté de son prestige de riche bourgeois. Le spectateur plonge peu à peu dans cette atmosphère électrique où l’érotisme est à fleur de peau, non sans cette ironie française qui fait le charme du film. Le père de Julien (Pierre Vernier) est peu intéressé par les filles, ses faveurs vont à Mathieu, aide palefrenier de 17 ans aux cheveux longs et à la chemise ouverte, un peu demeuré. On se demande si cette affection du maître n’est pas le signe d’un fils bâtard, mais la suite prouvera que ledit maître est plus attiré par les « jeunes ordonnances » que par la gent femelle.

Passe aussi le facteur Cheval, clin d’œil à la réalité, qui se bâtit un palais de galets de rivière et qui tombe de vélo lorsqu’il voit la blonde allemande Liselotte se baigner entièrement nue. Pendant ce temps, le vieux le professeur Unrath (Hannes Kaetner), un scientifique allemand un peu illuminé qui a fui le nazisme, attrape « des âmes » dont il gonfle les ballons. Il est un hôte payant, inoffensif à la jeunesse, et sait consoler les chagrins de maximes sages.

La guerre, déclarée durant l’été, laisse Julien quasi seul mâle au milieu du harem. Toute l’attention se reporte sur lui, adolescent tout neuf déjà initié un soir de punition par la femme de chambre (Anne Fontaine) qui « teste son lit » (elle sera virée par sa mère, Macha Méril). Elle sera suivie de la brune Mathilde (Gaëlle Legrand) dans le foin où il s’est endormi torse nu après l’avoir chargé toute la matinée, non sans prendre un coup de soleil. Rougissant et tout timide, il jouira pour la première fois, chevauché par sa tendre initiatrice. Une scène pudique, délicatement jouée, filmée sur les visages.

Désormais déniaisé il délaissera sa cousine qui ne veut pas de lui et s’arrangera par une fausse lettre par lui montrer la vérité : Charles est un baiseur de tout con qui passe. La scène dans le grenier où pendent les draps à sécher est hilarante, Charles déshabille la jeune servante de 16 ans qui a remplacé la femme de chambre trop hardie. Il descend les bretelles d’épaules et dégage ses seins, puis remonte sa robe pour la pénétrer. Surpris par Julia outrée, il ne se démonte pas et accroche simplement la robe relevée au fil avec une pince à linge, le temps de régler la question ; et la jeune servante patiente, ainsi offerte.

Le beau Julien qui prend de l’assurance passera entre les mains expertes d’Angela (Fanny Meunier), de Liselotte (Silke Rein), de Justine, de Madeleine… Candide est heureux comme au harem. Sa cousine veut quitter la ferme pour aller n’importe où avec Claire, ancienne actrice décavée, priée de déguerpir du domaine parce que sa chambre va être louée. Alors que Claire fait ses bagages, Julien surgit et se dispute avec Julia. Ils en viennent vite aux mains, comme des garçons, et Julien qui a pris de la force domine Julia. La maintenant sous lui, il lui ouvre la robe et dégage sa poitrine… ce qui se termine par un baiser fougueux de l’un vers l’autre, rencontre sensuelle exacerbée par la lutte. Désormais réconcilié avec la vie, Julien baise probablement Julia car la dernière image les montre tout nus dans les blés après l’amour. Julien traite Julia comme Charles en l’appelant « bébé ». Elle ne supporte pas et une nouvelle baffe (la troisième au moins) lui prouve qu’il ne faut pas mépriser les femmes.

Amour de la vie plus que de la bataille, amour des femmes et jeux libertins, toute la légèreté française est là, dans l’innocence de la jeunesse dans la campagne – ce qui fera perdre la guerre mais gagner la paix avec le baby-boom !

Le politiquement correct inhibe la réédition de ce film (mais laisse hypocritement le YouPorn des collégiens se déchaîner) et nous devons nous contenter de ce qui est proposé – d’autres pays européens sont moins prudes :

Tendres cousines de David Hamilton, 1980, avec Thierry Tevini, Anja Schüte, Valérie Dumas, Évelyne Dandry, Élisa Servier, Jean-Yves Chatelais, Macha Méril, Hannes Kaetner, Silke Rein, Laure Dechasnel, Pierre Vernier, Gaëlle Legrand, Anne Fontaine, Fanny Bastien, film en français avec sous-titres grecs €17.99 / ou Arrow 2007, audio français avec sous-titres anglais €57.60

Pack DVD David Hamilton : Les ombres de l’été, Premiers désirs, Tendres cousines, Un été à Saint-Tropez, Llamentol 2009, en audio français ou espagnol €24.34

Pascal Lainé, Tendres cousines, Folio, €8.90 e-book format Kindle €7.99

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Ragdoll contre Chat noir

Moi, je suis LE chat de la maison. Oh, il y en a bien un autre, qui était d’ailleurs là avant moi, mais c’est un Noir, un prolo habitué à vivre dans le jardin et à se débrouiller, je l’ai relégué à la cave. Moi, je suis un chat de race, je suis un Ragdoll – lui m’appelle volontiers Ral’bol ; je crois que c’est une injure. Mon père était siamois et ma mère persane ; je devais avoir une grand-mère birmane aussi, je ne sais pas. J’ai les longs poils de ma mère et la facétie comme la couleur de pelage de mon père. Celui-là, je ne l’ai pas connu, heureusement d’ailleurs, on dit que les pères chats mangeraient bien leurs rejetons qu’ils considèrent comme des proies dès qu’ils bougent.

Ma mère, en revanche, je suis resté quelques mois avec elle. Pas assez longtemps me dit mon maître car si je sais chasser, ça c’est dans les réflexes, je ne sais que faire de la bête une fois morte. « Cela se mange, ça ? ». Ma mère aurait dû m’apprendre en découpant ma première proie d’adolescent sous mes yeux, pour me montrer comment faire. Soit elle ne savait pas, soit elle s’en est bien gardée, soit elle n’a pas eu le temps. Je crois que la dernière hypothèse est la bonne. C’est pourquoi je dépends aujourd’hui des autres, c’est-à-dire des hommes. Je reste infantile, pas fini ; je ne chasse que les boites ouvertes et les croquettes en gamelle. La collectivité, dans sa maternelle bonté, se charge de la remplir chaque jour contre due reconnaissance politique, frottements, passage sur les genoux et ronronnement. Je n’ai plus ma mère, il faut bien remplacer.

