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Délivrance de John Boorman

Un film post-68 fascinant : il révèle la nature et les instincts dans un monde des années soixante qui en avait perdu l’habitude et le goût. Quatre amis de la classe moyenne d’Atlanta décident le week-end, sous la direction du leader Lewis (Burt Reynolds), de descendre pour la dernière fois une rivière de Géorgie qui va bientôt être barrée pour en faire encore plus d’électricité pour les climatiseurs, dit l’un d’eux. Plus de nature, la civilisation d’abord. D’où le voyage dans le passé de l’Amérique, afin de retrouver la fraîcheur et la passion des pionniers.

Sauf que la vie aventureuse de découvreur est rude, et pas vraiment civilisée. Il faut savoir quitter les conventions, le droit et l’humanisme pour survivre dans la nature sauvage. Les quatre hommes vont le découvrir brutalement. Le virilisme de Lewis, beau macho velu et musclé en combinaison dépoitraillée, tireur à l’arc hors pair et leader incontesté, se voit remis à sa place par les circonstances. Les autres aussi, à commencer par Drew (Ronny Cox), bon père, bon époux, citoyen exemplaire soucieux des lois, et Bobby (Ned Beatty), jouisseur et primaire, qui ne sait pas dissimuler. Reste Ed (Jon Voight), suiveur et suceur de pipe compulsif, qui va se révéler endurant et courageux. Si sa main tremble lorsqu’il veut tuer un daim, il n’hésite pas face à un ennemi. La délivrance est celle de l’accouchement : chacun d’eux deviendra ce qu’il est – au fond de lui, sous le vernis du civilisé.

Car les quatre pénètrent une région sauvage, à peine atteinte par la civilisation, où les êtres humains sont isolés et se reproduisent entre eux. Le thème du dégénéré ne cessera pas dans le cinéma américain, Massacre à la tronçonneuse en donnera une illustration. Loin des autres, l’humain se ravale au rang de bête. La première séquence donne le ton, Drew improvise à la guitare, imité par un gamin autiste (Billy Redden) qui l’imite puis le défie au banjo. Mais l’autisme est bien le thème du film : deux univers qui ne s’interpénètrent pas : la civilisation et la nature, les urbains et les bouseux.

Les quatre payent deux frères du coin, qui bidouillent la mécanique, pour reconduire leurs voitures à l’arrivée, puis remontent avec eux la rivière en gros 4×4 avant de décharger les deux canoës. Ils partent, campent à la belle étoile, chassent le poisson à l’arc au bord de l’eau. Mais cette écologie est étouffante : la nuit bruit de dangers, l’humidité pénètre les os, le feu attire les prédateurs. Nul n’est en sécurité. L’idéalisme du naturel rencontre la réalité : a quête initiatique est brutale et violente.

Dès le jour suivant, Ed et Bobby accostent et sont pris à partie par deux dégénérés du coin, dont l’un est armé d’un fusil. Devant la menace, ils se soumettent, ne pouvant croire qu’en pays de droit on s’en prenne sans raison à eux. Ils ont tort. Ed sera attaché serré au cou avec sa propre ceinture, sa poitrine dénudée pour y tracer un sillon sanglant avant la suite ; sa pipe jetée laisse augurer du sort qu’il connaîtra. Bobby sera carrément dénudé et violé, son corps de grosse truie attirant par son rose imberbe et rappelant probablement à l’homme des collines ses premières expériences sexuelles avec les cochons. Celui qui tient le fusil rigole bêtement, laissant apparaître un râtelier pourri. Il voudra son plaisir par la bouche d’Ed, le suceur de pipe. Tout est montré brut (scènes censurées dans plusieurs pays, dont la Norvège luthérienne et le Brésil trop catholique), bien que le viol soit hors champ, ponctué seulement par les cris de truies que l’agresseur pousse et pousse sa victime à imiter. L’homo-érotisme soft des quatre gars en canoë contraste avec l’homosexualité hard des deux chasseurs dégénérés : nature et civilisation.

Lewis intervient avec son arc et sa main ne tremble pas lorsqu’il embroche silencieusement le violeur. L’autre s’enfuit et Ed, qui a pris son fusil, n’ose pas lui tirer dessus. Dommage pour lui, il devra l’expier ultérieurement. La nature étant impitoyable, qui ne tue pas est tué. Aucun sentiment ne joue lorsqu’il s’agit de sa vie. Quant à la morale, elle est celle de l’Ancien testament, favori des protestants yankees : œil pour œil, dent pour dent. Ce pourquoi les interminables palabres de conscience après la mort du violeur sont difficiles à suivre aujourd’hui, après les attentats et les émeutes de banlieue. Le droit, c’est bien – quand on le fait respecter. Dans les zones libres, la nature sauvage ou la sauvagerie des banlieues, le non-droit règne, autrement dit la loi du plus fort ou du plus rusé.

Le cadavre enterré – avec son fusil, malgré le danger possible des autres – les canoës repris, les compères se retrouvent non seulement dans les rapides, mais aussi sous le feu du dégénéré survivant. Il les suit du haut des falaises. Lewis dit qu’il a entendu un coup de feu, les autres non, mais Drew le légaliste borné plonge dans les ondes et, comme il a voulu ne pas porter le gilet – pourtant exigé par la loi – il crève. Bobby qui était avec lui ne peut maîtriser le canoë et l’autre vient le percuter, ce qui casse le premier et renverse le second. Ballottés par les rapides et cognés sur les rochers, Lewis en a la jambe cassée, il n’est plus bon à rien qu’à souffrir (en expiation « morale » selon la Bible yankee) et les deux autres qu’à se dépatouiller. Bobby se révèle, ses yeux se sont dessillés, il admet que c’est eux ou lui. L’adversaire est sur les sommets, il faut aller le chercher, ceux qui sont dans la rivière sont trop vulnérables à ses balles.

Ed se dévoue, escalade la falaise avec l’arc et les flèches, dans certaines attitudes irréalistes parfois, qu’on sent outrées dans un décor truqué pour la caméra. Mais il parvient au sommet, s’endort et, à son réveil, voit le bouseux pas très loin, tenant son fusil braqué sur la rivière. Il prend son arc, enclenche une flèche, bande la corde… et tremble comme devant la biche. Mais, cette fois, comme l’autre l’a vu et épaule son fusil, il tire sa flèche. C’est là que se situe le meilleur suspense du film, je ne peux en dire plus. L’a-t-il atteint ? L’autre s’avance…

Durant tout le week-end de canoë récréatif dans la nature sauvage, ce ne sont qu’erreurs, mensonges, lâcheté ou brutalité (son pendant ?) et, au fond, la panique. L’être humain urbain n’est plus habitué à la nature, ni aux hommes des bois. Ceux-ci ne sont pas de « bons sauvages » à la Rousseau (Sandrine comme Jean-Jacques), mais des bêtes humaines avilies par leur solitude. Chacun se révèle. Lewis le macho est impuissant, Bobby le cochon rose jouisseur se rend compte du prix à payer pour jouir, Drew y laisse sa peau par (mauvaise) conscience, et Ed est condamné à avoir tué, à n’avoir pas su protéger Bobby, à n’avoir pas su convaincre Drew de porter son gilet, à mentir à l’inévitable shérif.

Guerre du Vietnam qui s’enlise et Watergate qui remet en question les institutions américaines, l’an 1972 n’est pas rose. Il y aura bientôt la réaction Rambo (1972 pour le roman de David Morrel mais 1982 pour le film), cependant Délivrance est le premier à revenir aux sources pionnières du pays : la conquête de la nature et des sauvages. La dernière frontière de la rivière encore inviolée les tente, les bouseux de la montagne les font rire, mais la nature comme les dégénérés se referment sur eux. A eux de survivre. Le héros n’est pas celui qui en prend l’uniforme et la gueule ; nul n’est civilisé au fond de lui et la nature comme l’adversité le lui révèle ; la violence est inhérente à l’homme. L’insouciance n’est plus de mise.

DVD Délivrance (Deliverance), John Boorman, 1972, avec Jon Voight, Burt Reynolds, Ned Beatty, Ronny Cox, Billy McKinney, Warner Bors Entertainment France 2000, 1h50, €8,20 Blu-ray €19,75

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Vers Vieste

Nous quittons notre gîte ensoleillé avec son chien joyeux qui veut jouer au ballon et sa chatte siamoise qui joue à la souris avec mes lacets. Elle m’aime bien depuis que je lui ai donné à manger. La chatte noire est plus sauvage. Nous laissons Piero, célibataire endurci, entre ces vieux parents. Il ne doit pas rigoler tous les jours.

Nous longeons le parc à cochons dont nous avons dégusté une échine hier. Le mâle présente une énorme paire de couilles que des assistantes sociales s’empressent de photographier ; elles n’ont pas dû en voir de longtemps. Je ne sais pas si l’on dit animelles pour les couilles de porc comme on le dit de l’agneau en cuisine ; on dit peut-être rognons blancs ou tout simplement testicules de cochon.

Puis c’est la succession des collines, montées et descentes en chemin pierreux, jusqu’à la mer. La fille d’hier retombe, elle glisse sur les pierres roulantes comme auparavant, mais cette fois son sac amortit. Elle n’a que des coups, pas de fêlure, elle peut s’asseoir à peu près. Les autres filles lui donnent de l’arnica « en homéopathie ».

Dans le paysage pousse le ciste de Montpellier, le lentisque, la sauge, le romarin. Le geai crie dans le ciel mais pas le guêpier comme hier. Il fait toujours beau temps, avec une petite brise qui arrache les chapeaux dans ses à-coups.

Vieste étend ses bâtiments sur sa pointe blanche, de plus en plus proche à mesure des tournants. La piste tombe en lacets jusqu’à la route côtière qui rejoint la plage. Celle-ci est longue de plus de 3 km, privatisée par les bars et les loueurs de transats. Nous trouvons quand même une trouée d’accès avec quelques arbres pour notre pique-nique. Le guide prépare tout pendant qu’il nous envoie nous baigner pour avoir la paix ; il déteste que les gens tournent autour de lui au prétexte de « l’aider ».

Un fort courant éloigne le nageur le long de la côte et un ruban de bouées à dix mètres au large est installé par sécurité. Le drapeau rouge est affiché pour la baignade. Il y a de petits rouleaux mais l’eau est agréable. Beaucoup de gens d’âge mûr se baignent mais aucun adolescent et presque aucun enfant. Nous ne faisons que nous tremper, pas vraiment nager.

Puis nous revenons en maillot de bain déguster la salade de farfalle accompagné du cacciocavalli et du saucisson de Piero. La salade est arrosée de son huile d’olive, que certaines ont achetée par bidons métalliques d’un litre. Un gars offre une bière Peroni de 33 cl à chacun. Le soir, une fille offrira deux bouteilles de prosecco pour fêter son divorce, un jugement en première instance en sa faveur après cinq ans dont son avocat vient de l’aviser par texto. Une dispute de sous, après la vente du fonds de commerce.

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Nul n’est mal longtemps qu’à sa faute dit Montaigne

Telle est la conclusion d’un long chapitre du premier livre des Essais, le chapitre XIV, intitulé « Que le goût des biens et des maux dépend en bonne partie de l’opinion que nous en avons ». C’est l’idée que nous nous faisons des choses qui les rend bonnes ou mauvaises – pour nous. Donc, « si les maux n’ont entrée en nous que par notre jugement, il semble qu’il soit en notre pouvoir de les mépriser ou contourner à bien ». Cette idée stoïcienne fait les choux gras du bouddhisme, qui considère que toute douleur en ce monde vient que nous nous en tourmentons et que surmonter la maladie, la vieillesse et la mort nous rendra libre, apte à l’éveil de la conscience, au nirvana. « Et en ayant le choix, si nul ne nous force, nous sommes étrangement fous de nous bander pour le parti qui nous est le plus ennuyeux », dit Montaigne en sa langue verte.

