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Ryû Murakami, Raffles Hotel

Article repris par NousLisons.fr

Le roman est tiré d’un film du même nom, ce qui est bizarre puisque d’habitude c’est l’inverse. Mais l’auteur a été fasciné par l’actrice principale. Il est parti de là, l’imagination stimulée. A l’arrivée, le roman n’a rien à voir avec le film, sinon la trame de l’histoire. Son personnage central reste une femme, mais différente disons-le tout net : à enfermer…

Ryu Murakami Raffles hotelMoeko joue constamment un rôle, même dans ses rêves. Elle est l’incarnation parfaite de « l’actrice », la robotisation perfectionnée du rôle. Elle fait de la vie une jungle où elle est parfois sangsue, parfois plante carnivore. En tout cas vénéneuse, incapable de partager une quelconque émotion. Son obsession est de se faire prendre (seulement en photo) par un milliardaire ex-journaliste durant la guerre du Vietnam. Mais elle n’est jamais contente du résultat, l’appareil ne pouvant combler ni satisfaire ce trou noir à l’intérieur d’elle-même.

Karoya, le photographe, est désabusé et surtout usé. La guerre l’a vidé comme une sangsue. Il s’enfuit à Singapour pour échapper à la mante religieuse Moeko. Mais elle finit par le retrouver, après avoir usé l’inoxydable jeune homme de service, Takeo, intelligent et bien fait, qui sert une agence de voyages.

Le Raffles Hotel, à Singapour, sert de décor suranné à cette tempête psychologique entre les trois, tous éprouvant les limites de l’humain. Moeko ne serait-elle pas après tout une extraterrestre déguisée comme dans la série télé, tête de lézard sous visage masque ?

L’auteur a d’excellentes expressions telles que : « une voiture de collection, un coupé blanc du genre à faire mouiller la culotte de bonheur à une jeune merveille du monde du spectacle qui a eu son premier avortement à treize ans, s’est arrêtée devant moi dans un crissement de pneus » p.106. Premier avortement à 13 ans, ça vous dit quoi sur le premier rapport sexuel ? Le spectacle, c’est ça. Le happening comme on disait autrefois, l’événement, la provocation, le coup médiatique.

En 14 chapitres, Ryû Murakami entrelace les visions des personnages, chacun parlant à la première personne. Cela donne quelques répétitions, qui rendent bien le côté obsessionnel du caractère Moeko mais permettent des points de vue décalés, peut-être plus « objectifs », sur le sujet de la photo. Une réflexion en abyme sur les méandres féminins et l’aliénation de la société du spectacle, où quiconque n’est pas acteur n’est au final… rien.

Ryû Murakami, Raffles Hotel, 1989, traduit du japonais par Corinne Atlan, Picquier poche 2002, 207 pages, €6.27

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Haruki Murakami, 1Q84 tome 2

Haruki Murakami 1Q84 2b

Étrange charme que cette œuvre de la maturité. Le roman se poursuit, s’approfondit, les personnages sont creusés, plus présents encore. C’est qu’on arrive à l’acmé, au moment crucial qui explique et justifie l’aventure. Il y a eu un aiguillage qui a fait dévier du monde normal, quelque part dans le premier tome. Nous ne sommes plus en 1984 mais dans l’année 1Q84 où les Little People se révèlent. Ils ont toujours vécu en compagnie des hommes, mais très peu sont aptes à les percevoir. Il faut une disposition particulière, être perceveur, et être accompagné d’un autre être humain complémentaire : le receveur.

Nous sommes dans un vrai thriller avec menaces, meurtres et tueurs. Nous sommes en même temps dans le surréel de la bifurcation du monde. Et dans un roman des plus classiques qui fait référence à Dostoïevski et Orwell. L’amour, la mort – entre les deux le sexe fait le lien. Ni bien, ni mal, mais comme acte d’union entre les êtres imparfaits, entre les mondes complémentaires. Baiser, c’est à la fois chérir et vaincre, aimer et tuer.

La méticulosité est l’autre face de la violence japonaise, très proche du même tropisme allemand. Les personnages sont voués à toujours aller jusqu’au bout. Ce qui crée un caractère, mais aussi un destin. Les objets fabriqués en Allemagne sont très présents dans ce roman : depuis « la Benz » automobile jusqu’au revolver Heckler & Koch et même à la pendule Braun qui égrène le temps avec une précision rigoureuse. Haruki Murakami sait sentir l’universel de l’obsession, que ce soit dans en Europe ou dans son propre pays.

