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Municipales biaisées

Le coronavirus et les pratiques restrictives exigées font que l’élection n’a connu ni la liberté de vote (« restez chez vous » et « allez voter » !), ni la circulation normale de l’information sur les points de vue et les programmes. Ce n’est que vendredi, in extremis, que les tracts électoraux ont été mis en boite à Paris : bonjour la concurrence libre et non faussée !

Les trois listes majeures plus celle des mélenchonistes ne présentent que des femmes au poste de maire, après l’éviction par vie russe de Griveau : bonjour la parité !

La loi inique de 1982 qui concerne seulement Paris, Lyon et Marseille, dite « loi Deferre », est une élection à trois tours qui élit « le » maire, à Paris la mairesse, avec très peu de monde. Elle permet de gagner tout en perdant – gagner en votes tout en perdant en voix. Les 163 conseillers de Paris s’ajoutent aux 340 conseillers d’arrondissements sur 17 secteurs et pour le Grand Paris. Ce sont eux qui décideront du nom de la mairesse, 503 personnes pour 1 300 000 électeurs : bonjour la représentativité !

Les résultats d’une élection ne sont pas légitimes juste parce qu’ils ont été proclamés. Ils réclament au préalable l’affrontement contradictoire des points de vue et l’absence de risque sanitaire ou civil. 28 % des électeurs disaient ne pas vouloir se déplacer pour voter en raison des risques, selon un sondage IFOP ; de fait l’abstention est en hausse, la belle journée de printemps qui incite à sortir compensant à peine la hantise d’être contaminé par les multiples contacts. Le président demande de protéger les plus fragiles et « en même temps » de leur faire prendre le risque de se réunir dans les bureaux de vote : quelle contradiction !

Il faut y voir la pression des partis d’opposition, droite et extrême-gauche, qui veulent « se compter » et pouvoir dire leur légitimité « contre » le gouvernement. Ces politicards à courte vue ruinent un peu plus la politique – comme d’habitude. Emmanuel Macron aurait pu, cette fois-ci, prendre les accents gaulliens et se situer vraiment au-dessus des partis en jouant au Père de la nation et en faisant reporter l’élection. Il aurait renvoyé les « petits partis qui cuisent leur petite soupe à petit feu dans leur petits coins », selon l’expression fameuse du général. Après tout, que sont trois ou quatre mois dans une mandature ? Mais cette fois il a joué au démago, il a « écouté », ressemblant plus au Hollande synthétique (aussi terne et sans saveur) qu’au Charles (le grand). Quelle dérision !

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Humeur municipale

Bientôt les élections, les municipales dont on dit que, parmi toutes les élections de la démocratie représentative, les Français sont les plus friands avec les présidentielles. Il se trouve qu’elles ne font guère recette à ce jour : la politique ennuie autant qu’elle montre, de façon répétitive, qu’elle n’est qu’une façon de sanctionner passivement des décisions prises ailleurs par un quarteron de technocrates hors-sol.

Les jeunes (18-24 ans) s’en désintéressent massivement selon les récents sondages. Même les écolos ne suscitent pas l’engouement que leur Grande cause voudrait. C’est que cette cause est plutôt floue, entre conservatisme réactionnaire envers tout ce qui est (les fleurs, les p’tits oiseaux, la campagne, les terres agricoles, les animaux de nos campagnes – et les traditions ancrées) et gauchisme tiers-mondiste anticolonialiste et anti blanc masculin de la pire espèce. « L’écologie » n’existe pas en tant qu’idée politique : il existe autant d’écologistes que de politiciens. Ce pourquoi « les listes » estampillées écologie ne veulent rien dire.

Les partis, d’ailleurs, sont massivement rejetés. Machines à egos, engrenages à faire gagner les bureaucrates plus que les originaux, la candidature Villani contre celle de Griveaux à Paris l’a montré. Tous deux LREM, mais l’un plus en cour que l’autre, plus « proche du chef » (sans qu’on voie à quoi ça sert), plus triste bureaucrate d’appareil que mathématicien apte à penser autrement. D’où nous savons que le parti du président va perdre à Paris. Agnès Buzyn est bien gentille mais apparaît parachutée, reprenant à son compte un « programme » qu’elle n’a pas pensé et dont elle a peine à convaincre.

Restent les deux femmes ennemies : Hidalgo et Dati – rien qui puisse vraiment passionner les citoyens de la capitale, hier « la plus belle ville du monde », aujourd’hui la plus sale et la plus bordélique entre gilets manifestants, blacks blocs violents, grèves à répétitions, logements Airbnb traqués par les municipaux, transports à éclipse, travaux à n’en plus finir et anarchie des vélos, trottinettes et autres contresens sur les voies. Est-il écologique d’avoir balancé l’ancien contrat Vélib pour devoir « faire des travaux » de terrassement pour installer de nouvelles prises, cela dans une indécision qui a duré des mois sur le nouveau repreneur, conduisant les abonnés à résilier et à ne plus revenir ? Lorsque l’on observe la somme de terrassements, destructions de trottoirs, défonçages de rues pour changer d’un mois sur l’autre la signalisation, les pistes sur la voirie ou le sens d’une rue, on se dit que « l’écologie » est un prétexte électoral sans aucune portée pratique à Paris !

D’autant plus que l’élection du maire de Paris est aussi faux cul que celle du président des Etats-Unis : un électeur ne vaut pas une voix mais élit un délégué qui va s’apparenter afin de voter en bloc, etc. Où est la fameuse « démocratie » dans cet empilement de copinages et de petits arrangements en coulisses ?

Dans le reste de la France, les « grandes villes » comptent peu : ce sont plutôt les quelques 35 000 communes qui font nombre. Sur l’ensemble, un peu plus d’une centaine ne voit émerger aucun candidat, aucune liste ; il n’y aura pas d’élection mais une tutelle préfectorale avant un rattachement possible à une commune voisine. Être maire est trop prenant : bien qu’au trois-quarts bénévole, la fonction de maire d’une petite commune est assimilée à un fonctionnariat électif par les citoyens égoïstes qui ne pensent qu’à consommer leurs « droits » et à revendiquer selon leurs désirs en dépit parfois de tout bon sens (faire taire les coqs de ferme ou les cloches du village !). Le résultat sera peut-être savamment analysé par les distillateurs de tendances politiques mais ne dira pas grand-chose sur la prochaine vraie élection : la présidentielle dans deux ans.

Les Républicains pourront se gargariser ici ou là, les écolos pavoiser, les marcheurs consolider leurs position et à droite et à gauche ou le Rassemblement national faire donner le clairon, cela n’aura guère de sens. Les citoyens s’abstiennent, les votants plébiscitent le sortant s’il a donné quelque satisfaction, le vote sanction envers la politique présidentielle est quasi inexistant dans ce genre d’élection. Ce pourquoi je ne vois pas pourquoi Emmanuel Macron pousse les feux sur la réforme des retraites avant les municipales, elle aurait pu très bien passer après avec débat interminable qui aurait montré à l’envi combien l’obstruction des antidémocratiques d’extrême gauche est toxique pour le pays. Sauf que les électeurs au cuir décidément de plus en plus tendre sont un peu plus hérissés qu’avant le fameux 49-3.

Car, vous l’avez noté, la société change. Mais pas en bien. Advient le règne de la Victime, réaction de foule sentimentale vite choquée, blessée, hypersensible à son ego, indignée de profession. Tout offusque et, au lieu de rationaliser et de proposer, vite on crie au viol et au scandale, on ne veut surtout rien changer. La démoque rassie est comme le pain : elle s’émiette avec le temps. Seules comptent les tribus, qu’on s’empresse de créer ex-nihilo chez les intellos tant les anciennes font populo. « Moi aussi » est le cri de « celles et ceux » (n’oublions pas le sacro-saint féminin de tout !) qui ont subi et qui croient leur peine équivalente au talent qu’il (et elles) n’auront jamais, même en rêve. Je n’existe que par le viol, l’inceste, le tabassage marital, l’acharnement médiatique, l’injustice judiciaire, l’écrasement social – la liste n’est pas exhaustive. Gabrielle Russier a-t-elle mis fin à ses jours en 1969 pour avoir trop aimé un ado – mineur et consentant – de 16 ans ? Et voilà Gabriel Russie (Matzneff de nom de plume) cloué au pilori par une hystérique vengeresse qui l’a désirée à 13 ans et est restée avec lui quatre années durant sans se sentir alors traumatisée, ni que ses parents se manifestent. Aujourd’hui, avant même que la justice se prononce, voilà que le tribunal médiatique a jugé : il est coupable forcément coupable. Jusqu’à mandater une perquisition en Italie et dans les archives de l’IMEC près de Caen (avec déplacement de justice en bande et frais y afférents) pour des faits sans crime qui remontent à plus de trente ans. Comme si le budget de la justice n’avait pas mieux à être dépensé que pour ces histoires de cul de la génération d’avant, époque où la morale n’était pas celle d’aujourd’hui. Où est passé Padamalgam ? Ne serait-il sensible qu’aux terroristes arabes ?

Vous le constatez, les « grands sujets » d’aujourd’hui ne sont ni les programmes, ni les partis qui les portent, ni les élections municipales, ni même (et surtout !) la démocratie, mais les histoires de coucherie et la psychose du virus à bière. D’ailleurs, les semaines passant et l’épidémie devant « naturellement » se répandre (comme aurait dit Chirac), ces élections ne vont-elles pas connaître, au moins dans les grandes villes, un taux d’abstention record ? Aller dans ces lieux infestés d’électeurs venus d’on ne sait quel bouge, tripoter des papiers déjà passés entre toutes les mains potentiellement contaminées des appariteurs pour se voir postillonner de « signez là » puis de « mettez votre bulletin dans l’urne », est-ce vraiment sain ?

Nous n’avons pas fini d’entendre de savantes analyses sur ces élections aussi improbables de 2020 !

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L’empire du je

Il y a dix ans, la crise financière mettait en lumière l’empire du jeu, la spéculation sur les prêts hypothécaires risqués, la virtuosité à dissimuler ces risques dans un emballage titrisé. Elle a abouti à la crise économique, puis sociale, puis politique que l’on connait – avec ses prolongements géopolitiques qui conduisent à la guerre… pour le moment commerciale. Nous vivons exactement le même schéma qu’en 1929, jusqu’à la guerre, mondiale en 1941. En sera-t-il de même en 2022, douze ans après 2008 ?

L’histoire ne se répète jamais mais elle réitère les schémas humains. Ce qui change sont les hommes, hier collectifs, aujourd’hui individualistes. L’empire du je a touché tout d’abord les traders et les affairistes qui se prenaient pour les tout-puissants : tel J6M – Jean-Marie Moi-Même Maître du Monde – alias Jean-Marie Messier, Polytechnicien énarque et inspecteur des Finances devenu PDG de Vivendi de 1996 à 2002, conduisant le groupe au bord de la faillite ; ou Fabulous Fab, surnom que s’est donné lui-même Fabrice Tourre, Ecole centrale, Stanford, intoxiqué de maths et engagé aux crédits hypothécaires de Goldman Sachs pour vendre des produits dérivés à ses clients – « de la merde » écrit-il à sa copine – aujourd’hui professeur assistant au département Finance de la Copenhagen Business School après un doctorat d’économie à Chicago. Le je ne touchait encore il y a dix ans qu’une très étroite élite mondialisée, narcissique, vantarde et avide de gagner toujours plus.