Ce que nous appelons le mal ne l’est pas en soi, mais seulement par l’opinion que nous en avons ; il peut d’ailleurs être un bien pour les autres – ainsi « d’éradiquer les mécréants » selon les Talibans qui n’ont que foutre des « droits de l’Homme ». La diversité des opinions dans le monde sur des sujets semblables montre que tel est bien le cas. Ainsi la mort, la pauvreté et la douleur, examine Montaigne.

Il donne force exemples de la mort acceptée et même recherchée par certains, soit parce qu’ils croient en quelque chose de plus fort, soit parce qu’ils ne veulent pas se soumettre. Ainsi de Socrate, premier grand exemple, cité par Montaigne, avant les pendus qui refusent la grâce parce que la garce qui leur est proposée à féconder ne leur convient pas. Ou de ces « femmes et concubines, ses mignons » qui se jettent allègrement au feu de leur chef mort. « Toute opinion est assez forte pour se faire épouser au prix de la vie ». C’est parfois ce que nous appelons fanatisme, dont le pendant positif est la foi.

Et de citer Pyrrhon, le philosophe stoïcien, qui se trouvait un jour sur un bateau pris dans la tempête. Aux plus effrayés, il montrait un cochon qui ne s’en souciait pas. « Oserons-nous donc dire que cet avantage de la raison, de quoi nous faisons tant de fête, et pour le respect duquel nous nous tenons maîtres et empereurs du reste des créatures, ait été mis en nous pour notre tourment ? » s’interroge Montaigne. L’intelligence nous conduit-elle à notre ruine ? Le raisonnement s’emballe-t-il au point de nous étouffer de craintes ? La vie exige la mort au bout et, si certains espèrent un au-delà, il n’est rien moins que certain. La mort viendra et peut-être le néant, pourquoi donc nous en tourmenter toute notre vie durant ?

Pire serait la douleur ? Car nos sens ne nous trompent pas : le pourceau de Pyrrhon « est bien sans effroi à la mort, mais si on le bat, il crie et se tourmente », expose raisonnablement Montaigne. Citant Ovide, il affirme même que « la mort fait moins de mal que l’attente de la mort ». Rien n’est pire que l’incertitude, elle fait travailler l’imagination et s’épouvante de fantômes grossis et amplifiés. « Et à la vérité ce que nous disons craindre principalement en la mort, c’est la douleur, son avant-coureuse coutumière ». Souffrir est bien pire que finir, la douleur est « le pire accident de notre être » dit Montaigne qui avoue la fuir autant qu’il le peut. « Mais il est en nous, sinon de l’anéantir, du moins de l’amoindrir par la patience, et, quand bien le corps s’en émouvrait, de maintenir ce néanmoins l’âme et la raison en bonne trempe ». D’ailleurs « la vertu, la vaillance, la force, la magnanimité et la résolution », que seraient-elles sans « la douleur à défier » ? Où serait l’aventure s’il n’y avait danger ? Le plaisir de l’effort si tout était confortable ? Et de citer Lucain en résumé : « il y a plus de joie dans la vertu quand elle nous coûte cher ».

En bon héritier des classiques de l’Antiquité, Montaigne hiérarchise ce qui nous fait humain : les pulsions sont toutes instincts et même la plante en a ; les émotions sont passions et les animaux en sont doués ; seul l’être humain est pourvu d’une raison évoluée, apte au langage et à l’abstraction, ce que l’époque de Montaigne appelle « l’âme ». Puisque nous sommes humains, il nous faut donc prendre notre principal contentement en l’âme et non dans le corps, c’est elle qui nous fera supporter, « seule maîtresse de notre condition et conduite », dit le philosophe. La douleur « se rendra de bien meilleure composition à qui lui fera tête. Il se faut opposer et bander contre ». Ce qui n’a rien à voir avec la jouissance sexuelle du masochiste, soit dit en passant, Montaigne parle dru mais sa langue est celle de son siècle. « Comme le corps est plus ferme à la charge en le roidissant, aussi est l’âme » – qui se laisse aller souffre bien plus que celui qui résiste. Et de citer les femmes des Suisses mercenaires qui accouchaient debout sans prendre de repos, le Romain Mucius Scévola qui se laissa griller le bras pour affirmer sa volonté de tuer son ennemi, ou encore le gamin spartiate qui, par discipline, laissa un jeune renard lui dévorer le ventre plutôt que de broncher à l’exercice. C’est « notre opinion [qui] donne prix aux choses (…) et appelons valeur en elles non ce qu’elles apportent, mais ce que nous y apportons » – ainsi « l’achat donne titre au diamant », alors que ce n’est qu’un vulgaire caillou dur et brillant, note l’avisé Montaigne.

La pauvreté, en ce sens, est un point de vue. Ce n’est pas la quantité de richesses qui importe mais le bonheur que l’on trouve en chaque instant avec les moyens que l’on a. Et Montaigne de citer son propre exemple :

1/ insoucieux jusqu’à 20 ans, « n’ayant d’autres moyens que fortuits », il fut fort heureux ;

2/ lorsqu’adulte il eut de l’argent, il s’en est tourmenté : en avait-il assez en cas d’accident ? suffisamment en ses voyages ? trop pour susciter la tentation et le vol ? « Tout compté, il y a plus de peine à garder l’argent qu’à l’acquérir » – l’avarice vient avec la richesse ;

3/ dans « une tierce sorte de vie », due au plaisir de certains voyages, « je fais courir ma dépense avec ma recette ; tantôt l’une devance, tantôt l’autre ; mais c’est de peu qu’elles s’abandonnent. Je vis du jour à la journée, et me contente d’avoir de quoi suffire aux besoins présents et ordinaires ; aux extraordinaires, toutes les provisions du monde n’y sauraient suffire ». Il se contente donc de ce qu’il a (quoi qu’il ait) et vit heureux – c’est-à-dire en accord avec lui-même. J’ai rencontré de ces gavroches au Népal qui vivaient au jour le jour de fruits ramassés et de vente de petites babioles, en guenilles et pieds nus mais fort heureux dans l’animation de la rue, avec leur fratrie et copains, qui s’initiaient à plusieurs langues pour faire guides, plus tard. « L’aisance donc et l’indigence dépendent de l’opinion d’un chacun », conclut Montaigne, et de répéter : « chacun est bien ou mal selon qu’il s’en trouve ».

« La fortune ne nous fait ni bien ni mal : elle nous en offre seulement la matière et la semence, laquelle notre âme, plus puissante qu’elle, tourne et applique comme il lui plaît, seule cause et maîtresse de sa condition heureuse ou malheureuse ». Oh, bien sûr, celui qui meurt de faim ne peut que rêver d’un peu, le feignant a tourment de l’étude, tout comme le luxurieux voit la frugalité qui le réfrène comme un supplice, mais c’est « notre faiblesse et lâcheté » qui font les choses difficiles et douloureuses, pas les choses elles-mêmes. « Pour juger des choses grandes et hautes, il faut une âme de même, autrement nous leur attribuons le vice qui est le nôtre ».

« Nul n’est mal longtemps qu’à sa faute » et il nous faut choisir entre résister ou fuir, vivre ou mourir. Mais c’est bien nous qui choisissons, même en laissant faire.

Michel de Montaigne, Les Essais (mis en français moderne par Claude Pinganaud), Arléa 2002, 806 pages, €23.50

Michel de Montaigne, Les Essais (mis en français moderne par Bernard Combeau et al.) avec préface de Michel Onfray, Bouquins 2019, 1184 pages, €32.00

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George Orwell, La ferme des animaux

Fort de son expérience stalinienne en Catalogne et devant l’irénisme de la presse anglaise qui encense le régime soviétique au nom des intérêts de la guerre mondiale, George Orwell décide d’écrire une fable à la Swift. Il se fonde sur le conte enfantin des gentils cochons de Beatrix Potter pour délivrer son message simple : chaud le cochon ! comme Brassens chantait gare au gorille.

« Maréchal, le vieux verrat primé au concours des blancs-moyens » a fait un rêve après « avoir eu le bonheur de méditer lorsque j’étais seul dans ma soue ». En bref, nous animaux menons « une vie misérable, laborieuse et brève » avec tout juste à manger pour nous garder en vie alors que le terrain est riche et la ferme prospère. « Pourquoi ? (…) parce que tout le produit de notre travail, ou presque, nous est confisqué par les humains ». Le seul problème qui fait obstacle au bonheur est donc l’Homme et la seule solution est de s’en débarrasser. « C’est là mon message, camarades, le Soulèvement ! » Nous deviendrons alors « riches et libres » et vivrons nus, sans vêtements plein d’affectation de rang social. Unité et camaraderie et nous vaincrons. Mon rêve : « un âge d’or vous est promis (…) nous recevrons tout en partage ».

Les cochons – qui sont considérés comme les plus intelligents des animaux domestiques – s’emparent du sujet et poussent les autres à la révolte au nom de la doctrine : l’Animalisme. Le plus gros, le plus méfiant et le plus habile s’appelle Napoléon et (tout comme le vrai Napoléon Bonaparte) capte la révolte à son profit pour s’emparer du pouvoir. Il est aidé de Boule-de-Neige, industrieux et actif, qu’il poussera vers la sortie avant de l’accuser de trahir et d’en faire un espion à la solde des Hommes. Il s’entoure d’une garde prétorienne de molosses élevés par lui tout petits qui grondent et mordent tous les opposants. Le culte de sa personnalité infaillible et suprême s’impose par la terreur – et les animaux qui se croyaient libérés se retrouvent dans des rets encore plus serrés, travaillant du matin au soir et même le « dimanche socialiste » pour engraisser les cochons qui se sont instaurés « intellectuels » et dirigeants et boivent tout le lait, mangent toutes les pommes, se vautrent dans les lits de la ferme et éclusent la bière et le whisky des réserves, trafiquent avec les fermes voisines, tandis que le bas peuple des moutons et autres volatiles assez bêtes trime et reste exposé aux intempéries.

Pour l’époque, l’allégorie est transparente : le vieux verrat est Karl Marx, juif barbu qui a engendré des cochonnets sans jamais s’en occuper et médité dans sa soue pour accoucher d’un rêve socialiste où demain on rase gratis ; Napoléon est le grand Staline Père des peuples et tyran sanguinaire qui n’hésite pas à éradiquer ses ennemis par le pic ou l’autocritique publique avant mise à mort ; Boule-de-Neige est Trotsky, organisateur de l’armée rouge et fidèle lieutenant mais juif et trop intelligent pour le rusé géorgien qui le chasse du gouvernement puis du parti avant de le faire assassiner au Mexique car il n’y a qu’un seule trône pour tous les cochons.

Mais l’œuvre transcende les époques en faisant méditer sur le mythe de « la révolution ». Tout changer fait qu’au fond rien ne change : l’élite se renouvelle mais elle reste un pouvoir qui exige et opprime. La leçon des Animaux est que « le peuple », bien que niais, doit rester vigilant sur le respect des valeurs pour lesquelles la révolution est faite : l’égalité, la camaraderie, le partage. Cela est du bon sens, du sens moral, de la décence commune que chaque humain possède en partage. Lorsque le lait mystérieusement disparaît, personne ne s’en préoccupe, or il a été donné aux cochons ; lorsque les pommes sont gardées pour eux par les cochons et que les murmures sont réprimés comme les marins de Cronstadt qui réclamaient que le pouvoir reste aux soviets et n’aille pas au seul pari bolchevique, la dictature s’installe – et nulle dictature n’est jamais bienveillante.