Cet état d’esprit porté à la maniaquerie secrète la secte comme la fleur le nectar. Se retirer du monde pour vivre selon une discipline draconienne – et choisie – est une façon de vivre son destin tout en s’en remettant à des puissances extérieures. De même lorsqu’on pratique à la perfection son métier : il s’agit toujours de se distinguer, d’avoir un « rôle ». C’est très japonais. Le viol de fillettes de dix ans est alors vu sous un autre angle : « une forme conceptuelle » pour « des échanges polysémiques ». Le leader baise l’ombre d’une âme, un être différent sorti du tissage des Little People. Comme quoi il ne faut jamais se fier aux apparences. Elles sont trompeuses, comme les démons Little People. Oh, me direz-vous, voilà une bien jargonnesque excuse pour assouvir ses instincts pervers ! J’en conviens tout à fait, mais l’auteur use justement du procédé pour condamner l’illusion des apparences, thème très bouddhique et à jamais actuel.

Qu’est-ce qui est « vrai » ? Rien ou tout, c’est selon. Affaire de point de vue : qui voit une seule lune ou deux lunes n’est pas dans le même monde, mais pourtant se côtoie. Qu’un orage brutal éclate sur un quartier particulier de Tokyo et l’on peut tout aussi « raisonnablement » incriminer un mauvais maillage des observations météo ou l’intervention rageuse des Little People. Comme Alice tombant dans le terrier du lièvre de mars, la réalité se déforme, même si elle reste la réalité.

lune et pin

Autre expression du fond japonais, l’équilibre des forces. Le monde n’est ni bien ni mal, comme dans les religions du Livre, il est en perpétuel équilibre – un peu comme chez les Grecs antiques. La démesure est condamnée par le Destin, la trop grande perfection comme la trop grande perversité. Tout ce qui dépasse les normes acceptables du monde (au sens métaphysique et non social), secrète son antidote pour que l’univers se rééquilibre. « Plus nous nous efforçons de devenir des êtres parfaits, magnifiques, méritants, plus l’ombre s’emploie précisément à rendre sa volonté sombre, mauvaise, destructrice » p.274. Ainsi Icare dégringolant pour avoir trop côtoyé le soleil, ainsi Alexandre devenu roi absolu après avoir conquis le monde connu, ainsi de la « race des seigneurs » dévoyée dans la perversité brutale. Qui veut faire l’ange fait la bête, disait sagement Pascal.

Au-dessus des humains reste la musique, qui plane, éternelle, omniprésente. La Sinfonietta de Janacek, mais aussi Bach, Telemann et les jazzmen américains des années 30. Au-dessus des humains reste aussi la lune, symbole de solitude mais aussi de paix, monde froid mais aussi féminin, s’élevant dans la nuit pour éclairer le monde des ténèbres et pour rythmer physiologiquement le temps.

Le lecteur avancera dans l’âme des acteurs, observera l’histoire prendre toute son ampleur, lira enfin le roman de la jeune fille de 17 ans et – ce n’est pas le moindre – apprendra à tisser une chrysalide de l’air…

Un charme étrange qui se prolonge, mûrit comme un vin en fût, et séduit diablement ! Écrit simple et direct, toujours aussi captivant.

Haruki Murakami, 1Q84 tome tome 2 juillet-septembre,  2009, traduit du japonais par Hélène Morita, 10-18 septembre 2012, 550 et pages, €9.12 et €9.12

Livre audio du tome 2 €23.18

Pour mémoire :

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Romain Gary, Les mangeurs d’étoiles

Ce roman, paru il y a un demi-siècle, reste d’actualité en Amérique latine, en Afrique, dans les pays arabes. Les mangeurs d’étoiles sont les hallucinés ; ils mâchent des feuilles, des herbes ou des champignons pour voir la vie en rose. Ils se gorgent d’idéologie, d’indigénité (appelée chez nous « identité nationale ») ou de religion. Ils se croient missionnés pour le Bien, faire le bonheur des gens malgré eux. Ce sont des dictateurs, des gourous, des « révolutionnaires ». Ou bien des colonialistes, exploiteurs ou donateurs à bonne conscience.

Romain Gary, né en Russie et arrivé en France à 14 ans, s’est engagé en 1940 dans la France libre. Compagnon de la Libération, il devient consul de France notamment en Amérique latine. C’est dire s’il connait bien des contrées et leurs mœurs, dans ces années 1960 toutes acquises aux « révolutionnaires » agrariens : Che Guevara et Fidel Castro. Sauf que lui les côtoie de près ; qu’il n’est pas intello de Normale Sup ni des cafés enfumés de Saint-Germain des Prés où l’on refait le monde en théorie dans un fauteuil. Il a connu la famine sous Staline, la guerre contre les fascismes et le cynisme communiste. Il est donc immunisé.

