Mer et marins

Canal de Panama

Le pilote du Canal de Panama a apporté avec lui des souvenirs de Panama, des vrais, il n’y en aura pas pour tout le monde ! Ce sont des souvenirs « authentiques » de Panama, précipitez-vous sur le pont 10 de 7h30 à 14h. La station de contrôle du Canal avisera le Celebrity Infinity par radio de l’heure à laquelle nous entrerons dans le canal, en fonction du nombre de navires en instance. Le pilote est arrivé depuis 5h45. Et voilà le programme des réjouissances. Pour l’écluse Miraflores 7h45-9h05 ; pour l’écluse Pedro Miguel 9h35-10h25 ; navigation en Gamboa 11h25 ; écluse Gatun 13h50-16h05. Temps variables, distance jusqu’à Colon, 80 miles nautiques. La traversée totale du canal prend 9 heures.

CANAL DE PANAMA

Un peu d’histoire sur ce canal. Son concept date du début du 16ème siècle quand le roi Charles d’Espagne avait commandé une étude pour trouver un chemin maritime plus rapide avec le Pérou et l’Équateur. Les Européens étaient fort intéressés à découvrir des routes commerciales plus courtes et plus rapides. Le chemin de fer du Panama a été ouvert dans les années 1850. En 1880, le creusement du canal commença sous l’impulsion du Français Ferdinand de Lesseps grâce à une levée de fonds géante à la Bourse de Paris. Les maladies, paludisme, fièvre jaune ont eu raison des premiers travaux. On estime à 27 500 le nombre d’ouvriers qui périrent pendant cette construction. Le travail fut terminé, après l’échec de cette tentative, par les États-Unis sous la direction de G.W. Goethals et le canal ouvrit en 1914. Les Américains pensaient à un canal au Nicaragua, projet actuellement mis en œuvre par les… Chinois ! En 1903, Panama indépendant accorda aux USA un contrôle controversé de 99 ans pour construire et administrer le canal. En 1977, un accord rendit le canal au Panama à la fin de 1999.

panama canal ecluses

Les écluses sont spectaculaires, larges de 33,53m et comportent une longueur utilisable de 304,8m. La profondeur varie mais est de 12,55m minimum dans la partie sud des écluses Pedro Miguel. Les écluses vont par paires. Chaque chambre est remplie avec 101 000 m3 d’eau qui entre par un réseau de conduites sous chaque chambre. Les navires sont tractés par les « mulas » petites locomotives sur rails circulant sur les murs des écluses. Les bateaux ayant la plus grande taille admise dans le canal sont désignés par l’appellation « Panamax » mais un nombre croissant de navires dépassent cette taille et sont appelés « post-Panamax ». L’avenir passe par des travaux d’élargissement lancés en 2007. Ce seront deux nouveaux jeux d’écluses : une à l’est des écluses de Gatún en place, l’autre au sud-ouest des écluses de Miraflorès, chacune desservie par un canal d’approche.

panama canal les mules

Actuellement, si l’on vient du Pacifique, à partir des bouées qui marquent l’entrée du golfe de Panama, les navires parcourent 13,2 km jusqu’aux écluses de Miraflores en passant sous le pont des Amériques. Le système des écluses de Miraflores fait 1,7 km de long avec un dénivelé de 16,5m à mi-marée. Ensuite le navire entre dans le lac artificiel de Miraflores qui fait 1,7km et se trouve à 16,5m au-dessus du niveau de la mer. L’écluse de Pedro Miguel est la dernière partie de la montée sur 1,4 km avec un dénivelé de 9,5m. La coupe Gaillard fait 12,6km de long à une altitude de 26m et passe sous le pont du Centenaire. Le Rio Chagres, cours d’eau naturel est amélioré par un barrage sur le lac Gatún, il parcourt 8,5km vers l’ouest pour se jeter dans le lac Gatún. Le lac Gatún est un lac artificiel formé par le barrage Gatún, emprunté par les navires sur 24,2km. Les écluses de Gatun comportent 3 étapes sur 1,9km de longueur et ramènent les navires au niveau de la mer. Un canal de 3,2km mène côté Atlantique. Le Bahia Limon (la baie citron) est un immense port naturel qui procure un mouillage pour les navires en attente de transit et fait 8,7km jusqu’à la digue extérieure. Le transit total est de 76,9km.

panama canal pousseurs

Je ne possède pas de données récentes pour vous parler argent. Sachez cependant que les plus petits navires en fonction de leur longueur paient des taxes qui, en 2006, allaient de 500 $ (longueur inférieure à 15m) à 1500 $ (supérieure à 30m). Pour les porte-conteneurs, les droits dépendent du nombre d’EVP. Par exemple, au 1er mai 2007, 54 $ par conteneur, en sachant qu’un porte-conteneur Panamax peut en transporter jusqu’à 4 000. La taxe la plus élevée aurait été payée le 30 mai 2006 par le porte-conteneur Maersk Dellys pour 249 165 $ ; la moins élevée par l’aventurier américain Richard Halliburton parcourant le canal à la nage en 1928 pour 36 cents. La moyenne est de 54 000 $.

panama canal pont du centenaire

Un nouveau projet d’envergure est entamé. On apercevait du bateau les engins de chantier, les grues au travail. Deux nouveaux jeux d’écluses : une à l’est des écluses de Gatun en place, l’autre au sud-ouest des écluses de Miraflores, chacune desservie par un canal d’approche. Les nouvelles écluses comporteront des portes coulissantes, doublées par sécurité, et seront longues de 427m, larges de 55m et profondes de 18m, permettant le transit de navires larges de 49m, d’une longueur de 386m et d’un tirant d’eau de 15m, ce qui correspond à un porte-conteneurs de 12 000 EVP.

panama canal travaux agrandissement

Les Chinois sont au Nicaragua pour construire un canal encore plus gigantesque afin d’y faire passer des bateaux « Valemax » de 18 000 EVP et jusqu’à 400 000 tonnes. Le Nicaragua a lancé les travaux de son canal controversé avec l’ambition de concurrencer celui de Panama. Le pays persiste dans son choix, malgré les doutes sur ce projet mené par un groupe chinois et critiqué par la population pour son impact écologique. Ce chantier pharaonique, est estimé à 50 milliards de dollars (cinq fois le PIB du pays) est le projet le plus ambitieux d’Amérique latine. Longueur du canal : 278 km (trois fois plus que celui de Panama), profondeur : 30 m, largeur : entre 200 et 500 m, nombre d’écluses : 12, durée de la construction : 5 ans, nombre de travailleurs : 50 000. Les risques environnementaux : proximité du volcan Conception, le lac Cocibolca (8 264 km2) est la principale réserve d’eau douce d’Amérique centrale. Il y aurait une possible salinisation et détérioration de la qualité de l’eau, 80 000 personnes boivent l’eau du lac et c’est aussi l’habitat naturel de 40 espèces de poissons…

Hiata de Tahiti

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Croisière au Guatemala et Costa Rica

En haute mer, est au menu de ce jour la préparation du poisson, le tango, le massage thaï, une conférence sur le canal de Panama, casino, dégustation de vin payante, séminaire sur la tanzanite (deuxième plus rare pierre précieuse au monde) et vente… Vente d’ambre. Au théâtre on retrouve le violoniste Sean Riley accompagné par le pianiste Brooks Aehron avec un excellent programme allant de la Méditation de Thaïs à La liste de Schindler en passant par Romance de Beethoven entre autres. Le soir le théâtre accueillera James Stephens III comique.

costa rica puntarenas

Puntarenas, Costa Rica 8h à quai, retour pour 19h45 et départ à 20h. La distance jusqu’au canal de Panama est de 470 milles nautiques. Nous avons retenu et payé une excursion « Aerial Tram Rainforest Adventure » qui nous permettait d’embrasser la canopée. Seule restriction, il ne fallait pas peser plus de 170 kilos… L’excursion est annulée pour une obscure raison, peut-être trop de personnes au-delà de 120 kg ? Tant pis, il faut se résoudre à aller dépenser quelques dollars dans les boutiques sises au bout de l’allée menant au bateau.

costa rica comme nous aurions aime

Puntarenas, contraction de Punta da Arena (pointe de sable). La péninsule est longue de 6 km et large de 200 à 600 m, reliée au continent par un isthme dans le golfe de Nicoya. Selon les archives, le site de Puntarenas fut utilisé comme port d’embarquement et de débarquement pour la première fois le 17 mai 1765 par Miguel Antonio de Unanué qui était alors propriétaire de l’exploitation agricole connue aujourd’hui sous le nom de « El Palmar ». Ce n’est qu’en 1797 qu’est construite la première douane donnant à ce port son caractère officiel. La Paseo de los Turistas longe la plage jusqu’à la Punta, c’est la promenade des touristes où l’on trouve des étals présentant de petits souvenirs : t-shirts avec animaux typiques du Costa-Rica, cigares, objets en bois…

guatemala tissage

Sur le bateau : soccer, basket, fitness, tester les vins italiens, tester le Jameson, tester le porto, casino, montres à vendre. Et ce soir, au théâtre, magie (peut-être découvrirons-nous comment faire disparaître la facture du bord ?) En haute mer et pendant la nuit nous vieillirons encore d’une heure ! Quel sera le programme ? Achats, pas chers disent-ils ! Voyez les réductions, 10% sur les parfums et cosmétiques, jusqu’à 60% sur les bijoux, jusqu’à 75% sur les montres, c’est même le capitaine du bateau qui donnera le top départ de ces « soldes ». Une énième conférence sur le Canal de Panama, on y arrive. Une présentation des futures croisières ; de la musique, encore les stars de l’Infinity au théâtre ce soir pour un show des années 70, des cours de danse et, pour le repas du soir mettez votre tenue de ville ou aller vous régaler des restes du midi au buffet. Il y aura aussi des sushi, du stir fry, des casses croûtes pour ceux qui refuseront de s’habiller, hou ! Et puis vous qui vous vautrez sur les chaises longues du pont 11, vous êtes priés de rentrer vos ventres et de ne pas empiéter sur la piste de jogging, na, c’est écrit dans le Celebrity today. Ceux qui monopolisent les chaises-longues et lits des ponts empruntent peu la piste de jogging, ou alors ils ont tellement grossi qu’ils débordent de leur canapé !

COSTA RICA

Puerto Quetzal, Guatemala, 7 h du matin, le bateau est à quai. Le Guatemala, ce sont des vestiges mayas, de petits villages indiens aux marchés colorés, des lacs, des villes coloniales préservées, la jungle impénétrable du Peten. Puerto Quetzal est le plus grand port guatémaltèque sur l’océan Pacifique. Antigua, érigée capitale par les Espagnols, déchue de son rang par les séismes du 18ème siècle (1773/1776) doit sa résurrection à la mise en valeur de son architecture coloniale de style baroque et Renaissance espagnole entièrement reconstruite. Elle se situe à environ 90 minutes de bus du port. Pour ceux qui ont choisi les sorties, tous à bord à 17h45, départ de l’Infinity à 18h. Direction le Costa Rica et Puntarenas dans 468 milles nautiques.

guatemala femme

Pour les autres, un petit tour en ville où un charmant défilé de Guatémaltèques en costumes régionaux nous occupe. Les couleurs vives des vêtements et nappes attirent le touriste. Sur le bateau concours de poker, fitness, musique disco, dégustation de vins. Au théâtre ce soir : iBroadway avec les « stars » de l’Infinity. Hum ! Star est peut-être un mot excessif…

Hiata de Tahiti

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Croisière au Mexique

Nous partons pour le Mexique, Cabo San Lucas à 748 milles nautiques. Et déjà, on nous invite à visiter les boutiques de luxe, le casino, à tester le porto, les liqueurs, en faisant chauffer la carte bleue… Oh ! Juste une signature sur le bon de commande avec présentation du sea-pass. Olé ! Wifi partout sur le bateau connectez-vous, c’est facile, vous créez un compte et vous passez bien entendu d’abord par la case départ « caisse » (59 $ pour 90 minutes, ou 109 $ pour 240 minutes, ou encore 429 $ pour 1680 minutes), ce n’est pas cher (vous ne paierez qu’en fin de croisière !) et ça peut rapporter gros.

Durant la nuit nous avons vieilli d’une heure. Ce premier jour en mer on propose du blabla sur les deux escales au Mexique, une présentation des émeraudes colombiennes, un cours de tango, du bingo, des bijoux en vente avec une réduc de 10 $, du fitness, etc. Et ce soir, pour aller casser la croûte au resto, grand tralala Formal (tenue de gala) !

cabo san lucas

A 11 heures, l’Infinity arrive à Cabo San Lucas, Mexique. Cette petite ville est située dans le sud de la péninsule de la Basse-Californie. Assez peu de sites touristiques dans cette agglomération de 56 000 habitants, des formations rocheuses, dont El Arco à Lands End constitue une particularité : une roche de granit dotée d’une voûte.

cabo san lucas arche

Baja (ancien nom de Cabo San Lucas) a été aperçue en 1537 par le pilote de Herman Cortes, Francisco de Ulloa, après la conquête de l’Empire Aztèque. Cette découverte ne valait que peu car sans or, ni argent, et un très faible potentiel agricole. Toujours la même bouffe ennuyeuse et fade aussi bien au buffet qu’au restaurant Treillis, dont le chef aurait été « gagneur du prix Emmy Bravo ». Bof ! Ce ne serait pas un truc qu’on trouve dans les pochettes-surprises ? Une attraction sur le pont : un sculpteur de fruits et légumes, très spectaculaire. Ce soir au théâtre, Gary Arbuthnot, flûtiste irlandais aussi à l’aise dans le répertoire classique, pop, jazz. Mais attention, attention ! Le Norovirus est à bord avec ses maux d’estomac, sa diarrhée, ses vomissements, si vous avez ces symptômes filez chez le médecin.

puerto vallarta statues

Nous avons encore avancé nos montres d’une heure et sommes en vue de Puerto Vallarta, toujours au Mexique. Ici on peut « magasiner ». La ville est un grand port et une destination touristique importante. Une ville de 165 800 habitants lieu de tournages de la Nuit de l’iguane (1964), le Magnifique (1973), Predator (1987), Vengeance (1990) et le Chihuahua (2008). Départ du bateau direction Puerto Quetzal au Guatemala, distant de 1042 milles nautiques.

puerto vallarta acrobatie

Un événement bien apprécié, le concert ce soir par le pianiste Brooks Aehron. Sinon, expo d’art, blackjack, vente de diamants, dégustation de Jameson (des frais s’appliquent). En mer, il faut s’occuper ! Alors au programme de ce jour on apprendra comment acheter une émeraude, découvrir l’Europe sur Celebrity, tournoyer au blackjack, nourriture et vins comment apprendre à les marier, il y a toujours des forfaits boissons à vendre, Kerastase pour les cheveux, lavez-vous souvent les mains, familiarisez-vous avec les lignes directives sur le bateau, fitness, et au théâtre Colleen Williamson. C’est quand même une rude journée, surtout quand on n’a rien à faire !

En mer, et ce soir tenue de gala obligatoire dans tous les restaurants. Pour ceux qui ne peuvent pas quitter leur pantalon ou leur jupe chiffonnés et leur tennis de marque…, direction l’Ocean View Cafe, le resto-self pas snob du tout. Mais il y a d’autres distractions durant la journée, comme par exemple un tournoi de machines à sous, l’histoire des œufs de Fabergé, comment préparer un steak (j’en tremble d’avance !), danser avec les officiers, préparer la traversée du Canal de Panama, basket. Après la guitare et voix de Charlie Butler, il y aura au théâtre Colleen Williamson (chanteuse) et Gary Arbuthnot (flutiste), ensuite du karaoké, et une dégustation (payante) du vin de porto à 22 heures… histoire de bien dormir ?