Or l’inégalité est dans la nature humaine, c’est toute la fonction du droit de poser des principes d’égalité de dignité et de voix. Le cochon, « plus intelligent », commande aux chiens, voués à la garde, aux chevaux, dont le rôle est de travailler en bête de somme, et aux moutons, destinés à se faire tondre comme aux poules, dont la fonction est de se faire plumer puis rôtir. Les « travailleurs pleins de bonne volonté, d’agréables camarades, mais parfaitement stupides » se feront toujours avoir par les pervers narcissiques qui accaparent le pouvoir à leur seul gloire et profit. Seul le débat démocratique, les règles de droit et les contrepouvoirs permettent de tempérer et de corriger cette pente naturelle des plus doués à s’imposer « naturellement ». Le mécanisme du césarisme est clair et le fascisme rouge communiste comme le fascisme brun mussolinien ou nazi ou le fascisme noir polpotiste restent des tyrannies dans lesquelles les dirigeants commandent sans contestation possible et vivent bien tandis que le bas peuple obéit et subit dans des conditions minimales. L’idéologie, en substitut de religion, justifie tout cela. Aujourd’hui c’est le cas en Chine de Xi, en Russie de Poutine, en Turquie d’Erdogan, en Inde de Modi ; cela a failli être le cas des Etats-Unis de Trump (mais les contrepouvoirs l’ont emporté), c’est en partie le cas en Hongrie d’Orban et en Pologne de Morawiecki, cela sera peut-être le cas en France de Marine Le Pen. Que « le peuple » ne se leurre pas : le grand chamboulement n’est jamais à son avantage car ce sont les plus durs qui gagnent.

La révolution ne peut qu’être l’affaire de chacun et pas seulement des intellos en chambre (ou en soue), et faire table rase du passé est le meilleur moyen d’imposer la force sans aucun recours. Car l’histoire humaine nous apprend que le meilleur comme le pire ont toujours cohabité en l’humain et qu’il faut composer avec, l’expérience montrant que seules les règles de droit, débattues et contrôlées, permettent d’endiguer le pire tandis que le meilleur ne parvient que par à-coup, mais c’est le prix à payer pour une liberté minimale et une relative prospérité. Ce qu’on appelle le régime démocratique. Car l’Âge d’or n’a jamais existé et le régime parfait n’existe pas.

George Orwell, La ferme des animaux (Animal Farm – A Fairy Story), 1945, Folio 2021, 176 pages, €4.50 e-book Kindle €3.99

George Orwell, Œuvres, édition de Philipps Jaworski, Gallimard Pléiade 2020, 1599 pages, €72.00

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Sains Valentin

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Christian de Moliner, Qu’est-ce que l’islam ?

Il n’existe pas de guide de la pratique islamique, sauf le Coran. Mais le Coran est une collation de prêches du prophète (qui, lui, n’a rien écrit), effectué sur ordre du calife Otman un demi-siècle après la mort de Mahomet. Il est difficile à lire car les signes diacritiques n’existaient pas encore et la langue permettait plusieurs interprétations des mêmes mots. A ce Livre, réputé pour être la parole même d’Allah susurrée aux oreilles du prophète par l’ange Djibril (Gabriel), s’ajoutent les hadiths, commentaires plus ou moins autorisés qui s’annulent en fonction de leur chronologie. Pas simple, donc, de pratiquer la foi en toute bonne foi. D’où le pullulement des sectes dans l’histoire musulmane. Avec les nouvelles techniques de l’information et de la communication, c’est un pullulement de sites dont il s’agit (car, contrairement au catholicisme intégriste jadis, l’islam n’est pas contre la science).

L’auteur, qui n’est pas musulman, observe la religion avec curiosité et se veut néophyte. Il va donc consulter les sites accessibles en français en se mettant « à la place d’un croyant » qui cherche à « approfondir sa foi et comment ne pas commettre, par ignorance, des péchés » p.8. Déjà, c’est le maquis ! Outre les sites extrémistes et « les sites hostiles aux musulmans », que l’auteur a écarté comme minoritaires parmi les croyants en France (même s’ils braillent plus fort que tous les autres), il existe des sites d’oulémas et des forums de discussion où chacun peut donner son avis. « Le nombre de sites ou de blogs musulmans est particulièrement important » p.22. Parmi les oulémas, les « modernistes » sont minoritaires, les « rigoristes » sont les plus nombreux sur la toile. « J’ai choisi le principe suivant pour composer ce livre : j’entre une question et j’effectue la synthèse des réponses des trois premières pages » de Google (p.23).

D’où le troisième chapitre le plus copieux et le plus intéressant après le premier (« Les bases ») et le second (« Les dogmes ») : « L’islam au quotidien ». Il s’étale de la page 65 à la fin, page 170 – soit les trois-quarts du livre. Il ressort que l’islam (rigoriste) apparaît, comme l’écrivait Lévi-Strauss dans Tristes tropiques, comme une religion de caserne. La Loi vient d’Allah et l’homme est réputé trop faible pour qu’Il puisse lui faire confiance (et la femme encore moins !). La phobie est la souillure, dont la première vient du sexe, la seconde (associée) à la nourriture, et la troisième au contact avec les mécréants.

Le seul sexe licite est celui du mari sur la femme, dans la position de l’imam (dite ailleurs du missionnaire) – tout le reste est moins bien, voire appelant les feux de l’enfer. Après la femme, la gradation du progressivement défendu concerne les concubines, les esclaves, puis « la fornication » hors mariage ou possession, puis les hommes et les jeunes garçons (pour les jeunes filles, pas de problème, le Prophète en a « épousé » une qui avait 9 ans, c’est donc licite). L’homosexualité et – pire – la sodomie (sur mâle, femelle ou animal – dans cet ordre) sont illicites, interdites. Il faut des années de repentance prouvée et de prières renouvelées pour qu’Allah puisse (éventuellement) pardonner ce moment d’égarement. Les hommes et les garçons doivent éviter de se montrer nus (la honte suprême !) et doivent se couvrir « du col aux genoux », ce qui exclut le string, le slip de bain et le torse nu, considérés comme impudiques (car attisant le désir ? y aurait-il une perpétuelle tentation homosexuelle reconnue par la religion dans les pays d’islam ?). Les femmes étant réputées plus faibles que les hommes, leur surveillance doit être plus sévère : clôture domestique et voile à l’extérieur sont de rigueur, les cheveux et les seins étant les attributs les plus excitants, la présence constante d’un mâle pubère de sa famille est requise pour toute excursion au-dehors.

A cause de la souillure du sexe (pourquoi est-ce une souillure ? Parce que l’acte d’engendrer vous permet de créer un nouvel être vivant, à l’égal d’Allah ?), il faut se purifier corps, cœur et âme cinq fois par jour ! Les petites et grandes ablutions sont requises avant toute prière quotidienne ; la repentance pour ses fautes aussi, sans quoi la prière ne vaut pas ; la soumission totale à Allah enfin, sans restriction mentale, sinon l’enfer guette. D’ailleurs, deux anges adjudants sont là en permanence qui vous surveillent, ils comptabilisent dans un grand livre tout ce que vous faites, vous dites et vous pensez pour en rendre-compte au Jugement dernier.

Au sexe est associée la nourriture, on le sait depuis Freud. Donc tout ce qui rappelle la souillure ou l’impureté ne doit pas être mangé (le cochon, le chien, l’animal trouvé mort, l’animal abattu de façon non rituelle par égorgement, les poissons sans écailles, etc.). L’alcool n’est pas vraiment interdit, mais pris dans l’interdiction de tout ce qui peut faire perdre le contrôle comme la drogue, le sexe illicite, la musique ou la danse. Dosé à 5% maximum, l’alcool est autorisé par exemple dans le vinaigre, dont Mahomet faisait grand cas, dit-on. Et l’alcool synthétique dit éthanol (dans les parfums par exemple) parce qu’il n’est pas issu de la macération de fruits (toujours la phobie de la souillure). Notez que les parfums sont plutôt réservés aux hommes, qui doivent se maintenir beaux pour plaire à Allah, mais déconseillés aux femmes qui n’ont à séduire que leur seul mari. Cette vision moralisatrice et normalisatrice est de retour aussi dans notre société laïcisée. Il ne faut pas fumer tabac ou cannabis, boire de l’alcool, se droguer, faire l’amour sans préservatif, manger trop sucré, trop gras, trop salé, trop de viande, du thon rouge ou de la baleine, se rendre dans des lieux trop bruyants, prendre le volant après boisson alcoolisée ou drogue, éviter le lait, manger sans gluten, consommer des oméga 3, se méfier des ondes radioélectriques, ne pas réutiliser une bouteille en plastique pour boire, recycler ses déchets, ne pas se promener torse nu en ville, ni seins nus sur les plages, ni consulter des sites d’extrême-droite, ni dépasser les limites de vitesse, ni traverser hors des clous, ni…

Toujours dans le registre phobique de la souillure, les contacts avec les non-musulmans doivent être évités au maximum aux croyants. Là encore existe une gradation, issue des contacts qu’a eu le Prophète en son temps. Les autres religions du Livre, Juifs et Chrétiens peuvent être côtoyés, à condition qu’ils ne disent aucun mal de l’islam et que l’on puisse garder l’idée de les convertir. Tous les autres, les polythéistes, les animistes et les athées sont des abominations qui n’ont presque rien d’humain. Ils seront rejetés par Allah à la fin des temps (après le retour de Jésus, prophète lui aussi dans l’islam – d’où l’alliance « objective » des chrétiens fondamentalistes américains avec les islamistes fondamentalistes wahhabites, par exemple).

Evidemment, avec les contradictions des textes entre eux et les silences sur ce qui est advenu depuis le VIIe siècle, les oulémas sont bien en peine pour trouver la voie droite au croyant. D’où les débats incessants sur les détails de la pratique. Car, ce qui est curieux pour nous, Occidentaux héritiers de Platon, est que la croyance compte moins que la pratique rituelle. Qui accomplit tout ce qu’il faut ira en paradis, même si « Allah » est pour lui un terme vague et abstrait. La pratique exige parfois des contorsions logiques. Par exemple sur le travail des femmes dans la société moderne, que le Prophète ne pouvait anticiper : « A noter la suggestion étrange d’un imam intégriste pour permettre à une femme de travailler seule dans un bureau sans enfreindre la loi islamique. Selon lui, il suffit que tous les deux sucent les seins d’une même femme afin qu’ils deviennent sœur et frère de lait. Ils n’ont plus le droit de se marier et peuvent cohabiter comme le ferait un frère ou une sœur (donc sans voile !) » p.121.

Il y a bien d’autres détails intéressants à picorer dans ce petit livre facile à lire et écrit par la base : le concret des questions qui taraudent les croyants en islam francophone. Sur la location, l’assurance de sa maison, l’héritage à laisser à ses enfants malgré la loi civile, le vote aux élections, les greffes, la télévision, les dessins animés, les photos, la météo (qui est une prévision mais pas une prédiction…). Eprouver une affection profonde pour un incroyant est interdit, mais le cambrioler n’est pas licite, ni le tuer s’il n’a pas lui-même attaqué, pas plus que le griller pour le manger (un imam affirme qu’on peut le manger cru).

Christian de Moliner, Qu’est-ce que l’islam ? Les sites musulmans français le dévoilent, mars 2018, éditions Jean Picollec, 170 pages, €15.00

Attachée de presse Guilaine Depis, 06 84 36 31 85 balustradecommunication@yahoo.com

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Chinois de Polynésie

Gaston Tong-Sang, un temps maire de Bora-Bora, a été Président de Polynésie, « pays d’outre-mer » français. Il est d’origine chinoise. Tout comme en Guyane, les Chinois tiennent le commerce entre leurs mains. A Papeete, mais aussi dans les bourgs, à Tahiti comme dans les îles, le magasin qui alimente, qui chausse et qui habille, c’est « le Chinois ». Il ouvre son magasin dès 5 heures, à l’aube, et le ferme vers 19 heures, une fois la nuit tombée.