Ce qui nous vaut ce roman picaresque, écrit d’une plume alerte, avec la verve d’une jeunesse bien vécue. Avant Guy Debord, son humanité saltimbanque vaut bien la société du spectacle. La politique est un théâtre, pas plus honorifique que les acteurs des cafés-concerts ou les numéros de cirque des clowns et des acrobates – ou même des télévangélistes ! La faute à qui, si l’être humain est devenu histrion ? A la religion d’abord, puis au marxisme devenu dogme qui lui a succédé. Toute Vérité révélée se veut totalitaire. Ce ne sont pas nos imams braillards d’aujourd’hui qui démentiront le portrait.

Ce pourquoi il faut relire Romain Gary qui décortique avec jubilation ce grand guignol fait d’artifices et de coups de gueule, dont Chavez est le dernier avatar.

José Almayo est un pauvre indien Cujon (invention de l’auteur qui peut se prononcer couronne ou couillon). Il a le visage impassible d’un dieu maya, mais avec du sang espagnol. Poussé aux études par les curés, devenu prostitué à 14 ans pour acquérir la gloire de toréer, il enrage d’être peu doué et de se faire moquer. « Quand on est né indien, si on veut s’en sortir, il faut le talent ou il faut se battre. Il faut être torero, boxeur ou pistolero » p.117. On dirait aujourd’hui chanteur, footeux ou terroriste – mais rien n’a changé. A 17 ans, il quitte son gras protecteur pour revenir au village consulter le prêtre qui l’a sorti de la glèbe. Il n’a pas réussi avec Dieu et le bien, il lui demande donc par contraste quels sont les plus grands péchés. Le vieux lui répond la sodomie, l’inceste et le meurtre d’un religieux.

Tout ce qu’on lui a appris est faux. « En fait, tout était mal, il n’y avait de bien que la résignation, la soumission, l’acceptation silencieuse de leur sort et la prière pour le repos de l’âme de leurs enfants, morts de sous-alimentation ou d’absence totale d’hygiène, de médecins ou de médicaments. Tout ce qu’ils avaient envie de faire, les Indiens, forniquer, travailler un peu moins, tuer leurs maîtres et leur prendre la terre, tout cela était très mauvais, non ? Le Diable rôdait derrière ces idées, on leur expliquait ça sans arrêt. Alors, il y en a qui ont fini par comprendre et qui se sont mis à croire très sérieusement au Diable » p.133. Et aux Américains, puisque les bien-pensants de gauche les accusent d’être impérialistes – Almayo les trouve donc irrésistibles.

L’éphèbe José décide donc de changer de protecteur. Exit Dieu, appel au Diable, El Señor en espagnol. Il tue le prêtre « respectueusement », puis copule avec sa sœur (déjà déflorée par son frère aîné) ; la sodomie, il a déjà donné. Mais il sait que le cul est sans importance pour devenir quelqu’un. Il entre dans la police, se crée des protections, en devient chef, puis renverse le dictateur en place avec un quarteron de généraux, avant de faire place nette pour lui tout seul. La protection majeure est celle des États-Unis et, dans ces années de guerre froide, s’afficher marxiste est le seul moyen de faire affluer l’aide américaine. L’idéologie, il s’en fout, comme tous les histrions, Mélenchon y compris ; ce qui compte est la gloire, qui garantit le pouvoir et l’argent. Le monde a-t-il changé ?

Il cherche à rencontrer le diable et, pour cela, convoque les plus grands manipulateurs qu’il peut trouver. Staline est mort, comme Hitler, c’est dommage ; il se rabat sur le meilleur casting du temps. Le Dr Horwat le télévangéliste américain blond, Agge Olson le ventriloque danois, le jeune cubain supermâle aux dents aurifiées, Charlie Kuhn né Majid Kura à Alep le directeur d’une agence artistique, Monsieur Antoine le jongleur de Marseille, Manulesco le juif roumain violoniste, John Seldon l’avocat d’affaires du dictateur – et même la pute américaine, très jeune actrice nominée, qui lui sert de maitresse kleenex – sont des rôles composés. Tous se croient géniaux, utiles à l’humanité. Ils ne sont que des pantins mus par la vanité. Le pouvoir ou l’argent ne sont rien face à la gloire…

Le roman commence au moment ou le capitaine Garcia, aussi roublard et borné que le sergent de Zorro, reçoit l’ordre – donné par le dictateur lui-même – de fusiller tout ce petit monde, sa mère comprise. C’est que la révolution gronde à nouveau, un jeunot guévariste veut lui ravir la place. Quoi de mieux que de tuer des étrangers, d’en accuser le rebelle, et de recevoir des marines venus ramener l’ordre ? Sauf que rien ne se passe comme prévu. Le Diable se rit des humains qui croient en lui. Dieu aussi, semble-t-il, puisque la conne américaine, devenue sa maitresse, se sent coupable d’être née nantie, socialement inutile. Elle veut « se réaliser » et « s’exprimer », scies de la jeunesse des années 60. En voulant faire le bien elle fait le mal, tant l’enfer est pavé de bonnes intentions. Le développement trop brutal pousse les masses à la révolte, les réalisations « culturelles » se font au détriment de la misère et du chômage (n’est-ce pas, Martine Aubry ?).