Le je touche désormais les classes très moyennes qui habitent le périurbain pour cause de loyers trop chers en centre-ville et qui se sentent exclus de la prospérité induite par la globalisation, malgré leurs diplômes. Comme la situation économique, industrielle et de l’emploi s’améliore un peu en Europe et en France, c’est la grande clameur sur la mare aux grenouilles : Et moi ? et moi ? et moi ? « Avec ma vie, mon petit chez moi, mon mal de tête, mon point au foie », chantait Dutronc. C’était en 1966, cela ne fait que cinquante ans, mais Ducon a remplacé Dutronc en nature humaine de base : égoïsme, envie, pétoche.

Certes, il y a des raisons à l’anxiété du siècle – le monde change comme il a toujours fait et ceux qui rêvaient d’être maîtres du monde à leur petit niveau perdent vite pied. Les pays pauvres prennent leur essor et des emplois ; l’Etat-providence ne peut pas tout, il prélève trop d’impôts mais n’offre pas assez de services publics ; il demande aux gens de se prendre en main mais les infantilise jusque fort tard dans la vie – bien plus que dans les pays voisins, aux Etats-Unis ou au Japon – via la fameuse éducation à la française et les injonctions et interdits de toutes sortes : mangez cinq fruits et légumes par jour ! bougez ! buvez-éliminez ! mettez votre ceinture ! faites-vous vacciner ! 80 km/h sur toutes les routes partout en France ! Mais rien ne va jamais assez bien.

« Neuf cent millions de crève-la-faim. Et moi, et moi, et moi, avec mon régime végétarien »… Ailleurs, c’est mieux ? Dans la Chine de Xi avec ses camps de travail et sa peine de mort de masse ? Dans la Russie de Poutine où toute manifestation politique est interdite sous peine de décennies de prison ? Dans la Turquie d’Erdogan où qui n’est pas avec le président est forcément une ordure à virer de la fonction publique et à coller en prison s’il l’ouvre ? Aux Etats-Unis où le président du parti de l’éléphant trompe son monde avec ses « moi je » tonitruants, aboutissant à la paralysie administrative et à la guerre commerciale avec toute la planète ? Au Royaume-Uni, perdu dans la surenchère isolationniste et qui risque de manquer de médicaments et de beaucoup d’autres choses le jour du Brexit sans accord qui approche rapidement ? En Belgique sans gouvernement où les banlieues Molenbeeck font la loi ? En Allemagne où monte inexorablement le successeur du parti nazi ? En Italie mafieuse et « gouvernée » par l’extrême-droite et l’extrême-gauche alliées ? La France est le pays qui prélève le plus d’impôts et de taxes et qui a la dépense publique la plus forte de tous les pays de l’OCDE – mais ce n’est jamais assez. Et moi ? et moi ? et moi ?

Les gijau sont les grenouilles dans la mare, chacun sur sa feuille, sans se préoccuper du voisin. Je coasse et me veux reine, moi rana – la grenouille. La solidarité dont se vantent les crapauds-buffles qui gueulent plus fort n’est que très locale, sur le rond-point du coin. Y en a marre de la mare ! Rien ne ressort pour le peuple tout entier de la part de ceux qui se proclament « le peuple » – à 85 000 sur 65 millions. L’intérêt général n’est-il que la somme des intérêts très particuliers ? Karl Marx, en bon Allemand, parlait de société en sac à patates. Nos grenouilles ont tout des patates, même l’uniforme jaunasse.

Il est vrai que, si les réclamations au départ avaient le mérite de la cohérence et de poser la vraie question de la fiscalité en France, la suite est non seulement plus floue mais nettement moins facile à saisir et satisfaire. Chacun coasse dans son coin et prend son rond-point pour le nombril de France. Le « mouvement » s’agite, mais comme un canard sans tête. Et moi ! et moi ! et moi ! Tout le monde est jaloux des « porte-paroles », ils voudraient en être eux aussi. Tout le monde voudrait porter sa petite revendication et en faire un référendum national. Tout le monde voudrait gouverner ou, au moins surveiller tout le monde. Car la méfiance règne ; on est jaloux du voisin, on critique la voisine, on brocarde celui qui se croit. Pêle-mêle, il faut tout remettre en cause et revoter (dans le sens voulu par la minorité qui coasse, pas par la majorité qui vote) : le RIC, le mariage gai, l’ISF, la PMA, le PMU, les MBA, les hauts salaires, la vitesse en voiture, les douze vaccins… L’extrême-droite en profite pour faire passer ses thèses en manipulant les réseaux « sociaux » ; l’extrême-gauche tente de récupérer le « mouvement » en approuvant la violence, légitimée comme sociale par les intellos qui se raccrochent aux branches pour n’avoir rien vu venir depuis leurs bureaux.

Mais comment transformer une cacophonie en projets politiques ? Une émotion en raisons ? Les coassements de la mare en mesures orchestrées ? Qui va donner le ton ? Les pommes de terre sont dans la purée et leur agitation dérive volontiers vers la violence physique, la casse publique et les agressions gratuites d’élus – voire des menaces sur leurs enfants. Aucun leader, aucun programme, aucune alternative. Peut-on gouverner sans personne pour le faire ? Sans sujets à proposer ? Sans procédures pour décider et appliquer ? L’expérience Trump montre combien gouverner via les réseaux sociaux est infantile, spontanéiste, égocentrée – sans aucun souci des conséquences.

Le gouvernement imagine un « grand » débat national sur tous les sujets (tous, sauf… ceux qui concernent les principes fondamentaux et les droits de l’Homme). Cela va-t-il accoucher d’une souris ou refonder la participation à la vie publique ? Les Nuit debout se sont couchés et les expériences locales laissent dubitatif : seuls ceux qui sont investis en politique participent, les autres laissent dire et faire ; seuls ceux qui votent habituellement voteront, les autres s’abstiendront. L’expérience, si elle est tentée, sera en tout cas intéressante, à condition de ne pas se noyer dès le départ dans les polémiques vaines d’envie jalouse sur le salaire de tel ou tel.

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Bénédicte Vergez-Chaignon, Pétain

benedicte vergez chaignon petainAu vu des « polémiques à la française » autour de Philippe Pétain, frappé en 1945 d’indignité nationale pour collaboration avancée avec l’ennemi occupant, malgré ses états de fait de 14-18, je réédite cette note de 2014 sur une biographie fouillée du personnage.

Mille trente-neuf pages denses et étayées, un véritable pavé d’un kilo et deux-cent vingt grammes de papier fin glacé avec un carnet de photos – voilà une œuvre d’historien d’un docteur femme de Science Po Paris, tout en références, témoignages et jugements balancés. Évidemment, nostalgiques s’abstenir ! Car la complexité humaine et le labyrinthe historique ne sauraient faire bon ménage avec le mythe et la caricature politique. Pétain était un grand homme et un salaud, un soldat attentif aux hommes et un homme d’État naïf et vaniteux. C’est que ce n’est pas simple, un être humain ! Surtout emporté dans la tourmente de l’Histoire, à une période où la France déprimée après l’hémorragie de 14-18 et aspirant aux cong’paye du socialisme hédoniste, ne veut rien voir de la montée nazie ni des desseins (pourtant écrits et publiés) d’un certain Adolf Hitler, ex-caporal de la guerre la plus con.

Marc Bloch, historien français et juif, officier de 14 rempilé en 40, l’a écrit bellement dans L’étrange défaite : c’est tout le pays qui a abandonné. A quoi bon se battre ? Déjà saigné par plus d’un million de jeunes hommes morts pour rien entre 14 et 18, le pays n’en peut plus. Réfugié derrière la dernière guerre, symbolisée par un vieux maréchal vainqueur de Verdun et portant beau ses feuilles de chêne, le pays n’en veut plus. La population quémandait en l’an 40, à une armée allemande étonnée de sa victoire facile et si rapide, « encore un quart d’heure, Caporal bourreau ». Le Chef allait protéger la terre et les hommes du charnier, le soldat prestigieux allait négocier comme un paysan les prédations du vainqueur, les Français allaient pouvoir attendre la fin du conflit pour se rallier au vainqueur comme la vache va au taureau après la lutte cornes contre cornes.

Bien rares en 1940 étaient les De Gaulle, Jean Moulin ou Daniel Cordier… vraiment bien rares. Les Radicaux avaient signés des deux mains la dévolution des pouvoirs constitutionnels à Pétain ; les Socialistes avaient suivi en masse (hors quelques-uns, embarqués par quiproquo sur le Massilia). Même les Communistes étaient pro-hitlériens (je n’ai pas dit pro-nazis), l’Allemagne nazie ayant signé un pacte avec la Russie stalinienne pour dépecer tranquillement la Pologne et se partager les dépouilles des vieilles démocraties.

Philippe Pétain est né sous le régime autoritaire de Napoléon III en 1856 ; il avait 14 ans lors de la défaite ignominieuse en 1871 de la baderne Bazaine et de Napo le nabot. Son sang d’adolescent a bouilli comme il se doit. Fils de paysan de la Somme, élevé par ses grands-parents faute de mère morte en couches, il a connu très tôt le collège militaire, tout entier voué au service des armes et à la « réforme intellectuelle et morale » (p.435) du pays. Mais enfance et adolescence n’occupent que 16 pages sur l’ensemble : il n’existe que très peu de documents et aucun récit personnel. Ces 22 années ne comptent que pour 1.5% de la biographie. A l’issue, il est déjà officier.

Intelligent, il se cultive en stratégie militaire et aime faire l’instructeur. 1914 commence page 68 sur 1039, il a déjà 58 ans ! Mais, en 4 années de guerre, il passe du grade de colonel au grade de général de division, puis à la distinction de maréchal de France. C’est dire combien la IIIe République était peu préparée au combat en 14, combien les badernes sévissaient dans les casernes, combien l’armement et l’uniforme étaient inadaptés (un pantalon rouge garance !) et archaïques (on attend encore les chars en 17 !). Pétain, déjà mûr mais actif et prudent, a profité du néant général ou presque ; il a été choisi contre le massacreur Nivelle à Verdun. Il avait la vertu d’être autoritaire (il a fait fusiller 7 meneurs de sa propre initiative en 1917) mais très procédurier militaire quant aux doléances : réprimer-analyser-modifier.

Comme l’observait De Gaulle (qui avait été son officier et son porteplume un moment), si Pétain était mort en 1925 (à 69 ans), sa gloire serait restée intacte et il aurait une avenue dans Paris comme Foch, Joffre ou Clémenceau, autres généraux maréchalisés de la Grande guerre. Las ! Ce vieillard encore vert, perclus de maitresses et marié tard à l’une d’elles (une divorcée, quel scandale dans la « bonne » société !), s’est piqué de politique. On l’envoie rétablir l’ordre au Maroc, il est nommé ministre ; il entre à l’Académie française. Est-ce pour cela qu’on l’écoute ou qu’il se fait entendre sur le réarmement nécessaire ? Il n’a pas du beaucoup insister, méprisant les maquignons des partis dans ces gouvernements à têtes pivotantes sous la IIIe République – car presque rien n’a été fait pour préparer l’armée à la guerre inévitable dès le début des années 30 !

Vieille France, matois, refusant les actes révolutionnaires comme la tentation de février 34, hostile aux idées maurassiennes sans pour autant les condamner, catholique pratiquant et soucieux de sa dignité chèrement gagnée, Pétain restera toujours ambigu, sibyllin, disant tout et son contraire. L’âge venant, il aura progressivement des trous de mémoire, une certaine aboulie, une incapacité à entendre (de l’oreille et de la comprenette) et une incapacité à travailler longtemps.