Les Chinois sont arrivés en 1856 pour travailler dans une plantation de coton sur Tahiti. Mais c’est en 1865 que l’immigration chinoise devient importante, quand les Cantonais débarquent en nombre pour le coton et le café. En 1873, conséquence de la fin de la guerre de Sécession, la plantation de coton tahitienne fait faillite mais les Chinois sont restés. D’autres immigrants arriveront dans les années 20 et deviendront les premiers négociants et commerçants. Ce n’est qu’à la fin des années 60 que la Métropole accordera progressivement leur naturalisation aux Chinois installés en Polynésie. Ils se sont depuis intégrés à la population locale par des mariages.

chinois des plantations polynesie

Cette minorité d’origine chinoise devient un enjeu géopolitique. L’allégeance des petits États polynésiens à Taïwan est battue en brèche par la Chine populaire. Pour étendre son influence dans le Pacifique, celle-ci n’hésite pas à annuler les dettes de ces micro-états en échange d’un vote à l’ONU contre Taïwan. La Chine propose d’envoyer ses touristes si ces pays répondent à ses critères : hôtels chinois, personnel chinois, nourriture chinoise. Cette diplomatie « de carnet de chèque » irrite l’Australie et la Nouvelle-Zélande. L’argent taïwanais tend à être remplacé par l’argent chinois. Les États en faillite de la région tendent à devenir le terreau d’une nouvelle idéologie et de toutes sortes d’attitudes nouvelles. Les Maoris arrivés en Polynésie venaient de Taïwan, dit-on… Et si la Chine, « propriétaire de Taïwan », venait à réclamer ces îles où ont abordés les valeureux piroguiers, comme faisant partie intégrante de sa zone d’influence ?

La culture chinoise contamine les croyances des îles. Ma Chinoise me prévient : « attention aux 1er et 2 novembre. – Pourquoi ? – Le 1er novembre, ça va encore, c’est la fête de tous les saints. Mais si tu veux aller au cimetière de l’Uranie voir les illuminations des tombes, attention à toi ! – Pourquoi, ça se passe vers 18 h et ce n’est pas loin de chez toi ? – Une enfant de 10 ans a été violée sur une tombe lors de ces cérémonies. – J’ai beaucoup plus que 10 ans et je ne suis pas peureuse. – Je t’aurai prévenue. – D’accord, je tiendrai compte de ton avertissement. Mais le 2 novembre, que se passe-t-il ? – Nous, les Chinois, nous ne sortons pas de chez nous car il y a des esprits partout. Je n’irai pas me baigner à la mer ! – Ah, bon ? Notre fête de Ka-san, nous la faisons dans le cimetière à midi car les esprits sortent le soir et la nuit ; mais ils demeurent présents tout le temps : ma belle-mère, qui était catholique, faisait son lit le matin et n’y touchait plus de la journée, surtout elle ne s’y asseyait pas ! – Mince alors, moi qui n’ai qu’un canapé-lit, vais-je devoir rester debout toute la journée ? Et mon genou droit qui ne me porte pas trop, que vais-je faire ? – Cela, c’est ton problème, mais je t’aurai prévenue… »

Dimanche 5 novembre, lever à 5 h, comme tous les dimanches, marché, retour chez moi pour la douche et le café. Puis ma Chinoise vient me chercher pour filer au cimetière chinois de Arue, pour fêter Ka-san avec ses trois frères. Les Chinois fêtent Ka-san deux fois dans l’année, une fois aux alentours de la Toussaint et la seconde vers avril, suivant le calendrier lunaire. Nous avons rendez-vous à 8h au cimetière. Les trois frères et leur famille arrivent, les bras remplis de paquets. Les tombes des parents sont déjà couvertes de fleurs. Ces tombes chinoises sont toutes construites avec un toit plat qui en protège deux ou trois à la fois. Les plus riches font installer un toit pentu recouvert de tuiles vernissées vertes ou orange. Leurs tombes sont recouvertes de marbre. Les autres les laissent carrelées de blanc. La femme est enterrée à gauche, l’homme à droite. Tous regardent la mer, adossés à la montagne. Si l’on ne voit pas la mer, il faut un plan d’eau. Ce cimetière est une colline donnée aux Chinois par le roi Pomaré.

chinois cimetiere polynesie

Pour Ka-san, il faut égorger un poulet, en recueillir le sang et laisser tomber plusieurs gouttes sur un papier blanc que l’on posera sur le dosseret de la tombe. Cela prévient le mort qu’on vient lui rendre visite. Le poulet est ensuite cuit entier, le foie sorti de l’abdomen et cuit en même temps. Il est dressé sur un plat avec les ailes collées aux flancs, le cou tordu et cuit de manière à ce que la tête regarde le ciel. Le sang du poulet a été cuit comme pour faire un boudin, et conditionné en un disque rond d’environ 5 cm de diamètre. On dispose trois verres de vin rouge (et du bon !), trois bols de riz et trois paires de baguettes, puis le plat où repose le poulet, avec un morceau de porc, de préférence du cochon de lait pour faire bonne mesure. Tout cela afin que les morts puissent se restaurer. Certains amènent le cochon de lait entier et des pommes rouges, tout est rouge. Chacun fait selon sa richesse. Un paquet de biscuits fourrés de confiture rouge, des fruits rouges, du thé « noir » (appelé « thé rouge » en Asie) complètent les libations.

Une jardinière remplie de sable sert à planter les bâtons d’encens allumés que chacun des participants aura, dans ses mains jointes, agité plusieurs fois en direction des tombes tout en murmurant une prière. On allume des bougies rouges que l’on plante dans la jardinière aux côtés des bâtons d’encens. La fumée se répand dans l’air comme après une manif à Paris, quand les flics ont balancé leurs gaz lacrymogènes.

Pendant que les hommes s’affairent à préparer ce « repas », les femmes et les enfants ouvrent des paquets de billets, les tournant en grosses fleurs. Ils ouvrent d’autres sachets enveloppés dans des journaux sur lesquels figurent les mots « femme » ou « homme ». De ces paquets sortent des habits de papier, des pantalons, des vestes pour les hommes que l’on reconnaît à ce qu’elles sont boutonnées devant, des vestes pour les femmes boutonnées sur le côté, des petits chaussons chinois noirs, des chapeaux noirs pour les hommes. Les vêtements femme seront posés, puis brûlés dans le chemin bordant la tombe sur le côté gauche, ceux des hommes posés puis brûlés sur le côté droit. Sur les habits, on pose tous les billets de banque et on met le feu à tout cela. L’un des frères avait amené deux bâtons au cimetière, je me demandais à quoi ils allaient servir : eh bien, ils ont servi d’instrument pour faire en sorte que tout brûle entièrement. Il ne doit rester que des cendres que les vivants laisseront sur place et que le vent emportera à son gré. Vu le nombre de billets de banque partis en fumée, les ancêtres devaient être satisfaits. Eux partis, la prospérité demeure !

Comme les familles chinoises sont étendues, nous sommes allés sur d’autres tombes après celle des parents. Le même cérémonial a été accompli pour la grand-mère. Les autres parents ont reçu des fleurs, des bâtonnets d’encens et des prières. Mais, sur la tombe de la grand-mère une fois tout brûlé, frères et sœurs lui ont annoncé qu’elle devrait dorénavant se joindre aux parents directs pour le cérémonial de l’an prochain ; il n’y aura plus qu’une cérémonie commune pour les ancêtres. Tout est dit en hakka, mais on m’a traduit.

L’un des frères m’a confirmé qu’avant, les Chinois laissaient toutes les victuailles sur les tombes et s’en retournaient à la maison. Mais les Polynésiens guettaient et venaient voler la nourriture des morts une fois les vivants partis. Désormais, les Chinois remportent toute la nourriture chez eux pour la consommer en famille.

Hiata de Tahiti

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Poumaka, ce piton des Marquises

Il a été vaincu par sa face sud par deux alpinistes américains et se prononce Po-oumaka. Sur l’île d’Ua Pou, ce piton vertical de 458 mètres baptisé « the wild jungle tower » par les deux alpinistes dont l’ascension a été filmée grâce à des drones (video sur le site de tahiti-infos). Cette ascension a duré une dizaine de jours dans des conditions difficiles : pluies diluviennes, végétation dense, verticalité. Bravo à ces deux alpinistes Mike Libecki et Angie Payne et à l’équipe vidéo de 3 Strings Productions et au guide local qui les accompagnait.

poumaka alpinistes americains

Voici un récit marquisien traduit par Henri Lavondès. Il s’intitule ‘Le combat des pics : Matahenua et Poumaka’ : « Jadis, dans les temps anciens, dans l’archipel des Marquises ou « La terre des hommes », les pics allaient d’île en île se faire la guerre. Matahenua (autrefois, guerrier redouté mais vaincu par Poumaka), de l’île d’Hiva ‘Oa, était très fier de sa hauteur, néanmoins il était pied-bot. Il n’avait qu’une seule bonne jambe. Il alla, cependant, jusqu’à Taipivai (grande et profonde vallée, au sud-est de Nuku Hiva, arrosé par la plus importante rivière de l’archipel formant une très haute cascade) et combattit avec Tikapo (pointe qui se trouve à l’est de Ho’oumi, près de la baie de Taipivai appelé aussi Cap Martin, important repère de navigation à l’extrémité sud-est de Nuku Hiva). Tikapo mourut. Il coupa sa tête et la jeta dans la mer. Cette tête s’appelle aujourd’hui Teoho’oteke’a (écueil qui se trouve juste en face du cap Tikapo et peut être traduit par « la tête du rocher ».

poumaka sur ua pou carte

« Et il passa ici, à Ua Pou, par Hakata’o (baie et vallée au sud-ouest) de Ua Pou). Il donna une gifle en travers des oreilles à Motu Taka’e (îlot en forme de pyramide aplatie entre Hakata’o et Motu ‘Oa). Celui-ci s’aplatit, mais il ne tomba pas ; il se tint toujours debout. Puis il monta chez Motu ‘Oa (petite île peuplée d’oiseaux de mer à un demi-mille au large, au sud de Ua Pou, appelée île plate). Motu ‘Oa est aujourd’hui couché, il mourut. Il monta à Ha’akuti, se battit avec Motu Heruru (presqu’île entre Ha’akuti et la baie de Vaiehu, ancien guerrier du combat des pics, à la pointe de trouve sa tête Motu Heruru). Il lui coupa la tête et la jeta dans la mer. De nos jours, ce morceau de tête s’appelle Motu Matahi (rocher du côté ouest de la baie de Ha’akuti). Il se trouve devant la baie d’Ha’akuti (baie et vallée de Ua Pou).

« Puis il monta à Oneou (baie et vallée inhabitée au nord-ouest de Ua Pou, appelée aussi Aneou . On trouve deux rochers liés à la bataille des pics, Ke’a ‘Oa et Motu Pahiti) et combattit avec Ke’a ‘Oa (pic dans la vallée d’Aneou ; littéralement « long rocher »). Ke’a ‘Oa mourut, il coupa sa tête et la jeta dans la mer. Elle se trouve devant la baie d’Aneou et s’appelle aujourd’hui Motu Pahiti (écueil dans la baie d’Aneou). Poumaka (pain de sucre de 975m dans la vallée de Hakahetau – les deux petites pointes qui le terminent évoquent les deux chignons des jeunes guerriers) n’était encore qu’un enfant en ce temps-là. C’est la raison pour laquelle il ne fut pas tué. Matehenua retourna à Hiva ‘Oa.

Ensuite, Poumaka grandit : « – Je vais aller faire la guerre à Matehenua, dit-il, car c’est lui qui est venu sans raison tuer quelques pics. – Où vas-tu ? dit Tikapo. Poumaka répondit : – Je vais prendre une revanche sur Matahenua. Tikapo dit : – Oui, mais attends un peu, faisons cuire au four un cochon et étendons-nous ici tous deux. Je t’appendrai comment tu dois faire.

poumaka piton des marquises

« Tikapo donna des instructions à Poumaka :
– Lorsque tu iras faire la guerre à Matahenua, aie bon courage, ne l’attrape pas par sa jambe paralysée, mais par sa bonne jambe, sa jambe paralysée ne le portera pas et il tombera par terre.
Puis ils prirent leur repas. Quand il fut achevé, Poumaka se prépara à partir. Tikapo lui dit :
– Prends avec toi deux cuisses de cochon pour payer tribut à certains pics, de peur qu’ils ne veuillent prendre revanche sur toi.
– Oui dit Poumaka, et il partit faire la guerre.