Hiata de Tahiti

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Croisière tiroir-caisse

Hiata quitte Tahiti pour quelque temps. Péripéties…

Une envie de croisière pour la fin de l’année avec un grand nombre de jours en mer, ce serait bon pour la santé de V. Des heures à respirer l’air du large, quelques excursions mais pas trop, un départ de la côte pacifique des USA, cela devrait nous satisfaire. L’Internet nous fournit des exemples de croisières, trop courte, trop chère, pas assez de jours à passer dans les fauteuils du pont. Enfin un miracle, nous tombons d’accord sur une croisière qui pourrait convenir. Nous sommes trois, H.M. et V., femmes « célibataires », fin octobre. C’est bon pour toutes ? Bien. Renseignons-nous plus en détails maintenant.

Mais voilà qu’un invité surprise se propose de venir envahir la maison de M. pour assister à un championnat de pétanque. Oh ! Il ne pourrait pas se trouver un autre gîte ? L’individu, un citoyen français vivant chez les Kiwis ça insiste, ça grogne, ça menace… M. cède et nous devons reporter notre croisière. Le représentant du croisiériste est domicilié à Monaco (hum !) : les sociétés paient moins d’impôts au pays du Prince ? Ce sera San Diego-Miami avec passage du Canal de Panama.

bateau celebrity infinity

Monaco qui vit sous régime princier ne sait pas qu’à 18 000 km de la principauté il y a un décalage horaire de 12 heures. On nous appelle en pleine nuit pour demander quand nous paierons… mais nous ne sommes pas encore inscrites ! On nous vend la croisière, les hôtels, les avions, enfin tout, il faut se décider tout de suite car « il n’y en aura pas pour tout le monde », c’est Carrefour qui dit cela ! La croisière ? On en veut bien mais pour le reste nous ferons les réservations nous-mêmes. A l’autre bout c’est déjà nettement moins aimable ! S. est notre « Conseillère », si nous avons besoin de… et de… elle est « à notre disposition ». En février 2014, nous lui envoyons un mail pour avoir des précisions sur telle et telle chose. Nous sommes en janvier 2015 et toujours pas de réponse. Allo Monaco ? vous êtes là Monaco ? Ben non, ils ont dû déménager. Seulement après avoir payé la somme demandée, Monaco nous envoie, toujours par courriel confirmation de notre réservation de croisière San Diego-Miami sur l’Infinity avec obligation de payer le reste avant telle date. Comme dit le Hollandais « Eerst betalen, dan kijken » : casque d’abord, on verra ensuite…

 bateau celebrity infinity grand escalier

Nous nous mettons en quête d’avions pour aller de Tahiti aux USA (ce n’est pas tous les jours !) pour ensuite voir si un ami américain peut nous mener en voiture un week-end à San Diego. Nous y dégotons un petit hôtel sympa afin d’y demeurer quelques jours avant l’embarquement. Et pour le retour, un hôtel à Miami et un vol pour nous ramener chez J. où nous attendrons l’avion de retour pour le fenua. Cela ne se déroule pas trop mal. Le solde réglé, nous attendons les instructions pour envahir les États-Unis. Allo S. de Monaco, y-a quelqu’un ? Mince alors, ils ont rayé Monaco de la liste des pays à décoloniser comme au fenua ? J’apprends en lisant les news que la Princesse attend des jumeaux. Félicitations au jeune couple. Au moins des bébés qui auront de quoi se nourrir et vivre décemment. Mais toujours aucune nouvelle de S. Aurait-elle déménagé, serait-elle malade, aurait-elle quitté cette société pour une meilleure place ? Que de questions demeurées sans réponse ? Nous sommes en octobre 2014 maintenant…

bateau celebrity infinity pont 10 piscine et spa

Après avoir soldé la croisière, j’ose de nouveau écrire à S. pour recevoir dans les meilleurs délais les documents pour accéder au bateau. Je réceptionne par mail, 14 pages à imprimer ! Ouf, S. est vivante ! Première surprise, la croisière va de San Diego à… Port Lauderdale : ce n’est pas Miami ! Mes amies qui sont branchées Internet et consorts tentent de joindre S., par mail, par téléphone. Tenez-vous bien : une fois elle n’est pas arrivée, une fois elle est arrivée mais n’a pas encore branché son ordinateur, une autre fois elle est occupée par d’autres appels, on nous refile alors de faux numéros pour appeler le service clients, le service client enfin trouvé ne s’occupe absolument pas des problèmes clientèle. Alors le service clients il sert à quoi ? Une autre réponse est : Port Lauderdale pareil que Miami, c’est juste à côté. Toujours aussi faibles en géographie les Français ! Encore et toujours S. est aux abonnés absents. Voyez vous-mêmes la croisière payée allait bien de San Diego à Miami. Nous sommes donc trois pommes roulées dans la farine par S. de Monaco. L’erreur est humaine, il suffirait de l’admettre et de rembourser les frais inhérents à cette erreur et ne pas se défiler sous de piètres prétextes…

bateau celebrity infinity piano

Maintenant parlons du bateau. Construit dans les chantiers de l’Atlantique à Saint-Nazaire en 2001. Rénové en 2011, presque neuf, quoi ! Nombre maximum de passagers : 1950/2450 (les 500 en plus on les met dans la cale, ils suivent en nageant ?) Équipage : 999 individus. Style de croisière : élégant (j’y reviendrai plus tard). Pavillon du navire : les Bahamas. Officiers de navigation : Grecs. Nationalités des membres de l’équipage : internationale. Nous y rencontrerons des Philippins, des Haïtiens, des Serbes, des Ukrainiens, des Mauriciens, et beaucoup d’autres Le bébé Infinity est long de 294 m et jauge 90 228 tonnes ; il peut naviguer à une vitesse de 26 nœuds.

Il se veut un navire de croisière au top pour la santé, pour la nourriture – pour tout ce qui peut prendre grand soin de votre carte bancaire. Une salle de spectacles de 900 places, un casino (par ici la monnaie), une discothèque, un ciné, des commerces de luxe (carte bancaire à jour SVP), des spas, deux piscines, des restaurants certains payants (CB indispensable), des ascenseurs en verre avec vue sur l’océan, un restaurant sur deux étages et bien d’autres gâteries – le luxe quoi ! Bientôt, en 2015, une « Suite class » est annoncée avec grand fracas. Ce sera comme sur le Titanic, les riches auront un majordome, un restaurant privé, un bar VIP, des boissons VIP, des domestiques pour VIP, des places réservées dans le théâtre, peut-être piscine et spa privés itou (et les canots de sauvetage ?). Le menu fretin serait donc séparé des VIP par des grilles (?) comme sur le Titanic et devrait se contenter d’un burger, d’une saucisse, ou d’un poisson qu’il aurait eu la chance de pêcher lui-même ? Il serait prié de prendre les escaliers et non les ascenseurs (c’est pour maigrir), etc. D’autres précisions et surprises seront peut-être dévoilées à l’embarquement.

C’était – sommairement – le décor planté. Nous allons entamer le voyage…

Hiata de Tahiti

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Alexander Kent, Un seul vainqueur

alexander kent un seul vainqueur

L’histoire continue d’avancer jour après jour, la grande et la petite. Richard Bolitho, marin depuis l’âge de douze ans, poursuit son existence tout en la mettant au service de Sa Majesté.

Il aime sur terre, entre deux missions vitales sur mer, cette Catherine qu’il a sauvée des griffes d’un mari pédéraste qui non seulement ne l’aime pas, mais a dilapidé la fortune de son épouse au jeu. L’épouse officielle du vice-amiral sir Bolitho, lady Belinda, reste à Londres dans la « bonne » société, éprise de conventions et de paraître. Malgré leur petite fille en commun, elle ne l’aime plus, et c’est réciproque.

L’Angleterre défend toujours son empire et la liberté de son commerce contre l’Ogre corse, ce Napoléon qui veut dominer l’Europe et force au blocus continental. Les autres nations maritimes, l’Espagne, la Hollande et le Danemark, sont trop faibles pour résister ; la première est alliée, la seconde voudrait rester neutre malgré les pressions, la troisième craint pour sa flotte enserrée dans les détroits scandinaves.

Ce pourquoi cette année 1806 qui suit la victoire de Trafalgar est importante. Napoléon poursuit ses victoires sur le continent mais sa flotte a été réduite par les destructions et les prises. Dommage que les terroristes de 1793 aient coupé tant de têtes expérimentées d’officiers mariniers : si les bateaux français sont solides et bien construits, ils sont trop souvent mal commandés et trop peu exercés au tir à boulets.

Bolitho est envoyé rejoindre une escadre anglaise au Cap de Bonne espérance, point névralgique de la route vers l’Asie : le canal de Suez ne sera construit qu’à la fin du siècle et la route du Cap Horn est trop dangereuse aux navires à voiles, la proximité des glaces antarctiques y lève de constantes et violentes tempêtes. La ville du Cap est tenue par les Hollandais Boers, alliés plus ou moins à Napoléon qui les a délivrés du royaume espagnol. Bolitho va devoir détruire des bateaux qui risqueraient de contrer l’occupation anglaise du lieu.

Il est ensuite envoyé dans le nord, au Danemark, pour éloigner le scandale de sa liaison avec Catherine, afin d’accompagner une mission diplomatique destinée à convaincre le royaume de ne pas livrer sa flotte à Napoléon. Péripéties qui montrent combien les conseilleurs d’ambassade ne sont pas les payeurs, trop souvent ignorants des réalités du terrain malgré leur intelligence globale. Car le « secret » diplomatique n’en est jamais un, le temps passé à « négocier » étant mis à profit par une escadre française pour tenter de couler le bateau où se trouve cet autre Nelson qu’est l’amiral Bolitho à son retour – et affaiblir ainsi la flotte anglaise.

navire trois ponts france 18e

Ces aventures sont entrelardées de moments d’amour et même de sexe brûlant entre les amants, de relations d’amitié avec les anciens collaborateurs, de retrouvailles affectueuses avec le neveu Adam, 26 ans et capitaine de frégate. À bord, Bolitho reste attentif aux hommes, ce qui est sa gloire et sa force au combat. Il s’efforce de connaître chacun, de retenir les noms des plus marquants, de parler sans superbe au plus humble aspirant, pilote ou matelot. Ce pourquoi ils l’aiment, ce pourquoi ses ordres sont obéis lorsque vient le temps de l’action. Le lecteur en apprend beaucoup sur la psychologie du commandement dans les unités de combat en lisant Alexander Kent, lui-même engagé dès 16 ans dans la Navy en 1940 sous son vrai nom de Douglas Freeman.

Il montre la force des liens humains, entre hommes qui se battent, entre adultes et jeunes pour apprendre le métier, entre hommes et femmes lors des périodes à terre. Cette spécialité rend ses romans maritimes vivants et parfois poignants. Il raconte peu ou prou la même histoire, mais jamais au même endroit, ni avec les mêmes protagonistes, ni au même moment. Cette familiarité décalée est l’un des secrets des « sagas », ces romans qui se succèdent où l’on voit vivre, grandir et évoluer les personnages. Où l’on s’y attache comme s’ils étaient de sa propre famille.

Quelques nouveaux apparaissent, comme cet aspirant Seagrave, 16 ans en début du roman, qui vient d’un bâtiment amiral où il a été battu au sang, « bizuté » comme on dit aujourd’hui. Au point de se croire lâche, sans cesse sous le regard des autres qui jugent, alors qu’il est courageux, comme son réflexe l’a montré un instant. Bolitho le reconnaît, après son capitaine et après l’homme qu’il a sauvé. Bienveillant, l’amiral permet la résilience…

Dès les premières pages, vous êtes pris dans l’histoire, le monde alentour ne compte plus ; vous voilà au XIXe siècle. Et tant pis si les bateaux français n’ont pas souvent le dessus et si Napoléon (ce héros français) est vu de l’autre côté de la Manche comme un dictateur impérialiste. C’est l’autre face, aussi vraie que la nôtre, du même personnage – et il est bon de s’en rendre compte. Le « bonapartisme » politique continue d’être la plaie de la politique française, bien peu démocratique malgré les grands mots des politiciens.

Le charme d’Alexander Kent est qu’il ne prend pas au sérieux ces combats idéologiques. Ce qui compte est de bien faire son métier et d’aimer ceux qui vous entourent. Un bien beau programme, plus honnête que celui des professeurs de vertu !

Alexander Kent, Un seul vainqueur (The Only Victor), 1990, Phébus Libretto 2013, 494 pages, €12.80
Les romans d’Alexander Kent chroniqués sur ce blog

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Que cent fleurs s’épanouissent à Tahiti !

Des animaux, des enfants des écoles venus avec maître et maîtresse : le thème prétentieux de la Foire agricole avait pour titre « Que germe, que fleurisse et que fructifie notre fenua ! » Vraiment cela laisse rêveur quand on sait que 80% des produits sont importés. L’organisation de cette foire était confiée à la fédération qui regroupe des horticulteurs… Certes une salade fleurie est excellente mais pas de quoi nourrir un estomac ma’ohi.

Et que penser de l’absence des Australes qui sont le potager de la Polynésie ? Les dirigeants ont bien sûr trouvé que c’était la faute aux rotations des bateaux qui ont privé la délégation des Australes d’être présente à la foire ! Foutaise ! Ici on mange des carottes, 1 000 tonnes par an, les Australes en produisent de 400 à 500 tonnes par an, donc pour continuer à avoir les fesses roses – c’est bien ce qu’on dit ? – ben on importe les carottes des USA ou de Nouvelle-Zélande !

OCT 2014

Et les bananes ? On en produit assez ? La foire agricole organise le concours de la plus belle banane, enfin du plus beau régime, c’est comme pour le concours des Miss. Elles s’appellent Hamoa, Yangamby, Rio, Pia toto, et autres (les bananes, pas les Miss). Il y a aussi les concours du plus beau taro, de la plus belle patate douce, de la plus belle igname. Tama’a maita’i (bon appétit) !
Savez-vous que la viande de lapin n’est presque pas consommée en Polynésie. Actuellement la viande est vendue directement par l’éleveur au consommateur averti ; le Tahitien aurait-il peur qu’on lui pose un lapin ! [Note d’Argoul : il s’agit plutôt d’une superstition de marin, importée dans les mentalités avec les bateaux venus d’Europe il y a deux siècles ; le lapin est un rongeur qui doit absolument ronger, donc le bois et les cordages sont sa nourriture, faute de mieux. Sur les bateaux à voiles, vous imaginez les dégâts ! Ce pourquoi on ne mentionne jamais le simple mot de « lapin » sur un navire à voiles, dire même « l’animal aux longues oreilles » attire la malchance !]

Quatre Polynésiens sur dix sont obèses. Hou ! 10% de la population est diabétique. Hou ! Et chez nos voisins ? En Nouvelle-Calédonie, 26,5% de la population est obèse, en Polynésie française 40,4%, à Wallis et Futuna 59,2% est en surpoids. 34% des enfants du fenua, âgés de 5 à 14 ans sont obèses, plus qu’aux USA. Dans le Pacifique Nauru détient le record avec 94,5% de sa population obèse. Cela fait 9,5 personnes/10. Les autorités se bougent. Elles se sont décidées à organiser lors d’un sommet sur l’alimentation « une réflexion stratégique sur les habitudes alimentaires de la population du Pacifique ». Ben ça va faire avancer, encore quelques personnes embauchées pour dormir sur un papier blanc de chez blanc ou pour sucer un crayon en attendant l’heure de sortie ! Jetez donc un coup d’œil ! Tant que l’on ne vous a pas marché sur le pied…

obeses de polynesie

Des pêcheurs marquisiens ont fait une pêche miraculeuse dans un lieu tenu secret. Ils ont ramené à bord de leur embarcation de 11 mètres équipée de deux moteurs Volvo de 300 chevaux, neuf peti (mérous géants), de nombreux vivaneaux et d’autres poissons. Parmi ces mérous, trois spécimens pesaient 60, 72 et 85 kilos. Les poissons de fond sont très prisés de la population des Marquises. Les paru sont des poissons des profondeurs dont les vivaneaux, qui appartiennent à la famille des Lutjanidae, et à celle des Seranidae pour les mérous et loches. Les pêcheurs vendent leurs prises à 600 XPF le kilo de mérou et 900 XPF le kilo pour les vivaneaux. Ces poissons vivant à de grandes profondeurs, ne sont pas touchés par la ciguaterra (la gratte).