Le chat Noir, lui, condescend à accepter les croquettes en apéritif mais il chasse. Quand il ne chasse pas, il préfère les morceaux cuisinés, ça le change, un peu d’épices, du beurre. Ah, les filets de poulet rôtis dans le beurre fondu… Voilà de l’oiseau encore chaud et savoureux comme on en trouve pas dans la nature ! C’est un chat à la bonne franquette qui a vécu avec des ouvriers sur un chantier. Il aime tous les restes des hommes, le gras, le grillé, les morceaux de fromage et même le chocolat. Le plus noir possible, le chocolat ; ça doit avoir un vague goût de rat tout chaud crevé… Il chasse et quand il est tapi dans un buisson on ne voit que les yeux. Il les ferme à demi pour ne pas se faire repérer comme s’il mettait des lunettes de soleil. Il croque volontiers les merlettes, insouciantes comme tous les piafs. Même les pigeons s’il peut, ils sont lourds et bien dodus, il doit y avoir à manger là-dedans. Moi, je le regarde car je ne pourrais pas ; pas assez vif, pas assez de savoir-faire. Dommage pour les pies, c’est agaçant ces bêtes-là, ça vous croasse dans les oreilles, on se les ferait bien. Un bond, un coup de dents, et hop ! Mais vous avez vu leur bec ? Avant de bondir, il faut toujours se demander où est le bec, comme le livre que lit ma maîtresse. C’est une attitude pessimiste, j’en conviens, mais prudente : même le chat Noir ne se risque pas sur les pies. Il se contente de les faire fuir en accourant ventre à terre. Mais il ne leur saute pas dessus, ah non !

Ce chat, il me fait envie ; il sait faire tout ce que je ne sais pas, grimper aux arbres à toute vitesse, ramper sans bruit entre les herbes, bondir d’un coup sur le mulot qui passe ou l’oiseau qui se pose, me flanquer une rouste quand je le titille de trop près. Alors je m’avance, pas à pas, très lentement pour ne pas déclencher le réflexe de chasse, un truc inscrit dans nos schémas instinctifs, je fais semblant de rien, je reste à la distance de sécurité, puis, à deux fois la distance, je le nargue un peu, queue relevée pour dire qu’ici c’est chez moi. Il ne dit rien, indifférent au gosse de riche que je suis à ses yeux, incapable de se débrouiller, dépendant de la sécurité sociale des hommes. Il est plus grand, plus musclé et plus fort, le Noir, il pèse un quart de plus que moi à presque 7 kg. Quand il me flanque une rouste parce que je suis allé renifler d’un peu trop près ses croquettes dans la cave, son territoire, les poils répandus ne sont pas les siens. Il a comme une cuirasse lisse de fourrure drue ce gouttière, les griffes glissent dessus comme sur un poil téfal, tandis que moi, avec mes mèches persanes et le sous-poil confortable en-dessous, ça accroche trop. Je ramasse d’ailleurs les brindilles quand je vais trop dans le jardin.

Je préfère les fauteuils et les lits élevés, disputant parfois la place à Minette. D’autre fois, je ne la vois même pas, une énorme peluche nous séparent, tout va bien.

Le Noir est venu tout seul dans la maison, il s’est fait adopter. Il va de maître en maître faire sa campagne électorale, frottements, coups de tête sur la main ou le visage qui s’avance, ronronnement, le grand jeu de la séduction, quoi. Il vient de la rue, il sait y faire le démagogue libertaire, il a bien fallu qu’il se nourrisse au début. Moi, je viens d’Espagne, d’un restaurant de l’intérieur où l’on m’a trouvé. J’étais très jeune et très maigre, ne mangeant que ce que j’arrivais à grappiller sous les tables, chassé à coups de balais par les serveurs. Ces maîtres qui aiment les chats m’ont pris en pitié, ils m’ont donné une boite dont ils ont toujours un exemplaire dans la voiture pour des cas comme le mien. Quand ils se sont levés pour partir, je les ai suivis. Quand ils m’ont encouragé à sauter dans leur voiture, je n’ai fait ni une, ni deux. Les débuts ont été durs, vétérinaire, médicaments, nourrissage. Je dormais beaucoup. Mais comme j’étais jeune, j’ai surmonté. Sauf que je n’ai pas appris la vie de chat, quoi. Je suis dépendant, presque chien, malheureux sans compagnie. Sauf que je n’obéis pas aux ordres, faut quand même pas exagérer, social-libéral peut-être mais pas socialiste, non. Pour moi il n’y a pas de sens de l’Histoire, à chacun sa liberté.

Je suis très jaloux, exclusif comme tous les Ragdolls, je ne supporte pas que l’on caresse Minette ou – pire ! – le Noir. Je fais « grrr ! » et « fsschhh ! » puis je commence à chanter, du profond de la gorge, comme un bébé humain qui pleure. Je suis LE seul chat de la maison, les autres n’ont qu’à bien se tenir. Même si j’ai le dessous à chaque fois dans les bagarres, j’ai remarqué que celui qui crie le plus fort devient le plus légitime aux yeux de tous ; l’autre finit par se sentir coupable et laisse la place. C’est ce qui est arrivé au chat Noir, sa légitimité en a été écornée. C’est ce que disait Rousseau, un autre livre que lit mon maître, je connais les lois de la nature donc ce que je dis doit être la volonté générale. Et ça marche, les chats comme le Noir n’ont qu’à bien se tenir. La Minette aussi, ah mais !