« Il arriva chez Matahenua :
– Nous allons nous battre tous les deux, maintenant.
Comme Matahenua se préparait à le faire rouler d’un coup dans la poussière. Poumaka l’empoigna par sa bonne jambe et il tomba par terre. On peut le voir allongé de nos jours (Selon la légende, Matahenua, qui était autrefois un pic, est, depuis sa défaite, un cap qui s’avance dans la mer).

« Poumaka retourna chez Tikapo et lui dit :
– J’ai fait mourir Matahenua, voici sa tête à ma ceinture.
Tikapo répondit :
– C’est moi qui t’ai appris comment t’y prendre. Sans moi tu étais mort.
– Oui, répondit Poumaka.

« Puis Poumaka revint ici à Ua Pou. On peut le voir au fond de la vallée de Hakahetau avec la tête de Matahenua à sa ceinture (Le sommet du pic Poumaka présente deux éminences, d’où son nom qui signifie « pilier fourchu ». À courte distance se trouve un grand rocher appelé Teupoko Matahenua qui signifie « la tête de Matahenua ».

Pour ceux qui, un jour, décideront de fouler la terre des hommes, la connaissance de quelques détails, notamment les légendes, s’impose ; ce qui ouvrira grand les bras des Marquisiens très fiers de leur archipel et de leur culture.

Hiata de Tahiti

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A Noël dans l’île de la Cité

La Cité est un État dans l’État à Paris, un quartier préservé au cœur même de la Ville. Contrairement à Londres, la Cité n’est pas la City financière, mais le lieu du droit et de la religion.

noel a paris rue st louis en l ile

La rue Saint-Louis-en-l’Île, qui la traverse de part en part, garde une atmosphère quasi médiévale, surtout en hiver, lorsque la nuit tombe tôt et que les boutiques s’allument.

bistrot a paris rue st louis en l ile

Rien que le bistrot fait envie par son atmosphère quiète, toute de cuivre, de verre et de bois.

boucherie a paris rue st louis en l ile

La boucherie ferait presque aimer le bœuf, malgré les hormones, la vache folle et les injonctions morales des écolos sur le méthane.

charcuterie a paris rue st louis en l ile

La charcuterie, d’où sortent de savoureuses odeurs de cochon cuit, rappelle que la France n’est pas encore un pays musulman. Faudra-t-il, pour cause de politiquement correct et ne pas « choquer » les religions susceptibles, vendre bientôt le cochon sous le manteau – comme l’alcool au Pakistan ?

confiserie a paris rue st louis en l ile

Noël est le temps de la confiserie, dont quelques boutiques offrent le choix.

noel berthillon a paris rue st louis en l ile

Berthillon le glacier fait de nombreuses affaires, même en dehors de l’été. Les amateurs cherchent plus le goût du fruit et la légèreté en fin de repas que le froid sur la langue, après les agapes chargées de Noël.

restaurant a paris rue st louis en l ile

Le restaurant est prêt, les tables installées attendant les pratiques.

creche de noel a paris rue st louis en l ile

Une discrète crèche de Noël, dans une vitrine, évoque les traditions. Oui, la France est surtout un pays chrétien, dans sa longue histoire. Nous ne sommes pas Américains, pot mélangé de diverses provenances (après éradication des Indiens). Que les bobos mondialisés se le disent : ils ne font pas la Loi ; qu’ils se haïssent eux-mêmes de leur insignifiance : c’est leur croix. Pour le reste, les Français aiment le bon vivre avec Rabelais autant que vivre à propos avec Montaigne.

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Sexe, rhum et cochon de Cuba

À l’arrivée au stade, une voiture de location recueille trois Italiens d’âge mûr, dont les adolescents en vélo qui baguenaudent alentour nous disent qu’ils viennent de se faire une ou deux putes. Cela les faite plutôt rire, ces ados ; ils n’ont pas l’austérité protestante de nos contrées coincées où baiser pour de l’argent est le péché absolu. Ils aiment l’amour, le faire, le voir et, si la femme se fait payer en plus, c’est tout bénéfice. Mais Françoise (qui ne comprend pas l’espagnol) réagit aux quelques bribes qu’elle perçoit de la traduction raccourcie de Philippe et elle se lance tel Don Quichotte contre les moulins. « Quoi ! salauds, salopo » (néologisme inventé pour la circonstance car Françoise ne parle pas plus italien qu’espagnol), « vous, pas honte ? baiser comme ça ? baisar ! » Nous rigolons ouvertement de cette morale militante (en langage « petit nègre » d’un air supérieur foutrement colon !), de ce féminisme décalé, de cette clownerie de gauche bobo. Entre adultes consentants, l’amour, même vénal, est une affaire de contrat, pas de morale publique. Mais allez faire comprendre cela à une fonctionnaire d’État socialiste en pleine psychanalyse !

fille bien roulee cuba

Le bus nous reconduit à l’hôtel en passant dans les vieux quartiers où nous revoyons une fois de plus les filles jeunes, bien moulées dans leurs boléros colorés, et les gosses caramels qui se sont mis à l’aise pour jouer après l’école. Toni nous quitte pour rejoindre sa belle, à qui il a fait en passant signe qu’il allait lui téléphoner sous peu. Encore un que l’amour va tenir occupé ce soir. Françoise, dans cette ambiance si sensuelle, se sentirait-elle frustrée ?

Si les adultes connaissent des sacrifices, la Perle des Antilles (petit nom de Cuba) semble bien être le paradis des enfants. Bien nourris, convenablement soignés, éduqués, ils vont sans guère de contraintes, ni vestimentaires, ni du qu’en-dira-t-on. Ils sont presque tout le jour les pieds nus et jouent sans chemise avec leurs frères et leurs copains. Dans cette atmosphère, même l’école intéresse leur curiosité. Ce n’est que l’âge venant qu’ils se font embrigader et vêtir au-delà du minimum. Dès 14 ans, nombre d’entre eux travaillent, surtout dans les campagnes. Même si cela leur donne une autonomie bienvenue à cet âge d’affirmation, et l’impression d’être utiles, le travail est quand même une contrainte. On les sent curieux de connaître le monde extérieur et la modernité, qui ne sont pas le diable de la propagande télévisée officielle, ils le sentent bien. Cette curiosité vivante, on la sent peu chez les adultes, plus méfiants, plus endoctrinés, moins formés peut-être – ou seulement résignés.

ecoliers torse nu cuba

Le rendez-vous est à 19h au bar pour un daiquiri fait de rhum (5cl), de jus de citron vert (1/2) et de glace pilée. On peut raffiner en ajoutant deux boules de glace au citron pour le moelleux de la crème. Certain ajoutent un trait de marasquin. Nous goûtons aussi le mojito qui est fait autrement. Prenez du rhum, toujours la même dose standard, 5cl, 1 trait de sucre de canne liquide le jus d’1/2 citron vert, un brin de menthe à écraser contre le verre, 25cl d’eau gazeuse et quelques glaçons. C’est meilleur. Je préfère le mojito au daiquiri, mais cela dépend de la température extérieure ! En revanche, je n’aime pas trop le cuba libre, 5cl de rhum et 25cl de cola avec glaçons : trop sucré pour moi.

daikiri de cuba mojito de cuba

Nous partons vers 20h pour le Rancho Toa, un restaurant chic à quelques kilomètres de la ville. La rivière Toa a le plus haut débit de Cuba, serine Sergio dans son micro. Nous sommes seuls en « salle » ; je mets ce mot entre guillemets car, sauf sur un côté, les murs n’existent pas. La nature est là, les arbres, les plantes, immédiats, température oblige. Et les moustiques s’en donnent à trompe joie. Nous sommes placés à la table principale pour les groupes, faite de planches brutes. Nous sommes assis sur des bancs de rondins à dossier. Tout cela est révolutionnaire et cow-boy à la fois, ce mélange constant de socialisme et d’Amérique qui fait la contradiction cubaine. Nous est servie une soupe épaisse de porc aux bananes, en calebasse. Puis le cochon lui-même, grillé à la broche, un long bâton enfilé de la barbe jusqu’au cul – ce qui a donné le mot « barbecue » qui vient des boucaniers. La viande est accompagnée de riz (importé du Vietnam car Cuba n’en produit pas assez pour l’avidité de ses habitants), de beignets de bananes plantains et de salade de tomates et laitue. Chacun va se servir à l’étal du cuisinier, un Noir gras qui, en bon spécialiste culinaire, connaît un peu de français. Le cochon, jeune, est tendre et goûteux (je ne parle pas du cuisinier mais de la bête embrochée !). C’est un met de luxe que nous avons là pour les normes cubaines ! Pas de dessert, invention trop occidentale, mais un café parfumé local.

Malgré la joie de cette nourriture bien choisie et bien préparée, toute conversation a été gâchée par les sempiternels musiciens qui viennent vous assourdir jusque dans votre assiette. Ils sont sept, jouent des airs « urbains » archiconnus qui deviennent des scies à touristes comme « Guantanamera » et « Siempre comandante, Che Guevara ». Les neufs dixièmes des touristes sont assez idiots pour être béatement heureux des rythmes en scie à leurs oreilles. Cela les empêche de penser. Moi, je m’emmerde. Les neuf dixièmes des touristes sont ravis qu’on vienne les tirer de la table pour se trémousser (peut-on appeler ça danser, sans rien connaître des rythmes ni des pas locaux ?). Moi, ça me gonfle. La gaieté factice n’a jamais été mon fort. Je prise plus la conversation des esprits à table que la danse du ventre. Et la chasse aux dollars continue. Les musiciens nous ennuient, mais il est « de bon ton » de les rémunérer. Les dix dollars chacun de la cagnotte créée hier soir pour régler pourboires et boissons collectives sont presque bouffés. Il s’agit ici de chasser le dollar où qu’il se trouve. Le touriste est un citron qui doit être pressé sous des airs avenants. On le prend par le gosier, par le sentiment, par la bienséance ou par la queue, peu importe. Les capitalistes doivent payer pour exister, n’est-ce pas dans la propagande ?

cochon de cuba

Nous rentrons vers 22h. Se déchaîne encore à l’hôtel l’animation des danseurs et danseuses salariés. Mais le vent est resté fort ce soir, et les mâles qui se trémoussent ont cette fois enfilé le tee-shirt qu’ils avaient quitté les soirs précédents pour s’exhiber devant les spectateurs dans une parodie de Loft Story showisée à l’américaine. Une vingtaine d’Américains justement, avachis, contemplent la viande très moussante qui se fait mousser sous leurs yeux. Ils paraissent abrutis et je ne sais si c’est l’effet du rhum traîtreusement avalé dans des cocktails sans force apparente ou si c’est l’effet hypnotique de la sono bien trop forte. Je ne les plains pas, chacun prend son plaisir où il le trouve. Mais j’avoue que ce plaisir à l’américaine n’est pas de ceux qui me sont bienvenus.

Quand la musique se tait, quelque part dans la soirée, on entend crisser les palmes et déferler les vagues. À mes oreilles, c’est quand même autre chose !

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Social-individualisme

Article repris par Medium4You.

Terminé le national-socialisme, vive le social-individualisme ! Tel semble le message de notre époque, qui a remplacé les élans collectifs (pour le meilleur comme pour le pire – voir l’Iran) par des élans narcissiques, centrés sur l’individu. Le mouvement démocratique libère la personne des appartenances biologiques, claniques, sociales et même physiques. L’hérédité ne fait plus l’identité. Celle-ci devient multiple, construite tout au long de la vie, bariolée. Mais cela ne va pas sans risques.