Des pêcheurs ramassent des pierres en bordure des rivières et des plages pour pêcher le thon. Une centaine de pierres par pêcheur et par semaine. Une centaine de pêcheurs emploieraient cette technique.

La pêche au caillou ou pêche à la ligne de fond consiste donc à descendre un appât en profondeur près du trou à thons. Pour se faire les pêcheurs utilisent des pierres de basalte de forme bien arrondie et un peu allongée. Elles restent au fond sans gêner la ligne ni l’hameçon. Le pêcheur met sa ligne à l’eau et la ligne se déroule toute seule, la pierre reste au fond. Pour le moment aucune réglementation mais certains donneurs de leçon grondent les pêcheurs en leur faisant croire qu’ils sont en infraction avec une loi… qui n’existe pas !

A Raroia, il y a des gens qui travaillent dur, comme ces collecteurs de nacre, une famille de sept personnes besogneuse qui collectent les coquilles. Le collectage (ou captage) sert à prélever du naissain (petites huitres perlières) de l’huître Pinctada Margaritifera, par fixation de celui-ci sur un collecteur. Les collecteurs sont constitués d’ombrières en plastique enchevêtrés le long d’une corde. Il faudra attendre au moins un an que les nacres aient suffisamment grossi et soient bien formées avant de pouvoir les manipuler. Mais il y aura encore beaucoup de choses à faire, un travail méthodique avant de pouvoir les expédier vers les atolls pour greffage. Dame Nature travaille à son rythme.

Hiata de Tahiti

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Jeux de plage

C’est alors qu’il fait bien froid, sombre, humide, que les kids rêvent de plage. Il n’y a pas de mots adéquats en français pour désigner le prime adolescent des deux sexes. L’été ils vont au soleil, presque nus, libres de tout et surtout de l’école.

fille et garcon bikini

Les ados surtout, garçons et filles. Ils sont tout hormones, prêtant à leur apparence une importance qu’elle n’aura jamais plus.

torses nus ado

Ils jouent, flirtent, se frôlent, osant à peine les caresses, les déguisant en bourrades viriles pour les gars et en moqueries sur les autres pour les filles.

filles ados

Mais ils ne se quittent pas, ils ne sont bien qu’en bande, attentifs jusqu’à l’obsession aux jugements des pairs.

Trio gamins

Heureux de se dépenser, d’offrir leur corps à l’eau, au soleil, au vent.

poirier plage

Amoureux du sport, de l’exercice, les muscles jouant sous la chair souple.

kayak de mer torse nu

Pas toujours beaux, parfois un peu gras, bourrelées pour les filles, mais vivants.

freres torse nu plage

L’âge entre 12 et 16 ans est émouvant à suivre pour ceux qu’on aime, captivant à observer pour les autres. Cet âge est sans pitié mais aussi poète, une seule fois dans leur vie.

torse nu blond sur les rochers

On ne peut que les aimer malgré tout puisqu’ils sont l’avenir, la vie même dans ce qu’elle a d’énergie. C’était il y a quelques jours, Noël, la fête de la Naissance. Celle du soleil pour les païens, de l’Enfant-Dieu pour les Chrétiens, de l’enfance même pour les laïcs. Souvenons-nous des jeux de plage.

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Alexander Kent, A l’honneur ce jour-là

alexander kent a l honneur ce jour la
Le Destin… Sir Richard Bolitho, vice-amiral de la Rouge, la flotte britannique de Sa Majesté, est en 1804 affecté aux Antilles. La guerre a repris contre Napoléon après l’éphémère paix d’Amiens; il rêve d’envahir l’Angleterre. Les vieux vaisseaux sont retapés pour faire bonne figure et l’Hyperion, démâté lors d’un précédent combat, est récupéré après avoir servi de ponton flottant. Mais ce qui compte est avant tout le caractère des hommes. Bolitho, engagé dès 12 ans, a appris à les connaître et à les aimer parce qu’il sait les reconnaître et s’en faire aimer. Surnommé Dick Égalité par ses marins, il n’a pas la morgue des aristocrates qui se croient d’une race supérieure, non plus que la dureté de ceux qui ont peur.

Son capitaine de pavillon, Haven, est de ceux-là : il fait fouetter les hommes pour un rien, juste pour assurer son pouvoir ; un autre, Sinclair, maniaque de la discipline, fera enchaîner un marin nu durant cinq jours sur le pont, pour avoir désobéi aux ordres de rationnement d’eau. Bolitho ne peut le supporter mais soupçonne quelques replis dans la psychologie de son capitaine. En effet, ce dernier croit que son second, jeune homme fin et musclé à l’air de gitan, a engrossé sa femme. Cela le ronge, il sortira de ses gonds pour tirer sur lui un jour de grande chaleur, alors qu’il apprend par une lettre de son épouse que le bébé est né. Sauf que Parris, le Second, – cela finit par se savoir – préfère les hommes… et s’est accoquiné avec le vicomte Somerwell, celui-là même que Kate, amoureuse jadis de Bolitho, a épousé par désespoir.

Mais Kate aime encore Richard, et sir Bolitho s’est lassé de sa lady Belinda trop londonienne, frivole fêtarde des salons de la haute. Il n’y a pas que les hommes dans l’univers des marins. Les femmes sont le rêve quand on est au loin, le réconfort lorsqu’on est au port, et parfois cet aiguillon qui pousse aux coups du sort. Bolitho, amiral, n’a pas sa place dans les coups de main ; c’est pourtant au cœur de l’un d’eux qu’il se met volontairement, afin de venger une frégate prise par l’ennemi. Est-il suicidaire ? Ou a-t-il plutôt le goût de l’aventure comme à vingt ans ? Il va se faufiler jusque sous la forteresse espagnole qui garde le port aux galions remplis d’or destinés à l’Espagne, alliée de Napoléon. Il va emporter un vaisseau – avec son chargement – au nez des canonniers et à la barbe des vieux barbons. De quoi le racheter aux yeux de l’Amirauté où ces Messieurs « qui font la guerre avec des mots et du papier », selon les dires de Nelson, voient d’un mauvais œil le « scandale » de l’adultère. Bolitho n’en a cure, préférant les bateaux aux bureaux et l’océan aux cancans.

Affecté l’année suivante en Méditerranée, où il revoit brièvement son neveu affectionné Adam dans sa vingtaine flamboyante, il va se heurter avec sa demi-douzaine de navires, à une escadre espagnole de douze vaisseaux. Le vieil Hyperion, un soixante-quatorze qui fait flotter sa marque, est détruit par les bordées d’un quatre-vingt-dix espagnol arrogant, mais l’amiral et ses hommes survivants ont capturé six espagnols avant de rallier Gibraltar. Ce haut-fait n’égale pas l’exploit de Nelson, aux prises avec la flotte franco-espagnole du vice-amiral de Villeneuve à Trafalgar au même moment – où il perdra la vie le 21 octobre – mais il a probablement permis à l’escadre hispanique en Méditerranée de ne pas venir en aide à celle de l’Atlantique. Bolitho applique la tactique même de Nelson : tronçonner la flotte ennemie en deux pour forcer aux abordages.

Adam est désormais capitaine de vaisseau et Bolitho retrouve sa vieille demeure familiale de Falmouth où Kate le rejoint, séparée de son bougre d’époux qui l’avait fait emprisonner et que Bolitho, bouillant de rage, a délivrée à Londres en jouant avec audace de son rang.

Comme toujours, l’aventure est captivante et le spleen comme la tendresse ne sont pas absents de cet univers viril. En cet hiver qui commence et dans ce pays morose, plusieurs heures d’évasion vous attendent, au soleil nu et au grand large.

Alexander Kent, A l’honneur ce jour-là (Honour This Day), 1987, Phébus Libretto 2013, 408 pages, €10.80
Les autres romans d’Alexander Kent chroniqués sur ce blog

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Migrations à Tahiti

EDT (l’EDF polynésien) se préoccuperait-elle des anguilles enfin ce serait plutôt Marama Nui qui gère les barrages. Au fait, on trouve quoi dans les rivières de Tahiti ? Des espèces amphihalines qui migrent à des moments déterminés de leur cycle de l’eau salée à l’eau douce et vice et versa : les catadromes (anguilles) et les amphidromes (chevrette, gobie). Les chercheurs ont dénombré 14 espèces amphihalines réparties dans 5 familles :

  • 3 chez les anguilles : puhi pa’a (Anguilla marmorata) puhi tari’a (anguille à oreilles = Anguillamegastoma) et puhi vari (Anguilla obscura).
  • 1 chez les éléotridés : o’opu (Eleotris fusca).
  • 5 chez les gobidés : apiri (Sicyopterus lagocephalus), apiri (Sicyopterus pugnans), moomoo (Awaous ocellaris), kokopu (Stenogobus genivittatus), tuivi (Stiphodon elegans).
  • 4 chez les chevrettes : oura pape (chevrette= Macrobrachium lar), oura ‘onana (Macrobranchium aemulum, Macrobranchium latimanus), oura ‘itara (Macrobranchium australe).
  • 1 chez les poissons : nato (perche = Kuhlia marginata).

course de vaa tahiti

Ces recherches scientifiques cassent un mythe sur l’anguille sacrée du fenua qui n’aurait pas d’oreilles !

Mais selon les scientifiques, c’est le signal qu’elles sont prêtes à partir en mer pour aller se reproduire. Elles développent des nageoires pectorales. Puhi tari’a ou L’anguille à oreilles (sacrée dans la mythologie polynésienne) n’est en réalité qu’un stade de développement…

Comme les autres anguilles de par le monde elles se reproduisent en mer. Les anguilles pondraient du côté de Fidji et du Vanuatu d’après les données scientifiques. Mais on ne sait pas encore pourquoi les civelles s’éparpillent dans le Pacifique pour trouver une rivière qu’elles remonteront, y grandiront et partiront à leur tour. L’anguille, c’est le prédateur des rivières, omnivore opportuniste, mange volontiers des chevrettes : c’est le régulateur pour certaines autres espèces de la rivière.

Une thésarde a été recrutée par Marama Nui pour trois ans. Elle va étudier la rivière et ses habitants de manière scientifique puisqu’il y aura soutenance de thèse à Paris Sorbonne. Et elle permettra également à Marama Nui d’améliorer l’exploitation de la rivière et… son image de marque. Gagnant-gagnant, dit-on.

carte migrations polynesiennes

Les anguilles ne sont pas les seules à migrer. Selon des chercheurs australiens, les Polynésiens – des Samoa, des Iles de la Société, des Tuamotu, des Marquises, des Gambier, des Australes et des Iles Cook du Sud – ont essaimé vers la Nouvelle-Zélande et Rapa Nui entre 1140 et 1260. Pourquoi cette période de migrations fut-elle si courte ? Des chercheurs australiens ont conclu que pendant ces 120 années, les vents étaient favorables ! Ce sont deux spécialistes du climat et un archéo-anthropologue qui ont publié les résultats de leurs recherches dans la revue américaine PNAS.

Entre 1140 et 1260, les alizés ont faibli d’est en ouest, mais vers le Sud ont soufflé plus fort, facilitant la navigation pour les Polynésiens du centre-est vers la Nouvelle-Zélande. « Sous ce vent, les navigateurs polynésiens pouvaient faire le voyage jusqu’à Aotearoa en 10 ou 14 jours ». Après 1300, les vents se seraient inversés et la navigation vers la Nouvelle-Zélande serait devenue plus ardue. Cette même étude montre qu’à la même époque, les vents pourraient avoir été favorables aux Polynésiens et aux Amérindiens vers Rapa Nui. Bref, une histoire de souffle !

Hiata de Tahiti

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Ragazzi des plages

torses nus plage

Délurés sont les très jeunes Italiens. Pas très sportifs en général. Mais de toutes les couleurs de cheveux, la péninsule étant un carrefour en Méditerranée.

torse nu jeune et vieux

Certains rappellent David, celui de Michel-Ange, en plus tendres et plus jeunes. Quelques années avant d’être épais et poilus comme papa et grand-papa.

slips de plage

Mais la plage est l’aire de jeu du jour entier. Petits et grands s’y promènent et s’y reposent, heureux d’être là, en compagnie, sans même se connaître.

ragazzi torse nu

Les ragazzi locaux restent en bande. Amicaux et sensuels pour attirer les filles. Qui ne s’y frottent qu’en bande elles aussi.

gamin torse nupréados

 

Le petits machos s’entraînent déjà pour paraître plus grands.

gamin en slip plage

Les préados se démènent, avant et après le bain, mais toujours autour du bain, le moment de la journée où leur peau s’érotise, bien plus que le regard, qui ne vient que vers 13 ans. Ils se plongent dans la vague, se roulent dans le sable, s’étreignent en luttes amicales, laissent la brise du soir hérisser le derme sur leur poitrine.

jambes et torse nu

La jeunesse brûle son énergie à la plage. Elle fait le plein de soleil, se sensations et de liberté avant l’hiver. Qui est là aujourd’hui.

adolescent torse nu

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Un rescapé de La Méduse – mémoires du capitaine Dupont

philippe collonge un rescape de la meduse memoires du capitaine dupont
Gervais Daniel Dupont, originaire de Maintenon (dans la Beauce au nord de Chartres), soldat de l’An II engagé à 17 ans dans les armées de la République, est devenu au fil des campagnes capitaine d’infanterie. Sa dernière mission est de rallier le Sénégal, rendu à la France par l’Angleterre avec le retour de Louis XVIII.

Las ! Le lieutenant de vaisseau Duroy de Chaumareys, réintégré capitaine de frégate après 25 ans sans naviguer, est un dilettante vieilli qui jette toutes voiles dehors, bonnettes de course sorties, sa frégate La Méduse sur le banc d’Arguin au large de la Mauritanie, pourtant marqué sur toutes les cartes.

Dupont raconte la pagaille, la lâcheté, les révoltes des soldats contre les officiers, les affres de la faim, l’ivrognerie de désespoir, enfin le sauvetage in extremis… Tout le monde connait le tableau de Théodore Géricault qui montre avec l’exaltation propre au Romantisme, des naufragés blêmes à moitié nus gisant sur les planches qui font eau.

theorore gericault le radeau de la meduse construction

Le grand format est construit en deux cônes successifs, dans une atmosphère de fin du monde. Le premier suggère le passé, le radeau porté par sa voile de drap comme un destin subi ; le second est l’espoir, l’action de la chemise agitée vers le bateau qu’on croit apercevoir à l’horizon. Le tableau date de 1818 et le naufrage de 1816, encore tout frais à la mémoire. La presse parisienne – mais surtout l’anglaise, toujours avide de se gausser des Grenouilles vaniteuses (jusqu’au cirque Trierweiler tout récent) – donne un retentissement mondial au radeau de La Méduse.

theorore gericault le radeau de la meduse ecoliers au louvre

Philippe Collonge, habitant de Maintenon à sa retraite du groupe Air France, s’est intéressé à l’histoire de sa commune et a collecté les manuscrits conservés soigneusement par la famille du capitaine, adjoint au maire sur ses vieux jours. Il a fait un véritable travail d’historien, n’hésitant pas à comparer la version des faits écrite de la main Dupont avec les témoignages des autres rescapés de La Méduse, et à nous donner un éclairage sur les années de jeunesse du soldat devenu capitaine pour ses capacités humaines et sa bravoure au combat.