L’auteur se place en observateur de la comédie humaine, ces « révolutionnaires » en paroles pour faire l’acteur, mais avides de gloire égoïste qui donne le pouvoir et l’argent. Il crée le personnage de Radetzky, conseiller de José Almayo, qui se dit ex-parachutiste de Hitler comme Skorzeny, en réalité journaliste suédois né Leif Bergstrom et aventurier comme Romain Gary. Lui aussi joue un rôle, la différence est qu’il ne se prend pas au sérieux et met sa vie en jeu.

Leçon du livre : « Après tout, il n’y a pas d’autre authenticité accessible à l’homme que de mimer jusqu’au bout son rôle et de demeurer fidèle jusqu’à la mort à la comédie et au personnage qu’il avait choisis. C’est ainsi que les hommes faisaient l’Histoire, leur seule authenticité véritable et posthume » p.386. Oui, mais l’histoire jugera – elle est impitoyable aux faiseurs.

Romain Gary, Les mangeurs d’étoiles, 1966, Folio 1981, 448 pages, €7.69

Romain Gary présente lui-même Les mangeurs d’étoiles en archives INA

Eva Bester parle en vidéo des Mangeurs d’étoiles sur Arte

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Thorgal 19 La forteresse invisible

Née en 1977, la bande dessinée Thorgal devait se renouveler. Seize ans plus tard, voici que l’enfant venu des étoiles, Thorgal, hésite entre suivre une vie d’aventures ou revenir vers les siens. Les grands espaces sont dans ses gènes, lui qui est né ailleurs ; mais l’amour l’attache, conquis de haute lutte.

Il aime sa femme Aaricia, son fils Jolan qui a dans les 7 ans, et Louve, sa dernière née encore bébé qu’il ne connait pas vraiment. Thorgal est comme Ulysse, parti en guerre qui veut revenir sur son île, mais que certains dieux veulent empêcher.

L’album s’ouvre sur un cauchemar, sa femme et ses enfants lui tendent les bras mais un gouffre les engloutit à deux pas de lui. Il se réveille aux côtés de son âme damnée, Kriss de Valnor, la Circé implacable amoureuse de lui.

Elle le provoque : pourquoi reste-t-il avec elle, la belle Kriss, s’il pense sans cesse à « cette petite dinde » d’Aaricia (dont elle est jalouse) ? Il préfère le souvenir enfui à la jeunesse offerte. La malédiction de Thorgal, elle n’y croit pas, toujours dans le présent, mue par ses seuls désirs. Elle ramène tout à ce qu’elle sent et juge son bel étalon brun aux instincts : la liberté plutôt que la soupe et la marmaille !

Suit une scène érotique où Kriss nue se trouve attaquée par deux ruffians d’une banlieue viking qui voient en elle une femme, donc une proie facile. Bonne à violer avant de l’égorger. Mais c’est qu’elle ne se laisse pas faire. Thorgal la tire de là au moment où elle va se noyer, maintenue par les bras puissants de l’un des hommes. Évidemment elle le nie, mais il l’a sauvée.

Il la sauve encore une fois d’elle-même en refusant qu’elle tue les deux fuyards d’une flèche, comme elle sait si bien le faire. Thorgal a tort de les laisser s’enfuir, mais il ne le sait pas encore. Ou plutôt, il a eu raison à long terme, car les dieux n’auraient pas apprécié, mais tort à court terme, car il sera capturé par le village, après avoir quitté Kriss, écœuré.

Condamné à mort et suspendu par les pieds sur chevalet jusqu’au lendemain matin, il aura tout le loisir de méditer ses erreurs. La première vient de ne pas écouter une vieille femme (encore une tentatrice !) qui lui prédit son avenir. Il la traite de sorcière alors qu’elle voit plus loin.

Après quelques péripéties où elle vient le délivrer, puis lui fait retrouver in extremis Kriss qui le sauve à son tour des ruffians qui voulaient lui faire la peau, elle s’entend enfin invoquer pour sauver le couple désassorti des flammes d’un vallon sans sortie. Chez les Vikings, le destin est écrit et l’être humain ne peut pas faire grand-chose, sinon tenir bravement son rôle. Thorgal a eu beau refuser l’errance, il y est condamné. A lui de combattre au mieux les monstres et les ennemis sur sa route, s’il veut retrouver sa famille.