Les années 1939-1945 sont le cœur du livre, puisqu’elles sont le cœur de ce que notre époque post-Auschwitz retient de Pétain : pas moins de 570 pages, soit la moitié du volume. Le maréchal avait 84 ans en 40 et presque 90 en 45.

• Il s’est laissé circonvenir, n’ayant jamais compris le cynisme nazi tout en moyens justifiant les fins. Goering lui-même l’a dit : « Pétain, c’est Hindenburg, et ce n’est pas une bonne chose que les grands soldats victorieux, hélas ! vieillis, gouvernent leur pays vaincu » p.680.
• Il s’est laissé berner par son entourage de conservateurs catholiques et de pro-nazis, de technocrates et de maquignons parlementaires.
• Il a voulu répéter la « réforme intellectuelle et morale » des années 1880 par la Révolution nationale (le terme n’est pas de lui, qui se méfiait du mot révolution).
• Il s’est dévoyé en acceptant la collaboration du « moindre mal » sans comprendre : déporter les Juifs (mais « étrangers »), fusiller les Résistants (mais « terroristes »), laisser saborder la flotte (pour « respecter » les conventions d’armistice), rester en métropole (sinon la France aurait un Gauleiter qui imposerait des conditions plus dures), élaborer une trentaine de projets de nouvelle Constitution (mais rester par « sentiment du devoir » chef de l’État à vie)…

Philippe Pétain sera justement condamné à mort et à l’indignité nationale en 1945, mais dans un procès bâclé et mal conduit, dont le jury est composé presque uniquement d’adversaires politiques. Il est immédiatement gracié par le président de la République provisoire, le général De Gaulle, et interné au fort du Portalet près de Pau avant celui de la Pierre-Levée sur l’île d’Yeu. Il y mourra en 1951, définitivement sénile, à cinq ans de son centenaire.

La vieillesse est un naufrage. En voulant bien faire, mais par ataraxie du grand âge et vanité de vieux méritant, le maréchal s’est fourvoyé et compromis. Il a empêché la France qui le voulait de résister, il n’a pas permis aux moyens de l’empire de continuer la guerre, il a laissé la police française livrer des Juifs aux nazis. Le redressement intellectuel et moral se fera durant la guerre sans lui et contre lui, trop confit dans le passé et l’autoritarisme suranné.

Mais il est facile de réécrire l’histoire comme on aimerait qu’elle fût. La reconstruction de la France s’est bâtie en opposition à la démission de l’armistice de 40 et absolument contre les idées nazies et collaborationnistes. Caricaturer les vagues idées de Pétain était symboliquement nécessaire même si, pas plus que Marx n’était marxiste, Pétain n’était vraiment pétainiste. L’histoire s’observe à son moment, pas repeinte de moraline : en octobre 1944, « la jeune IFOP demande [aux Français libérés] s’il ‘faut infliger une peine au maréchal Pétain’. Seuls 32% répondent par l’affirmative, quand 58% sont contre » p.882.

L’ambiance pétainiste n’a cessé de couler sous la surface, elle ressurgit ça et là aujourd’hui :

• dans l’écologie (tellement conservatrice de « la terre ne ment pas ») ;
• à l’extrême-gauche dans les idées d’un Badiou qui considère la démocratie comme inutile, au profit d’un parti unique, directeur politique de la société ;
• chez le père-la-morale Bayrou, (tellement catho coincé face à Cohn-Bendit le soixantuitard) ;
• dans le parti de « rassemblement » bleu Marine qui veut sortir les sortants, éjecter les parlementaires et les élus corrompus, garder la terre de France aux Français et effectuer une « réforme intellectuelle et morale » du pays…

Cette biographie d’un symbole replacera l’homme dans les idées et les circonstances et permettra de mieux comprendre comment peut s’opérer le glissement progressif du conservatisme à l’autoritarisme – et de l’autoritarisme au nazisme. Une lecture qui serait bien utile à tout le monde !

Bénédicte Vergez-Chaignon, Pétain, septembre 2014, Perrin, 1039 pages, €29.00

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Courage Fil(l)on(s)

Le tropisme trop français à se mettre de l’argent public dans les poches en toute discrétion pour faire comme les autres (à droite depuis Giscard comme à gauche depuis Mitterrand) est rattrapé par la morale basique qui vient de l’Internet anglo-saxon. Ce que le catholicisme absout, les aménagements à la loi s’il y a repentir à la fin, le protestantisme le récuse : chacun se doit d’être vertueux et transparent – ou disparaître de la vue.

Les cinq « affaires » qui sont attachées à la queue du chien Fillon par des éléments mal intentionnés envers lui, envers son parti et envers le processus électoral ne sont peut-être pas condamnables par la justice. Mais la com’ remplace le droit, le jugement moral la raison des faits, l’affichage de la vertu la vertu elle-même.

D’où vient le coup nécessite d’analyser à qui profite le crime. Plusieurs hypothèses :

La gauche au gouvernement, bien-sûr, qui est annoncée perdante et veut faire chuter l’opposant. C’est assez crédible, ledit gouvernement ayant tous les moyens de savoir (Parlement, Bercy) et tout le temps de peaufiner la stratégie qui consiste à choisir précisément cette date pour embarrasser une droite triomphante. N’est-ce pas ce que le sarkozysme avait préparé à Strauss-Kahn (l’affaire de Lille) avant que la pulsion imprévue à New York ne fasse éclater de lui-même à gauche le « candidat idéal » adoubé par Libération ?

L’extrême-droite ensuite, qui joue sur le velours du « tous pourris » seriné depuis des années – ce qui fait tactiquement passer au second plan les « affaires » qui touchent la famille Le Pen en ce moment

Les sarkozystes haineux évincés de leur candidat comme des investitures aux législatives : Henri Guaino, Rachida Dati – et pourquoi pas Jean-François Copé, humilié jadis à la tête du parti, humilié récemment à la primaire de droite ? Mais ce serait éliminer leur parti du second tour, jeu dangereux, sauf des partisans LR d’une alliance avec le Front national.

Les macronistes qui voudraient casser la dynamique Fillon et récupérer les voix du centre (d’où l’appel tout récent à Bayrou) ? Ce pourrait être le dernier pied de nez de François Hollande à cette politique qui l’a fort malmené, et une façon d’adouber son dauphin sans le dire, ambiguïté qu’il affectionne. Mais Emmanuel Macron n’a pour l’instant aucun vrai programme…

L’extrême-gauche qui veut casser le système et en appelle rituellement au grand chambardement et à la VIe République ? Mais il vaudrait mieux impliquer Hamon puis Macron que Fillon.

Les hackers « russes » ou les pirates anarchistes du net ? Mais pour quoi faire ? Le chaos en Occident comme l’élection de Trump ? Pour qui favoriser ? L’émergence d’un parti des extrêmes, nouveau Mussolini ou éructant Chavez ? Le retour de l’URSS sur la scène internationale ?

Comment parer le carambolage du processus électoral ?

Le handicap des gens de droite est qu’ils aiment les bottes et qu’ils ont tendance à se tenir droit dedans. D’où leur rigidité à réagir aux sales coups politiques. François Fillon est doué d’une grande force de caractère et ne lâche jamais, dit-on. Ce pourquoi « on » implique sa famille, façon de le déstabiliser là où il est le plus vulnérable.

Mais sa première défense est archaïque, primaire et sans effet sur le sentiment. La page Fillon pourrait être tournée par l’opinion avant de l’être par la justice. Jouer l’outré n’avance à rien : est-ce vrai ou pas ? Si c’est vrai, pourquoi ne pas assumer ? Les pratiques étaient ainsi jadis (« on » remonte jusqu’en 1988 !), se défendre est dire oui et prouver qu’un travail a été effectivement accompli, puis déclarer lancer un débat public pour réformer le système. Rien de plus, rien de moins.

Surjouer le déni offensé pour accuser la misogynie et évoquer un Complot n’est pas décent. Tenter de gagner du temps va au revers de l’opinion qui exige le tout, tout de suite, d’Internet et des réseaux. La génération Fillon n’est pas à l’aise avec le nouveau monde du net. Emmanuel Macron se défend mieux de ce genre d’accusations.

François Fillon a pour lui son charisme. Mais il est fondé non seulement sur le caractère, mais sur ce qu’il montre : cohérence, équilibre des idées, clarté du message. Montrer qu’il fait autrement qu’il ne dit, qu’il manie le mensonge ou l’omission tout en s’affichant empli de rigueur morale, est saper son charisme. Et faire douter ses partisans.

Qui d’autre en cas d’empêchement ?

Les Français plébiscitent Alain Juppé ; il serait le moindre mal – assez légitime pour y aller, rassembleur au-delà des Républicains. Pour le moment, il ne veut pas, ayant assez d’être « joué » contre les uns et les autres sans qu’il soit reconnu pour lui-même.

Certains, surtout dans le parti, en restent bloqués à Nicolas Sarkozy. Ce serait la pire chose pour la droite que de revenir sur le passé en flouant les électeurs qui sont venus massivement exprimer son rejet à la primaire.

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Plus le temps passe et moins la situation est claire, plus les médias se focalisent sur l’écume des affaires au lieu de parler du fond : le chômage, la croissance, l’Europe, l’hostilité trumpienne, la menace poutinienne, la concurrence chinoise.

Assumer ou changer, c’est maintenant ! « Courage, Fillon ! » – ou « courage, filons… » ?

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Mélenchon, méchant bon

J’ai eu l’heur de publier sur ce blog en 2011 une note sur Jean-Luc Mélenchon, politicien entre Péguy et Doriot. Un lecteur l’a retrouvée et la commente cinq ans et demi plus tard comme digne d’actualité. Je l’en remercie et, comme les commentaires sont fermés sur les notes après un à deux mois – pour ne pas susciter des « polémiques à la françaises » aussi vaines que stupides, une fois l’actualité passée – il a publié son avis dans la rubrique « à propos ». Comme ce n’est ni le lieu pour le lire, ni pour débattre d’un sujet en particulier, je me permets de replacer dans le fil des notes ce commentaire de grand intérêt, que j’accompagne de quelques réflexions. Le débat est ainsi ouvert, quelques mois avant les prochaines présidentielles en France, et quelques semaines avec les primaires des sept nains du PS.

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« Bonjour, votre article de 2011 sur Mélenchon, Péguy et Doriot m’a paru intéressant, y compris en 2016-2017.

Le temps rectifie cependant quelques unes de vos idées, comme l’opposition de Mélenchon à l' »aigle » russe…

Le rapprochement avec Doriot me paraît, quoiqu’il en soit, pertinent, sinon comme stricte analogie du moins comme hypothèse-guide.

Au passage, d’autres idées de votre article me paraissent approximatives. Ainsi, le bien-être des ouvriers de l’automobile est une légende (qu’il s’agisse de Toyota, de Ford, de Renault, de Fiat, en 1970 ou 2016, que l’organisation soit fordiste ou par groupes de qualité).