Dupont ne dit pas tout. Même s’il parle moins bien le français que sa langue maternelle le beauceron, il connait l’art de l’ellipse, tant sur les putains de Saint-Domingue que sur l’épisode cannibale du radeau et la répression des révoltés sans-grades. Mais ce qu’il dit est franc et honnête, son écriture est directe, sans langue de bois.

theorore gericault le radeau de la meduse cadavre

theorore gericault le radeau de la meduse carte naufrage

Une première partie narre ses campagnes de 1792 à 1815, tirées d’un journal tenu succinctement à mesure ; une seconde partie met en scène La Méduse et après, de 1816 à 1818. Les deux parties tiennent à peu près le même nombre de pages mais l’éclairage des années de soldat montrent combien la personnalité d’un homme compte plus que ses connaissances théoriques lors de dangers immédiats. Gervais Daniel Dupont a 41 ans lors du naufrage de La Méduse ; il n’a jamais été marin mais a beaucoup navigué pour l’armée, notamment vers les Antilles et dans les Caraïbes. Il voit très vite combien les officiers de la frégate sont peu compétents, à l’exception d’un aspirant d’une vingtaine d’années qui ne survivra que par miracle, blessé gravement à la jambe, et qui adressera un rapport tout professionnel au ministère de la Marine.

Si la première partie intéressera surtout les Antillais et les amateurs d’histoire maritime du XIXe siècle, la seconde captivera tous ceux qui aiment les mystères des faits divers. Car ce malheureux naufrage n’est que la traduction de la misère humaine : l’impéritie, l’inaptitude, l’arrogance, la veulerie, la démission… Les officiers mariniers et les officiels embarqués se sauvent en chaloupe. Ils ne remorquent qu’un moment le radeau où s’entassent le tout-venant, 150 personnes avec Dupont et sa compagnie de terre, ainsi qu’un mousse de 12 ans qui mourra et une seule femme. Lorsque le brick L’Argus retrouvera le radeau de La Méduse, 15 jours après le naufrage de la frégate, il ne reste que 15 survivants.

Ce témoignage d’un fait vrai donne envie de relire le roman ensorcelant d’Edgar Allan Poe, Les aventures d’Arthur Gordon Pym sur le même sujet.

Un rescapé de la Méduse – mémoires du capitaine Dupont 1775-1850, Manuscrit original présenté et commenté par Philippe Collonge, La Découvrance novembre 2014, 161 pages, €17.94

Attachée de presse Guilaine Depis

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Edgar Allan Poe, Aventures d’Arthur Gordon Pym

Edgar Allan Poe Aventures d’Arthur Gordon Pym Folio
J’ai lu ce livre dans ma prime adolescence. En tant que garçon épris de cartes et d’estampes, il m’a fasciné. Relu récemment dans l’édition Pléiade, mais dans la même traduction littéraire de Charles Baudelaire, j’en ai saisi moins l’aventure que le progressif cheminement vers le fantastique, toujours au bord du monde, là où l’inconnu laisse toute sa place à l’imagination.

Tout commence en effet par deux gamins aventureux (et déjà habitués à l’alcool) : leur périple impromptu en canot durant une nuit où la tempête se lève préfigure ce qui va suivre. Mais les drôles ont un peu plus de seize ans. Ce n’est que vers 18 ans qu’Arthur est embarqué par Augustin, de deux ans son aîné, dans le baleinier de son père, armé pour la pêche hauturière sur plusieurs mois. Arthur n’a rien dit à sa famille, sa mère et son grand-père devenant hystériques à la simple évocation de son désir d’aventures.

L’auteur, né en 1809, a l’âge de son aventurier lorsqu’il écrit le livre, c’est peut-être ce qui le rend si réaliste ; l’âme d’un jeune homme est bien rendue dans sa curiosité insatiable, sa fièvre d’action et son imagination sans limites, au bord de l’affolement.

Tout commence pour Arthur par un enfermement dans la cale, pour contrer son débarquement possible s’il est découvert trop tôt, claustration qui se prolonge mystérieusement, jusqu’aux affres de la faim et de la soif, parce que le navire a été pris par une part de l’équipage qui veut se faire pirate. Le massacre des matelots restés dans le droit chemin n’est que la première étape horrifique de la rude vie adulte que les ados sont avides de connaître bien trop tôt. Ils vont être servis !

Après s’être battus avec les mutins qui restaient et leur avoir fendu le crâne, les deux compères aidés de deux marins fidèles qui ont feint d’être du côté des apprentis pirates, jettent par-dessus bord les barbares qui n’avaient eu aucune pitié pour la vie humaine. Ils sont pris par une violente tempête, le brick est démâté, les cales remplies d’eau. Les quatre survivants se sont attachés sur le pont, trempés et affamés plusieurs jours avant d’ôter leur chemise pour se sécher un peu et plonger par l’écoutille pour tenter de trouver à manger.

alexander ludwig marin jean

Un navire vient droit sur eux ; ils se croient sauvés par la Providence (ce hasard dont l’espérance et l’imagination font une volonté) mais le navire n’est peuplé de que morts d’empoisonnement ou d’une brutale maladie, le seul qui semble bouger étant dévoré par une mouette. Un autre navire passera sans les voir. Il faut donc tirer à la courte-paille pour savoir qui sera mangé. Le sort ne tombe pas sur le plus jeune mais (justice immanente), sur celui qui avait proposé le cannibalisme. Il est promptement expédié, découpé et avalé – sans plus d’état d’âme, nécessité oblige.

Mais le sort ne leur est pas plus favorable : Auguste, blessé par un mutin, est rongé par la gangrène et finit par mourir ; les requins se repaissent de son cadavre dans d’horribles craquements. Arthur l’adolescent découvre alors ce que peut devenir un homme dans les situations extrêmes.

Le bateau ne résiste pas à un autre coup de vent et se retourne, quille en l’air, le lest mal amarré ayant bougé dans la cale. Il ne reste que deux survivants : l’inoxydable Arthur, qui a une fois de plus ôté sa chemise, et Peters, Indien à demi-sensé. Ils sont recueillis in extremis par une goélette qui part explorer le pôle sud en attrapant au passage quelques fourrures. Ils ont l’occasion de se refaire un peu et visitent plusieurs îles australes au paysage désolé avant de se laisser faire par un courant marin qui les conduit plein sud. Cette transition de fausse sécurité amène peu à peu Arthur, comme le lecteur qui s’identifie volontiers à lui, à cheminer vers le légendaire et le maléfique : toute couleur s’estompe, toute humanité régresse, toute vie se fait plus cruelle.

La glace qui s’amoncelle fait soudain place à une étendue d’eau libre et l’atmosphère se réchauffe. C’est alors que surgissent les îles imaginaires dans l’inexploré humain. Rien de paradisiaque malgré les apparences ; même l’eau est gélatineuse. Leurs habitants sont noirs, vaguement descendants des Éthiopiens de la Bible ; ils sont rusés et nourrissent de mauvais desseins. Mais ils savent endormir la méfiance et c’est par miracle (ou plutôt par la curiosité sans cesse en éveil d’Arthur qui voulait explorer une faille de la passe) que le garçon et Peters échappent à l’ensevelissement vivant de l’équipage en marche vers la fête d’adieux, à la prise d’assaut du navire à l’ancre et à l’explosion de la cale.

bateau sous voile

Ils ne doivent qu’à leur astuce, à leur courage et à leur détermination brutale d’échapper à la horde qui se rue sur eux. Ils volent un canot, détruisent le seul autre disponible, et voguent à force de pagaie. Arthur ne tarde pas à se mettre torse nu – comme chaque fois que le danger presse – pour faire de sa chemise une voile. Cette sensualité un peu masochiste envers sa jeune chair d’apparence vulnérable décrit assez bien les affres des hormones chez les adolescents tourmentés par l’aventure. Arthur semble jouir des épreuves qui le trempent, l’assomment, le meurtrissent, le noient, l’ensevelissent ou l’affament. Ce plaisir pris par le corps dans l’action virile n’est pas pour rien dans l’étrange charme du livre chez les adolescents garçons. Les filles y sont peut-être moins sensibles, mais je n’ai pas d’exemple récent.

Le courant vers le sud emporte le canot tandis que la chaleur de l’air augmente, jusqu’à une brume qui voile l’horizon. C’est alors qu’est évoqué un « Géant blanc » avant que le carnet ne s’interrompe brutalement. Arthur s’échappe de ce pôle sud maléfique mais il n’en dira rien. Tout d’abord parce qu’on ne le croira pas, dit-il à l’éditeur, puis parce qu’il meurt dix ans plus tard sans qu’on sache comment, mais sans avoir achevé le manuscrit de son histoire. C’est du moins ce que l’auteur nous dit.

Devenu sans doute adulte à 29 ans en 1838, date où paraît le roman, il passe à autre chose, ces Histoires extraordinaires où l’imagination se débride mais avec plus de maturité. Jules Verne donnera une « suite » à l’aventure d’Arthur Gordon Pym dans Le sphinx des glaces.

Voici un bon roman de marine ancien mais éternel, empli d’aventures, de courage et d’imagination, analogue à L’île au trésor de Stevenson, à Deux ans de vacances de Jules Verne, et à Moby Dick de Melville. Tous ces romans répondent à la passion adolescente pour l’action et sont à mettre entre toutes les mains dès l’âge de 10 ans.

Edgar Allan Poe, Aventures d’Arthur Gordon Pym, 1838, traduites par Charles Baudelaire, Folio classiques 1975, 305 pages, €7.90
Edgar Allan Poe, Œuvres en prose traduites par Charles Baudelaire, Gallimard Pléiade 1951, 1165 pages, €46.70

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Naufrages à Tahiti

Trois naufragés retrouvés en vie aux Îles sous le vent, les trois pêcheurs avaient seulement un téléphone portable avec eux ! « On a eu une panne d’essence »… Il a fallu déplacer deux avions, deux hélicoptères. Après enquête il s’avère que le pilote du bateau n’avait ni permis, ni radio, ni fusées, ni moyens de navigation. Cette négligence lui fait encourir au maximum un an de prison et 1,8 million de XPF d’amende. J’ai ouï dire par ailleurs que cette plaisanterie aura coûté plus de 87 millions de XPF. Le marin fautif : « je remercie le Seigneur de nous avoir trouvés ».

naufrage de bonitier tahiti radio1ORCHIDEES

Dix naufragés ont été secourus entre Bora-Bora et Scilly. « Nous avons prié et le Seigneur nous a entendus ». Leur bateau était en train de couler tandis qu’ils dormaient dessus. Originaires de Scilly, un confettis de 4 km2, partis pêcher à Tupai, atoll de 10 km2 situé à 16 km au nord de Bora-Bora, atoll désert, et qui avait défrayé la chronique car aménagé pour recevoir les hôtes de marque de Flosse et qui serait pourvu de magnifiques… lampadaires et d’une piste d’atterrissage ! Mais nos pêcheurs, eux, étaient sur leur bonitier avec leur famille et ont attendu 16 heures les secours, agrippés à un radeau de survie et une petite annexe avant que l’hélico (le Dauphin de l’Armée) ne vienne les hélitreuiller. Ils avaient été courageux de plonger sous leur bateau pour chercher la balise. Une fois récupérée cette balise leur a permis de se signaliser auprès du MRCC de Papeete. Sans la balise…

Ici aux Marquises, on veut une vedette pour le sauvetage en mer, qui servirait aussi pour les evasan (évacuations sanitaires). Mais, il serait préférable d’avoir… un hélicoptère ! Quand on sait que certains pêcheurs partent en mer sans aucun matériel, peu d’essence, pas de fusée et autre moyen pour être localisé on pourrait facilement imaginer l’usage d’un hélicoptère ! Mais qui ne demande rien n’a rien.

Les habitants fuient la ville de Papeete et s’exilent dans les communes voisines. Il y aurait 1045 logements inoccupés. En journée la ville compterait 100 000 personnes, le soir 28 000. On travaille à la capitale mais, devenue peu attractive, les habitants la fuient dès leur travail terminé. Il faudrait faire des projets, les réaliser si l’on ne veut pas laisser mourir Papeete. D’autres lorgnent vers Punaauia pour devenir la nouvelle capitale de la Polynésie.

Relaxé dans l’affaire Anuanuraro, démissionné par le Haussaire donc plus Président de la Polynésie française, déchu de tous ses mandats y compris celui de sénateur, SDF puisque sa maison a brûlé, MAIS… salarié de droit privé de son propre parti le Tahoera’a (orange) à l’assemblée de Polynésie. Vous avez deviné qui est-il ? – Gaston Flosse en personne. Il serait le conseil spécial de Marcel Tuihani, nouveau président de l’assemblée depuis un bureau à l’assemblée. Na !

Hiata de Tahiti

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Regrets de plage

ado muscle torse nu

C’était le bon temps, la plage ! Enfants et adolescents de tous les sexes s’y exhibaient libres. Ils faisaient ce qu’ils voulaient, en général jouer avant de déjeuner, puis jouer avant de goûter, et jouer avant de dîner. Et encore après.

fille beach volley

Voir comment sont les autres était un attrait : poitrine et arrière-train des filles, épaules et abdominaux des garçons. Mais pas à tout âge, petits garçons et petites filles plongent de concert sans se demander de quel sexe est l’autre.

fille et garcon torse nu

Se promener presque nu était un grand plaisir. En slip dans la ville, après le bain, était admis. Parfois un sein nu sur deux pour les belles filles…

gamin muscle en slip

sein nu pas l autre

Les fratries se retrouvaient sur le sable à se mesurer au ballon. La coupe du monde venait d’expirer et chaque bande de gamins rejouait les matchs.

gamins torse nu

Mais ce bon temps est fini. L’automne est là qui rend floue la silhouette, engoncée sous les vêtements. On ne joue plus, on est sérieux, l’école et la famille l’exigent.

Jusqu’au prochain été.

torse nu

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1914 jusqu’à Tahiti !

On a commémoré les cent ans du bombardement de Papeete le 22 septembre 1914 par des croiseurs cuirassés allemands qui voulaient faire main basse sur un stock de charbon.

papeete bombardee 1914

A l’époque, Papeete comptait moins de 4 000 habitants, le tiers de la population de Tahiti. Les constructions étaient en bois, les communications très lentes, le canal de Panama venait d’être ouvert trois semaines plus tôt, il n’y avait pas de station de radio.

En ce matin du 22 septembre 1914, les croiseurs de bataille de la Kriegsmarine Scharnhorst et Gneisenau, flanqués de leurs navires ravitailleurs, s’approchent de la passe de Papeete. N’arborant aucune couleur, on doute encore de leur nationalité.

SMS_Scharnhorst

gneisenau

[Argoul 05/12/2014 : Comme me le fait justement remarquer Jean-Claude, la photo du Gneisenau ci-dessus n’est pas celle de 1914 mais date de la Seconde guerre mondiale. La Kriegsmarine a en effet mis en service en 1906, puis en 1938, deux sisterships Scharnhorst et Gneisenau qui se ressemblent comme deux gouttes d’eau. Le Gneisenau qui a attaqué Papeete avait donc l’allure du Scharnhorst ci-dessus, avec quatre cheminées à charbon flanquées de deux mâts.]

Vers 8 heures, un coup de semonce est tiré depuis les collines de Papeete où Destremau, le commandant de La Zélée, a fait installer les canons. Les pavillons allemands sont hissés sur les deux croiseurs de la marine impériale commandée par l’amiral von Spee. Le commandant Destremau ordonne le dynamitage de la passe de Papeete et la destruction de 2 000 tonnes de charbon stocké sur les quais, convoitise des ennemis.