Rousseau m’est sympathique ; si j’avais des petits je les aurais laissés comme lui à leurs diverses mères, je ne m’encombre pas de niards miaulant. Je les aurai aussi laissés à poil baguenauder dans la nature, pour qu’ils apprennent. Ce qui m’intéresse, c’est la sécurité et la chaleur du collectif, croquettes tous les jours et genoux à volonté devant la télé. Ou dans une vasque à fleurs, s’il fait beau, au soleil. Les mômes, ils n’ont qu’à se tailler un territoire ou apprivoiser d’autres maîtres. Sauf mes filles ; je les aurais bien prises dans mon harem. Car, hein, je suis LE chat de la maison. Dans chaque maison il n’y a qu’un SEUL chat, même s’il peut y avoir plusieurs chattes. Mon territoire est bien marqué, j’ai laissé mon odeur partout et je fais le tour pour la renouveler chaque jour, surtout au printemps.

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Du vent à Tahiti

Makemo atoll des Tuamotu, 56,2 km2 de terres émergées, surface du lagon 854 km2. Troisième plus grand atoll des Tuamotu après Rangiroa et Fakarava. Les éoliennes gisent au sol ! Les éoliennes devaient devenir un projet pilote et… un modèle pour les autres ! Aujourd’hui, on est revenu à l’électricité d’origine thermique, néanmoins tous les habitants n’ont pas encore été raccordés au réseau. La faute à qui ? Fiu ! C’était il y a dix ans, la SEM (Société d’Economie Mixte) était délégataire de service public et détenue à 66% par le Pays, le reste du capital est réparti entre la Société de réseaux d’études et de service (SPRES) et la société d’études et de développement polynésienne (SEDEP) appartenant à l’homme d’affaires Dominique Auroy. Par manque de pépètes. Il est urgent d’attendre.

Manuae

En attendant, le réchauffement climatique poursuit ses effets.

Le samedi 12 décembre, en 24 heures, il est tombé 179 mm d’eau à Papenoo (côte est de Tahiti), 201 mm à Maheana, 163 mm à Hitiaa à 2 m d’altitude et 168,4 mm à Hitiaa à 500 m d’altitude. Un homme est décédé suite à un éboulement qui a détruit sa maison. Les crues étaient impressionnantes, des torrents de boue et d’eau dévalant à toute allure, emportant maisons et voitures. Les habitants de la vallée d’Onohea ont dû être évacués, la rivière ayant recouvert la route. Le lendemain… on constate une soixantaine de maisons détruites, des familles ont tout perdu. Là encore la solidarité polynésienne n’est pas qu’un mot.

cyclone pam

Le cyclone Pam dévaste le Vanuatu, 16 morts, 450 millions de dollars de dégâts, des rafales de vent à 320 km/h. Comme toujours, les Polynésiens sont solidaires et envoient des conteneurs de dons, des secouristes, des bûcherons, des agents EDT sur place pour aider les populations.

En attendant, la prévarication continue.

atoll

Scilly ? Ce nom ne vous dit rien pour les antipodes ? Confetti de 4 km2, appelé aussi Manuae est un atoll sans passe, couvert de cocotiers dont on a parlé récemment au tribunal correctionnel. De la prison a été requise contre René Taputu, le « roitelet » de l’atoll de Scilly. Cet individu se serait érigé en roitelet depuis plus de 30 ans. D’après le procureur, « il y a créé une communauté sur laquelle il règne, il y vit avec un harem, des enfants naissent sans même être déclarés, vivent sans électricité, sans soins. Il cultive du paka (cannabis) et pêche la tortue (espèce protégée). Le pays devra un jour ou l’autre prendre ses responsabilités et organiser le rapatriement de cette communauté. Il pourra compter sur le concours du Haut-Commissariat ». N’y aurait-il pas un castelet libre à Tahiti pour y loger ce roitelet et sa cour ?

Hiata de Tahiti

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Thorgal 34, Kah-Aniel

Thorgal 34 Kah Aniel couv
Un cru meilleur que le précédent, l’histoire s’accélère un peu (pas trop) et la magie renaît (plutôt conventionnelle).

Mais pourquoi ces couleurs verdâtres et marronnasses, même dans les instants les plus lumineux de l’amour, de la ville ou du désert ? La gueule du héros en couverture elle-même est alourdie du bas comme s’il devenait moins avisé et plus prognathe, affublé d’une barbe de notable socialiste.

Rosinski est-il en pleine déprime pour atténuer l’éclat de l’orient par ces ombres lourdingues ? Où est passé le dessinateur des albums de la maturité ?

Exit Jolan pour l’instant, Thorgal poursuit sa route et Aniel grandit. On apprend de qui il est le descendant, bien que Thorgal l’ait engendré.

Mais nous quittons le nord et les étoiles pour le politiquement correct arabisant. Le grand métissage des gènes et des cultures… Tout le monde il est beau et puissant, le jeune chamelier basané est amoureux de la nordique Lehla tandis que Thorgal abandonne sa passion d’Aaricia pour une voilée, fille de concubine à sultan !

Thorgal 34 thorgal et salouma voilee

Des pages entières ne contiennent que des cases sans un mot, signe que le scénariste n’a pas grand-chose à dire. Pas plus que le dessin, qui baisse, le scénario n’est à la hauteur. Il sombre lui aussi dans le verdâtre et le marronnasse du politiquement correct onusien.

Thorgal 34 amour verdatre

Le fils des étoiles passe de la fonction d’homme debout à celle d’homme de boue.

Thorgal 34 lehla nue au bain

Les complots de harem remplacent les bagarres viriles, les passes magiciennes l’intervention des dieux. Asgard est bien oublié au profit des coutumes islamiques où « si les jeunes filles se promènent en tenu affriolante, c’est qu’elles sont à prendre » (p.29) et où le poison et la ruse sont préférés à l’arc et l’épée.

Thorgal 34 moeurs arabes pour la femme

Le personnage de Thorgal en est trahi, l’amour serein méprisé, les valeurs vikings ignorées. Au profit d’un salmigondis à la mode, vendable à la multiculture. Le jeune lecteur, en pleine construction d’identité, a besoin d’autre chose que ce Machin où tout vaut tout, où l’on baise qui est là malgré les serments, où l’on somme la vierge de s’initier aux godemichés et où le fils aîné est oublié tandis que le cadet n’est plus un fils.

Thorgal 34 aniel nu

Aniel renaît, nu, en jeune homme voué à une destinée, prélude peut-être à une bifurcation de héros par Sente.