Mais pour rester au centre de votre article : avec Mussolini ancien leader socialiste, Doriot évoluant du PCF à la collaboration pro-nazie, l’opportunisme narcissique (et l’insécurité mal compensée qui peut-être va avec) engendre bien des vicissitudes et les parcours sont souvent TORTUEUX et chez les apprentis caudillos. « Le futur Duce de l’Italie fasciste est élevé par un père forgeron et militant anarchiste et une mère institutrice et très religieuse (catholique). »

Je crois que les méthodes et de style de Mélenchon, les fantasmes qui s’échappent parfois de sa bouche par manque de maîtrise et par sincérité semi-volontaire…, tout cela permet de voir qu’il n’est pas tel qu’il apparaît à ses suiveurs et à ses électeurs.

Les indices d’une idéologie vermoulue et réactionnaire sont pourtant assez patentes. Il doit lui-même faire des rectifications fréquentes, sur un mode agressif et embarrassé, ou encore rectifier son programme pour tenter de les intégrer et sauver la face. Voir ici ses vœux. La stance à l' »universalisme » (blah blah…) inciterait à nuancer le rapprochement avec Péguy… et à mieux cerner le caractère opportuniste du bonhomme.

Politiquement incohérent, il n’en serait pas moins nocif, selon moi, s’il en avait les moyens… Mais son style et la confusion qu’il trimbale ne sont pas des caractères isolés dans les mouvances militantes et semi-intellectuelles de notre époque.

Merci pour votre article et pour certaines pages de votre blog.

Pierre Grimal »

Ce qui est intéressant est que l’étude sur le bonhomme Mélenchon a peu vieilli : le politicien est toujours « méchant » par haine personnelle contre la société, qu’il sublime en la projetant sur « le peuple ».

Il veut évidemment en faire « le bien » malgré lui, au peuple. Ce pourquoi il est un méchant bon.

Mais il ne peut aller dans le sens du peuple qu’en résolvant ses propres contradictions venues de l’extrême-gauche trotskiste-lambertiste : internationalisme ? le peuple veut du nationalisme ; anticapitalisme ? le peuple veut surtout du boulot ; écologisme ? le peuple ne veut pas régresser au moyen-âge ; démocratie directe ? le peuple veut bien participer, mais pas gouverner, ça l’ennuie – son individualisme exige épouse et pavillon, DVD possédés et quant à soi préservé. Pas sûr que la Grande transparence robespierriste de Mélenchon soit en phase avec ce que veut le peuple…

J’écrivais aussi sur ce blog en 2012, à propos de Mélenchon, le malentendu qu’il provoque (et continue de provoquer) :

  • Quand on est né en 1951 on n’est plus vraiment jeune,
  • Quand on a occupé depuis trente ans les fromages de la République, nanti d’un patrimoine frisant l’ISF et d’un revenu égal à cinq SMIC.
  • Quand on a voté oui à Maastricht et qu’on reste député européen.
  • Quand on se dit trotskiste lambertiste (dont une fraction a soutenu Marcel Déat en 1941, socialiste autoritaire devenu collabo parce qu’antilibéral et anti-anglais, ministre du Travail de Pétain).
  • Quand on est pétri de toutes ces contradictions, comment convaincre dans la durée ?

Le rassemblement des mélenchonistes apparaît bien hétéroclite.

Mais veut-il vraiment gouverner ? Je me posais la question en 2014 sur ce blog. La posture du Commandeur, Victor Hugo tonnant du haut de son exil, est bien plus valorisante pour ce théâtral politicien, que la discipline de chaque jour des affaires à régler par compromis… Le fusionnel d’une Assemblée unique et d’un gouvernement direct, me paraît une compensation personnelle pour un gamin frustré de père à 11 ans qui semble ne jamais s’en être remis (ce qui me navre) – mais pas un remède au mal français qu’est l’immobilisme d’âme paysanne et la répugnance à changer (si bien servis par Chirac puis Hollande).

Yaka et encore yaka, résumais-je en 2016 dans un billet de blog, sur les outrances de l’extrême-gauche, Mélenchon inclus. Je n’ai pas changé d’avis depuis. Mélenchon aime gueuler, pas gouverner. Car gouverner, c’est prévoir, et ne pas suivre le vent du peuple selon qu’il girouette de l’est à l’ouest ou du nord au sud. Mélenchon se positionne comme national-populiste, qu’il le veuille ou non. Il ne veut pas de Poutine comme Grand frère, même s’il admire probablement sa façon, de faire. Donald Trump aussi… Mélenchon est adepte non de la démocratie mais de la démocrature – la dictature, mais du Salut public, de la Patrie en danger – tout ce que Castro a réalisé durant ses quasi 60 ans de règne autocratique sans partage.

Un grand méchant, Mélenchon, même s’il se veut un méchant bon.

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La jeunesse s’en fout

Deux enseignements sont à tirer d’un sondage IFOP pour Atlantico du 1er septembre 2016 : 1/ le sens des mots qui se perd dans le slogan politicien, 2/ l’évasion de la jeunesse de toute politique.

La question est posée de savoir si « les valeurs républicaines » et si « l’identité nationale » sont des concepts qui touchent personnellement. Gauche et droite sont ainsi mesurées à leurs slogans intimes.

Rappelons qu’un sondage, même selon des méthodes scientifiques, n’est qu’une image à un moment donné de l’opinion et que la taille de l’échantillon peut biaiser l’interprétation sur des sujets aussi vagues que les valeurs. Mais la tendance mesurée par un sondage qui pose les mêmes questions à un an d’intervalle environ est plus fiable – ce qui est le cas du sondage cité.

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Saturation des mots : valeur républicaine comme identité nationale ne veulent plus rien dire, employés à tort et à travers et pour n’importe quoi par des politiciens qui préfèrent la posture morale du discours médiatique aux décisions pratiques efficaces. L’enflure à gauche, les rodomontades à droite, incitent les citoyens à ne plus en voir le sens. Ils étaient 35% à être touchés par les « valeurs républicaines » en mai 2015 ; ils ne sont plus que 25% le 1er septembre…

C’est la même chose pour « l’identité nationale », car la nation reste mal définie et l’identité un concept flou : est-ce la devise de la république ? les idées d’émancipation des Lumières ? l’origine chrétienne recyclée en humanisme ? l’histoire révolutionnaire ? ou les simples idées du patron de la droite qui les emploie ?

Les valeurs proclamées et les valeurs observées ne coïncident pas : la démocratie semble accaparée par quelques-uns et ce microcosme élitiste fonctionne dans l’entre-soi, avec pour complicité les médias – et plus particulièrement la presse écrite. D’où la baisse massive de lecture des journaux, la perte de crédibilité abyssale des journalistes et la croyance de plus en plus forte dans les théories du complot où une minorité intéressée « cache des choses » au grand nombre pour mieux le manipuler.

Rien d’étonnant à ce que les partisans du FN croient plus en l’identité nationale (encore qu’à 48% seulement !) que les partisans du FG (encore qu’à 15% quand même !). Mais il est encore plus étonnant que le votant FN ne soit pas touché par le mot « république » (10% seulement !), et que les membres du PS ne soient touchés QUE pour 43%. Ces gens-là, socialistes et nationaux socialistes, sont-ils donc pour une « dictature » – qui est l’exact inverse de « république » ? En ce cas les électeurs et surtout les jeunes sont fondés à fuir et à surtout ne pas voter pour ce genre de bouffons.

Il y a là une perte de sens préoccupante, les mots paraissent dévoyés et sans signification – alors qu’une claire définition est le premier pas vers l’adhésion. Les « valeurs républicaines » ne parlent pas à 75% des Français, même à 63% des socialistes ! Comme le disait Manuel Valls, la langue politique devient une langue morte, comme si les politicards parlaient latin ou hébreu. En revanche, dès que l’on fixe une valeur sur un exemple concret, là les langues se délient et la politique reprend ses droits : voyez en août le ridicule burkini.

« Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement » : telle est la faute claire et nette de la gauche culturelle que de tortiller du cul pour désigner les choses. Ce ne sont que : « pas de stigmatisation ! pas d’amalgame ! c’est plus complexe que ça ! on ne peut pas dire ! »

Mais si : disons les choses – pas de tabou dans le débat public. Ce qui ne signifie nullement que « la parole raciste » ait droit de cité, mais observer qu’il y a 91% d’enfants d’origine musulmane dans une école est un FAIT, pas un jugement. C’est sur ce fait que l’on peut débattre, juger et éventuellement agir (accentuer la mixité, traiter tout le monde pareil, répartir en bus les classes dans différents quartiers, comme aux États-Unis, etc.). Les têtes soumises à l’extrême-gauche « supposée » avant-garde parce qu’elle connaîtrait mieux le marxisme, cette prophétie soi-disant « scientifique » de l’Histoire, ne pensent plus : elles ont trop peur d’avoir « honte à la gauche », d’être en état de péché mortel devant les ayatollah de l’extrême, gardiens du Dogme. Cette gauche encombrée de tabous nie donc le fait, une vieille habitude communiste de la langue de bois, qu’Orwell avait si bien ridiculisée dans 1984 : le ministre de la guerre s’intitulait ministre de la paix, la pire dictature d’apparatchiks après 1945 se présentait comme démocratique et populaire, la liberté était la contrainte et le tortionnaire en chef était qualifié de Génial leader à la Pensée avancée…. Ce serait une vaste blague si ce comportement clérical, attendant la parole éclairée de la curie gauchiste avant de parler, n’avait des conséquences dramatiques à la fois pour la république, pour la démocratie et pour la concorde civile.

On mesure là combien les « idiots utiles » qui peuplent les médias et qui aboient en horde toujours à gauche, sont une nuisance à la démocratie. Ces petits intellos plein de bonnes intentions et le cœur sur la main, enflés dans des poses généreuses avec de grandes envolées lyriques à la Victor Hugo, croyant en l’idéalisme réalisable de suite et dans la bonté du pire ennemi – mais sans jamais se compromettre aux affaires ni mettre les mains dans le cambouis – empêchent le débat plutôt qu’ils ne font avancer l’histoire. Peut-être y aurait-il autant d’idiots utile à l’extrême de la droite, si d’aventure le poutinisme était poussé un peu plus… Mais la génération post-68 qui truste les places a été biberonnée au marxisme le plus à gauche possible, cette maladie infantile, disait Lénine.

Affirmer le contraire de ce qui est, inverser les valeurs : « Aujourd’hui, les mouvements islamistes font exactement la même chose. On l’a vu avec le burkini. Les associations islamistes défendent cet uniforme en se plaçant sans scrupule sur le terrain de la liberté individuelle et de la tolérance, alors même que ces mouvements entendent promouvoir une société qui tourne le dos à ces valeurs. Le renversement du mot discrimination restera sans doute comme le summum de cette stratégie puisque, par la grâce de la rhétorique, ce sont ceux qui dénoncent une pratique hautement discriminatoire qui se voient accusés de prôner la discrimination » déclare Vincent Tournier, maître de conférences à Science Po Grenoble. Je n’ai RIEN à changer à ces propos.

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Le pire est ce que ce sondage montre de la conscience politique de la jeunesse actuelle : ils s’en foutent. Près de deux sur trois (63%) « ne savent pas » ce qui les touche, le mot « république » étant très vague (grâce à l’Éducation nationale qui entonne plutôt le colonialisme de la IIIe, la défaite de la IVe et le monarchisme de la Ve ?).