Réplique immédiate, les Allemands bombardent Papeete, La Zélée est coulée dans le port, les dégâts matériels sont considérables, la mairie et le quartier du commerce brûlent, des maisons sont rasées jusqu’à Sainte-Amélie, la cathédrale n’est pas touchée. On déplore trois morts.

La-Zélée

Huit ans plus tôt, en 1906, Papeete avait été rasée par un cyclone et un tsunami. Moins de deux mois après le déclenchement des hostilités en Europe, Papeete était l’une des premières victimes de la Première guerre mondiale.

Pour les Tahitiens, Maxime Destremau est un héros, on l’appellera le Tamota api (le nouveau chef). A l’occasion du bombardement de Papeete, un documentaire Destremau, un destin polynésien de Pascale Berlin Salmon (52 minutes) et un livre de Didier Destremau, petit-fils du commandant Destremau : Tahiti sous les bombes – Papeete 22 septembre 1914  Jours de guerre à Tahiti (Les fausses notes du clairon aux Éditions du Pacifique), sont consacrés au commandant Destremau.

Dans les plus hautes sphères du pouvoir à Tahiti, Destremau n’est pas en odeur de sainteté. Le gouverneur de l’époque Fawtier, représentant l’autorité civile, en a fait son ennemi personnel et n’a eu de cesse qu’il parte. C’est lui qui fera tout pour obtenir la chute de Destremau. Le gouverneur, garant de la paix sociale et économique souhaitait que tout continue comme avant c’est-à-dire que les Comptoirs commerciaux soient essentiellement tenus par de grands familles allemandes et que tout continue comme avant, sans entrave. Le militaire ne l’entendait pas de cette oreille. C’est l’histoire de deux hommes rigides, stricts, mais à cette époque l’armée devait s’incliner face au pouvoir civil. Le civil aura raison du militaire, on renverra Destremau en France où il mourra d’une maladie mal diagnostiquée, à 40 ans.

Le lycée Tuianu-Le Gayic de Papara a établi « le menu du Poilu » pour le déjeuner des lycéens, un clin d’œil remarqué. Voyez donc ce menu du Poilu :

  • Entrées : sardines à l’huile et biscuits de guerre (Sao est une marque de biscuits secs très populaire à Tahiti) ou pâté et biscuits de guerre (Sao).
  • Plats de résistance : pommes de terre et lentilles accompagnées de corned-beef (Puatoro).
  • Dessert du combattant : carrés de chocolat et fromage.
  • Dessert de l’arrière : yaourt et fruit.
  • Sans oublier le traditionnel « quart de rouge » (jus de raison… euh, de raisin).

Hiata de Tahiti

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Plage des pêcheurs à Mirissa

Nous partons pour quelques kilomètres de bus jusqu’à la plage des pêcheurs où les bateaux traditionnels alignés, colorés, semblent n’attendre que la photo. L’heure n’est pas à la pêche, peut-être ne servent-ils plus que de décor ? Construits en bois, très effilés, ils sont équilibrés par un grand balancier d’un seul côté et dirigés par une godille.

mirissa bateau a balancier sri lanka

Au large, sont à l’ancre des bateaux plus gros et plus professionnels, avec de longues perches pour tendre les filets en haute mer.

mirissa bateau sri lanka

Des adolescents du coin viennent sur la plage jouer au cricket, sport très populaire en Inde (qui n’est qu’à 31 km au-delà du détroit de Palk), puis se roulent dans les vagues en se chamaillant, la plupart tout habillés. Ne sont torse nu que ceux qui sont fiers de leur corps. Même les petits garçons gardent souvent un tee-shirt.

cricket mirissa plage sri lanka

Une voilée attend à la lisière du sable, avec la plus jeune de ses filles, que son époux, son fils et sa plus grande fille terminent de s’amuser dans le ressac, tout au bord. Il ne s’agit pas de nager mais de se tremper ; ces enfants savent-ils nager, d’ailleurs ? Pour une fois torse nu, le garçonnet musulman d’une huitaine d’années prend beaucoup de plaisir à se rouler dans l’eau mêlée de sable, comme en témoignent ses gloussements et ses cris. Déjà replet, presque obèse, il est l’enfant gâté parce que le seul fils. Abus de sucreries et de Coca, favoritisme de mâle.

nager mirissa plage sri lanka

Le Seafood restaurant est un ancien bateau posé sur le bord de la plage. Du pont, on domine les baigneurs, les surfeurs et les joueurs de cricket. Un peu plus loin sont en effet proposées des leçons de surf et il y a deux élèves, une fille de 20 ans et un adolescent de 14 qui s’y essaient sous la direction d’un professeur à chignon. Les vagues sont ici propices à apprendre, ni trop hautes, ni trop puissantes. Douché, submergé, épuisé, le kid rejoindra sa mère, tout mouillé, en seul bermuda mais des étoiles dans les yeux. Ils s’installeront en bas sur les tables de la plage pour boire un Coca.

mirissa plage sri lanka

L’assiette de thon grillé, de riz et de salade est copieuse, je ne la finis pas. Le poisson est trop sec, frit trop longtemps. Il est bon mais dur à mastiquer, malgré la tentative culinaire de le cuisinier sauce ail et oignon. Il est vite 14 h, le temps passe.

seafood restaurant mirissa plage sri lanka

Nous sommes à la pleine lune et c’est la fête de Poya, comme chaque mois, durant laquelle on commémore la naissance, l’illumination et la mort du Bouddha. Durant cette fête mensuelle, des lampes sont allumées autour de l’arbre de la bodhi, le banyan de l’Illumination, et de la dagoba qui est un reliquaire ; on fait une offrande de fleurs à la statue du Bouddha ; des versets des écritures en pâli sont récités ; les fidèles se prosternent devant le moine et invoquent les trois figures du Bouddha, de la Dharma (son enseignement) et de la Sanghà (communauté des adeptes) ; ils citent les cinq préceptes du bouddhisme et écoutent un sermon sur le Bouddha et ses vies antérieures.

mirissa filets sri lanka

Inoj nous rappelle les cinq préceptes communs à tous, laïcs et moines :
1. ne pas nuire aux êtres vivants ni prendre la vie (non-violence),
2. ne pas prendre ce qui n’est pas donné,
3. ne pas avoir une conduite sexuelle incorrecte ─ plus généralement garder la maîtrise des sens,
4. ne pas user de paroles fausses ou mensongères,
5. s’abstenir d’alcool et de tous les intoxicants.

L’alcool est donc prohibé durant cette fête – mais nous Occidentaux sommes exemptés de cette contrainte à condition de nous cacher : bière dans un sac ou cocktail dans les chambres. Comme il n’y a que des Occidentaux dans l’hôtel, le bar fait une exception, les jus de fruit déguisant l’alcool qu’il y a dedans. Mais toutes les bouteilles habituellement étalées au comptoir ont été ôtées. Le jour étant férié, nous n’avons pas vu de bus rouges, service d’État ; seuls les bus privés circulaient, conduits par des non-bouddhistes.

Le dernier dîner du séjour est morne, à la nuit tombée, dans la cuisine internationale. Demain, le réveil a été fixé très tôt car les trentenaires sont avides de meubler leurs intérieurs de « souvenirs » pour quand ils seront vieux. Il y a longtemps que je me suis détaché des babioles qu’on rapporte et qui ne servent qu’à encombrer.

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Alexander Kent, Flamme au vent

alexander kent flamme au vent
Douglas Reeman (le vrai nom de l’auteur) aime la mer ; il y est tombé tout petit avant de s’engager adolescent (à 16 ans) dans la Royal Navy contre les Allemands. Il connait bien l’univers des bateaux et le monde hiérarchique mâle, des mousses aux amiraux, en passant par les aspirants. Son héros, Richard Bolitho, a été anobli par le roi et les autres l’appellent désormais « sir » Richard. Lui s’en moque un peu, préférant les gens aux titres et oripeaux dont ils s’affublent.

Nous sommes fin 1803 et la paix d’Amiens, conclue entre Napoléon et l’Angleterre, vient de voler en éclat. A la tête d’une escadre de sept navires, dont quatre soixante-quatorze (canons), l’amiral Bolitho est chargé de protéger les convois anglais de Méditerranée. Surtout trois vaisseaux qui apportent de l’or turc, tribut du sultan au Royaume-Uni. L’amiral français Jobert, vaincu une première fois par Bolitho qui lui a ravi son navire, cet Argonaute qu’il occupe actuellement, n’aura de cesse de ruser pour s’emparer du trésor.

Voilà pour la bataille et l’univers des hommes. Le neveu aimé, Adam Bolitho, lieutenant de vaisseau à 23 ans sur une frégate, y fera bonne figure, tandis que le majordome attitré de l’amiral, Allday, découvrira un fils pas tout à fait comme il l’aurait souhaité. Les rapports filiaux restent très présents dans les romans d’Alexander Kent, et cette empathie des hommes entre eux est ce qui fait le sel de ses romans maritimes. L’amiral se préoccupe des tout jeunes aspirants, rarement reconnus, « ni hommes, ni officiers encore », comme des canonniers et des pilotes, du chirurgien et des matelots.

Mais l’univers serait mutilé s’il n’existait aussi les femmes. Elles n’ont pas leur place à bord des navires militaires mais restent présentes dans les cœurs et les fantasmes. L’amiral écrit à son épouse Belinda, restée à Falmouth avec leur petite fille ; Allday recueille un fils inconnu d’une fille d’auberge avec qui il a connu de bons moments vingt ans auparavant, entre deux missions à la mer. Mais c’est Valentine Keen, le capitaine de pavillon et ami de Bolitho, qui va découvrir l’amour.

Un capitaine de pavillon est celui qui commande le bateau sur lequel se trouve un amiral, lequel commande, lui, toute l’escadre. En secourant un bateau de commerce désemparé, convoyant des condamnés vers l’Australie, Val Keen est révolté de voir une jeune femme fouettée comme un vulgaire gibier de potence. Il interrompt le supplice, ramène à bord la victime pour la faire soigner, supputant de la débarquer à Gibraltar. Mais une épidémie de fièvre empêche tout échange, le Rocher est en quarantaine ; il lui faut donc garder la belle sur le vaisseau. Reconnaissante, et expliquant pourquoi elle a été injustement condamnée, Zénobia suscite l’amour du capitaine. Scandale en haut lieu ! Rapt, désobéissance au code, assouvissement de besoins personnels – on en a dégradé pour moins que ça ! Un conseil de guerre est réuni pour juger les impétrants à Malte… mais la guerre n’attend pas : les Français sont signalés au nord. L’amiral et son capitaine rejoignent leur bord sans être jugés, en attendant les suites ; la belle est mise en partance pour l’Angleterre sur un paquebot civil.

marine femme a voile

Sous cette histoire montée en épingle se tapit la vile vengeance d’un autre amiral, jaloux du succès de Richard Bolitho et vindicatif contre son traître de frère pourtant décédé. Le fils de cet amiral haineux est d’ailleurs aspirant sur le navire de Bolitho. Mais la victoire contre Jobert balaiera toutes les intrigues, l’honneur vaut mieux que le sexe.

L’auteur varie un peu les épisodes convenus, les ordres, les exercices et les ruses, il ajoute un soupçon de féminité dans les esprits des marins, mais le lecteur reconnaît avec confort l’univers empathique de la marine à voile vue par Alexander Kent. Une image de marque qui fait le succès de ses nombreux livres, pas moins de 25 tomes pour les aventures de Richard Bolitho, commencées comme tout jeune aspirant de 15 ans avant de finir amiral, et dont Flamme au vent est le 17ème opus !

Alexander Kent, Flamme au vent (Colours Aloft), 1986, Phébus Libretto 2012, 389 pages, €10.80
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Nordhoff et Hall, Panne sèche

charles nordhoff james norman hall panne seche
Auteurs américains célèbres en leur temps des Révoltés de la Bounty, Nordhoff et Hall donnent ici une description pittoresque et réaliste du tempérament des Tahitiens. La famille Tuttle, à l’arrière grand-père américain austère, entreprenant et économe, s’est diluée dans le sang polynésien jouisseur, hédoniste et imprévoyant.

Jonas, le pater familias de la cinquantaine, est respecté lorsqu’il décide – mais il est trop nonchalant pour le faire, la procrastination étant chez lui une seconde nature. Ses quatre fils en fin d’adolescence sont vigoureux et travailleurs mais pas souvent, et pas futés pour un sous sauf le dernier, Ru, 16 ans, qui répare admirablement les moteurs.

Heureusement, car le vieux cotre Zimba, rapiécé de toutes parts, en a fréquemment besoin. Mais les frères préfèrent rogner sur la gazoline pour s’acheter du tabac – c’est rageant quand le moteur tombe en panne sèche à trois minutes d’un banc de thons particulièrement fourni dont la pêche aurait pu rapporter des milliers de francs. Ou bien oublient de prendre le bidon de réserve – qui oblige à rejeter à la mer toute une pêche inespérée loin de Tahiti, faute de moteur et faute de vent pour rentrer avant que les poissons soient pourris…

Tout est à l’avenant, et la blague qui revient régulièrement est celle du docteur, à qui Jonas a emprunté sur promesse – toujours renouvelée – de le rembourser, et qu’un événement de dernière minute empêche toujours de le faire. Même quand une véritable fortune de mer échoit au clan, sous la forme d’une épave remplie de matériaux ramenée par eux à bon port. Ils ne manquent pas de se faire rouler sur le prix, trop impatients de palper les billets pour les dépenser aussitôt, trop stupides (ils l’avouent – mais après) pour prévoir et compter. En deux mois de fiestas, ripailles et autres largesses sans compter, ils se retrouvent sur la paille, plus pauvres qu’avant puisque leur domaine ancestral – hypothéqué – doit être vendu aux enchères.

Les auteurs, par la voix du trop bon docteur, ne mâchent pas leurs mots sur ces cigales inconséquentes : « avec ta tribu vous battez tous les records de gaspillage, de je-m’en-foutisme et d’imprévoyance de toute l’île, toute ! Que diable faites-vous de tout l’argent que vous gagnez, ne serait-ce que de la pêche ? (…) Il disparaît dans la mangeaille et les bringues, les fameuses bringues de chez Tuttle ! » p.50.

tahiti danse

Tant de bêtise est cependant rachetée par les sentiments. La tête toujours ailleurs mais le cœur sur la main, les poches vides mais les muscles tout prêts (jusqu’à Riki, le petit-fils de 8 ans athlétique et à l’œil perçant pour découvrir les bancs de poissons), la famille reste soudée, prête à rire même dans le désespoir. Il suffit de musique, de danse et d’une dame-jeanne de vin.

Tous les Tahitiens ne sont pas aussi futiles et le roman a été écrit dans les années 1930. La vallée de Vaipopo, domaine des Tuttle, est devenue une Zone industrielle. L’éducation et la discipline du travail ont probablement amélioré les habitudes. Mais quand même, il semble en rester quelque-chose… que ce roman plein d’humour et d’humanité décrit avec bonheur.

Pour tous ceux qui veulent pénétrer un peu mieux le tempérament tahitien, avant d’y aller en touriste ou s’y installer un temps pour travailler, rien de tel qu’un détour par la fiction de deux romanciers américains du monde d’hier pour y voir clair !

Charles Nordhoff et James Norman Hall, Panne sèche (No More Gas), 1939, éditions Ura-Tahiti 2012, 287 pages, €22.00

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Thorgal 33, Le bateau-sabre

Thorgal 33 couv
Album de remplissage, pas très bon, ni dans le dessin ni dans l’histoire. La série s’essouffle, le nouveau scénariste – très touche-à-tout – n’a pas assimilé le personnage de Thorgal, sinon ses tics ressassés dans les albums précédents (ne pas tuer, être inventif, sauver les autres, y compris les chiens).