Thorgal 34 aniel jeune homme nu

Le néo-scénariste n’aime pas le monde viking qu’il connait mal (un gamin de 5 ans qui ne sait pas nager chez les Vikings est une stupidité). Il n’aime pas plus Thorgal ni Aaricia, ça se voit depuis ‘Moi, Jolan’ ; il n’a de cesse de bifurquer pour faire exister les personnages secondaires, bien à lui, mais affadis depuis Van Hamme. N’en étant pas le père, Sente adopte avec peine une famille de héros recomposée – pour le grand dam de la série !

Souhaitons que le cru 2014 de la série quitte un peu ces bas-fonds culturels et ces illustrations fadasses pour un peu de sain héroïsme et de magie positive !

Rosinsski & Sente, Thorgal 34, Kah-Aniel, 2013, 48 pages, €12.00

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Esclavage dans le monde arabe 7ème 20ème siècle, Murray Gordon

murray gordon l esclavage dans le monde arabe 7e 20e siecle
L’esclavage n’a pas concerné que la traite atlantique ; le territoire africain et les marchands arabes ont également trafiqué des êtres humains, bien avant et durant bien plus longtemps – jusqu’à la mi-XXe siècle. Les études sur le sujet sont plus rares et font moins parler d’elles. Murray Gordon, qui a enseigné les sciences politiques à la City University de New York et travaillé aux Nations Unies, y voit quatre explications :

  1. la mauvaise conscience occidentale au passé colonial enrichi dans le commerce triangulaire,
  2. le manque de documents historiques de première main,
  3. l’écart de définition de l’esclave entre Occident et Islam (objet sans âme pour les premiers, personne vendable pour les seconds),
  4. enfin l’absence de diaspora noire comme aux États-Unis et en France qui ne pousse pas à l’étude du sujet.

Son livre, qui se lit facilement et donne de copieuses notes et bibliographies, complète ceux de Jacques Heers, Les négriers en terre d’islam – la première traite des Noirs VIIe-XVIe siècle et de Robert Davis, Esclaves chrétiens maîtres musulmans – l’esclavage blanc en Méditerranée (1500-1800).

Des historiens se sont quand même penchés sur ce sujet délaissé, surtout depuis le mouvement abolitionniste né au XIXe siècle en Angleterre pour raisons religieuses ; Murray Gordon en fait la recension. Si les chiffres sont à prendre avec les précautions scientifiques d’usage, les témoignages et les écrits historiques sont indéniables. Il y aurait eu traite vers les pays arabes pour environ 7 millions d’esclaves du VIIe siècle au XVIe siècle (p.149), pour environ 10 millions de 1600 à 1800 (p.150), et pour environ 2 millions de 1800 à 1950 (p.172, p.188). Il y aurait eu encore de 500 000 à 700 000 esclaves en Arabie Saoudite dans les années 1950… Ce sont principalement des « nègres », réputés physiquement forts pour être soldats mercenaires, gardes du corps ou compagnons de jeux, agriculteurs, eunuques de harem castrés entre 8 et 12 ans, intendants, artisans spécialisés ou nourrices, concubines ou mignons – voire « chèques de voyage » pour payer les frais durant le pèlerinage à La Mecque. Mais ce sont aussi des « Slaves » des Balkans, de Grèce ou des bords de la mer Noire, les chrétiens pris en Méditerranée, et des « Blancs d’Asie » capturés en Inde ou ailleurs.

La carte des traites draine principalement l’Afrique du nord et du centre, le XIXe siècle voyant l’apogée des routes ouvertes : « A l’ouest, s’étendait la route du Maroc à Tombouctou en passant par Taoudeni, avec son important embranchement sur Mabruk et Touat. Au centre, passait la route Ghadamès-Aïr-Kano qui menait au pays des Haoussas. Plus à l’est, on trouvait la route Tripoli-Fezzan-Kawar qui se terminait au Bornou. Enfin, la dernière reliait la Cyrénaïque au Ouaddaï par Kufra » p.155.

esclavage arabe routes du commerce

Pourquoi l’esclavage en pays arabe ? Parce qu’il est plus ancien que l’islam, la pratique courante d’une société machiste de bédouins prédateurs qui considèrent déshonorant tout travail autre que la guerre. Parce que l’islam – mais plus encore la charia, cette interprétation juridique de la religion – a légitimé l’esclavage des non-croyants, avec une exception théorique pour les croyants du Livre non-musulmans : juifs et chrétiens. Mais la pratique a toujours su jouer habilement des textes pour justifier la capture, la captivité et la mise au travail de croyants, y compris musulmans, lorsque cela arrangeait les affaires. Le mythe de Cham, présent dans la Bible et repris par le Coran, rend les « nègres » inférieurs, plus loin de Dieu et plus « enfants ». « Tant que l’esclavage reposa sur un système multiracial, les propriétaires turcs et arabes d’esclaves favorisèrent leurs esclaves blancs par rapport à leurs esclaves noirs, dans l’attribution du travail et dans ce que l’on pourrait appeler les perspectives de carrière. Les concubines blanches étaient préférées aux noires… » p.102. Le Prophète veut cependant corriger les abus pratiques de la société de son temps (p.25) et la religion musulmane qu’il instaure fait des esclaves des êtres humains à traiter correctement. On peut d’ailleurs « expier ses péchés » en affranchissant ses esclaves. Mais « il n’y a rien dans les prescriptions du Prophète qui permette de conclure qu’il aurait en aucune façon favorisé l’abolition même graduelle de l’esclavage. Une approche aussi radicale lui aurait aliéné les gens mêmes qu’il voulait gagner à son enseignement » p.25.

D’ailleurs, la conversion à l’islam après la capture ne rendait aucunement libre : le juriste musulman marocain Ahmad al-Wansharisi, au XVe siècle « déclara qu’elle n’invalidait pas la propriété ou la vente de l’esclave » p.39. L’esclavage en islam « fait partie de l’ordre naturel des choses », justifié au nom de la religion par le sentiment d’être élu d’Allah, habilité à convertir la terre entière. « L’abus de la notion de jihad se manifesta particulièrement dans les déprédations des pirates barbare[sques] à l’encontre des navires chrétiens sur les côtes d’Afrique du nord (…) qui se poursuivirent jusqu’au début du XIXe siècle » p.33.