Le premier risque est celui de la peur. La liberté fait peur car nombreux sont ceux qui ne savent qu’en faire, effrayés de devoir décider par eux-mêmes après avoir réfléchi. D’où cette régression réactionnaire vers un âge d’or, un Dieu qui commande, une religion qui prescrit en détail comment se comporter, un parti qui décide de la morale, des syndicats qui défendent obstinément les zacquis, un chef qui montre le chemin… Merah se croyait missionné d’Allah pour tuer de sang froid de jeunes enfants élevés dans une autre religion (sans même qu’on leur ait laissé le choix).

Le second risque, inverse, est celui de la démesure : tout est permis. La liberté devient la licence, l’émancipation le droit de faire ce qu’on veut, au gré des désirs les plus fous. On se marie entre gais, on baise avec n’importe quel « cochon », on tue sans assumer les suites (dans la série Poubelle la vie), on refuse l’Europe-contrainte, on nie les simples lois de l’économie, on refuse toute entrave au désir du tout tout de suite. Ainsi, l’éthylotest en voiture devient-il une contrainte insupportable, incitant un gouvernement de gauche à agir comme Chirac, président de droite : « je promulgue la loi mais je demande qu’on ne l’applique pas ». Pourquoi rendre légalement « obligatoire » l’éthylotest si ne pas en avoir n’emporte aucune conséquence ? Autant supprimer l’obligation pour n’en faire qu’un conseil de la Prévention routière. Mais non : jamais un gouvernement jacobin n’acceptera de laisser le choix à la société civile, il lui faut toujours énoncer le Bien.

Peur de la liberté, démesure de la licence, ces deux pôles semblent les tentations de la politique. La droite veut conserver, voire revenir sur les excès de libertés ou de réglementation. La gauche veut aller toujours plus de l’avant, faisant du « progressisme » un objectif en soi, sans but, sans définir un progrès vers quoi. La droite veut immobiliser le changement trop rapide de la société, la gauche veut chevaucher le mouvement social. Rien n’a changé en apparence, nous serions dans le clivage classique.

Mais ce serait trop simple, car en économie, c’est l’inverse. En France, la droite est pour s’adapter au monde qui bouge, la gauche frileuse pour résister des quatre fers à tout ce qui change. La gauche d’immobilisme et la droite de mouvement, c’est nouveau… mais rappelle les années 30, où le « progressisme » sort du collectif à gauche pour s’incarner dans l’individualisme, tandis que la droite l’investit massivement !

Cela en théorie, car droite et gauche se rejoignent au gouvernement. Hollande fait concrètement du Sarkozy, il n’y a que le style qui soit différent. Le résultat des élections est tiède, déplaisant à tous ceux de droite comme à tous ceux de gauche. Restent les raisonnables, de moins en moins nombreux, les européens de conviction, les centristes et les sociaux-(qui voudraient bien être)-démocrates – mais sans syndicats puissants.

La tentation de la politique sera donc de refaire du clivage entre droite et gauche. Comment ?fefe Lucile Butel

Depuis des décennies, la droite ne dit rien de l’avenir. De Gaulle montrait le chemin de l’indépendance et de la grandeur nationale, jusqu’à Giscard avec les réformes de mœurs devenues indispensables pour adapter le pays aux mœurs (divorce, avortement, égalité dans le couple, majorité à 18 ans). Mais Chirac n’a rien foutu, roi fainéant conservateur, médiatique anesthésiant. Sarkozy changeait d’avis de mois en mois, reniant ce qu’il affirmait d’abord, refusant d’abolir ce qu’il aurait dû, par exemple ISF et 35 heures, surfant en avant des médias pour faire tout seul l’actualité. Ni le somnifère ni le prozac ne sont de bons moyens de gouverner : la droite n’aurait-elle rien à proposer de plus équilibré ? Ni Chirac, ni Sarkozy, où sera le nouveau projet de société ? Bruno Le Maire, François Fillon, NKM ? Comme nul ne voit rien venir, certains ont la nostalgie du retour de Sarkozy.

Depuis des années, la gauche est restée hors du gouvernement. Elle n’assume donc qu’avec réticences et couacs répétés les « ajustements » nécessaires des promesses au réalisable, de l’idéal « de gauche » au quotidien concret. Promettant l’emploi pour tous dans quelques mois, elle ne réussit que le chômage pour tous par ses insultes aux créateurs d’entreprise, par sa pression fiscale sur les sociétés et sur « les riches » (de la classe moyenne), par sa posture anti-finance (malgré une réforme bancaire avortée) et son théâtre anti-repreneurs s’ils sont étrangers (Mittal, Taylor…). Après avoir accusé la TVA d’être « de droite », voici que la gauche va l’augmenter, après avoir accusé Sarkozy de « brader » les acquis de retraite, voici que la gauche va les remettre en cause, après avoir vilipendé la semaine de 4 jours, voilà que les syndicats d’enseignants vilipendent l’abolition de la semaine de 4 jours, après avoir juré que « jamais » il ne signerait le pacte de stabilité européen, voilà que le gouvernement de gauche le signe selon la version Sarkozy et les désirs allemands. C’est que la réalité des choses rattrape les grands discours abstraits – dans le même temps que l’individualisme narcissique se fiche du collectif comme de son premier slip. Le « Moi, président de la République, je serai irréprochable » nomme ses copains plutôt que des compétents (Jack Lang, Olivier Schrameck, Ségolène Royal…). Les rodomontades du Montambour (merci Alain Ternier pour cet heureux surnom) sonnent creux devant les nécessités industrielles de Florange, Pétroplus, Goodyear et du journal la Provence. Toujours, c’est le « moi je » qui règne et pas le collectif, plus de salaire au détriment de l’intérêt des élèves, plus de copains confort qui ne feront pas de vagues, plus de célébrité auprès de syndicats et de la gauche radicale.

La gauche délaisse alors l’économie où elle ne peut rien – que surveiller et punir (ce qui aggrave la crise) pour faire diversion dans le libéralisme… sociétal. Il répond au narcissisme moi-je d’époque et devrait faire dévier la ligne raisonnable de François Hollande en radicalisme anarchiste à la Beppe Grillo. C’est la vraie tentation de la gauche que de reconstituer du clivage en ce sens. En manipulant le politiquement correct, mariage gai, mères porteuses, droit de vote aux étrangers, toutes les revendications minoritaires deviennent des « droits » pour répondre au prurit d’égalité sans limites. Même les casseurs et autres agresseurs condamnés par la justice deviennent légitimes… s’ils sont syndicalistes ! Le gouvernement de gauche leur reconnaît une égalité supérieure aux citoyens ordinaires : ils peuvent impunément tabasser, casser, séquestrer, sans être condamnés pour autant. Il s’agit de « luttes sociales », donc permises. Un conseil aux maris jaloux ou autres vengeurs : prenez votre carte de la CGT, entraînez votre ennemi dans une manif et foutez lui sur la gueule : vous resterez impunis.

Mais les ouvriers déclinent, mondialisation et productivité obligent. Ceux qui restent délaissent la gauche, surtout le parti socialiste, au profit des fronts, d’ailleurs plus le national que le « de gauche ». Le socialisme perd alors son prétexte social pour changer de clients. Vive l’immigré et le bobo urbain ! Donnons le droit de vote aux étrangers, abolissons les genres, permettons toutes les provocations individualistes-narcissiques. Là est l’avenir puisque là serait « le progrès », induit par le mouvement social qui va sans but.

couple erotique

Le pire vient probablement d’avoir lieu avec le roman Iacub où culture s’abrège en cul tout court. Nous avons là le meilleur exemple de l’amoralité bobo de gauche : l’individualisme absolu, le narcissisme du désir exacerbé, l’aboutissement du libertaire revendiqué depuis Fourier en passant par mai 68. Entre adultes consentants, tout est permis s’il n’y a ni torture ni meurtre ; le désir violent d’être violée peut même se concevoir dans une démarche de jouissance jusqu’au bout (et très vit). On peut même rire de cette lutte pour la domination entre bourgeois cosmopolites mâle et femelle. Mais où serait l’information si le naming répété dans les médias ne constituait les ragots croustillants ? Où serait la « littérature » s’il ne s’agissait de la marque déposée DSK, « ex-Directeur du FMI, ex-candidat à la présidence de la République, ex-figure de la gauche socialiste » ? Le niveau s’abaisse au caniveau. Nul ne peut croire qu’on cherche la « sainteté » en devenant pute à « cochon ». A moins qu’il ne s’agisse de victimiser le prédateur pour renverser l’opinion ? Les victimes apitoient toujours… alors qu’un procès en prostitution a bientôt lieu à Lille.

Voilà de quoi renforcer à la fois le Front national et les islamistes ou cathos intégristes. Voilà de quoi séparer un peu plus le peuple et les élites, la classe moyenne familiale laborieuse et l’hyper-classe supérieure individualiste et riche. Comme à Athènes au IVème siècle : comme quoi le « progrès du mouvement social » est une idéologie qui n’a aucune consistance historique…

D’où mon pronostic (pas mon souhait) :

  • Les classes moyenne et populaire vont volontiers voter de plus en plus à droite (comme chez les Républicains américains) – tant mieux si la droite sait récupérer le raisonnable, l’Etat protecteur sans entraver l’initiative, le moindre gaspillage des deniers publics. Sinon ce sera le Front national qui va grossir.
  • La classe des élites mondialisée et des petits intellos « révolutionnaires » va voter de plus en plus à gauche, surfant sur l’individualisme narcissique – en cherchant à racoler les antisystème, immigrés, étrangers, gais-bi-trans-lesbiens, artistes, écolos, fonctionnaires et autres clients captifs de l’État-prébendes. Tant mieux si le hollandisme ne déçoit pas trop. Sinon les troupes pourraient bien conforter le PDG de Mélenchon, qui se verrait volontiers en Saint-Just appelant aux armes contre les riches et aux frontières contre Bruxelles.

La France pourrait connaître une évolution à l’américaine, avec une droite de plus en plus à droite mais refuge du collectif national, et une gauche de plus en plus anarchiste-bobo, exaspérée de tout est permis. Ce qui promet de prochaines élections intéressantes…

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Rentrée à Tahiti

Depuis le 16 août les collégiens et lycéens ont repris le chemin des établissements scolaires. Mais la veille…

Il est 16h38 ce mercredi 15 août, un tremblement de terre durant 4 secondes, les murs et les meubles ont bougé. Magnitude 4 sur l’échelle de Richter, et à 50 km de Tahiti. La peur m’a privé de 5 g de graisse. Une secousse sur le fond océanique dans la région de Teahitia, côte est de Tahiti. Nous avons nettement ressenti la secousse, le sol a bougé, les meubles tremblé, certains ont découvert des fissures dans leur habitation, Moorea a ressenti également la secousse. Les autres archipels n’ont pas été concernés. Séisme isolé, pas de réplique et aucun danger dit le laboratoire géophysique de Pamatai. Le 16 mars 2008, il y avait déjà eu un séisme de magnitude 3 dont l’épicentre se situait à une profondeur de 10 km toujours dans cette même région de Teahitia. Vous avez été sages, vous aurez droit à une petite carte du volcan Mehetia et des volcans sous-marins.

Grande nouveauté pour les collégiens le lendemain : tout le monde en uniforme ! De la 6e à la 3e. Les dents ont grincé, certains ont parlé des droits de l’homme bafoués. Les requêtes de parents d’élèves visant à empêcher l’uniforme à l’école ont été rejetées par le Tribunal administratif. Une tenue 700 FCP (5,87 €), les parents des élèves boursiers recevront 3000 FCP (25,14 €). Je vous rassure tout est fabriqué en Chine. Hein ? La Chine, vous disiez ? « Pour acheter les nouveaux linges (habits), mes filles commandent plutôt sur Internet en surfant sur un site français, dit une mère de famille parlant des dépenses pour la rentrée des classes ».