Quant à Jolan, on ne voit pas trop ce qu’il fait là si l’on n’a pas lu les albums précédents.

Le gamin, fils de son père, n’apparaît que sur quelques pages, gauche et sans destin malgré les « promesses » de la magie rouge. Le nouveau dieu des chrétiens va-t-il le convertir ? On en tremble un peu : la série Thorgal serait-elle la même si tous ces Vikings se convertissaient au religieusement correct de la belgitude moyenne ?

Même le dessin montre l’adolescent en transition, au physique ingrat, au visage lourd, malgré sa tunique bleue fendue au col qui fait la transition (et qui s’allonge à mesure qu’il prend de la taille et des épaules ?).

Thorgal 33 jolan

L’aventure de Thorgal, en quête de son dernier fils Aniel enlevé par la magie rouge, se passe en hiver dans le paysage sombre de la Russie des fleuves. Neige, tempête, eau glacée ne sont pas joyeux ; la cruauté des marchands et des pillards est inévitable ; seuls les chiens de traineau, la fille Lehla retrouvée (sœur de Darek), et le capitaine d’arme du bateau viking retiennent l’attention. Pour le reste, nous sommes dans la plus sommaire psychologie. Célibataire et papa virtuel, Thorgal est bien terne.

Malgré les beaux paysages (Rosinski sait dessiner), l’usage du pinceau ne convient pas aux visages, trop balafrés de rouge ou trop verdâtres selon l’encrage.

Thorgal 33 barque viking

Et comme l’action se traîne ! Cinq pages de blabla pour ne rien dire au début et resituer Jolan (à la fin de l’album on a déjà oublié), sept pages d’action enfin contre les pillards du fleuve, quelques vues de transition sur les esclaves, cinq pages presque sans paroles sur la neige avec les tigres (!) avant pas moins de quatorze pages sur la récupération d’un coffre coulé avec une orque (!) qui dévore les nageurs. Le tigre de Sibérie existe, mais son aire est côté Pacifique, proche des fleuves Amour et Oussouri, pas des fleuves russes de la Baltique à la mer Noire. L’orque épaulard (du moins c’est la bête que suggère le dessin) est aussi positionné côté Pacifique de la Russie, vers le Kamchatka, et n’est pas faite pour l’eau douce des fleuves.

Beaucoup d’invraisemblances donc dans ce mauvais album, dont la magie fantastique qui pouvait faire le charme de certains précédents est totalement absente, presque scolaire ici. Ce qui s’ajoute à un scénario indigent pour une histoire qui n’a rien à dire et dont les dessins s’étirent pour atteindre péniblement les 48 pages exigées… Vraiment pas le meilleur de la série !

Thorgal 33 thorgal

Pourquoi vouloir à tout prix suivre le filon ? Histoire de fric ? Vanité de faire « comme » Van Hamme ? La « saison 2 » de Thorgal avec Sente n’est pas à la hauteur de la saison 1 avec Van Hamme, son créateur. A vouloir trop en faire, à récupérer tout ce qui brille pour se faire mousser, le néo-scénariste montre ses limites. Thorgal, comme Jolan, sont des caractères. On ne joue pas impunément avec ces personnages, au risque du ridicule.

Rosinski & Sente, Thorgal 33, Le bateau-sabre, 2011, éditions Le Lombard, 48 pages, €12.00

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Géopolitique du thon à Clipperton

Clipperton est un anneau corallien fermé de 1,7 km² de terres émergées. L’île relève du domaine public et est propriété domaniale directe de l’État. L’autorité est déléguée au Haut-commissaire de la République en Polynésie française, représentant de l’État depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 : « La loi détermine le régime législatif et l’organisation particulière des Terres australes et antarctiques françaises et de Clipperton ». Contrairement aux DOM et COM (département et collectivités), les lois et règlements de la République s’y appliquent de plein droit et « les juridictions de l’ordre judiciaire ayant leur siège à Paris » sont « territorialement compétentes ».

Clipperton carte de situation

L’île a été découverte le Vendredi saint 3 avril 1711, d’où son nom initial d’île de la Passion, par Martin Chassiron et Michel du Bocage. Elle est considérée comme possession française depuis le 17 novembre 1858 suite à sa prise de possession par le lieutenant de vaisseau Le Coët de Kerveguen au nom de Napoléon III. La raison de cette exploration de 1858 était surtout le guano (la fiente d’oiseau , phosphate utilisé dans les fertilisants), à plus long terme le percement de l’isthme de Panama envisagé par la France dans la ligne de la politique d’influence « latine » de Napoléon III aux Amériques. Le Coet de Kerveguen n’a pas pu débarquer. Un marin est allé à terre à la nage en dépit des requins et des vagues et a ramené des échantillons de guano. Une carte a été levée depuis le haut du mât et l’annexion de l’île rapportée a Hawaï. La redécouverte, l’occupation et l’exploitation de cette île à guano par les Américains incita le Mexique plus proche à la revendiquer et à l’occuper dès 1898. Une garnison mexicaine s’installe en 1906 et y construit un phare. Mais cette colonie fut abandonnée en 1914 par le Mexique à cause de la révolution, et ses derniers survivants livrés à la famine. Ils ont été découverts par accident et évacués par un navire de la marine américaine en 1917.

En 1909, le Mexique et la France se soumirent à l’arbitrage international du roi Emmanuel III d’Italie qui attribua la possession de l’atoll a la France en 1931. L’île était terra nullius lors de la prise de possession. Mais, au Mexique, on continue de revendiquer aujourd’hui la propriété de l’île dont les richesses sont le thon et les nodules polymétallique qui jonchent ses fonds marins. Selon le site de la Marine nationale, « Le contexte diplomatique et juridique » est clarifié entre la France et le Mexique concernant cette île. En effet, conformément à l’accord franco-mexicain du 29 mars 2007, entré en vigueur le 1er mai 2007, les navires de pêche mexicains peuvent bénéficier de licences de pêche pendant 10 ans dans les 200 milles marins entourant Clipperton. Sans quotas ni contrôle mais avec une obligation de déclarer les quantités pêchées et d’enregistrer les navires auprès du Haut-commissariat de la République à Papeete. La renégociation de cet accord a lieu cette année et les accords expirent en 2017. En échange, certainement un moment historique de notre diplomatie, le Mexique cesse de revendiquer une île que le droit international a pourtant reconnue française depuis 1931 !

Clipperton peche mexicaine dans les eaux territoriales

Or, très rares sont les nombreux navires américains, sud-américains et même asiatiques observés qui ont demandé une quelconque autorisation pour y pêcher, y mener des expéditions scientifiques ou y plonger avec les requins : la France et Papeete sont loin, les énarques parisiens s’en moquent, les responsables le sont à temps partiel et les politiciens n’y ont aucun électeurs. Seule l’économie pourrait faire pression sur ces Messieurs, mais l’économie en France est aux abonnés absents : qui va contrôler les pêches Mexicaines et leur faire payer les permis et une redevance a la tonne ? qui va affréter des bateaux pour le tourisme écologique ou la pêche sportive depuis que le Club Med est en vente aux étrangers ? qui va affréter (comme le Japon ou l’Espagne) des thoniers pour aller pêcher dans le Pacifique ? Les pêcheurs français sont de petits artisans collés aux côtes où ils disputent le rare poisson aux plaisanciers, pas des entrepreneurs hauturiers. Il est loin le temps des Terre-neuvas ! Et le pêcheur Polynésien, pourtant subventionné, n’a pas la volonté de partir loin de son île à la pêche « au long cours ».

De plus, l’État est impuissant à continuer l’empire. Pas de volonté, pas de moyens, à peine un renouveau national de la recherche scientifique 10 ans après l’expédition médiatique de Jean-Louis Étienne avec deux scientifiques en 2014 et une expédition prévue en 2015 (si le budget est maintenu). Eric Chevreuil, ancien officier de l’armée de terre française reconverti dans l’informatique en Californie, est soucieux de Clipperton et est scandalisé par le pillage de ses ressources par les senneurs Mexicain et par « la propagande parisienne ». Il a récemment écrit une lettre ouverte au Président parue dans la version papier de Marine & Océans (Mai 2014), et rédigé un dossier d’enquête révélateur sur les abus des navires Mexicains a Clipperton. Ce dossier est diffusé a l’aube de la renégociation de ces accords de pêche pour informer le Premier ministre, les ministres des Affaires étrangères, de l’Outre Mer, de l’écologie, au le Secrétariat général de la Mer et le Haut-commissariat de la République a Papeete, par courrier digital et normal en avril 2014. Il écrit entre autre : « La frégate de surveillance Prairial et l’Arago, en transit, ont effectué un total de trois visites en 2011. Le Prairial y est aussi allé deux fois en 2012, une fois en 2013 et aucune mission n’est prévue en 2014. Chaque visite totalise trois jours en ZEE dont une journée a Clipperton. Au total, « la Police » française a passé 6 jours à Clipperton en quatre ans ».

clipperton bateau de peche mexicain avec vedettes de rabattage

Photos d’une campagne de pêche du navire Mexicain de Pescas Aztecas 9 à Clipperton : hélicoptère, 8 vedettes de rabattage, 1 barge pour étendre des kilomètres de filets, 1200 tonnes d’emport (source Eric Chevreuil)

Or une île sans administration et où personne n’habite n’aurait, pour le droit international maritime, que 12 milles marins de zone maritime territoriale (et non les 200 milles marins de zone économique exclusive). D’après les réponses du gouvernement à des questions posées à l’Assemblée nationale, le fait de ne pas étendre la ZEE aurait permis de réaffirmer notre souveraineté auprès des instances internationales. Esquive en langue de bois ? Par la faute de Nicolas Sarkozy, alors Président de la République, la France n’a pas fait valoir auprès de l’ONU en 2009 ses droits de possession sur la zone de 40 000 km² de plateau continental à Clipperton, les perdant définitivement. Cela pour ne pas fâcher les autorités mexicaines et ne pas risquer de compromettre la libération de Florence Cassez, dit-on…

Mais si tous ces arguments n’étaient que prétextes ? Le flou artistique entretenu par les diplomates et les technocrates sur le sujet, comme en témoignent les « réponses » ministérielles aux questions posées à l’Assemblée nationale ou au Sénat, montre que le droit de la mer n’est ni clairement établi ni souverainement revendiqué. Les politiciens préfèrent signer des « accords » économiques ou culturels pour les Airbus ou les étudiants avec le riche Mexique que d’exercer ses droits impossibles sur la pêche au thon et la collecte de nodules si loin de la métropole. Faute de volonté, faute de moyens, faute d’électeurs. Quand la force tranquille ne peut affirmer le droit, place à la ruse diplomatique.

2014 05 accords de peche france mexique question au senat

Sous peu à Paris (en août ?), les accords de pêche Franco-Mexicains de 2007 vont être renégociés en catimini et sans débat. La souveraineté de la France sur cet atoll et ses ressources sera probablement de nouveau bradée dans un accord qui ne profite vraiment qu’au Mexique. Ce pays pille allègrement la zone jusque dans les eaux territoriales françaises de Clipperton où les requins, les dauphins et les tortues de mer tombent victimes de leurs kilomètres de filets.

A quoi nous sert donc Clipperton ? Grâce à une ZEE presque aussi grande que la France continentale, l’île de Clipperton permet à la France de disposer du deuxième domaine maritime mondial, derrière les États-Unis. Ce qui les ennuie, semble-t-il… Va-t-on la vendre au Mexique, comme Napoléon 1er fit de la Louisiane aux États-Unis ? Va-t-on la perdre comme l’indigent Louis XVI (dont le sosie règne à l’Élysée) le fit du Canada ?

En savoir plus :

Clipperton vue par le Ministère de l’Outre-mer
Clipperton selon la Marine nationale
Site Tous les territoires français
Forum Mexique sur Clipperton
Jean-Louis Etienne en expédition à Clipperton
Clipperton vue par la world encyclopédie en français pour les paidès
Les intérêts commerciaux de la diplomatie française au Mexique
Le site du Professeur Jost, université de Tahiti
Clipperton sur ce blog
Rapport de M. Chevreuil : copie sur demande à echevreuil@sbcglobal.net

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Les corps chantent à la plage

L’été venu, la pluie éloignée, les plages se peuplent. Mais la foule est communautaire, il s’agit de se retrouver « entre soi » dans un songe primitif.

1 plage encombrée
Ce pourquoi tout ado, plus sensible qu’enfants et adultes, joue au sauvage, nu entre le ciel et l’eau.

2 ado nu plage
Les filles se vêtent plus, malgré les années 70 la mode des seins nus ne prend plus, à cause des intégristes coincés cathos, juifs et musulmans qui craignent leurs désirs et adorent interdire aux autres ce qu’ils seraient avides de faire eux-mêmes. Intégristes contre intégral.

3 adolescente seins pomme
Seuls les garçons sont plus libres, dans les religions du Livre.

4 adolescents torse nu
Les filles restent entre elles, en bikini quand même.

5 filles bikinis
Les rencontres entre sexes sont datées, c’est dommage, le baiser seins nus était parfaitement érotique.

6 baiser seins nus plage
Aujourd’hui, les garçons prennent le pas sur les filles. « Sur la plage, la société s’exhibe, se regarde, s’entre-regarde et se met en scène pour elle-même, hors de tout contexte » disait il y a 20 ans le sociologue Jean-Didier Urbain.

7 garcon nu contre fille
Hors la plage, on peut se mettre nu, entre soi, comme sur un bateau où les mousses s’ébattent libres au soleil.

8 mousses nus aux homards
Sur la plage, on cache sa nudité intégrale dans le sol, pour faire corps avec la terre, là où s’y mêle la mer.

9 nu dans le sable
L’on se vêt de sable, d’eau ou seulement de lumière.

10 garmins jouant torse nu
Les filles défilent en maillots de bain colorés pour attirer et serrer, chaleur qui se met en valeur.

11 seduire hot
De quoi faire rêver l’ado ému par les hormones.

12 reve nu ado
Ou les ado filles au vu des formes athlétiques sous les habits mouillés.

13 jeunesse mouillee
Mais on ne voit plus guère les seins nu rissolant au soleil, comme les parfaits œufs au plat en petit-déjeuner…

14 seins nus plage

Je vous offre donc aujourd’hui un peu de rêve – même si les photos ne sont pas toutes de moi.

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Chasse au trésor à Tahiti

Pour ceux qui ont vécu en Polynésie, Anuanuraro est un nom qui leur rappelle des souvenirs… Non ?

L’atoll d’Anuanuraro dépend de l’atoll de Hao (ancienne base arrière du CEP), ses terres émergées ? 2 km2, la surface de son lagon ? 8 km2. Anuanuraro ou Anuanu-Ouest fut aussi appelé Archange puis Duke of Gloucester Island par les découvreurs. C’est un petit atoll sans passe de 5 km de long sur 3,5 km de large. Racheté par le Territoire, il était la propriété de Robert Wan qui y exploitait une ferme perlière (cela vous rappelle quelque chose, maintenant ?). L’aérodrome privé n’est plus en utilisable.

ballon plage polynesieL’île est réputée détenir un trésor… C’est là que trois hommes passionnés d’archéologie, d’histoire et de chasse au magot ont vécu une aventure rocambolesque depuis le 17 mars dernier. Ils avaient tout prévu sauf le mauvais temps. Débarqués d’un catamaran, ils auraient perdu 80% de leurs vivres dès leur débarquement mouvementé sur l’atoll. Téléphone satellitaire et panneaux solaires ne fonctionnaient pas… Et le catamaran ne devait revenir les chercher qu’entre le 3 et 6 avril !