L’Arabie Saoudite, les Touaregs, les sultans turcs, les riches égyptiens, Oman, Zanzibar, furent les plus gros consommateurs d’esclaves. « Au milieu du XVIIIe siècle, le harem et le voile, symboles du statut des peuples soumis chez les Byzantins et les Perses, furent adoptés par les Arabes » p.64. Les habitudes d’avoir des domestiques, de garder ses femmes et concubines à l’abri de tous regards, et la caution de la religion – firent que l’esclavage a duré en Arabie Saoudite jusqu’en 1962 et en Mauritanie jusqu’en 1981 ! « Partout où l’islam s’implanta, le harem entra dans les mœurs » p.94. Même l’Afghanistan, pourtant réputé plus arriéré, a aboli l’esclavage en 1923, l’Irak en 1924, la Transjordanie et l’Iran en 1929. « En Égypte, dans les années 1870, les beys et les pachas les plus riches achetaient encore des garçons blancs pour servir de compagnons de jeu à leurs fils » p.61. « Un marché aux esclaves fonctionnait encore à La Mecque en 1941 » p.227. « Des chargements de jeunes garçons avaient été débarqués à Oman en 1947, venant de la côte du Makran, au Baloutchistan. (…) on faisait venir des jeunes filles d’Alep en Syrie pour les vendre comme esclaves en Arabie » p.227.

esclave torse nu ligote 14 ans

Ce sont les pressions diplomatiques, commerciales et militaires des pays occidentaux – avec arrière-pensées coloniales – qui ont forcé à abandonner le système social confortable de l’esclavage et les profits fructueux de la traite (de 300 à 500 % de bénéfices pour les marchands p.161, malgré les nombreux morts dus au transport – traverser le Sahara à pied… – et aux mauvais traitements). Les pays devenus colonies ont abandonné de force la traite et l’esclavage : Tunisie et Algérie en 1846, Tripoli en 1853. Certes, les conférences internationales de 1885 et 1890, la SDN en 1926, l’ONU en 1956, se sont saisis du problème. Mais, « en réalité, le facteur déterminant dans cette affaire ne fut pas le respect des textes interdisant l’esclavage, respect intermittent dans le meilleur des cas, mais plutôt l’apparition de nouveaux moyens de transport plus pratiques et de nouvelles opportunités commerciales » p.170. Le développement des échanges et l’industrialisation ont rendu l’esclavage sans intérêt pratique.

Quoique… les salariés mercenaires importés du Népal ou d’Indonésie en Arabie Saoudite ou dans les Émirats aujourd’hui, parqués sans passeport dans des clapiers construits à la hâte, et exploités 12 heures par jour pour bâtir des buildings, ne sont-ils pas la forme moderne de l’esclave en islam ? Et la secte islamiste Boko Haram (ce qui veut dire “l’éducation occidentale est un péché”) qui a annoncé que les adolescentes nigérianes enlevées seraient traitées comme des esclaves, mariées de force aux militants du groupe islamistes ou vendues pour 12 $ sur les marchés – ne reprend-t-elle pas la tradition des origines de l’islam ? Retour aux sources et anticolonialisme font aussi partie d’aujourd’hui. Connaître l’histoire permet de comprendre ce qui se passe ici et maintenant.

Quant à « commémorer » l’abolition de l’esclavage, autant n’oublier aucune des formes qu’il a pris et qu’il prend encore. Car trop souvent, pour les politicards avides de faire mousser leur politiquement correct, la « mémoire » est sélective – selon leur idéologie du moment. Or l’histoire est une science en mouvement, pas une réserve d’indignations morales gratuites.

Murray Gordon, L’esclavage dans le monde arabe – VIIe-XXe siècle, 1987, collection Texto Tallandier 2009, 271 pages, €7.60

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Une autre image de la femme musulmane

Article repris par Medium4You.

Rappelons qu’Auguste Mouliéras, professeur de la chaire publique d’arabe d’Oran est l’auteur, fin XIXème, d’une encyclopédie anthropologique sur le Maroc. Soumise, la femme en Islam ? Pas toujours… Tout dépend de son caractère, de son intelligence, de la puissance de sa famille, des mœurs de sa tribu. Exemple :

« Quoi qu’en dise Perron et sa docte cabale, c’est-à-dire les pseudo-arabisants-sociologues qui ont suivi les brisées de l’ancien directeur de l’école de médecine d’Égypte, la musulmane est encore la reine de son foyer comme au temps des Abbassides et des Arabes antéislamiques. Il est bien certain toutefois qu’elle n’a jamais l’occasion d’étaler en public son réel prestige. Le monde fermé de l’Islam, en effet, n’a pas nos bals, nos soirées, nos réunions mondaines, où les deux sexes fusionnent si intimement, se coudoient, s’observent et se font remarquer. Invisible derrière ses voiles et ses murailles, la mauresque, arabe ou berbère, ne livre son existence quotidienne qu’à ceux qui vivent avec elle, à son mari, à ses frères, à ses proches parents. Or, jusqu’à présent, ceux-ci n’ont point jugé à propos de divulguer les secrets du harem soit du haut d’une tribune ou de la scène d’un théâtre, soit dans les pages brûlantes d’un roman de mœurs orientales. Nos psychologues en redingote se sont donc trouvés dans l’obligation absolue, ou d’étudier la femme arabe uniquement dans les livres arabes, rien que dans les livres arabes, ou de se copier les uns les autres en parlant des horizontales algériennes et tunisiennes. Ceux qui ont puisé leurs inspirations dans la littérature du peuple de Mahomet nous ont montré la femme poète, artiste et lettrée, c’est-à-dire l’exception. Les autres nous ont donné leurs impressions sur les filles perdues de l’Islam, les mouquères dépravées de l’Afrique du Nord, autre exception qui ne prouve rien en faveur de leur thèse. Au point de vue spécial de la femme et de son influence dans la société islamique, il y a peu de chose à glaner à travers la littérature arabe, car les compatriotes du Prophète ont évité avec soin de déchirer le voile de leur vie privée. Quand, par hasard, ils mettent en scène une femme, c’est toujours une savante ou une sainte. Il est évident que l’hôtel de Rambouillet et les mystères de Lourdes ont leur place, si l’on veut, dans les études gynécologiques, mais cette place est restreinte parce que les précieuses et les bigotes ne sont dans une nation qu’une infime minorité.