Que de victoires ! Les rameurs polynésiens gagnent toutes les courses, sur 200 m, sur 500 m, sur…, sur… Sonnez trompettes, résonnez tambours à Nottingham. Grâce au soutien personnel du milliardaire australien Clive Palmer, grand ami du président du gouvernement polynésien soi-même, sous la houlette du ministre de l’Éducation, des Sports, etc., les athlètes du Fenua ont tout raflé. Ce succès sportif anime la compétition entre Tavini (Indépendantiste) et Tahoera’a (autonomiste) qui concourent dans la discipline verbale ! Oscar l’Indépendantiste : «Un pas vers les Jeux Olympiques, grâce à mon ami australien Clive Palmer, une vision de notre futur ». L’autonomiste Tahoera’a lui parle des nombreux déplacements des élus indépendantistes à Paris, sébiles à la main tandis que le prix de l’essence et du gasoil s’envole.

Le dragon boat vient de la Chine ancestrale. L’engouement pour cette discipline dure depuis une vingtaine d’année en Chine, Allemagne, Grande-Bretagne. Ce sport se pratique à 10 ou 20 rameurs auxquels s’ajoutent un barreur et un batteur, sur une embarcation de 12 m de long sur 1m20 de large, avoisinant les 300 kg. Ses adeptes rêvent d’en faire une discipline olympique. C’est sur la Tamise, my God, en marge des Jeux olympiques de Londres qu’a été organisé ce 10e championnat européen… Et c’étaient des Mao’hi qui ont tout gagné… je n’y comprends plus rien !

Changement à Paris, changement à Papeete. Tandis que Richard Didier, Haussaire, s’apprête à regagner Paris, son remplaçant Jean-Pierre Laflaquière débarque. Arrivé fin janvier 2011 sur le territoire, le Haut-commissaire de la République française était un homme affable et apprécié ici, mais il avait été conseiller pour l’Outre-mer du président Chirac. Il est donc remplacé par le préfet hors-cadre Jean-Pierre Laflaquière. On change tout à Paris, enfin un peu, ce sont donc 13 préfets qui ont été nommés en conseil des ministres, et ce nouveau Haussaire porte le numéro 13… C’est la valse à 13 temps, à 13 temps. Et cela sent comme une odeur d’indépendance…

À vos télés sur France 3 : le magazine Thalassa devrait programmer en décembre 2012 voire janvier 2013 une émission de 110 mn sur la Polynésie française. Le réalisateur Gil Kebaïli a mis en boîte plein d’images et de documents sur les Marquises et l’atoll de Raroia. Il a voyagé pendant 2 mois au fenua. Il a ainsi pu filmer les fêtes du Heiva aux Marquises, une chasse au cochon sauvage, tandis que sur l’atoll il a filmé un mariage, des coprahculteurs, une ferme perlière. Donc des tas d’images à découvrir prochainement sur France 3.

Hiata vous salue, portez-vous bien ; je cours préparer ma valise pour la Chine.

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Moulins de Kerouat

La Bretagne, ce n’est pas seulement la mer, c’est aussi la campagne profonde, isolée, autarcique jusqu’au début du 20ème siècle. Près du gros village de Commana dans les monts d’Arrée, un territoire de 12 hectares a été conservé tel qu’il était dans les années 1850. Il s’agit d’un « écomusée ». Cet établissement conserve les rapports techniques de l’homme avec la nature.

Une rivière détournée, un étang de régulation, et voici un bassin utilisable pour le génie des hommes. Dès le 17ème siècle, une quinzaine de bâtiments sont érigés ici à usage de moulins à farine, de tannerie, de culture d’herbes fourragères, de lavoir, de potager et d’élevage associés à toute habitation humaine avant l’ère moderne. Le tout est restauré, entretenu et exposé avec des explications qui n’ont pas la lourdeur du « pédagogisme » qui sévit trop souvent à l’E.Na (l’éducation nationale quand elle se croit). Ici, tout est simple et direct, ce qui est bien le moins pour des visiteurs dont les arrière-grands-parents étaient, ainsi que 80% des Français, paysans.

J’ai ainsi personnellement connu mon arrière-grand-mère, décédée alors qu’elle abordait presque un siècle révolu. Elle vivait en son grand âge comme elle avait toujours vécu, sur terre battue, tirant l’eau au puits dans la cour, l’électricité n’étant enfin installée que pour les dernières années de sa vie (ah, les vertus de lenteur du Monopole). C’était en une autre région qu’ici, mais les granges de Kerouat sont restées comme dans mon souvenir d’ailleurs.

L’étable et l’écurie n’ont pas changé. La maison à avancée de 1831 (l’époque de Jacquou le Croquant en d’autres lieux) comprend lit clos breton et vaisseliers de bois sombre. L’avancée, qui fait « riche » comme l’étaient nécessairement les meuniers, était l’endroit réservé aux repas, en retrait des lieux de passage. Le sol est dallé car les bovins, contrairement à ce qui était le cas chez mon arrière-grand-mère, ne vivaient pas dans le même bâtiment pour y communiquer leur chaleur. Le saloir en granit, vaste auge chère à saint Nicolas, rappelle que le cochon était un animal déjà fort élevé en Bretagne.

Un judicieux panneau explicatif montre que l’on cultivait volontairement plusieurs essences de bois autour des fermes bretonnes. Chacun était destiné à un usage particulier :

  • le frêne faisait de solides manches d’outils ;
  • l’orme faisait des charpentes, le plancher des charrettes et ses feuilles étaient un régal pour les cochons ;
  • le châtaignier servait de patate à l’automne, d’alimentation porcine l’hiver et son bois était utilisé en menuiserie ;
  • l’épine annonçait le printemps quand elle fleurissait et servait à faire des fagots d’allumage pour le feu comme… à étendre le linge ;
  • le houx permettait de ramoner la cheminée avant de la décorer pour Noël ;
  • l’osier était utile pour faire des liens et tresser des paniers ou des casiers à écrevisses ;
  • de même que le saule, dont le bois chauffait en plus parfaitement la poêle à crêpe, donnant des galettes dorées à souhait et point brûlées ;
  • pommier, cerisier, poirier, laurier servaient aux alcools et à la cuisine ;
  • le camélia blanc fleurissait les mariages et les fêtes religieuses.

On le voit, le « respect » de la nature était surtout un usage intelligent de ce qui poussait « naturellement ». L’homme s’ébattait dans son entour comme un poisson dans l’eau, il l’aménageait imperceptiblement, mais avec l’acquis des millénaires depuis la révolution néolithique. Il « gérait » les alentours de son nid.

Un autre panneau décrit finement les « cercles d’activités » qui s’étendaient, de façon concentriques, autour des fermes.

Le premier cercle, privatif, est celui des bâtiments et dépendances auxquels on accède sans presque se mouiller. C’est le domaine privilégié des petits enfants et de l’activité des mois d’hiver.

Un second cercle est constitué par l’ensemble des parcelles qui délimitent le village avant les champs cultivés. C’est un enchevêtrement de clos, de vergers, de haies, de chemins, d’aires à battre, de puits, de fontaines, de four à pain, de calvaires. Cet espace est semi-privatif et fait l’objet de droits d’usage bien réglementés. Il protégeait aussi le village des vents dominants et permettait à chacun de faire ses besoins sans trop s’éloigner (eh oui, le tout à l’égout n’existait pas !). C’est aussi le domaine des fleurs « sauvages », qui trouvent dans cette protection un terrain propice (pervenches, primevères, pissenlits, pâquerettes…), et le domaine des oiseaux « familiers » qui trouvent toujours du grain à becqueter été comme hiver tout en protégeant du trop d’insectes et de vers (merles, pinsons, rouges-gorges, chardonneret, fauvette, mésanges, pigeons). Parfois étaient installées les ruches. Ce cercle est aussi celui des vieux qui n’aiment pas s’éloigner trop des habitations.

Le troisième cercle est celui des récoltes : champs cultivés, prés au bétail, bois de coupe, taillis, landes. C’était déjà le territoire semi-sauvage, celui où « la main de l’homme mettait à peine le pied », selon l’expression d’un Dupont d’Hergé. Le domaine des adultes et des enfants dès dix ans, laboureurs, bûcherons, bergers.

Voici donc une culture ancrée dans l’histoire et présentée de façon attrayante, double rareté digne d’être observée. Les moulins de Kerouat ne sont plus aujourd’hui habités ni utilisés, il s’agit donc d’un « spectacle » mais, à l’inverse de Disneyland et équivalents, ce lieu n’est pas une reconstitution en chambre ni la mythification d’un âge d’or. Il a la vérité de son passé, il est un beau musée de plein air pour expliquer la campagne aux ignorants des villes. De la culture qui enrichit l’âme – que l’on me pardonnera de préférer à celle, éphémère et m’as-tu-vu, des histrions.

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Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit

« Ca a débuté comme ça » est la première phrase du roman. Elle vous dit tout sur le reste : le fil de l’eau qu’est la vie, « voyage dans l’hiver et dans la nuit », le destin qu’est le « ça » contre lequel on ne peut rien, le style populaire qui véhicule l’émotion avant la raison. « Ça a débuté comme ça », par la guerre, la grande, l’absurde – stupidement célébrée ces dernières années ; puis l’arrière et ses fumiers profiteurs et ses poules avides de sexe ; puis la colonie où l’on envoie les ratés, les vicieux, les petits maîtres ; puis l’Amérique, ce rêve de modernité où la machine va plus vite mais n’a pas plus de cœur ; enfin la banlieue, autour de Paris, la « zone » où survivent les pauvres, les petits, les sans grades, dans la boue, le voisinage haineux et la peur de manquer. Et toujours Robinson, le double caricatural de Céline, solitaire et démerde comme le naufragé de Defoe. « Ça a débuté comme ça » et ça finit par un remorqueur sur la Seine, qui emporte tout, « qu’on n’en parle plus ». C’est la dernière phrase du livre.

Mais entre temps, on en a parlé, sur 504 pages Pléiade. Avec crudité et fine observation, avec cynisme et moments d’émotion, avec amertume et rire. La vie, quoi. Le ‘Voyage’ est l’Odyssée moderne avec la guerre industrielle comme Iliade, qui dissout les héros dans la crasse et les puces. Céline n’est pas un voyeur misérabiliste qui jouit de l’indigence des autres en se croyant au-dessus. Céline n’est pas Zola. Il en est, lui, de ce peuple petit pauvre, issu d’un couple d’employé subalterne aux assurances et d’une boutiquière en mode du passage Choiseul. Céline s’est arrêté au certificat d’études, à 12 ans. Il n’a repris l’école qu’après la guerre, passant un bac oral – light – pour anciens combattants et parce qu’on manquait cruellement d’instruits après les millions de morts. Il a fait l’école de médecine, la voie de l’enseignement professionnel, avant de finir son diplôme en faculté. Il n’a jamais soigné que les pauvres, Céline, et quelques mois les ratés de Sigmaringen. Le peuple, il connaît : il en est. Peut-être est-ce justement parce qu’il n’est pas un intello bourgeois intégré au « milieu » littéraire avec plein de copains médiatiques qu’il a raté le prix Goncourt en 1932 pour ‘Voyage’. La mode l’a attribué à un écrivaillon dont on s’est empressé d’oublier jusqu’au nom, tant les prix récompensent rarement le talent mais plutôt la lèche. On lit encore ‘Voyage au bout de la nuit’, il y a belle lurette qu’on a oublié ‘Les loups’, prix Goncourt 1932 !

Le populo, Louis-Ferdinand Céline le sait par cœur. « Ils ne seraient dans un autre quartier ni moins rapaces, ni moins bouchés, ni moins lâches que ceux d’ici. Le même pinard, le même cinoche, les mêmes ragots sportifs, la même soumission enthousiaste aux besoins naturels, de la gueule et du cul, en referaient là-bas comme ici la même horde lourde, bouseuse, titubante, d’un bobard à l’autre, hâblarde toujours, trafiqueuse, malveillante, agressive entre deux paniques » p.346.