Mais quel est ce trésor ? L’un des plus gros trésors pirate du monde ! De 3 à 23 tonnes d’or ! Caché où ? C’est un aventurier irlandais Charles Edward Howe qui a organisé de nombreuses expéditions à Pinaki (autre atoll des Tuamotu) suite à sa rencontre en Australie en 1912 avec le dernier survivant d’une équipe de quatre pirates qui auraient volé et caché, de nombreuses années auparavant, le magot, sans jamais rien trouver. Les aventuriers des temps modernes ne remettent pas en cause l’existence de ce trésor mais pensent qu’il se trouverait sur un autre atoll des Tuamotu. Lequel ? C’est bien là la question !

pirates costumes

Ils pensent également que le trésor ne proviendrait pas de la cargaison d’or d’un navire espagnol mais d’un voilier, Le Madagascar, une frégate trois-mâts britannique, mystérieusement disparue corps et biens en 1853 et que les pirates auraient drossé volontairement sur le récif d’Anuanuraro.

Pinaki, appelé également Panaki, ou Whitsunday Island par les Européens est un petit atoll circulaire de 4,5 km de diamètre, un lagon de 1 km de long et 600 m de large, relié à l’océan par un seul hoa. Loin de Tahiti (plus de 1 100 km) l’île est connue car on raconte qu’elle renferme un trésor : un butin de 10 millions de dollars représentant les biens de l’Église catholique au Pérou qui fut embarqué en 1849 sur une goélette qui appareilla de Pisco. Une mutinerie à bord, plusieurs personnes de Nukutavake en 1850 qui affirmèrent avoir vu une goélette semblable à ce navire dans les parages de Pinaki et même un pêcheur affirmait avoir vu des hommes décharger des coffres en bois ! Howe débarqua à Pinaki en 1912, creusa, fouilla l’atoll pendant 18 ans sans jamais rien trouver. D’autres creusèrent d’autres trous…

TAHITI DEPUIS LES HAUTEURS

Il parait que pendant les soirées de bringue, le trésor est toujours un sujet de conversation ! Nos aventuriers ont récolté de précieux débris. Le plus jeune des aventuriers laissé sur place (plus résistant qu’un Australien) a été recueilli par l’hélicoptère Dauphin et déposé sur l’atoll privé de Nukuteppi.

Hiata de Tahiti

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William Golding, La trilogie maritime

La trilogie maritime est un grand œuvre de prix Nobel de Littérature de la part de William Golding (il lui fut attribué en 1983). Elle fut écrite en 1988 et 1989, quelques années avant de passer de l’autre côté, là où les hochets n’importent pas et les hoquets non plus. Rites de passage, Coup de semonce et La cuirasse de feu ne sont pas des titres d’Harry Potter mais les épisodes d’une initiation. Le jeune homme en question est plus âgé que le collégien sorcier, au début de sa vingtaine ; son nom est Edmund Talbot. William Golding a toujours aimé analyser les humains en situation. Les plus lettrés des lecteurs se souviennent de Lord of the flies, publié en 1954 et traduit en français sous le titre Sa majesté des mouches. Ce livre-culte, devenu en 1963 un film de Peter Brook, observait des garçons autour de la puberté livrés à eux-mêmes dans une île après un crash d’avion…

William Golding Trilogie maritime

Edmund, jeune esquire, part servir le Royaume comme quatrième secrétaire du Gouverneur aux antipodes, dans cette Australie colonisée par les convicts (appelés – par la langue de bois déjà – des « hommes du gouvernement »). Nous sommes au début du 19ème siècle, Napoléon vient d’être exilé en l’île d’Elbe. La traversée, sur un bateau pourri de la Navy mené par un capitaine psychotique et peuplé d’immigrants, va durer presque un an ! De quoi alimenter les étapes du passage à l’âge adulte.

Épris de grec et bourré de latin (ce dernier considéré comme langue vulgaire « faite pour les sergents »), assez content de lui-même, protégé par un parrain illustre auquel il a promis le récit de la navigation, Edmund ne tarde pas à se voir coller une image de « lord », phraseur et soucieux de sa condition. Mais dans une traversée aussi longue sur un navire aussi précaire, il faut bien se frotter aux autres – physiquement et mentalement. Et c’est là que le sens théâtral de l’auteur met en scène l’humanité en sa tragi-comédie. Un révérend coincé et un beau jeune marin musclé demi nu de 20 ans ; un Premier lieutenant monté du rang dont toute ambition se cantonne au principe de précaution et un Troisième lieutenant, ex-noble français empli d’idées, de savoir technique et de bagout ; un aspirant de 15 ans timoré et sans espoir (mais qui survit) et son cadet de 14 ans vif et déluré (qui disparaît brutalement) ; une ex-pute folâtre et une ex-gouvernante collet-monté ; un époux qui ne porte pas la culotte et un athée missionnaire qui offre sa main… Tous ces personnages détonants, allant par paires, vont faire des étincelles !

torse nu blond muscle travis fimmel australien

C’est sans conteste le premier tome qui est le plus enlevé. Unité d’action, de lieu, de caractères : le bateau est un microcosme des désirs humains et des conventions sociales, un « village global ». On peut mourir de honte et c’est ce qui arrive au révérend Colley, exalté par le matelot Billy Rogers, beau comme un Travis Fimmel posant pour Calvin Klein. Saoulé lors de la cérémonie du passage de la Ligne, Colley se voit offrir une fellation qu’il ne refuse point, dans l’entrepont, par l’éphèbe populaire. Après son décès, au tribunal de la dunette devant lequel le trop beau matelot doit s’expliquer sur « les mœurs » de la Royal Navy en usage durant cette journée de folie, il a cette réponse digne du rusé Ulysse : « dois-je commencer par les officiers, Monsieur ? » La réplique clôt aussitôt le débat parmi ces Anglais collet-monté de l’ère prévictorienne. Pas de jugement donc, le livre de bord affirmera « mort de maladie », ce qui fera tiquer notre Edmund encore idéaliste, et réfléchir à point nommé, lorsqu’on se veut politique, sur l’éthique de conviction et l’éthique de responsabilité.

Le tome second manque de souffle dans ses débuts, il peine à trouver un nouveau sujet dans cette traversée qui se prolonge. Heureusement qu’un bateau frère se rapproche, contenant de belles femmes, et que notre Edmund tombe raide dingue d’une jeunette d’à peine 17 ans. Un bal donné dans les grands calmes, un message puis la séparation brutale avec le vent qui lève et désunit les esquifs. Le souvenir de la belle alimentera le journal de bord de notre ingénu.

voiles d un bateau

D’autant qu’il lui reste le pire à affronter au tome trois : un aspirant inapte, un bateau qui craque de toutes parts, les quarantièmes rugissants. De quoi se poser d’utiles questions sur cette arche qui pourrait couler bel et bien avant de toucher terre. La tragédie rôde : sans mât de misaine, point assez de vitesse ; sans vitesse, point assez de nourriture ; réparer le mât exige des fers portés au rouge, au risque de faire brûler tout le bateau… Tragique dilemme qui fait se souvenir des deux éthiques : faut-il rester frileux et agir en Chirac/Hollande ? Ou bien se payer d’audace et tenter le tout pour le tout à la De Gaulle/Sarkozy ? Ce n’est pas dit comme cela mais c’est l’idée : principe de précaution et mort lente d’inanition, ou courage d’oser avec perspective de s’en sortir ? Pour de bons Anglais, hommes d’action, c’est le courage qui prévaut et non l’immobilisme. Malgré la tempête, malgré le mur de glace d’un gigantesque iceberg, malgré la disparition de l’intendant et du vif aspirant, le bateau parviendra à bon port, « le Hollande » et « le Sarkozy » ayant calculé, par la méthode précaution-tradition ou par la méthode innovation-calculs, le même point.

Edmund arrive en Australie en ayant surmonté la Mort, l’Amour et les Épreuves. Sa Quête initiatique se verra récompensée par une élection au Parlement de Londres, un héritage précipité lui donnera l’aisance et la main de celle qu’il aime pour rassasier ses désirs. La tête, le cœur et le ventre sont désormais comblés. Happy end.

Mais c’est moins cette fin qui compte que le déroulement de l’aventure. Dieu, référence lointaine, n’intervient pas, les sentiments humains sont passagers comme les hommes dans un bateau, les conventions sociales encadrent et fournissent une bonne excuse à la méchanceté foncière de l’être humain. En bref, on fait son destin par soi-même : en étant capitaine inflexible, lieutenant convaincant, époux inspiré. Edmund revit un périple d’Ulysse en découvrant le monde, les éléments et l’humanité réelle. Ce n’est déjà pas si mal.

William Golding, Rites de passage I, €6.46, Coup de semonce II, €6.46, La cuirasse de feu III, €6.46 sont édités en Folio, entre 300 et 400 pages chacun.

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Découvrir l’île de Rimatara

En ce samedi matin, le petit déjeuner expédié, nous partons à pied découvrir l’île à commencer par la grotte de Teruatave située en bordure de la piste d’aviation. Désolée, impossible pour moi de ramper par une ouverture de 90 cm x 90 cm avec le poignet gauche fracturé. Il vous faudra imaginer deux colonnes en pierre, une banquette en pierre taillée ainsi que des stalagmites et des stalactites dans une pièce de 3 m de hauteur et de 4 m de largeur. « Des sauvages cannibales vivaient dans cette grotte et aimaient manger les enfants. Certains enfants disparaissaient et n’étaient jamais retrouvés ! Les habitants du village n’étaient plus des cannibales et se demandaient qui était l’auteur de ces crimes. Un jour l’auteur fut surpris : c’était une des dernières femmes sauvages qui mangeait toujours de la chair humaine. Elle se réfugiait toujours dans cette grotte d’accès difficile. Les villageois l’ont attirée et capturée à l’aide d’un filet. On l’apprivoisa puis on la civilisa. Elle fut baptisée Pufenua (placenta), et ne mangea plus de viande jusqu’à sa mort ». Toutes les grottes de l’île ont toutes des histoires de cannibales.

GROTTE DE TERUATAVAE

Nous escaladons maintenant le Pito Oromana (le nombril de Rimatara). Pas nécessaire de s’embarrasser de cordes de rappel, piolets et autres, la hauteur maximale est de 8 400 centimètres comme le clament les Rimatara! Des pamplemoussiers ont été plantés par le SDR (Service de développement rural) et sont chargés de fruits délicieux, de quoi nous rafraîchir avant d’atteindre le sommet. Ce pito est situé au centre de l’île. De là-haut on voit toute l’île en un seul coup d’œil. Dans les temps anciens on y enterrait le placenta de l’enfant royal qui venait de naître. Cet emplacement de 2 m de côté serait la tombe du Roi Temaeva. Cet emplacement est sacré et tapu (tabou). La plus haute pierre indique le partage de l’île en deux, et l’on trouvera plus bas sur la route de ceinture une autre pierre dans un enclos et plus loin dans la mer un feo. En joignant ces points l’île de Rimatara est séparée en deux. La légende dit que tout incendie survenant dans la montagne n’atteindra pas le pito de l’île.

RIMATARA stèle commémorative

Nous redescendons au milieu de cocotiers… attention à ne pas circuler dessous car il fait du vent ! Baron, le chien, nous précède et trace le chemin. Nous sommes attendus pour le tamaara’a sur la plage et c’est du sérieux ! ici comme partout en Polynésie le ma’a est très important : cœur de cocotier récemment abattu (rien à voir avec les cœurs de palmiers en boîte), IPO (pain) cuit dans des feuilles de auti (Cordelyne fructicosa), uru (fruit de l’arbre à pain) tapé avec du punu pua’atoro (boîte de singe), du poulet aux aubergines, du ma’a tinito (cuisine chinoise) avec du riz, du poisson cru à la Rimatara, des pahu’a (bénitiers), pastèque. Tout est sur la table, il suffit de se servir. Les mouches, heureuses de cette prolifération de plats, nous accompagnent par régiments entiers ! Nous rentrerons en fin d’après-midi à la pension où le dîner oui, oui, encore du ma ’a, consistera en une salade de crevettes au pamplemousse et cœur de coco, suivie d’une loche à la vapeur avec du riz et un fei (banane de montagne) avec de la glace au coco. C’est impossible de tout manger mais pour les Rimatara ce n’est pas la même chose. La nuit sera venteuse, pluvieuse.

RIMATARA EGLISE ADVENTISTE

C’est dimanche il a plu toute la nuit, il a fait du vent toute la nuit, masquant les bruits des tupapa’u (personne défunte qui vient tourmenter les vivants) qui allaient et venaient dans notre bungalow. J’ai même l’impression qu’ils ont pris une douche dans la salle de bains ! Ce matin, un brunch était prévu. Impossible, rien que de penser à ce qui pourrait se trouver sur la table j’ai des douleurs au ventre. C’est le programme au temple protestant : 6h30 Première messe. 7h30 Grand repas dans chaque famille, 8h30-9h30 école du dimanche des enfants encadrés par les adultes, 10h-11h grand-messe pour tous, 15h-18h dernier office. Nous ne sommes pas venues pour ‘amu’amu (bouffer) mais pour l’île, les habitants et leurs légendes. Il pleut toujours et les sorties sont compromises. Dans l’après-midi, une éclaircie nous permet de mettre le nez dehors. Nous apercevons des ura en grand nombre et nous marchons jusqu’à Amaru où nous irons saluer les habitants du cimetière royal. Même s’il n’y a plus de roi, il est impératif d’aller se recueillir devant les tombes des dignitaires, histoire de ne pas avoir de mauvaises visites cette nuit. C’étaient probablement les messages des tupapa’u qui nous avaient visitées la nuit dernière. Il est temps de parler du ura.

Lori de kuhl polynesie timbre

Le ura ou lori de Kuhl est une perruche endémique de 18 cm de long qui appartient à la famille des loris. Ura veut dire rouge en tahitien. Son plumage est vert, jaune, rouge clair, rouge foncé, violet, une longue queue vert-rouge, un bec jaune foncé et des petites pattes jaunes grâce auxquelles il peut s’agripper aux branches des arbres fruitiers. Ses repas ? Le suc des fleurs, le nectar des fleurs de bananiers. Il se déplace en couple, signale sa présence par un sifflet strident et aigu. Il est présent partout dans l’île. D’après Teura Henry « le vini-ura, perroquet siffleur de Rimatara (Iles Australes) au plumage rouge, jaune, bleu et vert était l’émanation du dieu Ta’aroa » (Tahiti aux temps anciens, p.396).

Voici la légende du Ura de Rimatara : « Autrefois, il y a très longtemps, la marouette Moho était l’oiseau le plus beau de tous ceux qui peuplaient l’île de Rimatara, et tous l’admiraient pour ses couleurs chatoyantes. Son plumage était multicolore, rouge, bleu, vert, jaune… La perruche Ura était grise et terne. Personne ne l’appréciait malgré ses cabrioles dans les fleurs de bananiers et ses sifflements aigus. Le Ura devint triste et jaloux du Moho : sa beauté l’obsédait, il fallait qu’il obtienne d’aussi belles plumes que celles de son rival. Comment s’emparer des couleurs du Moho, toujours en éveil ? Il fallait ruser et profiter d’un moment opportun. Guettant le bel oiseau, le Ura attendit que celui-ci s’endorme pour sa sieste pendant les heures chaudes de la journée. S’approchant sans bruit il commença par s’emparer du vert des ailes, puis s’enhardissant il subtilisa le jaune du dos. Le Moho ne bougea pas. Il lui prit le rouge de la poitrine. Puis il lui vola le bleu de la tête. Mais alors qu’avant d’en finir avec l’orange des pattes, il voulait prendre la couleur rouge des yeux, le Moho (Porzana tabuensis) sentit le bec du Ura sur sa paupière et se réveilla brusquement. Il vit ce qui lui était arrivé et, se trouvant honteux sans son magnifique plumage, fila se cacher dans le marécage. Depuis ce jour, le Moho gris, qui a gardé son œil rouge et ses pattes oranges, ne se montre plus aux autres animaux et reste terré sous les hautes herbes ne sortant qu’au crépuscule – pendant que le Ura batifole haut dans les branches piaillant à tue-tête pour attirer l’attention et faire admirer sa beauté ».