Faite dans des conditions si défectueuses, l’enquête de nos africanistes ne devait et ne pouvait aboutir qu’à la condamnation navrante et sans appel qui est sur toutes les lèvres chrétiennes « La musulmane existe comme bête de somme, comme chair à plaisir. Son influence morale n’existe pas ». (…) Entrons dans le vif de la question par des exemples qui démontreront que la musulmane des classes laborieuses de la société islamique est pour le moins aussi influente et aussi heureuse que l’épouse de l’ouvrier chrétien. Si je choisis à dessein le monde des travailleurs, c’est parce qu’il constitue l’immense majorité humaine, le troupeau innombrable et souffrant des pauvres, l’élément producteur et générateur par excellence. A côté de lui, que sont les riches ? Une quantité négligeable ou peu s’en faut.

A quelques lieues d’Aïn-Béïdha, dans la province de Constantine, il est une tribu arabe, les Ôùlad Daoud, dont j’ai conservé le meilleur souvenir. Un modeste agriculteur, le vieux Si Ah’med ben T’ayyéb paraissait gouverner en prince débonnaire son grand douar, vaste agglomération d’une vingtaine de tentes sous lesquelles vivaient ses fils, ses filles, ses brus, ses petits-fils, ses arrière-petits enfants, tout un monde de parents de différents degrés, très unis entre eux, s’aimant, s’entraidant, la vraie famille patriarcale en un mot, telle que je l’aime. Arrivé en 1874 dans ce milieu exclusivement arabe pour y apprendre le plus difficile des idiomes terrestres, muni d’une simple lettre de recommandation de mon savant professeur, le regretté Napoléon Seignette, je fus accueilli par ces braves gens comme un adolescent inexpérimenté que j’étais alors, c’est-à-dire en toute sincérité de cœur, sans aucune arrière-pensée, en parent plutôt qu’en ami. Non, ils ne m’ont rien caché, mes chers hôtes, que je bénis encore après un quart de siècle de séparation. Ils furent pour moi des conseillers éclairés, des guides sûrs et désintéressés, presque des frères, malgré la différence de race et de religion.

Quelles maisons de verre que ces tentes arabes, quelle mine, quel trésor d’observations pour qui a des yeux et des oreilles ! Vivant de leur vie, m’intéressant à tout ce qu’ils faisaient, agriculture, élevage, tissage, tonte des moutons, castration des taureaux, cuisine, transhumance, labours, prières, ablutions, chasse aux puces exécutée sur la personne du vénérable Si Ah’med par les mains pieuses de ses fils de trente et quarante ans, longues veillées, conversations interminables avec les femmes et les hommes, telle est la vision, très nette et très douce, de mes trois mois de séjour là-bas qui me passe rapidement devant les yeux.

Une fée magique gouvernait la colonie. C’est elle, je le sus plus tard, qui avait décrété mon admission dans le giron de la grande famille. C’était la pieuse Khadhra, la vieille et sainte femme du chef, la mère sacrée de ses grands fils, la belle-mère non moins respectée des enfants du patriarche issus d’un premier lit. Or, le prudent Si Ah’med ne prenait jamais une décision sans consulter la reine du douar et celle-ci faisait marcher son monde au doigt et à l’œil, un froncement de ses sourcils étant un ordre auquel on n’avait encore jamais désobéi. Une nuit, par un orage épouvantable, nous étions campés sur la pente d’une colline. Affolés par le tonnerre et la pluie, les troupeaux envahissaient les tentes, piétinant les dormeurs, renversant les personnes qui étaient debout. Des trombes d’eau menaçaient à chaque instant d’emporter nos toits de laine. Éperdues, les mères se sauvaient au centre du douar, leurs enfants serrés sur la poitrine, criant que c’était la fin du monde, faisant in-extremis la profession de foi islamique. Cependant, nous, les hommes, nous déclarions qu’il fallait se réfugier au plus vite dans le vieux bordj inhabité de Seignette, à trois kilomètres de là. Et nous appelions Si Ah’med, le conjurant de sortir enfin de sa tente où il paraissait avoir pris racine : – Sidi, partons, allons au bordj, le t’oufan (déluge) nous emporte ! – Calmez-vous, enfants, répondit la voix tranquille du vieillard. Khadhra est en prière. Attendez qu’elle ait fini. Elle vous dira ensuite ce qu’il faut faire.

Patiemment, nous restâmes immobiles sous les grondements du tonnerre et la pluie battante. Tout à coup, un pan de la tente du chef se souleva, et Khadhra parut au milieu des éclairs. « Tous à vos tentes, que personne ne sorte, l’orage va finir, s’il plaît à Dieu. » Tandis qu’elle parlait, je voyais, comme en plein jour, sa main rigide tendue vers nous dans l’attitude de souveraine omnipotence qui lui était habituelle. Un quart d’heure plus tard, nous dormions tous du sommeil du juste, chacun ayant regagné précipitamment sa couche sur l’ordre formel de la femme arabe illettrée qui gouvernait le douar.

(…) Une dernière observation qui a bien son importance : pas une seule fois, durant mon séjour au milieu d’eux, je n’ai été témoin de sévices, de cris, de querelles et de coups dans les vingt ménages arabes qui m’entouraient. Chacun vaquait à ses occupations avec le calme et la régularité placide des temps bibliques. Puis, le soir, réunis devant ma tente qui était devenue le forum de notre village aux maisons de laine, assis pêle-mêle avec les femmes et les enfants, nous causions, et, souvent aussi nous écoutions celle de ces dames qui avait une histoire à raconter, un bon mot spirituel à placer. De ce qui précède, il ne faut pas conclure que tous les maris mahométans sont des modèles de patience, de douceur et de galanterie. Non, loin de là. Ce que j’affirme cependant, c’est qu’ils ne sont ni meilleurs ni pires que nos paysans, et je puis ajouter, sans crainte d’être taxé d’exagération, que le buveur d’eau islamique est et sera toujours un époux mille fois moins insupportable que l’ouvrier alcoolique de nos grandes villes industrielles.