Il va donc entrer au pays des sortilèges, où les êtres prennent des apparences aimées afin de l’empêcher d’agir. C’est ainsi qu’il retrouve Leif, son père adoptif, puis Tjall, le joyeux blond écervelé, toujours torse nu dans les tempêtes. Les blonds fluets en rajoutent toujours dans le comportement viril pour compenser leur apparence ; c’est vrai encore aujourd’hui, n’avez-vous pas remarqué ?

Après avoir combattu un dragon qui n’était qu’un petit garçon (qu’il a bel et bien égorgé d’un coup d’épée bien ajusté), il doit lutter contre trois belles femmes prêtes à le poignarder. Heureusement que ses sens sont retenus par Aaricia !

La sorcière se révèle une déesse, elle le guide dans la forteresse invisible jusque sur la pierre où les noms de tous les hommes ont été gravés par les dieux pour conserver la mémoire. Là, il peut appliquer sa propre main pour effacer son nom, ce qui le fera oublier des dieux. Il pourra alors rentrer chez lui, être libre des liens envers l’autre monde.

Mais en contrepartie, il perdra tous ses souvenirs, car les dieux ne donnent rien pour rien. Lorsqu’il se réveille – comme au début aux côtés de Kriss de Valnor – il se voit appeler Shaïgan-sans-merci et rappeler qu’il est l’amant de Kriss, compagne fidèle de tous ses combats…

Son avenir sera-t-il d’être roi du monde ? Grand guerrier sans pitié comme Kriss de Valnor ? Loup aventurier plutôt que mouton familial ?

Rosinski & Van Hamme, Thorgal 19 La forteresse invisible, 1993, éditions du Lombard, 48 pages, €11.40

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Marc Dugain, La malédiction d’Edgar

Science pote et ex-financier, Marc Dugain mélange réalité et fiction d’une étrange manière. Son style de rapport administratif laisserait croire à la réalité d’une enquête de journaliste, voire d’historien. Mais l’intitulé « roman » en fait une docu-fiction, genre très à la mode aux États-Unis parce qu’il correspond à la mentalité jeune, formatée au mélange des genres, prenant les jeux vidéos pour le monde réel. C’est ce métissage qui me gêne. Pourquoi ne pas avoir rédigé un « vrai » roman, une réalité réinventée ? A chaque affirmation du livre naît toujours un doute : est-ce vrai ou pas ? Ce qui met mal à l’aise.

Reste Edgar Hoover en directeur du FBI durant 48 ans, son soi-disant amant (?) Clyde Tolson en adjoint du directeur, et divers présidents dont surtout John Fitzgerald Kennedy. On savait JFK aussi queutard que DSK, mais ce qu’on apprend ici – si c’est vrai… – fissure la statue du jeune premier dynamique. Le frère Bob est encore pire. Quant à Hoover, il est inconsistant dans ce livre. Il se contente de régner en proconsul sous huit présidents et dix-huit ministres de la justice, fuyant comme une anguille.

Conservateur ? Il l’est évidemment puisque c’est le rôle de la police fédérale de protéger l’État et les institutions. Homosexuel moralement rigide ? Peut-être, mais est-ce la réalité de la personne ou le rôle complaisant créé pour lui par l’auteur ? Les « preuves » peuvent très bien avoir été inventées par ses ennemis, fort nombreux surtout parmi la gauche américaine, du simple fait qu’il n’était pas conforme au canon de l’Américain moyen : marié, deux gosses.

Comme financier sans doute, Dugain connaît bien les Texans, ceux qui ont laissé assassiner les Kennedy. « Ils sont l’expression même de la virilité. J’aimais leur machisme, cette façon binaire de voir le monde, d’écarter d’un revers de la main toutes ces foutaises d’ambitions collectives qui ne sont que l’émanation de dépressifs pleurnichards. J’étais fasciné par leur brutalité, gage de leur efficacité. Les Texans ne connaissaient pas les problèmes en suspens. Ils les réglaient. (…) Les gens qui savent ce qu’il leur en a coûté pour parvenir là où ils sont ne prêtent jamais l’oreille aux balivernes vomitoires des libéraux bien-pensants » p.151. Le Texan ou l’anti-Hollande…

Le ‘communisme’ est le bouc émissaire commode de ces années Hoover, qui a encouragé le sénateur MacCarthy. « Tout comportement, toute attitude, toute pensée, toute intention déviants. Il regroupait toutes les formes d’actions politiques ou sociales qui allaient contre l’Amérique et qui d’une façon ou d’une autre engageait à la subversion. Il définissait toute attitude frelatée où l’individu s’abandonnait à des pulsions nocives pour la société, en essayant de justifier cet abandon de soi par un discours libéral sans autre but que de légitimer ses certitudes » p.166. Le communisme pour Hoover est la finance de Hollande et Mélenchon, le Mal en soi, à soupçonner et à traquer partout. De quoi aveugler sur toutes les autres réalités souvent plus menaçantes comme la mafia, la drogue ou les castes politico-économiques…