Non seulement ils n’ont pas été éduqués à penser par eux-mêmes ni à savoir ce qu’un mot veut dire, mais ils restent ignorants des informations de base, piochant ici ou là sur Internet sans être capable de mesurer le vrai du faux. Ils ne s’intéressent pas aux conflits de la société, tellement habitués qu’ils sont à rester égoïstes, centrés sur leurs hormones et avides seulement de selfies qui les mettent en valeur auprès de leurs pairs. Pire, ils fuient les conflits, « surtout pas de vagues » dit-on à l’ENA, et les jeunes font pareil : dès que l’on élève le ton, ils zappent. Affirmer les ennuie, se défendre demande trop d’effort, résister à la rigueur… mais en restant passifs, ne « faisant rien », surtout pas s’indigner pour pas grand-chose comme les velléitaires parisiens qui se contente de passer la nuit debout en bavassant à l’infini.

Dépolitisés, individualistes, ne croyant plus aucun « adulte » tant ceux-ci, de la génération mûrie juste après 68, leur apparaissent emplis de narcissisme moral, gavés de mots creux, de blabla social et de comportements égoïstes – ils désertent… C’est que les jeunes imitent toujours les plus âgés qu’eux, qui leur indiquent la voie : leur égoïsme jeune est le miroir de l’égoïsme bobo content de lui post-68, arrivé au pouvoir avec la génération Mitterrand – et n’a jamais décroché depuis.

D’où le problème du sens : des mots, des valeurs, des conflits. Ceux-ci sont pourtant inévitables en toute société, ce que la politique doit régler. Tout politicien élu a pour devoir quotidien de gérer les multiples conflits entre les intérêts divergents de son peuple d’électeurs, pour aboutir aux compromis nécessaires sans dévoyer le cœur de ce qui fait vivre ensemble.

Si nous sommes dans le chacun pour soi, comme dans les pays anglo-saxons, alors toutes les revendications sont aussi légitimes et la guerre civile n’est pas loin : on le voit aux États-Unis avec la guerre des Noirs et en Angleterre avec les exceptions du droit pour les minorités (il a fallu une dizaine d’années pour emprisonner un prêcheur haineux issu du Pakistan !).

Un sondage European Value montre combien un cœur européen qui réunit de la Scandinavie à l’Espagne (sans le Royaume-Uni ni l’Italie – ni les pays de l’est) fait consensus sur un « corps de valeurs mêl[ant] engagement dans la vie citoyenne, sociale et politique, sécularisation religieuse, ouverture aux autres, fort degré d’adhésion aux principes démocratiques et libéralisme des mœurs ». Au contraire, l’Europe orientale, la Russie et la Turquie, sont d’un type « religieux-autoritaire » qui les repousse hors de l’Union.

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C’est probablement cette double contradiction – entre les discours et les actes des politiciens 1/ nationaux, et 2/ entre un cœur européen et ses marges – qui pousse « les jeunes » à éviter d’émettre un avis. Ils ne veulent entrer en conflit avec personne, ayant déjà du mal à gérer leurs conflits intimes et personnels ; ils n’ont pas appris à penser sous le gauchisme pédago béat en spontanéité et laisser-faire ; ils ont à leur disposition la puissance d’Internet, la meilleure et la pire des choses, où le soft-power américain peut se donner à plein, tandis que les manipulateurs sectaires ont tout loisir de rafler quiconque dans leurs filets. Tout ce qui les intéresse, en cette fin d’été sur le blog, c’est (quand même les livres mais surtout) la nudité, le sexe et la plage…

Dommage pour la jeunesse : elle sera bientôt adulte et « aux affaires ». Elle aura à prendre des décisions graves et radicales. Elle n’est en rien préparée, ni ne s’y intéresse. C’est la faute de ma génération, celle qui a cru aux promesses de Mitterrand comme à celles de Chirac, ces menteurs de profession qui ont fait des émules, de Sarkozy à Hollande, de Mélenchon à Le Pen… Ce pourquoi le changement : c’est maintenant !

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Que la Morale est belle quand elle reste théorie !

Depuis toujours, les humains se divisent entre donneurs de leçons et donneur d’ordres, hommes de fer et hommes de faire.

  1. Les premiers ont le beau rôle – car ils ne mettent jamais les mains dans le cambouis. Ne faisant rien, ils ne se trompent jamais. Ils préfèrent régenter les âmes en leur faisant honte des écarts à la Règle intangible.
  2. Les seconds agissent, ce qui veut dire se compromettent. Ils doivent négocier avec les forces en présence pour faire avancer leurs idées.

Réel oblige contre Idées pures, que la Morale est belle quand elle reste théorie !

Syriza, Podemos, Mélenchon, Duflot, Frondeurs, Aubry, Corbyn… tous préfèrent le rêve à la réalité, l’utopie de l’épure à se retrousser ici et maintenant les manches. Il est tellement plus facile d’être le Vertueux qui jamais ne fait de compromis que le Pragmatique qui évolue pour composer avec le réel puisqu’il ne peut pas l’annuler.

Soyons heureux : quand la Vertu s’incarne en politique, malheur aux citoyens ! Les esprits non conformes à la Règle sont vus par les croyants comme d’immondes déviants qu’il faut traiter en malades (à enfermer et rééduquer) ou en ennemis (à concentrer en camps ou à exécuter). Robespierre a montré la voie, Lénine et Staline ont suivi, puis tous les petits chefs comme Mao, Castro et le touche-pas-à-mon-Pot des gauchistes français des années 70. Jusqu’aux coraniques littéral-illettrés qui infestent nos banlieues en se croyant Vengeurs après Révélation.

Mon idée est que si les diables rouges s’agitent dans le bénitier capitaliste, tant mieux ! Ce serait pire s’ils en sortaient pour tenter l’aventure. La gauche sociale-démocrate-libérale sera mise en échec ? Tant pis : que l’alternance équilibre les dérives potentielles. Un peu de pouvoir à la droite éloignera les tentations de certains Républicains à lorgner vers l’extrême-droite, tout aussi dangereuse que l’extrême-gauche, tant le blabla de surenchère n’a jamais rien résolu dans le concret historique. Seule la lucidité de la raison agissante permet d’agir – pas les illusions des ombres de la caverne idéologique : ainsi parlait Platon.

idees pure caverne de platon

Car nous sommes toujours dans l’ornière simple des deux éthiques pointées par Max Weber : l’éthique de responsabilité et l’éthique de conviction.

En politique, il est nécessaire de voir loin, donc de peser les conséquences des décisions que l’on prend. Quiconque agit en politique non selon ce qu’il peut faire mais selon sa Bible du moment n’est pas un politicien mais un théocrate, qui sait mieux que tous ce qui est bon à tous. Si le réel résiste, il applique par la force ces convictions venues d’en haut : de la Bible ou d’Al Koran, de l’Histoire révélée à Marx, de la révolution permanente qui excite Mélenchon, de l’écologie coercitive traduite par Duflot, du fonctionnariat intangible qui alcoolise Martine Aubry.

  • La conviction empêche le débat, donc l’exercice de la démocratie : qui ne pense pas comme vous est insulté, traité de moins que rien, donc de « fasciste » – ce Mal absolu de la bonne conscience « de gauche, forcément de gauche » comme répétait à l’envi la Duras, bobote fort à la mode des années 1980-2000.
  • La responsabilité permet le débat, donc l’exercice pragmatique du pouvoir : qui ne pense pas comme vous est invité à suggérer d’autres pistes – irréalistes s’abstenir, mais rien n’empêche d’essayer. Certes, la conviction résiste, mais elle comme une lumière qui éclaire le chemin : les embûches ne peuvent être simplement ignorées et la route vers l’idéal ne s’achève jamais. Le tout est de faire ce que l’on peut – en prenant conscience des risques et en assumant ses actes. Le contraire même de l’irresponsabilité sociale de la génération Mitterrand-Chirac.

Les gauchistes de la gauche française, on les connait, ils n’ont en rien changé depuis 40 ans : étatistes, jacobins, taxateurs et clientélistes, ils révèrent le Fonctionnaire – ce serviteur content de l’être – et redistribuent à tour de lois cet argent qu’ils se moquent de produire (ils préfèrent « prendre » – et tant pis pour la génération suivante). Moralistes, ils ont gardé de leur jeunesse marxiste une haine du « capitalisme » qu’ils sont en bien en peine de définir, fourrant dans ce concept tout ce qui « ne vas pas » à leurs yeux (jusqu’au latin qui disparaît… car peu « utile » aux entreprises).

Les fonctionnaires sont certes nécessaires, lorsqu’ils remplissent avec zèle et neutralité le service du public. Mais quel est ce « service » ? Les fonctions régaliennes légitimes de l’État, pas tout et le reste ! Armée, police, justice, diplomatie, impôts, hôpital – voilà qui est indispensable. Tout le reste se discute et Macron a raison de le laisser entendre à une gauche obtuse et figée – n’en déplaise à l’amère de Lille. Et les Français, contrairement aux archéo-socialistes style Aubry décidément de plus en plus coupés du peuple, sont en majorité d’accord. Les États très fonctionnarisés comme la Russie de Poutine et la Chine aujourd’hui, sont plus néfastes que le Canada ou la Suède qui n’embauchent plus aucun fonctionnaire à vie, mais seulement par contrats de 5 ans. En débattre, c’est la démocratie, jeter l’anathème, c’est un coup de force.

Dans un monde ouvert et qui se globalise, ce sont des nuisibles, ces nostalgiques des Trente glorieuses… Car il est fini, le temps de la reconstruction d’après-guerre, du dirigisme du Plan, du soviétisme des têtes. Tous les pays dirigés d’en haut ont échoué, de l’URSS après Staline à la Chine après Deng (l’été dernier l’a montré). L’initiative et la créativité ne sauraient obéir aux directives d’un aréopage de vieillards technocrates ; l’économie ni la participation politique ne sauraient être liées aux ordres impulsés d’en haut. C’est au contraire « la base », le peuple, les gens, qui se trouvent assez adultes et responsables pour se prendre en main. D’où le côté inaudible de l’Église en moralisme, de l’école pour le savoir, du Président en politique, du parti Socialiste pour les idées… Certes, mai 68 est passé par là avec sa haine de tout autoritarisme – mais c’est surtout que la société a changé : elle est plus autonome, plus individualiste, plus ouverte. Absolument plus poussée à obéir à des « mots d’ordre » des partis ou des idéologies. Le Fonctionnaire, exécutant sans initiative des règles de procédure et des ordres hiérarchiques, ne saurait être un idéal social.

Les gauchistes sont les descendants des frères prêcheurs de notre moyen-âge, aussi péremptoires, armés de la même Voix d’en-haut, tonnant aussi fort contre le gaspillage, le foutre et l’orgie, vertueux comme pas un (sauf pour l’argent public… à user comme des filles publiques pour ces petits marquis de la noblesse d’État). Ils voudraient ramener tout le monde à la même norme médiocre, pour que « l’égalité » soit pure et parfaite, comme dans Cité de Dieu rêvée par saint Augustin (évêque kabyle et paillard repenti). En témoigne par exemple le fonctionnariat d’État qui sévit à l’Éducation nationale : petit savoir, petit salaire, petit travail – bien tranquille et assuré. Tout salarié qui dépasse la rémunération du Fonctionnaire de rang le plus élevé est considéré par les petit-bourgeois envieux de Bercy comme « riche », donc à tondre. Même si le sire prend du risque, soyons impitoyable : qui lui demande de prendre un risque ? il n’a qu’à faire comme tout le monde – et passer un concours : il aura la garantie du salaire, de la santé, du travail et de la retraite – comme dans la ruche. Exception : les stars du foot. Le gauchiste, qui va au peuple comme la vache au taureau, aurait « honte » de toucher aux idoles du prolo.