De la campagne et de l’atelier passons à la jeunesse des écoles. Quittons l’Afrique française, où l’instruction est nulle chez la femme arabe, et entrons au Maroc. Courons à Fas [on dit aujourd’hui Fès], la capitale intellectuelle du pays. (…) Si Ah’med ben Es-Snousi veut bien nous accompagner. C’est un vieil étudiant, c’est un barde populaire, et aussi un poète lettré, d’une fécondité, d’une facilité d’improvisation extraordinaire. Habitant Fas depuis douze ans, il connaît les coins et les recoins de la capitale, les mœurs, les coutumes, l’état d’âme de ses coreligionnaires.

« Moi, serviteur de mon Dieu, Ah’med ben Es-Snousi, j’ai étudié à Fas pendant douze ans et j’y ai vu une femme, s’appelant El-Aliya bent Si-t’-T’ayyéb ben Kiran, qui nous faisait un cours de Logique dans la mosquée des Andalous. Entre elle et nous se trouvait un grand rideau qui nous empêchait de la voir, mais nous pouvions l’entendre. C’était une femme d’une érudition vaste, d’un savoir infini dans toutes les branches des connaissances humaines. Mieux qu’aucune femme de la ville, elle possédait son Coran dans sa mémoire. La plupart des femmes de Fas, en effet, apprennent le vénérable Livre divin. Toutefois elles étaient bien inférieures à Madame El-Aliya en métaphysique (autrement dit, dans le domaine des richesses intellectuelles qui proviennent de la raison pure). Nous suivions donc les leçons d’El-Aliya, et elle nous stupéfiait par l’étendue de sa science. Les femmes de Fas sont d’ailleurs très fortes en littérature elles goûtent particulièrement les poésies de l’imam El-R’ernat’i. El-Aliya faisait gratuitement ses conférences aux étudiants. Son cours avait lieu à midi pour les hommes et après la prière de quatre heures du soir pour les femmes. Elle expliquait aux étudiantes la Vjerroumiya (grammaire arabe) avec les commentaires d’El-Ezhari.» (…)

Une femme arabe professeur de Logique, qu’en pensent nos géographes et nos sociologues qui ont répété sur les tons les plus lugubres que le Maroc est plongé dans les ténèbres d’une barbarie sans nom, dans l’océan d’une ignorance incurable ? Et veuillez remarquer que notre El-Aliya dédaigne absolument le psittacisme coranique abrutissant que vous connaissez. L’intelligente Marocaine plane dans les régions élevées de la science des sciences, la sophia des stoïciens, la science du raisonnement, celle qu’Hamilton et Kant ont pu définir la science de la pensée en tant que pensée. »

Sensibles féministes, sages profonds, et vous divins philosophes qui rêvez l’égalité, la fraternité et la science universelles, réjouissez-vous! Non, le Mag’rib n’est pas l’immense et noir tombeau que l’on croyait » page 737.

Auguste Mouliéras, Le Maroc inconnu tome 2 – exploration des Djelaba, 1899, disponible gratuitement sur Gallica

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Anders Behring Breivic le monstre de Norvège

Un attentat à la bombe contre le gouvernement social-démocrate et des  jeunes travaillistes de 14 à 30 ans tués par balles en quelques heures. Breivic a frappé fort pour qu’on le considère. Rançon de notre société du spectacle où les idées sont inaudibles si elles ne hurlent pas devant les caméras.

Qui est donc Anders Behring Breivic ?

Anders n’est pas fou, seulement paranoïaque. Sa logique glacée vient du sentiment d’être cerné, personnellement sans amour, socialement noyé, culturellement métissé. C’est un activiste du choc des civilisations à la Huntington, proche en pensée de la droite israélienne et des Nachis de Poutine.

Behring n’est pas fasciste, il ne croit pas aux mouvements de masse ni aux partis autoritaires bottés sous le charme d’un gourou charismatique. Il est hyperindividualiste, ne croyant qu’en lui-même et aux actes personnels, proche en cela des ultraconservateurs américains, libertariens adeptes des milices armées civiles. Ce pourquoi les bobos intellos du Nouveau Snob se trompent, trop bardés de tabous politiquement corrects pour comprendre la différence entre extrême droite et anarchisme.

Breivic n’est pas raciste, non seulement il le dit mais la meilleure preuve est qu’il a massacré les siens, des ados blonds aux yeux bleus, et pas les basanés immigrés du coin. Il est proche en cela de l’Unabomber américain, un solitaire psychotique qui tuait parmi les siens tous ceux qui représentaient le gouvernement. Ce qui limite probablement son message.

Pourquoi parler de ses idées ?

Jamais je n’accomplirai un acte aussi barbare que de tuer au pistolet-mitrailleur des gosses en slip au bord d’un lac, qui n’ont que leurs mains pour se défendre. Jamais je ne justifierai un tel ‘happening’ au nom de je ne sais quelle révolution ou avenir radieux. Jamais je n’obéirai à la logique glacée des partisans persuadés d’avoir tout seul raison, de Savonarole à Torquemada, de Lénine à Pol Pot.

Mais je crois à la lucidité. Nul ne peut combattre la mort qui marche sans comprendre les ressorts qui la font s’avancer. Comprendre n’est jamais pardonner, cela est d’un autre ordre. Il n’y a aucune morale à analyser pour tenter de savoir ; juger, en revanche, est le lot de la société.

Quelles sont les idées du tueur ?

Elles ne sont pas aberrantes, loin s’en faut. Elles sont seulement poussées à leur logique folle, tout comme les Évangiles avec l’Inquisition et le Capital de Marx avec les camps staliniens. Ses idées sont contenues dans un opuscule de 1518 pages en anglais, qu’il diffuse gratuitement sous le titre de ‘2083 A European Declaration of Independence’.