Les politiciens modernes ont été inventés par JFK. Marketing et storytelling remplacent convictions et projet d’avenir : « une belle coupe de cheveux à) la télévision vaut mieux que n’importe quelle conviction solide, (…) le désir supplante les croyances et suffit à ramasser des voix » p.241. Qu’aurait été Kennedy sans Hoover ? C’est la question que pose le roman, sans que peut-être la réalité ait été ainsi. John Kennedy n’était-il que ce sex-machine vaniteux et léger que peint l’auteur – malgré les mémoires de Pierre Salinger, collaborateur de JFK, qu’il cite pourtant en bibliographie ? « Le pouvoir, au fond, c’est faire ce qui est dans l’intérêt de la nation et ne lui faire savoir que ce qu’elle peut entendre » p.421.

D’où la « leçon » tirée par l’auteur sur le siècle américain, le siècle de Hoover et des Kennedy, des libéraux hippies de gauche et des Texans moralistes et conservateurs : Camus. Il imagine (invente-t-il ou est-ce vraiment arrivé ?) Tolson allant trouver un obscur prof de littérature française dans son chalet isolé de montagne pour l’interroger sur le suspect Albert Camus, un probable subversif ‘communiste’ trouvé dans les papiers d’un anti-américain. Le philosophe français s’est toujours élevé contre les totalitarismes, à commencer par celui du parti moscoutaire et par les idiots utiles et sectaires comme Sartre. Le prof cite Camus : « Le bien absolu ou le mal absolu, si l’on met la logique qu’il faut, exigent la même fureur » p.447. Réplique immédiate de l’admirateur des Texans : « Ce genre de pensée affaiblit le pays, elle le gangrène alors que l’ennemi n’a jamais été aussi actif. On ne peut pas avoir ces idées et être un bon patriote » p.447. C’est ce que disent Mélenchon et Marine, et même Hollande en mode ‘de gauche’.

Tous les persuadés de la morale, tous les volontaristes autoritaires, tous ceux qui savent bien mieux que vous ce qui est bon pour vous, sont des sectaires. Il existe des Hoover de droite et des Hoover de gauche, des Hoover d’église et des Hoover de parti, des Hoover intellos et des Hoover politiquement correct. Peut-être est-ce la leçon du livre pour notre temps, très différente du film de Clint Eastwood ?

Marc Dugain, La malédiction d’Edgar, 2005, Folio 2011, 497 pages, €7.98

DVD J. Edgar de Clint Eastwood, avec Leonardo di Caprio, Warner Home, €8.86

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Patricia MacDonald, Un coupable trop parfait

Les romans policiers de Patricia Bourgeau, dite « MacDonald », me laissent un sentiment mitigé. J’admire le professionnalisme de l’intrigue, savamment amenée, conduite avec ce qu’il faut de suspense, sans temps mort. J’aime l’originalité des thèmes, qui change des autres. En revanche, je reste au bord du roman, sans vraiment entrer dans l’histoire. Je n’éprouve aucune empathie pour les personnages. Ils m’apparaissent comme des poupées mécaniques, de simples acteurs jouant un rôle social stéréotypé. Même les héroïnes ne sont pas sympathiques. « Un coupable trop parfait » représente pour cela un progrès : il est sans conteste le meilleur de la série !

Dans les histoires MacDonald, il s’agit habituellement d’une femme et mère qui se heurte à l’égoïsme et à la lâcheté des hommes. La femme est bête ; les hommes violents. Chacun joue son rôle : lui de macho qui a des comptes à régler avec sa mère ou son ex-femme ; elle de maman qui « par instinct » et par « convention sociale » défend bec et ongles ses petits, filles ou garçons. Pas trop grands, les garçons – sinon ils passent à l’ennemi ! En général, la femme-et-mère agit sans aucune rationalité, sans mesurer jamais les conséquences de ce qu’elle fait. Son ‘instinct » la propulse dans les ennuis et ce sont les autres qui l’en tirent. Comment voulez-vous trouver sympathiques de telles pétasses en folie ?

« Expiation » (1981) met en scène une ex-taularde (évidemment innocente !) qu’une société villageoise poursuit mystérieusement de sa vindicte.

« Un étranger dans la maison » (1983) narre la stupidité d’une mère qui laisse sans surveillance son bébé de 4 ans ; il est donc enlevé et retrouvé dix ans plus tard, son ravisseur étant bien sûr autre qu’on ne croit.

« Petite sœur » (1986) est le remord d’une grande sœur qui a fait sa vie hors de sa petite ville et de sa famille étriquée ; la mort du père la rapproche de sa sœur de 14 ans, dont le petit-ami de 21 ans (sic !) n’est pas très net.