Ils habitent loin du centre, où c’est pas cher et où on dépense rien pour eux. « Les ébauches des rues qu’il y a par là, des rues aux lampadaires pas encore peints, entre les longues façades suintantes, aux fenêtres bariolées des cent petits chiffons pendant, les chemises des pauvres, à entendre le bruit du graillon qui crépite à midi, orage des mauvaises graisses. Dans le grand abandon mou qui entoure la ville, là où le mensonge de son luxe vient suinter et finir en pourriture, la ville montre à qui veut le voir son grand derrière en boites à ordures » p.95. En métropole ou aux colonies, même combat : « La négrerie pue sa misère, ses vanités interminables, ses résignations immondes ; en somme tout comme les pauvres de chez nous mais avec plus d’enfants et encore moins de linge sale et moins de vin rouge autour » p.142.

Toute leur vie, leur énergie, leurs désirs, sont brimés par les maîtres et leur condition vile. « Presque tous les désirs du pauvre sont punis de prison » p.200. Ils sont dressés dès l’enfance, les pauvres. « Ils ne savent pas encore ces mignons que tout se paye. Ils croient que c’est par gentillesse que les grandes personnes derrière les comptoirs enluminés incitent les clients à s’offrir les merveilles qu’ils amassent et dominent et défendent avec des vociférants sourires. Ils ne connaissent pas la loi, les enfants. C’est à coup de gifles que les parents la leur apprennent la loi et les défendent contre les plaisirs » p.312. Alors ils se vengent dès qu’ils peuvent, les pauvres, sur les autres qu’ils jalousent, sur les plus faibles qu’eux surtout. Comme aux colonies.

La philosophie du pauvre est le destin, le renoncement. « Sa formidable résignation l’accablait, cette qualité de base qui rend les pauvres gens de l’armée ou d’ailleurs aussi faciles à tuer qu’à faire vivre. Jamais, ou presque, ils ne demanderont le pourquoi les petits, de tout ce qu’ils supportent » p.151. Ceux qui ont les moyens, sur cette terre, sont des demi-dieux. « Les riches n’ont pas besoin de tuer eux-mêmes pour bouffer. Ils les font travailler les gens comme ils disent. Ils ne font pas le mal eux-mêmes, les riches. Ils payent. On fait tout pour leur plaire et tout le monde est bien content. (…) Les femmes des riches bien nourries, bien menties, bien reposées elles, deviennent jolies. Ca c’est vrai. Après tout ça suffit peut-être. On ne sait pas. Ca serait au moins une raison pour exister » p.332.

D’où le divorce entre la cucuterie d’idéal pour les riches et la condition réelle du peuple : « Pour Lola, la France demeurait une sorte d’entité chevaleresque, aux contours peu définis dans l’espace et le temps, mais en ce moment dangereusement blessée et à cause de cela même très excitante. Moi, quand on me parlait de la France, je pensais irrésistiblement à mes tripes, alors forcément, j’étais beaucoup plus réservé pour ce qui concerne l’enthousiasme » p.52. Quelle çonnerie, la guerre ! disait l’autre. Le peuple est réaliste, naturel, il ne se grise pas de mots. « L’esprit est content avec des phrases, le corps c’est pas pareil, il est plus difficile lui, il lui faut des muscles. C’est quelque chose de toujours vrai un corps » p.272. Céline est matérialiste, pas idéaliste ! « L’âme, c’est la vanité et le plaisir du corps tant qu’il est bien portant, mais c’est aussi l’envie d’en sortir du corps dès qu’il est malade ou que les choses tournent mal » p.52

La vérité est dans la matière et l’amour « vrai » veut toucher, peloter, baiser. Telle Sophie la Slovaque : « Élastique ! Nerveuse ! Étonnante au possible ! Elle n’était diminuée cette beauté par aucune de ces fausses ou véritables pudeurs qui gênent tant les conversations trop occidentales. (…) L’ère de ces joies vivantes, des grandes harmonies indéniables, physiologiques, comparatives est encore à venir… (…) Permission d’abord de la Mort et des Mots… Que de chichis puants ! C’est barbouillé d’une crasse épaisse de symboles, et capitonné jusqu’au trognon d’excréments artistiques que l’homme distingué va tirer son coup… » p.472. La nature est vigoureuse et saine, le naturel est beau et désirable. Les nègres musclés et leurs femmes aux seins nus sont « tout juste issus de la nature si vigoureuse et si proche » p.150. En Afrique, la nature a plus de force qu’ailleurs, racine de la fascination de Céline pour le biologisme nazi. « La végétation bouffie des jardins tenait à grand-peine, agressive, farouche, entre les palissades, éclatantes frondaisons formant laitues en délire autour de chaque maison » p.143 « L’infinie forêt, moutonnante de cimes jaunes et rouges et vertes, peuplant, pressurant monts et vallées, monstrueusement abondante comme le ciel et l’eau » p.163. Éternel retour pour ces « bestioles du bled qui se coursent pour s’enfiler ou se bouffer, j’en sais rien » p.164.

L’amour romantique est l’opium du pauvre, le film des pulsions, la guimauve commerciale. Les pauvres piquent ça aux bourgeois, selon la « civilisation des mœurs » du haut vers le bas, chère à Norbert Elias. « Les trucs aux sentiments que tu veux faire, veux-tu que je te dise à quoi ça ressemble, moi ? Ca ressemble à faire l’amour dans les chiottes ! » p.493. L’Hamour, disait Flaubert par dérision, « l’amour, c’est l’infini mis à la portée des caniches » dit Céline p.8. Montherlant écrira ses ‘Jeunes filles’ pour dire pareil et Matzneff ses ‘Lèvres menteuses’.

Bien sûr, l’émotion existe sous les oripeaux idéalisés. Les mots ne disent pas le vrai. Le film n’est pas la réalité. La vacherie est première mais parfois l’être se révèle. « Je l’avais bien senti, bien des fois, l’amour en réserve. Y en a énormément. On peut pas dire le contraire. Seulement c’est malheureux s’ils demeurent si vaches avec tant d’amour en réserve, les gens. Ça sort pas, voilà tout. C’est pris en dedans, ça reste en dedans, ça leur sert à rien. Ils en crèvent en dedans, d’amour » p.395. « Moi (…) un Ferdinand bien véritable auquel il manquait ce qui ferait un homme plus grand que sa simple vie, l’amour de la vie des autres » p.496. Ce qu’ont Alcide le sergent colonial qui trafique pour payer la pension chez les sœurs d’une nièce de dix ans ; et Molly la pute américaine, qui entretient les amants auxquels elle tient.

Malgré le ton et le cynisme, il y a du rire chez Céline. Rien que les noms donnés aux bateaux ou lieux-dits des colonies valent leur pesant de sexe. Il est partout présent, depuis le bateau Amiral Bragueton (braguette) suivi du Papaoutah (empapaouter), de la compagnie Pordurière (amalgame de portuaire et ordurière), jusqu’à San Tapeta (tapette), lieu d’où il est embarqué sur la galère Infanta Combitta (con-bite)… Le boy noir est « lascif comme un chat » (p.143), les petits nègres aiment à se faire caresser sous la culotte (p.167) – tout comme Bébert, neveu de concierge du Raincy, sept ans, qui « se touche » : « C’est pas vrai, c’est le môme Gagat qui m’a proposé… » p.244. Gaga, bien sûr, c’est comme ça que ça rend, l’astiquage de tige. Céline appellera son chat Bébert, du nom du môme qu’est crevé d’une mauvaise typhoïde, en 1944. Il y a encore le curé Protiste, au nom d’unicellulaire ou le chercheur biologiste russe Parapine… Saint Antoine, alias San Antonio, le patron des cochons, s’en est inspiré. Lire encore la description en Amérique du dieu Dollar (p.193) auquel on va rendre ses dévotions à mi-voix devant un minuscule guichet, comme au confessionnal. Avant d’aller déféquer dans les cathédrales à merde, en sous-sol, où chacun attend son tour à la queue pour se déculotter.

C’est un moment d’humanité carabinée que ce Céline là.

Louis-Ferdinand Céline, Romans 1 – Voyage au bout de la nuit – Mort à crédit, édition  Henri Godard, Pléiade Gallimard 1981, 1582 pages, €54.63

Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit, 1932, Folio plus classiques, 614 pages, €8.93

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Salon Destinations nature aujourd’hui et demain

A la Porte de Versailles à Paris, hall 4, se tient vendredi 25, samedi 26 et dimanche 27 mars le 27ème salon destinations nature. Il y en a pour tous ! Du senior avancé au gamin, du solitaire au groupe, en passant par les couples, les amis ou la famille entière. Du raid et du bien être, de l’aventure hard et du spa cool, de la montagne et de la gourmandise, de la chaussure ou du vélo. Et même de l’escalade et du kayak. On trouve tout au printemps du voyage.

Cette année est celle de la forêt. ONF et IGN sont en première ligne, suivis des agences de circuits découvertes et pédestres. Les Pyrénées sont à l’honneur avec l’agence La Balaguère.

Le salon est sympa, vous pourrez avoir des informations, suivre des films et conférences, prendre un air de vacances, choisir votre destination et goûter les produits du terroir même les plus exotiques. Il y a divers ateliers pour petits et grands tels que la mécanique du VTT, la marche nordique, la découverte de l’huile d’olive, lire les cartes avec l’IGN, les chauve-souris avec l’ONF…

Intellos, vous connaissiez les ‘Cahiers de l’Herne’ ? Voici les ‘Cahiers de l’âne’ qui vous fera découvrir les vertus d’Aliboron. Quelques spécimens broutent leur foin dans un enclos odorant du salon et viennent faire caresser leur fourrure rêche entre les deux oreilles.

Avec le Japon, son nuage et son chauffage-centrale usagé, le bio est à l’honneur.

Les paysans aussi.

Le cochon catalan n’est pas atteint et fort savoureux.

Les punchs créoles sont appétissants, comme les jeunes dames qui les servent bien frappés !

Les gamins amenés ici par le système scolaire s’intéressent à tout ce qui est sport. Notamment fabriquer un cerf-volant.Evidemment le mur d’escalade où ils admirent les grands.

Ou l’élan bien chaussé du Vieux campeur. 

Mais il s’agit de tout recycler, hein !

Avec Chemins du sud vous irez à pied en France, au soleil, ou dans les pays méditerranéens. Deux Français sur trois randonnent en France « pour se maintenir en forme » et « passer un moment avec ses proches », disent-ils. L’ONF a inventé une formule de rando tout compris qui valorise son savoir-faire dans les paysages méconnus et préservés, dans le respect de l’environnement avec ses randonnées Retrouvance.

Avec Terre d’aventures, vous irez partout. En France, en Europe et ailleurs. Avec 10% de réduction salon sur l’Islande, le Maroc et le Népal. Faites vite pour vous préinscrire !

De nombreux catalogues et documents vous diront tout sur tout.

Et pour les casaniers, ou ceux qui veulent en rêver avant et après, outre les guides Lonely Planet ou Petit Futé, vous avez aussi pléthore de romans de voyages !

Salon Destinations Nature, métro porte de Versailles, hall 4

Tarif normal 8€, 5€ pour les moins de 18 ans et les étudiants. 5€ aussi pour ceux qui prennent leur billet par internet. Gratuit jusqu’à 12 ans.

Le dimanche 27 :

  • rando dans Paris (entrée libre) par les randonneurs de la Sarthe, départ 10h15 porte de Pantin
  • randos diverses dans Paris pour tous les tempéraments, par la Fédération française de randonnée (FFR) Île-de-France site internet ou 01 48 01 81 51
  • rando rollers et coquillages (mineurs accompagnés et adultes), départ 14h30 place de la Bastille. 
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