Anders Behring Breivic accuse l’Occident d’avoir laissé depuis 1945 l’égalitarisme marxiste envahir la culture pour saper les fondements même de la civilisation européenne. Il se dit « chrétien » mais version taliban : fasciné par le Jihad musulman, il se veut un croisé, retournant le jihad contre ses promoteurs. Ce pourquoi il revivifie le mythe du Templier, ordre militaire contre les infidèles. Il a trop joué à World of Warcraft, ado marqué par son époque, où le spectacle en ligne pousse à échapper à la réalité.

Il n’a rien d’un partisan d’extrême-droite (il a quitté le Parti du Progrès qui ne lui apportait rien) mais plus d’un anarchiste nihiliste. Un populiste braqué contre les élites vénales et lâches. Le marxisme, hérésie laïque du christianisme, prône l’égalité absolue des conditions, toute différence étant condamnable en soi. Philosophie de l’histoire tirée de l’observation socio-économique, Gramsci, Lukacs, Marcuse, Adorno et l’école de Francfort l’ont rendu « culturel », générant la « pensée 68 » et gangrenant les campus universitaires au nom de la révolution et de l’anti-répression des désirs. De déconstruction en contestation de toute légitimité, de féminisme en châtrage des valeurs mâles, jusqu’à l’anti-négationnisme où la loi interdit même de discuter des thèses d’histoire politiquement incorrectes. Il en fait un chapitre (p.343), « Le nom du diable est : marxisme culturel, multiculturalisme, mondialisation, féminisme, culte de l’émotion, humanisme suicidaire, égalitarisme »… Dans ce nivellement global « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ».

Sauf que les Musulmans ne sont pas gentils, ils sont croyants et intégristes, domptant les femmes à pondre des enfants. Qui ne prononce pas allégeance à Allah et ne se fait pas circoncire est à abattre comme un chien. L’immigration en Europe atteint l’étiage des 10%, avec une natalité plus forte. Dans une génération ou deux à ce rythme, l’Europe ne sera plus européenne mais la banlieue de l’islam. Avec la bonne volonté de ses dirigeants, qui appellent à une Eurabie en affirmant que l’islam est une part de l’Europe (comme la Turquie), encourageant immigration familiale et mœurs islamiques (voile, harem, épargne charia compatible, commerce halal, cantines spéciales, piscines séparées, enseignement de l’histoire expurgé, apprentissage de l’arabe à l’école, financement des mosquées…). Les musulmans pourraient représenter 50% de la population française en 2050 ! Je ne sais pas d’où viennent ces sources (Wikipedia ?) mais cela explique la « résistance » de l’auteur, « vrai » chrétien, traditionaliste souverainiste, tenant de la civilisation européenne historique.

Breivic fait appel aux sources Internet et à des textes glanés ici ou là dans l’Encyclopaedia Britannica et dans les journaux en ligne pour rassembler ses idées en 1518 pages. Son plan est en 5 parties : 1/ la montée du marxisme culturel et du multiculturalisme en Europe, 2/ pourquoi la colonisation islamique commence en Europe, 3/ l’état des mouvements de résistance européens antimarxistes et anti-jihad, 4/ les solutions pour l’Europe occidentale, et 5/les thèmes de discussion d’application utile à la stratégie politique. Pourquoi 2083 ? Parce qu’à ce moment, croit l’auteur, entre un tiers et la moitié de la population européenne sera musulmane, induisant un violent mouvement de réaction des autochtones avec coups d’état, déportation, interdiction de toute référence multiculturelle et imposition d’une idéologie nationale conservatrice (p.803).

Page 837 vient la formule appliquée littéralement par Breivic vendredi : « la meilleure méthode est d’attaquer de façon violente et par tromperie (attaque choc) avec des forces limitées (1 ou 2 individus). » Le terrorisme conservateur est aussi haïssable que celui d’extrême gauche durant les années de plomb des Brigades rouges, de la bande à Baader et d’Action directe. En cela, les partis de la droite extrême ne sont pas plus coupables de leurs idées que les partis d’extrême gauche. Le terrorisme est mimétique, partant des mêmes causes (un parti mou sans action concrète), avec les mêmes effets (des actes individuels de commando qui sèment la mort sans rien changer à la société).

Comment le contrer ?

En étant clair sur les objectifs de l’Union européenne, ferme sur la culture à transmettre et sur les valeurs qui composent notre vivre-ensemble, opposé à la lâcheté médiatique du métissage où tout vaut tout – pour mieux abêtir et vendre Coca cola.

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D’autres animaux au parc Etosha en Namibie

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Parmi les prédateurs, le chacal a chabraque ou l’hyène brune et tachetée…

Etosha, c’est aussi 110 espèces de reptiles et 16 d’amphibiens. parmi les 340 espèces d’oiseaux recensées.

Volent l’outarde de Rüpell (le plus lourd oiseau en vol),

le calao de Monteiro, des colonies de pintades sauvages,

l’étourneau de Burchell, le rollier à gorge lilas…

L’oryx possède une robe isabelle et ses flancs sont marqués d’une bande noire. Il a deux longues cornes finement ciselées.

Sa particularité est que sa température peut atteindre 45° centigrades et grâce a un « climatiseur » veineux capable de rafraîchir le sang cérébral il ne souffre pas d’insolation !

Les otaries de Cape Cross est la plus grande colonie au monde, un million de résidents sur les côtes namibiennes et les îlots. La colonie de Cape Cross en compte de 80 000 à 100 000. Elles vivent ici en famille. Les mâles sont à la tête d’un harem de 25 femelles, ils ne sont présents que pour la saison des amours tandis que femelles et enfants résident en Namibie.

Vautrées sur les rochers ou le sable, ces dames vivent ici au milieu d’un brouhaha de cris sourds. Pardon mesdames, mais vous avez oublié de vous parfumer avec le n°5 de Chanel ! Votre présence se sent… 300 000 jeunes naissent chaque année dans les 15 colonies de la côte.

Hiata de Tahiti

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