« Sans retour » (1989) commence par le meurtre d’une adolescente modèle ; l’auteur donne alors toute la mesure de sa haine féministe en créant le personnage du « fils parfait », un éphèbe superbe de 16 ans dont tout le monde est amoureux ou au moins admire.

« La double mort de Linda » (1994) fait ressurgir une mère qui a abandonné sa fille et ce retour remue les turpitudes de la petite ville.

« Une femme sous surveillance » (1995) montre la femme-victime de la communauté, la veuve qui hérite, l’hystérique qui se remarie juste après le meurtre de son premier mari, celle qui vole le petit-fils.

« Personnes disparues » (1997) multiplie les coupables pour cet enlèvement d’un bébé et de sa baby-sitter adolescente ; les hommes seront malmenés, comme d’habitude, même si le coupable réel n’est pas celui qu’on croit.

« Dernier refuge » (2000) donne à voir la fille naïve qui croit trouver le grand amour à chaque mâle qui s’intéresse à elle ; et tout père qui se préoccupe beaucoup de ses enfants ne peut qu’être suspect pour la MacDonald – c’est le rôle de la « femme-mère », voyons, dans la culture américaine !

C’est ce parti-pris qui agace, au fond. Que chacun soit cantonné dans ses rôles par une société conventionnelle, au point de ne pas pouvoir en sortir autrement qu’en côtoyant la mort. Que chacun soit élevé de façon si étriquée qu’il finisse par confondre « ce qui se fait » avec « ce qui se doit », et les conduites éduquées avec des conduites « naturelles », « instinctives ».

« Un coupable trop parfait » (2002), renouvelle un peu le genre. Il s’agit toujours d’une épouse et mère, agissant « à l’instinct » – ou du moins selon les convenances qu’elle met sous ce nom. Comme d’habitude, elle ne se sent nullement en cause, elle n’a « pas de chance » : son premier mari se suicide sans rien laisser prévoir ; son second mari se noie dans sa propre piscine. A chaque fois, l’épouse-et-mère est absente, préoccupée de fanfreluches ou autres attraits superficiels de l’existence. Mais, cette fois, le héros du roman n’est pas la mère. C’est le fils, un petit garçon de huit ans d’abord traumatisé d’avoir découvert mort son père ; devenu adolescent de quatorze ans qui s’entend mal avec son beau-père et reste maladroit avec son bébé sœur.

Dylan est fragile… et plus fort qu’on ne croit. Il fait d’ailleurs un coupable tout désigné pour la vindicative procureur, ex-amoureuse du beau-père. Dylan remet en question le vernis de « bonne mère » et les hypocrisies adultes – notamment de tous ceux qui sont investis d’autorité : profs, flics et psychiatres. Dylan est sain, au fond : il rigole du féminisme imbécile qui court l’esprit américain ; il devient mâle en découvrant que ses père, beau-père et grand-père ne sont pas si nets que ça ; il choisit son troisième « père » sur la fin ; il prend les choses en mains, puisque sa mère est incapable.

Il y a du progrès dans la peinture des gens réels, Patricia, continuez ! Vous ferez moins de MacDo insipides et plus de vrais romans.

Patricia MacDonald, Un coupable trop parfait (Not Guilty), 2002, Albin Michel, 450 pages, €19.86 (et occasion €2.00)

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Céline et son époque

En 1955, Louis-Ferdinand Céline avait l’œil acéré sur son époque. Il pointait déjà avec humour ce qui deviendrait les dérives de la génération qui venait. Dans ses ‘Entretiens avec le professeur Y’, entièrement rédigés par lui, il se moque de la publicité, des manipulateurs de la jeunesse, et de la fatuité du siècle qui croit que tout commence avec lui. Tout a explosé en vol… sauf la fatuité. Encore un effort, camarades !

Écrire serait un sacerdoce accouché dans la douleur et sans esprit de gagner sa vie ? Céline se fout de la vision romantique du génie méconnu misérable et de l’éditeur mécène, compatissant à la postérité. Il le dit tout cru : Gaston Gallimard, son éditeur, est un commerçant. Dans « le jeu » capitaliste, il faut faire de l’esbrouffe pour exister. Seuls les médias font un livre, le génie à lui seul ne fait pas le succès.