Certes, l’émergence du global et de ces pays du tiers-monde qui revendiquent désormais leur place dans le premier monde, opère une concurrence féroce ; certes, le Budget étatique se réduit tant les impôts sont déjà lourds et toute hausse contreproductive (Hollande l’a testé a son détriment, mettant dans la rue les bonnets rouges) ; certes, l’endettement national exige une certaine austérité que chaque élu rechigne à opérer – puisque ce n’est pas SON argent ; certes, les élites politiques et intellectuelles apparaissent indigentes, courte-vue, préoccupées plus par leur ego du moment devant la télé que par leur responsabilité devant la cité sur la durée d’un mandat. Mais la tentation gauchiste ne vaut pas le plaisir pervers de les déboulonner.

Romains de la décadence Thomas Couture

Monde cruel, impérialisme américain, Union européenne impuissante, dirigeants français médiocres, droite écartelée et socialistes sans repères : comment l’électeur ne serait-il pas écœuré des « partis de gouvernement » qui promettent à tout va sans jamais rien tenir – ou si peu ? D’où la tentation de sortir de ce monde-ci pour errer dans le monde idéal, « l’autre monde est possible » allant pour certains jusqu’à « l’au-delà » des houris et éphèbes promis au paradis islamique. Les écolos ont la trouille de l’enfer, pensez : 2° de plus dans vingt ans, ils se voient déjà griller à bout de fourches – repentez-vous, mes frères, avant qu’il ne soit trop tard !

Mais les couches populaires, elles, sont plus réalistes que les petits fonctionnaires qui se croient intellos, que les syndicalistes qui croient avoir tout compris de la lutte des places ou que les politiciennes arrivistes qui voudraient bien la place. Le peuple ne croit pas les gauchistes, même les vrais qui s’essaient aux responsabilités, même Tsipras – qui est allé dans le réel bien plus loin qu’un Mélenchon qui se contente de discourir, d’une Aubry qui a accouché des 35 h qui endettent l’État chaque année et dont on voit les ravages encore à l’hôpital public, ou d’une Duflot qui a engendré le désastre de la construction en France depuis 3 ans.

Les couches populaires voteront peu ; celles qui votent voteront encore moins Mélenchon mais préférerons les trois Le Pen – la Trinité d’apocalypse de la Trinité-sur-mer. Parce que les partis de gouvernement n’ont jamais voulu écouter – par tabous idéologiques – les cris et les demandes desdites couches populaires, il n’y a rien d’autre d’utile à faire que d’encourager l’alternance : un temps à gauche, un temps à droite. Juste pour l’équilibre de la responsabilité face à la conviction.

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Le con promis

Le socialiste militant, croyant indéfectible, ravi de fusionner avec les camarades dans l’enthousiasme des luttes électorales du printemps apparaît lorsque la bise fut venue… comme un con. Le con « promis » par son dirigeant. François Hollande est un bon politicien, donc machiavélien : il promet en gros caractères de répondre aux fantasmes de sa base partisane ; il ajoute en petits caractères ce qu’il va vraiment faire. Tous les politiciens font ça, Chirac ayant théorisé la formule selon son vocabulaire de salle de garde : « les promesses n’engagent que ceux qui les croient ». François Mitterrand laissait dire, François Hollande est plus honnête puisqu’il l’a écrit – mais en petit. L’archaïsme de la culture socialiste française exige de ménager l’idéologie, faute de quoi on n’est pas élu. Quitte à faire l’inverse par la suite, donc « trahir » selon la mentalité stalinienne encore en vogue chez les vieux soixantuitards réfugiés en fonction publique, qui forment le gros des militants.

  • Promesse la « non-signature » du traité européen corrigé ; la réalité est qu’on l’a signé en l’état, on l’a simplement justifié en disant qu’on avait ajouté la croissance… qui existait déjà dans les textes.
  • Promesse le « faire payer les riches » ; la réalité est que toute la classe moyenne et populaire paye avec la CSG et la TVA (même les chômeurs !) parce que les riches ne sont jamais assez nombreux pour le tonneau des Danaïdes de la dépense publique, et que les « 75% » ne touchent que quelques centaines de personnes… qui vont sans doute adapter leur rémunération.
  • Promesse le « dialogue social » ; la réalité est qu’il est contraint par la loi en cas d’échec, et que les syndicats sont très peu représentatifs : voir les médecins, voir le temps de travail.
  • Promesse l’écologie ; la réalité est que la France n’a pas les moyens de se priver du nucléaire tout de suite, ni les moyens de subventionner l’éolien et le solaire à guichet ouvert, ni même les entreprises pour produire à coûts assez bas pour qu’on ne doive pas importer tout le matériel. Reste l’isolation des logements, probablement le principal gisement d’économies d’énergie : mais a-t-on les moyens pour l’instant de créer une nouvelle niche fiscale ou de subventionner les logements modestes ?

Eh oui, gouverner est bien autre chose que promettre. Le socialiste de base apparaît donc comme un con, promis au désenchantement comme d’habitude. Cela parce que le parti n’a jamais su s’adapter.

  • Il reste nostalgique des révolutions du XIXème, sans voir qu’on est passé au XXIème.
  • Il ne veut pas se couper du mythe marxiste selon laquelle l’Histoire a une loi qui s’accomplit quoiqu’on fasse, donc que « le capitalisme » est condamné.
  • Il ne voit pas que son concept de « capitalisme » est bien flou, en gros tout ce qui ne va pas dans le monde : l’argent, l’effort, la compétition, la domination, la marchandisation, la mondialisation, la dictature (ouverte ou des lobbies), la guerre. Alors que « le capitalisme » est une technique, pas une idéologie (l’idéologie est l’ultralibéralisme uniquement financier). Le capitalisme est une technique d’efficacité économique pour produire le plus et le mieux avec le moins de capital, de matières et d’hommes. Le capitalisme est donc « écologique » : il économise au maximum la planète et le travail pour la meilleure productivité des facteurs…

Le socialiste ne voit rien de tout ça, il reste dans sa bulle imaginaire où, comme chez Disney, les petits cochons roses danseront dans le soleil dès que le Grand Méchant loup aura disparu. Les militants « espèrent toujours, de manière floue et non argumentée, qu’un jour,  le capitalisme sera remplacé par autre chose. En attendant, l’économie française perd des parts de marché et notre commerce extérieur est de plus en plus gravement déficitaire », dit très justement Gérard Grumberg, observateur CNRS de la gauche politique, dans un article de Telos du 6 novembre.

La hantise socialiste est de se couper de l’extrême-gauche, sorte de Surmoi vigilant du dogme marxiste. Mais on ne peut gouverner en disant je quitte l’Europe, je quitte l’euro, je taxe à 100% tout ce qui est au-dessus du SMIC, je fonctionnarise les dirigeants des entreprises et je nationalise tous les moyens de production, je change les institutions au profit d’une Assemblée élue et surveillée par les citoyens en armes, et ainsi de suite. La France n’est pas toute seule, ni phare des nations. Elle a décidé depuis les années 1950 de bâtir une Europe unie, ce qui ne se fait pas sans compromis ni convergences. Gouverner, c’est accepter cet état de fait dû à l’histoire et à la volonté générale qui s’est à maintes reprise exprimée.

François Hollande se met donc à gouverner. Il choisit – enfin ! – la politique de l’offre, comme toute la gauche de gouvernement partout dans le reste de l’Europe. Finie l’incantation au « keynésianisme » (caricaturé d’ailleurs uniquement en dépense publique permanente, ce que Keynes n’a JAMAIS dit). Place à la politique favorable aux entreprises : moins de charges, plus de souplesse, un meilleur financement. Pourquoi les entreprises ? Parce que seules elles créent des emplois. Et que, insérées dans un système surtout européen (leur principal bassin d’exportation), elles doivent se mesurer aux autres. Eh oui, il faut produire avant de redistribuer : grave question qui n’est jamais débattue dans les instances du PS. Le sera-t-elle à l’avenir ? On n’ose le croire… Surtout que 59% des Français se reconnaissent nuls en économie et considèrent l’information économique à 60% comme incompréhensible (sondage TNS octobre 2012). Merci les fonctionnaires (majoritairement socialistes) de l’Éducation nationale !

Mais non, il ne s’agit pas d’un virage social-démocrate ou social-libéral.

  • La gauche française ne peut être sociale-démocrate puisque ce type de régime exige des syndicats puissants et représentatifs – ce qui est bien loin d’être le cas chez nous !
  • La gauche française ne peut pas être sociale-libérale, puisque ce serait « accepter » le capitalisme et faire avec la mondialisation – ce que refuse bec et ongle la base militante PS principalement de fonctionnaires assurés de leur emploi, couverts pour leur santé et sans problème de retraite.

Alors, qu’est-il donc, le parti socialiste français ? La énième version du jacobinisme, oscillant entre Robespierre et Danton, révérant l’État centralisé qui sait mieux que tout le monde ce qui est bon pour chacun. Où tout se décide entre soi, énarques sortis des mêmes écoles, loin des cons de base à qui l’on chante l’air qu’ils veulent entendre.

Il faudrait au PS un vrai débat sur la réalité des choses. L’observateur s’amuse (et s’attriste) de voir qu’il est bien loin.

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Réactionnaires

Article repris par Medium4You.

Qu’est-ce qu’être « réactionnaire » ? C’est celui qui réagit à une action ; en politique, celui qui est contre ce qui arrive et veut soit le rétablissement de ce qui était avant (conservatisme) soit l’établissement d’un idéal imaginé (gauchisme) ou d’un équilibre éternel (écologistes). La réaction est une action qui tend à provoquer l’effet contraire à celui qui l’occasionne. Sont donc réactionnaires tous ceux qui refusent le présent au nom d’un âge d’or, d’un ailleurs ou d’une « autre » politique.

Contrairement aux idées reçues, le terme de « réactionnaire » en politique n’est pas réservé aux conservateurs qui veulent retrouver un âge d’or (droite) ou protéger les zacquis (gauche) ; il est aussi applicable à ceux qui prônent le durable, autre nom de l’éternel. Cet âge de stabilité à (re)trouver peut être soit très ancien, soit plus récent.

  1. Ainsi, les contre-révolutionnaires n’ont jamais accepté la révolution libérale des Lumières en 1789 ; ils rêvent au retour du roi de droit divin, de la tradition établie, des féodaux.
  2. Certains écologistes remontent même plus loin, à l’époque néolithique où l’homme a cessé d’être chasseur-cueilleur respectueux de mère nature pour tenter de la maîtriser par l’élevage et la culture, bâtissant des villes pour y entasser les récoltes, créant l’État pour lever l’impôt et entreprendre de grands travaux pour dompter les fleuves, le vent, la matière.
  3. Les nostalgiques des Trente glorieuses rêvent de retrouver l’élan démographique, économique et moral des années de Gaulle, où le parti Communiste et la CGT allaient dans le même sens productiviste et progressiste.

Il y a donc des réactionnaires de droite, des réactionnaires écolos et des réactionnaires de gauche. Mais tous ont un point commun. Ils se ressemblent par leur itinéraire mental, toujours le même, obéissant à un schéma de causalité identique. La séquence commune est : refus du présent, sentiment de déclin, recherche d’un coupable, ressentiment anti-élites, désignation d’un bouc émissaire, rassemblement autour d’un État fort servi par un sauveur.

Extrême droite, extrême gauche et gauche écolo agissent de cette même façon. Toujours au nom du « peuple », bien sûr, à qui l’on inculque que célafôta et yaka. Selon cet archétype politique, peu importe le prétexte, le résultat sera le même. Inutile de prétexter qu’il y a « gauche » dans le titre, il s’agit là de pure idéologie, dont Marx, Nietzsche et Freud ont montré qu’elle n’est que le voile de bonne conscience sur les instincts refoulés.

Il suffit d’examiner point par point l’itinéraire de cet archétype.

1-      Refus du présent : il s’agit de montrer qu’aujourd’hui est pire qu’hier ou que l’équilibre abstrait (Dieu, l’Histoire ou Gaïa même combat). Pas difficile car rien ne va jamais comme on veut. C’est le sens du temps que de changer sans cesse. Le mouvement a deux sens, revenir à l’avant ou anticiper l’après – mais il s’agit, à droite comme à gauche, de quitter ce mouvement pour établir une éternité. De quitter l’histoire qui se fait pour fonder un équilibre perpétuel indépendant des hommes.

  1. L’extrême droite veut retrouver un âge d’or où la culture ne remettait pas en cause la nature, où tout était « naturel » : l’identité, l’état social, la hiérarchie du pouvoir, la croyance, les mœurs.
  2. L’extrême gauche veut retrouver une époque révolue en rétablissant ce qui était alors : État jacobin, politique industrielle, crédit largement nationalisé, franc géré par le gouvernement via la Banque de France, frontières, diplomatie armée indépendante dotée de la bombe nucléaire (en bref un capitalisme monopoliste d’État).
  3. La gauche écologiste veut un avenir sur le thème de l’équilibre, toujours hors de l’histoire, par un nouveau pacte écologique pour effacer l’humain des rythmes naturels et des ressources de la nature, en devenant « renouvelable » ou « durable ». Effacer l’homme des êtres prédateurs au nom d’un « équilibre » du vivant mythique.

2-      Sentiment de déclin : non seulement ça ne va pas, mais ça va de mal en pis. Vite, jetons le bébé avec l’eau du bain ! Pour les réactionnaires, de droite, de gauche ou écolos, il n’y a rien de bon à garder du présent. La nature se dégrade comme le climat, les ressources se raréfient et sont l’objet de compétition mondiale, la population nationale est envahie d’immigrés, l’économie s’effondre à cause des émergents et de la rentabilité marchande, la devise est laissée à un lobby de technocrates apatrides asservi au capital étranger, l’emploi se délite à cause des patrons avides qui vont produire ailleurs et déclarer des bénéfices où il y a le moins d’impôts, la diplomatie et l’éducation n’ont plus « les moyens », le français recule comme langue parlée dans le monde comme le bon français dans nos banlieues. Nous sommes en décadence, rien ne va plus, c’était mieux avant ; il n’y a plus de bons produits, plus de sécurité, plus de jeunesse, plus de morale…

3-      Recherche d’un coupable : il s’agit de démontrer la causalité diabolique, souvent assimilée au libéralisme économique, laisser faire et laisser passer. La différence entre les extrêmes, droite et gauche (avec les écolos), est que la première refuse tout laisser passer au nom de l’autorité réhabilitée contre le laxisme, alors que la seconde distingue soigneusement le laisser faire économique (c’est mal) et le laisser faire des mœurs (c’est bien). Il faut y voir un écart de clientèle, les bobos sont des bourgeois acquis à la gauche qu’il s’agit de garder alors que leur pente naturelle, fonction de leur position sociale et de leur statut de richesse, les mènerait volontiers au conservatisme (si je suis heureux dans la société telle qu’elle est, pourquoi vouloir qu’elle change ?). Or le mouvement historique montre l’affinité des libertés : de la liberté d’expression à celle de voter, de la liberté de faire à celle d’être. La liberté réclame la liberté, voyez l’Iran, la Chine, l’Égypte de Moubarak… Le coupable une fois désigné, pourquoi ne se passe-t-il rien ? Parce qu’il y a Complot, évidemment ! Complot planétaire, fomenté par tous ceux qui ont intérêt à préserver leur pouvoir financier, social et moral et qui empêchent « le peuple » de réaliser ce qu’il veut.

4-      Ressentiment anti élite : qui a donc intérêt à préserver ce qui est ? Ceux qui ont actuellement le pouvoir, les élites sociales, politiques, énarques et grandes écoles, des affaires. Elles sont mondialisées, libérales, riches, urbaines, bourgeoises, parlementaires, attirées par les États-Unis et à l’aise en anglais. Vous avez là tous les ingrédients de ce « qu’il faut » haïr : la société du contrat au profit du retour à la société patriarcale, la culture de la négociation au profit de celle de l’autorité imposée, la société ouverte au profit du protectionnisme et du corporatisme, la population multiculturelle au profit de la xénophobie, le bon français et la loi française contre la presse poubelle et l’instruction à l’américaine (déferlement de franchouillardise sur l’affaire DSK), la campagne contre la ville, le terroir contre l’Europe technocrate, le jacobinisme contre les organisations internationales, le nationalisme contre le cosmopolitisme, la pureté ethnique contre le mélange métèque…

5-      Bouc émissaire : il est tout trouvé, il s’agit du capitalisme libéral anglo-saxon mené par l’Amérique selon l’éternel Complot financier qui dépossède chacun de sa terre, de ses origines, de ses pratiques ancestrales ppour tout rendre négociable et marchand. Un classique qui touche l’extrême droite comme l’extrême gauche et les écologistes, malgré les euphémismes et les dénis. Il s’agit de remettre en cause tout le mouvement de libération de l’individu depuis les démocrates Grecs jusqu’à la révolution des mœurs de mai 1968, en passant par la Renaissance (lire les classiques païens au-delà de la Bible) et les Lumières (esprit critique, égalité en droit et dignité, sortie par l’éducation des obscurantismes et contraintes). Cela au profit du collectif qui commande et exige le fusionnel. Tous les droits au collectif, aucun droit à l’individu : telle est la vulgate de ceux qui savent mieux que vous ce qui est bon pour vous. Evidemment, le collectif, c’est eux : le parti, l’avant-garde, les spécialistes autoproclamés, la technocratie d’Etat…

L’intérêt de désigner un bouc émissaire est que le ressentiment individuel peut prendre une forme physique collective manipulée et canalisée : la violence de « la rue » est orientée vers des ennemis clairement désignés. Tous ceux qui ne sont pas avec vous sont contre vous : c’est simple à comprendre ! Tu discutes ? Tu es donc l’ennemi, le Diable, le sous-humain, le malade. J’ai le droit moral de te haïr, le droit juridique de t’accuser de n’importe quoi, le droit médical de te faire soigner malgré toi dans des camps spécialisés de rééducation, le droit physique de te taper dessus (et plus si crise politique comme sous Hitler, Staline, Castro, Pol Pot ou Milosevic).

6-      Rassemblement autour d’un État fort servi par un sauveur : à cette anarchie apparente des intérêts particuliers qui semble faire de la société une jungle, le remède refuge est l’État national et social. Il s’agit de la nostalgie de la monarchie, état « organique » où tout le monde est à sa place selon l’ordre divin ou « naturel », ou de l’Etat « intrument de la lutte des classes » pour retrouver l’équilibre de la société d’avant les classes, l’état définitif de la fin de l’Histoire, ou encore de l’empeinte humaine minimum dans l’état de Nature. C’est une constante des programmes de gauche comme de droite extrêmes que ce social nationalisme (ou national socialisme) dans un seul pays. Repli sur soi, sur ses origines, ses traditions, son « modèle social », ses frontières. Contre l’étranger, les traités négociés, les classes privilégiées, les lobbies, vive le peuple sain, rural et premier ! Local contre global : la terre seule ne ment pas, bon sang ne saurait mentir, vox populi vox dei.

  1. Pourquoi l’État ? Parce qu’il est réputé au-dessus des classes et des partis, des intérêts personnels – même s’il est manipulé par une caste étroite au nom du « peuple ». Parce que seules les frontières définissent le domaine d’intervention d’un État.
  2. Pourquoi un sauveur ? Parce que nul groupe ne peut seul être le maître en démocratie, enclin plutôt à négocier, à faire de la petite « politique ». « Yaka imposer car célafôta l’élite établie », est le slogan populiste.
  3. Pourquoi populiste ? Parce que le populaire est toujours en retard d’une génération sur les mœurs – depuis tous temps. Resté autoritaire malgré 1968, patriarcal machiste malgré le droit de vote de 1945 et l’égalité dans le mariage 1975, partisan des solutions de force malgré l’éducation (nationale).

Toute époque de crise engendre ressentiment social et repli sur soi, crispation et intolérance. Malgré l’écart affiché des idéologies, le schéma de réponse politique est le même : il s’agit d’arrêter le temps, de trouver l’équilibre qui rendra immobile le système. Il s’agit là d’un rituel archétypal où peu importent les prétextes – de gauche, de droite ou écolo : l’avenir espéré est résolument réactionnaire.

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Anders Behring Breivic le monstre de Norvège

Un attentat à la bombe contre le gouvernement social-démocrate et des  jeunes travaillistes de 14 à 30 ans tués par balles en quelques heures. Breivic a frappé fort pour qu’on le considère. Rançon de notre société du spectacle où les idées sont inaudibles si elles ne hurlent pas devant les caméras.

Qui est donc Anders Behring Breivic ?

Anders n’est pas fou, seulement paranoïaque. Sa logique glacée vient du sentiment d’être cerné, personnellement sans amour, socialement noyé, culturellement métissé. C’est un activiste du choc des civilisations à la Huntington, proche en pensée de la droite israélienne et des Nachis de Poutine.

Behring n’est pas fasciste, il ne croit pas aux mouvements de masse ni aux partis autoritaires bottés sous le charme d’un gourou charismatique. Il est hyperindividualiste, ne croyant qu’en lui-même et aux actes personnels, proche en cela des ultraconservateurs américains, libertariens adeptes des milices armées civiles. Ce pourquoi les bobos intellos du Nouveau Snob se trompent, trop bardés de tabous politiquement corrects pour comprendre la différence entre extrême droite et anarchisme.

Breivic n’est pas raciste, non seulement il le dit mais la meilleure preuve est qu’il a massacré les siens, des ados blonds aux yeux bleus, et pas les basanés immigrés du coin. Il est proche en cela de l’Unabomber américain, un solitaire psychotique qui tuait parmi les siens tous ceux qui représentaient le gouvernement. Ce qui limite probablement son message.

Pourquoi parler de ses idées ?

Jamais je n’accomplirai un acte aussi barbare que de tuer au pistolet-mitrailleur des gosses en slip au bord d’un lac, qui n’ont que leurs mains pour se défendre. Jamais je ne justifierai un tel ‘happening’ au nom de je ne sais quelle révolution ou avenir radieux. Jamais je n’obéirai à la logique glacée des partisans persuadés d’avoir tout seul raison, de Savonarole à Torquemada, de Lénine à Pol Pot.

Mais je crois à la lucidité. Nul ne peut combattre la mort qui marche sans comprendre les ressorts qui la font s’avancer. Comprendre n’est jamais pardonner, cela est d’un autre ordre. Il n’y a aucune morale à analyser pour tenter de savoir ; juger, en revanche, est le lot de la société.

Quelles sont les idées du tueur ?