« Il est mécène, c’est entendu, Gaston… mais il est commerçant aussi, Gaston… je voulais pas lui faire de peine… je me suis mis à me rechercher, dare-dare, sans perdre une minute, quelques aptitudes à « jouer le jeu »… pensez, scientifique comme je suis, si j’ai prospecté les abords de ce « jouer le jeu » !… J’ai compris illico presto, et d’un ! avant tout ! que « jouer le jeu », c’était passer à la radio… toutes affaires cessantes !… d’aller y bafouiller ! tant pis ! n’importe quoi !… mais d’y faire bien épeler son nom cent fois ! mille fois !…que vous soyez le « savon grosses bulles »… ou le « rasoir sans lame Gratouillat »… ou « l’écrivain génial Illisy » !… la même sauce ! le même procédé ! et sitôt sorti du micro vous vous faites filmer ! en détail ! filmer votre petite enfance, votre puberté, votre âge mûr, vos moindres avatars… et terminé le film, téléphone !… que tous les journalistes rappliquent !… vous leur expliquez alors pourquoi vous vous êtes fait filmer votre petite enfance, votre puberté, votre âge mûr… qu’ils impriment tout ça, gentiment, puis qu’ils vous rephotographient ! et encore !… et que ça repasse dans cent journaux !… encore !… et encore !… » p.493.

La jeunesse est la proie rêvée du système : naïve, ignare, bienveillante et pleine de bonne volonté énergique, elle est prête à croire à ce qu’on lui dit. Être adulte, c’est adopter les idées de la société dans laquelle on aspire à entrer adulte. Bonheur pour les manipulateurs ! Les maquereaux philosophiques et politiques exploitent sans vergogne cette masse qui bande (donc sourde). Et allez donc ! Les idées sont comme les produits : du prêt à consommer. Abêtir pour mieux dominer. Staline avait piquée le truc à Goebbels qui avait étudié soigneusement le système de l’église catholique – c’est dire si ça ne date pas d’hier.

« J’ai pas d’idées, moi ! aucune ! et je trouve rien de plus vulgaire, de plus commun, de plus dégoûtant que les idées !les bibliothèques en sont pleines ! et les terrasses des cafés !…tous les impuissants regorgent d’idées !… et les philosophes !… c’est leur industrie les idées !… ils esbrouffent la jeunesse avec ! ils la maquereautent !… la jeunesse est prête vous le savez à avaler n’importe quoi… à trouver tout formidââââble ! s’ils l’ont commode donc les maquereaux ! le temps passionné de la jeunesse passe à bander et à se gargariser d’idéaas !… de philosophies, pour mieux dire !… oui, de philosophies, monsieur !… la jeunesse aime l’imposture comme les jeunes chiens aiment les bouts de bois, soi-disant os, qu’on leur balance, qu’ils courent après ! ils se précipitent, ils aboyent, ils perdent leur temps, c’est le principal !… aussi voyez tous les farceurs pas arrêter de faire joujou avec la jeunesse… de lui lancer plein de bouts de bois creux, philosophiques… (…) plus c’est creux, plus la jeunesse avale tout ! bouffe tout ! (…) impatiente, présomptueuse, fainéante… » p.497

La cause première de tout ça ? La fatuité, la vanité, l’histrionisme. Ce siècle croit que tout commence avec lui, que le Progrès (idéalisé) a accouché de la génération la meilleure. L’après-guerre recommence le monde. Beethoven ? Fi ! Heureusement qu’existe son interprète Toscanini sinon que serait Beethoven ? Et Molière sans les metteurs en scène « modernes » ? Et Jeanne d’Arc sans la théâtreuse qui l’enfle pour le public d’aujourd’hui ? Rien n’est vrai, tout est faux, dit Céline. Seule compte l’apparence. Guy Debord pouvait aller se rhabiller avec sa « société du spectacle » : il n’a rien inventé, il a copié Céline. D’ailleurs, Guy Debord existerait-il sans « les farceurs » qui manipulent l’imposture et l’adulent, comme Philippe Sollers ? Qui dénonce la société du spectacle se met en plein dedans…

« Toutes les bourdes sont avalées… empiffrées… redemandées !… du moment qu’elles sont bien poussées !… effrontément !… massivement !… Voltaire l’a dit !… (…) et nous sommes en plein dans l’esprit !… l’esprit du culot atomique !… (…) Toscanini efface Beethoven ! mieux ! il est Beethoven ! il prête son génie à Beethoven !… vingt cabotins recréent Molière !… ils le retranscriptent ! Mlle Pustine joue Jeanne d’Arc… non ! elle est Jeanne d’Arc !… Jeanne d’Arc a jamais existé !… le rôle existait, voilà ! le rôle attendait Pustine !… c’est tout !… (…) le faux triomphe ! la publicité truque, truque, persécute tout ce qui n’est pas faux !… le goût de l’authentique est perdu !… j’insiste ! j’insiste ! observez !… regardez autour de vous !… » p.508

Louis-Ferdinand Céline, Entretien avec le professeur Y, Gallimard Pléiade, Romans IV, 1993, édition Henri Godard, 1598 page, €71.25

Louis-Ferdinand Céline, Entretiens avec le professeur Y, Folio, 123 pages, €3.89

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