Elles ne sont pas aberrantes, loin s’en faut. Elles sont seulement poussées à leur logique folle, tout comme les Évangiles avec l’Inquisition et le Capital de Marx avec les camps staliniens. Ses idées sont contenues dans un opuscule de 1518 pages en anglais, qu’il diffuse gratuitement sous le titre de ‘2083 A European Declaration of Independence’.

Anders Behring Breivic accuse l’Occident d’avoir laissé depuis 1945 l’égalitarisme marxiste envahir la culture pour saper les fondements même de la civilisation européenne. Il se dit « chrétien » mais version taliban : fasciné par le Jihad musulman, il se veut un croisé, retournant le jihad contre ses promoteurs. Ce pourquoi il revivifie le mythe du Templier, ordre militaire contre les infidèles. Il a trop joué à World of Warcraft, ado marqué par son époque, où le spectacle en ligne pousse à échapper à la réalité.

Il n’a rien d’un partisan d’extrême-droite (il a quitté le Parti du Progrès qui ne lui apportait rien) mais plus d’un anarchiste nihiliste. Un populiste braqué contre les élites vénales et lâches. Le marxisme, hérésie laïque du christianisme, prône l’égalité absolue des conditions, toute différence étant condamnable en soi. Philosophie de l’histoire tirée de l’observation socio-économique, Gramsci, Lukacs, Marcuse, Adorno et l’école de Francfort l’ont rendu « culturel », générant la « pensée 68 » et gangrenant les campus universitaires au nom de la révolution et de l’anti-répression des désirs. De déconstruction en contestation de toute légitimité, de féminisme en châtrage des valeurs mâles, jusqu’à l’anti-négationnisme où la loi interdit même de discuter des thèses d’histoire politiquement incorrectes. Il en fait un chapitre (p.343), « Le nom du diable est : marxisme culturel, multiculturalisme, mondialisation, féminisme, culte de l’émotion, humanisme suicidaire, égalitarisme »… Dans ce nivellement global « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ».

Sauf que les Musulmans ne sont pas gentils, ils sont croyants et intégristes, domptant les femmes à pondre des enfants. Qui ne prononce pas allégeance à Allah et ne se fait pas circoncire est à abattre comme un chien. L’immigration en Europe atteint l’étiage des 10%, avec une natalité plus forte. Dans une génération ou deux à ce rythme, l’Europe ne sera plus européenne mais la banlieue de l’islam. Avec la bonne volonté de ses dirigeants, qui appellent à une Eurabie en affirmant que l’islam est une part de l’Europe (comme la Turquie), encourageant immigration familiale et mœurs islamiques (voile, harem, épargne charia compatible, commerce halal, cantines spéciales, piscines séparées, enseignement de l’histoire expurgé, apprentissage de l’arabe à l’école, financement des mosquées…). Les musulmans pourraient représenter 50% de la population française en 2050 ! Je ne sais pas d’où viennent ces sources (Wikipedia ?) mais cela explique la « résistance » de l’auteur, « vrai » chrétien, traditionaliste souverainiste, tenant de la civilisation européenne historique.

Breivic fait appel aux sources Internet et à des textes glanés ici ou là dans l’Encyclopaedia Britannica et dans les journaux en ligne pour rassembler ses idées en 1518 pages. Son plan est en 5 parties : 1/ la montée du marxisme culturel et du multiculturalisme en Europe, 2/ pourquoi la colonisation islamique commence en Europe, 3/ l’état des mouvements de résistance européens antimarxistes et anti-jihad, 4/ les solutions pour l’Europe occidentale, et 5/les thèmes de discussion d’application utile à la stratégie politique. Pourquoi 2083 ? Parce qu’à ce moment, croit l’auteur, entre un tiers et la moitié de la population européenne sera musulmane, induisant un violent mouvement de réaction des autochtones avec coups d’état, déportation, interdiction de toute référence multiculturelle et imposition d’une idéologie nationale conservatrice (p.803).

Page 837 vient la formule appliquée littéralement par Breivic vendredi : « la meilleure méthode est d’attaquer de façon violente et par tromperie (attaque choc) avec des forces limitées (1 ou 2 individus). » Le terrorisme conservateur est aussi haïssable que celui d’extrême gauche durant les années de plomb des Brigades rouges, de la bande à Baader et d’Action directe. En cela, les partis de la droite extrême ne sont pas plus coupables de leurs idées que les partis d’extrême gauche. Le terrorisme est mimétique, partant des mêmes causes (un parti mou sans action concrète), avec les mêmes effets (des actes individuels de commando qui sèment la mort sans rien changer à la société).

Comment le contrer ?

En étant clair sur les objectifs de l’Union européenne, ferme sur la culture à transmettre et sur les valeurs qui composent notre vivre-ensemble, opposé à la lâcheté médiatique du métissage où tout vaut tout – pour mieux abêtir et vendre Coca cola.

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Politique sans DSK

Le héros socialiste, expert économique mondialiste et sauveur d’une France craintive à bout de souffle a masqué les courants souterrains de la prochaine présidentielle. Il a tant fait rêver en rose, ou se positionner en bleu, brun ou vert, que les enjeux en ont été occultés. Sa disparition subite, digne de l’acte manqué freudien, met en lumière tout ce qui demeurait caché : rejet massif de la droite de gouvernement, dédain des extrêmes, tentation du centre.

Le rejet de Nicolas Sarkozy est tel qu’il aurait fait voter Strauss-Kahn sans que l’électeur adhère vraiment à sa politique. Une enquête réalisée pour Canal+ par la méthode sérieuse du face-à-face, du 29 avril au 2 mai 2011 au domicile d’un échantillon représentatif de 1000 personnes, montre que seuls 17% des Français sur six jugent le bilan de Nicolas Sarkozy positif. Les 76% de jugements négatifs sont au-delà des précédents : 43% des Français jugeaient favorablement le bilan de Valéry Giscard d’Estaing en 1980, 56% celui de François Mitterrand en 1987 et 49% celui de Jacques Chirac en 2000. Même les électeurs Sarkozy du 1er tour 2007 sont partagés, 47% jugent le bilan positif contre 47% négatif.

En cause, la crise mais surtout une attitude. Nicolas Sarkozy n’apparaît pas légitime dans la fonction présidentielle. Même dans le domaine régalien, où il a le moins démérité, il apparaît grande gueule puis capitulard, hésitant à avancer quand les puissants froncent les sourcils. La reculade sur la régulation financière au G20, le désastre sur l’environnement à Copenhague, la négociation avec les Russes en Géorgie, l’absence de vision long terme en Libye ou en Afghanistan… Le bilan de Nicolas Sarkozy sur la place de la France dans le monde n’est estimé positif que pour 36% des sondés.

Mais le président du pouvoir d’achat cause plus qu’il n’agit : 89% des sondés jugent négative son action, 80% ne voient aucun bénéfice sur l’emploi, 76% trouvent ses réformes fiscales dans le mauvais sens. Le financement des retraites est mal jugé par 71%, la politique d’immigration mauvaise à 69%, la justice à 67%. La crise économique et financière a fait l’objet de discours musclés… qui ont accouchés de souris : 63% des sondés jugent sa gestion négative. De même la sécurité, mauvaise pour 61%, et l’environnement, mal géré pour 59%.

Sur tous ces sujets, Dominique Strauss-Kahn était crédité de pouvoir mieux faire. Lui hors jeu, pour qui voter ? Une enquête par téléphone des 20 et 21 mai 2011 pour Le Nouvel Observateur et i>Télé auprès d’un échantillon représentatif de 1013 personnes, montre que François Hollande est pour l’instant le favori. Il bénéficie du soutien des plus de 65 ans (28%) et des électeurs 2007 de François Bayrou en 2007 (29%).

La droite est dans les choux, responsable d’avoir peu fait pour contrer la crise, et pas pour le plus grand nombre. Nicolas Sarkozy obtiendrait moins de 25% des intentions de vote au premier tour. Il réalise ses meilleurs scores parmi les plus âgés (40% d’intentions de vote chez les 65 ans et plus face à Martine Aubry), les commerçants, artisans et chefs d’entreprises (33%) : toutes les catégories que guigne Marine Le Pen. On note une nette déperdition de l’électorat Sarkozy 2007 de premier tour : 38% n’ont plus l’intention de voter pour lui en 2012.

Marine Le Pen ne tire pas profit de l’affaire DSK, mais serait au second tour si Ségolène Royal, Bertrand Delanoë ou Laurent Fabius se présentaient. Elle est première chez les ouvriers (32%), les employés (25%) et les femmes au foyer (29%). Mélenchon ne décolle pas, non plus que l’extrême gauche.

Mais ce qui sort est le centre. Les Français sentent bien que la crise est profonde et touche tous les pays développés. De quoi remettre en cause le mode de vie confortable où l’énergie est peu chère, les salaires en hausse, les retraites décentes. Or l’incertitude est la norme dans l’histoire, pas la protection. Les pays émergents eux-mêmes ne sont pas à l’abri d’accidents économiques ou sociaux (l’inflation en Chine, les menées islamistes en Inde, la déstabilisation du Pakistan, les révoltes au Nigeria, le cartel de la drogue au Mexique…). Une position mesurée sur tous ces sujets, de l’union européenne à la mondialisation, de la transition nucléaire à la productivité est nécessaire. Les candidats non idéologiques, pragmatiques, à l’écoute non seulement des votants mais du monde, emportent les suffrages.

Ce pourquoi Strauss-Kahn faisait rêver, lui qui était loin du gauchisme. Ce pourquoi Martine Aubry, trop rigide et considérée à tort ou à raison comme d’esprit archaïque époque Mitterrand, est moins désirée que François Hollande, bien que femme. L’électorat Modem se reporterait à 70% sur Hollande contre 52% sur Aubry au second tour, selon le sondage. Nous ne sommes cependant qu’à un an des élections, tout peut se modifier d’ici là.

Chez les écolos, Nicolas Hulot (entre 8% et 12%) arriverait à regrouper davantage qu’Eva Joly (7%) et certainement plus que Cécile Dufflot si elle se présentait. Les centristes déclarés (François Bayrou, Jean-Louis Borloo, Dominique de Villepin) parviennent dans ce sondage autour de 15 à 20% s’ils s’additionnent. Jean-Louis Borloo est le mieux placé, entre 7 et 9.5% selon les hypothèses. Il devance à chaque fois François Bayrou, entre 5 à 8% des intentions de vote, usé par trop d’années de présence mi chèvre mi chou dans le paysage. Dominique de Villepin n’est pas désiré, à 3-4% seulement.

Rejet de la droite, désir du centre pour conduire la politique française, le parti Socialiste paraît bien placé s’il sait ouvrir le gouvernement aux centristes et aux écologistes non radicaux. Le fera-t-il ? Ce serait rejouer à gauche ce qu’a réussi Nicolas Sarkozy en 2007. Le léninisme de combat des apparatchiks, dont maints exemples sont donnés à qui sait le lire, me font penser qu’il s’agit là d’impensable. Seul DSK aurait pu, lui qui avait un pied en dehors du parti, jusqu’à chercher à se créer des inféodés dans la presse. Même Ségolène Royal n’a pas osé avec François Bayrou en 2007, ce qui est sa principale erreur politique. Je ne vois ni Martine Aubry, ni François Hollande, appeler un Jean-Louis Borloo ou un Français Bayrou dans un gouvernement de gauche… Il y a tant de « camarades méritants » à récompenser !

Le « centrisme » Hollande paraît donc bien une illusion. C’est en tout cas une tactique qu’il devrait développer pour rester dans le sens de l’opinion française.

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