RIMATARA PITO DE L ILE 8 000 CM

Les anciennes parures des chefs Polynésiens étaient autrefois en grande partie réalisées en plumes rouges de Ura, cette espèce vivait dans les forêts tropicales des Kiribati, de Polynésie française et des îles Cook. Mais dans l’ensemble de la Polynésie, l’oiseau qui les porte avait déjà disparu à l’arrivée des premiers explorateurs européens au 18e siècle. Il était trop chassé pour ses plumes. Seule l’île de Rimatara, grâce au respect d’un tabu (tabou) édicté par sa défunte reine et ancêtre Heimata Ura Vahine ou Tamaeva V (1893-1923) a pu conserver une population de ces oiseaux aujourd’hui classés « en danger d’extinction » sur la liste rouge de l’Union mondiale pour la Nature. Elle s’était adressée au Ura et lui avait dir « ‘Eiaha ‘ oe e haere fa’ahou i te tahi fenua’e (tu n’iras pas sur une autre île. S’adressant plus tard au ‘Ura vaero (lori mâle) et au ‘Ura pa’o (femelle), elle les supplia : E noho na’orua i ‘onei, tiretire o, tiretire a (vous vivrez ici, vous vous reproduirez encore et encore). Et lors des dernières cérémonies qu’elle présidait, vêtue de sa cape royale en plumes de ‘Ura, elle jure : ‘Aita atu i muri a’e ia’u nei e ‘abu fa’abou i teie ‘abu (personne après moi ne vêtira plus jamais cette cape » (bulletin n° 319 de la S.E.O.). En avril 2007, dans le cadre d’un programme de sauvetage de l’espèce, la Société d’Ornithologie de Polynésie Manu avait réalisé la translocation préparée scientifiquement de 27 loris de Kulh de Rimatara (Archipel des Australes) à Atiu (Iles Cook). Une plaque gravée commémore cet échange.

Hiata de Tahiti

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Voyage à Rimatara

Rimatara est la plus petite île des Australes, 9 km², 8,5 km de circonférence, à 665 km au sud-est de Tahiti. C’est une île circulaire issue d’un plateau volcanique. Les habitants ont l’habitude de parler de son altitude en cm soit 8 400 pour le plus haut sommet de l’île. Son lagon est quasiment inexistant. La population au dernier recensement 2012 est de 873 habitants.

RIMATARA

La première mention de l’île est faite par le capitaine Samuel Pinder Henry en 1811. En 1821, deux missionnaires protestants établissent une mission sur l’île. La France institue son protectorat en 1889 puis l’annexe en 1900.

FAUVETTE DE RIMATARA

Les paysages sont magnifiques, de superbes plages de sable blanc, un récif frangeant, des petites criques ornées de feo (corail fossilisé), quelques petites falaises, tout cela peut être découvert à pied, à vélo. Règne une végétation exubérante : arbres fruitiers, plantes à fleurs, plantations de taro, pandanus, nono, cocotiers pour faire du coprah, café, bananes, etc. Deux espèces endémiques rares : la fauvette de Rimatara et le ura (rouge en tahitien) ou lori de Kuhl. Trois villages sur l’île : Anapoto, Motuaura Et Amaru. Les spécialités sont le tressage des paniers ou peue (natte en fibre végétale tressée), les chapeaux, la préparation du fara (pandanus), la confection des colliers de coquillages «pupu». La sculpture sur bois d’une très grande finesse commence à être connue. Une destination à privilégier. Il y a deux pensions de famille sur l’île et un avion trois fois par semaine. Toute la population est protestante à part une petite communauté adventiste. Partons à la découverte de l’île.

LORI

Le débarquement d’avion ou de bateau oblige tous les visiteurs à passer à travers les volutes de fumée d’un feu de bourres de coco purificateur ! L’arrivée est matinale à la pension ‘La Perruche rouge’ et sitôt le petit-déjeuner avalé il faut partir en compagnie de N. dans les champs de pandanus. La variété de Paoere (Pandanus tectorius) est cultivée à grande échelle à Rimatara. C’est un pandanus à feuilles très vertes, sans aucune épine et stérile. Il faut couper quatre ou cinq feuilles, enlever la nervure centrale, nettoyer, tresser une guirlande qui sera mise à sécher à l’abri de la pluie. N. apprend aux touristes à faire un petit éventail. Pour 4 000 XPF par personne il en faut pour son argent. Le chef d’œuvre réalisé, c’est le repas Rimatara : soupe Rimatara (poulet, riz, pota vert (blettes) et lait de coco) taro, fei (bananes de montagne) et crêpes bananes. Pas question de se reposer : en voiture pour le tour de l’île, traversée des villages d’Anapoto, Mautuaura et Amaru et arrêts photos à la demande.

RIMATARA ENLEVER LA NERVURE CENTRALE

Ainsi le coin secret des amours défendus, Tamarii a Tara (Les enfants de Tara) ou Bain des vierges est un bassin naturel entouré de rochers sis près du Motu Rare Apo. La légende raconte qu’« il était une fois, au temps des rois, deux enfants qui s’aimaient en cachette. Les membres de leur famille s’opposaient à leur amour. Il leur était impossible de se présenter chez le Roi car les membres de leurs familles les épiaient. Ils décidèrent de s’enfuir et de se cacher dans les rochers au lieu-dit Hipuna. Seules, les jeunes filles connaissaient leur cachette. Chaque jour elles leur rendaient visite en prétextant aller prendre un bain ou de puiser de l’eau de mer à leur retour. Elles apportaient de la nourriture aux amoureux. Mais, un jour, ces enfants furent surpris par des pêcheurs et poursuivis jusque chez le roi. Ce dernier les accueillit et les maria. Malheureusement, ces enfants étaient frères et sœurs, enfants de Tara, et ne vécurent pas longtemps ensemble ». C’est l’un des plus beaux coins de l’île de Rimatara.

gamine gamin

Le Raro Apo, Mauna Teitei est un coin recherché des habitants surtout durant les fortes chaleurs. Les pique-niqueurs apportaient uniquement du taro (Colocasia esculenta) apo, qui est le préféré et le plus apprécié des habitants pour sa saveur et sa couleur. Les uns se reposaient, les autres plongeaient et tous étaient heureux !

SOUPE RIMATARA

La légende de vahiné Punarua : « Il y a bien longtemps sur l’île de Rimatara vivait une sirène à l’abri d’une profonde grotte marine dans la baie de Motuaura. On pouvait la voir sur la crête des vagues les jours de forte mer apaiser les flots afin de protéger le village. La renommée de sa beauté était parvenue jusqu’à Hurumanu, un vaillant guerrier d’une île lointaine qui désira vivement la conquérir. Il débarqua à Taanini au nord de l’île et bondit sur la montagne Oromana (8400 cm). Là, du sommet de l’île, il aperçut la princesse de ses rêves qui se baignait près du rocher Toaharao que l’on voit encore tout près de la superbe plage de sable blanc. Hélas lorsqu’il y parvint, elle avait à tout jamais disparue. Elle s’était réfugiée dans les rochers de Toaharoa et dit-on cachée dans une excavation nommée Punarua. C’est pourquoi les Anciens ont appelé leur sirène « Vahiné Punarua ».

Hiata de Tahiti

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Alexander Kent, Honneur aux braves

alexander kent honneur aux braves
Le capitaine Bolitho, en 1802, est désormais vice-amiral, il terminera le roman anobli. Il faut dire qu’il a conservé une île à la couronne, coulé deux navires ennemis et pris à l’abordage un troisième – un plus gros. Cette aventure de mer ne dépare pas les précédentes, la 15ème du lot. Nous sommes entre hommes et les relations humaines comptent par-dessus tout.

La mer, les hasards et les dangers, l’équipage, les anciens et les proches, ledit Alexander Kent (qui se nomme dans le réel Douglas Reeman) les connaît bien pour s’être engagé lui-même à 16 ans dans la Royal Navy. Il n’a pas son pareil pour décrire les affres et le courage des aspirants de 13 ans, des enseignes de 19 ans et des lieutenants de 20 ans, tout comme la responsabilité assumée des capitaines de 30 et des amiraux de 50 ans. Il le sait, ce qui compte est le chef, celui qui sait surveiller, aimer et rendre justice au travail de chacun : « Ces marins ne se battaient ni pour le pavillon ni pour le roi, comme le croyaient ces imbéciles de terriens. (…) ils se battaient pour leurs compagnons, pour leur bâtiment, pour leur commandant » p.231.

Nul ne connaît rien à la guerre, pas plus qu’à l’entreprise, s’il ne sait ces quelques mots. Ce n’est ni la gloire, ni l’argent, ni la femme, qui font se battre pour vaincre : mais l’attachement à ses camarades. Difficile à dire en ces temps de féminisme forcené et de chacun pour soi – mais c’est ainsi que cela fonctionne entre hommes.

‘Honneur aux braves’ est un bon roman d’aventures pour adultes – et l’on devient adulte dès 13 ans dans la marine à voile. Le lecteur se souviendra longtemps d’Adam le neveu, d’Evans le petit aspirant juste pubère, d’Allday le serviteur absolu, de Jethro l’ancien marin fidèle, de Keen le valeureux capitaine de pavillon. Les intrigues, les coups de main, les combats navals ne manquent pas. Il faut savoir nager, et pas que dans les vagues, dans la bêtise humaine des civils aussi qui ne pensent qu’au commerce et aux coups bas politiques. Si vous perdez, la faute vous en revient ; si vous gagnez, on se glorifie de vous avoir choisi et donné les bons ordres.

Mais pour Bolitho, ce qui compte sont les hommes. Il s’est marié, a eu une petite fille qu’il ne verra qu’un an plus tard, après sa mission. Celui qui est comme son fils est son neveu, qui lui doit tout. Que lui faut-il de plus ?

Malgré les traductions tardives et les parutions au compte-goutte, la série des 23 volumes de mer prenant Bolitho aspirant adolescent pour le quitter amiral en son âge mûr, est un délice de lecture. Oserai-je dire « pour les garçons » ? C’est mal vu par l’égalitarisme forcené des aigries qui n’ont pas trouvé pied à leur chaussure, mais je le dis. Il n’est ni interdit ni tabou aux filles d’aimer – enfin je crois – puisque la liberté est le premier des biens hérité des Lumières. Bienvenue sur la mer !

Alexander Kent, Honneur aux braves, 1983, traduit de l’anglais par Luc de Rancourt, Phébus Libretto 2011, 361 pages, €9.41

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Tahiti marine

On rouvre la pêche aux rori (holothuries ou concombres de mer) interdite par le gouvernement Temaru depuis octobre 2012 ! Cette pêche avait boosté l’économie polynésienne. En 2012, 235 millions de XPF de rori avaient été exportés. Une année prolifique pour les finances grâce au rori polynésien. Le peï (pays) avait surfé sur l’intérêt croissant des marchés asiatiques pour l’holothurie où celui-ci est consommé en soupe ou en salade – la bête serait aphrodisiaque – et une offre internationale de plus en plus restreinte compte tenu de la fragilité de cette ressource. Seules cinq espèces, les plus rentables seront autorisées à la pêche. Les rori ont un rôle majeur pour l’écosystème. Ils déplacent et mélangent le substrat et recyclent les matières issues de la désagrégation des roches. Les rori consomment et broient les sédiments et les matières organiques en fines particules, retournant les couches supérieures de sédiments des lagunes. Des éboueurs indispensables.

holothurie

En 1958, le premier poti marara (bateau à moteur) naissait grâce à l’ingéniosité et la persévérance de Léonard Deane, un pêcheur d’Arue âgé de 27 ans à l’époque. Aujourd’hui il a 83 ans et vit à Tubuai. Dans les années 50, la pêche aux marara (poissons volants) se pratique en pirogue, de nuit et à deux. Le rameur conduit le bateau muni d’une palme de cocotier séchée en guise de flambeau et à l’avant le pêcheur prêt à harponner le poisson. Quelques années plus tard, les premiers moteurs hors-bord arrivent sur le territoire. C’est moins fatigant ! Les pêcheurs remplacent le harpon par une épuisette, la palme de cocotier par une lampe à pétrole. Léonard est un pêcheur difficile qui fait fuir ses chauffeurs !

Il se retrouve donc seul pour aller pêcher. Il doit donc trouver le moyen d’être autonome. Il se penche sur plusieurs projets, il les teste sur une remorque. Il place une caisse à l’avant du bateau, ce sera le poste de pilotage. Il imagine un manche qui part du plancher, relié au moteur par des poulies et un câble ; il trouve un bambou qu’il attache sur le manche du moteur, ce sera l’accélérateur. Il essaie cette nouvelle machine et décide de partir en mer la tester. Cela a marché car il peut dès le lendemain apporter ses poissons au marché ! Il livre le double de ses concurrents, il n’a plus besoin de chauffeur. Il est aidé par le concessionnaire Mercury pour perfectionner son invention, porter une lampe frontale qui libère la main gauche. Le poti (bateau) marara (poisson volant) fait des émules. Dans les années 70 on l’utilise pour la pêche au mahi mahi. Un pêcheur s’est rendu compte que le mahi mahi ne plonge pas quand la mer est agitée, il reste en surface. Le poti marara, une aubaine pour les pêcheurs de mahi mahi ! Les fils ont repris le flambeau du papa, l’un construit toujours en bois et l’autre en polyester mais toujours des poti marara !

poti marara bateau

Construction d’une marina au centre-ville de Papeete par le Port autonome qui investit dans la plaisance. Pour le moment nous sommes privés de promenade sur le quai en bois le long du boulevard Pomare. Il paraît que la marina pourra accueillir 80 bateaux dont une dizaine de yachts. La mise en service est prévue en 2015, le montant des travaux s’élève à 700 millions de XPF. Avancez la moni (monnaie) !

Oli, le cyclone de 2010 avait laissé des traces. Papenoo sur la côte Est de Tahiti n’est pas protégée par la barrière de corail. L’océan est virulent, il fallait protéger la population qui vit en bordure de route d’une éventuelle catastrophe naturelle. 380 millions de XPF investis dans ces travaux dont 60% financés par le FED (Fonds européen de développement). Mauruuru (merci) l’Europe ! Ce seront des blocs de béton en puzzle qui soutiendront la future digue. Ils ont copiés les Pays-Bas champions en la manière de protéger leur pays des eaux. Mais les blocs seront fabriqués au fenua ! Après, l’Océan n’aura qu’à bien se tenir !

Hiata

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Crabes et poissons sur Kauehi

Le kaveu (crabe de cocotier ou crabe voleur) est un crustacé désigné scientifiquement sous le nom de Birgus latro. Bien qu’autrefois abondante dans les îles polynésiennes, la population de kaveu a fortement diminuée. Cette espèce doit être protégée. C’est le plus grand animal terrestre possédant des pattes articulées.

KAUEHI LODGE KAVEU

Il peut vivre jusqu’à 40 ans, atteindre une taille de 50 cm et un poids de 5 kg. Il appartient à la famille du bernard l’hermite mais, contrairement à celui-ci, une fois adulte il n’a pas besoin de se protéger dans une coquille, son abdomen étant calcifié. Il possède 10 pattes : une paire de grosses pinces pour se nourrir avec laquelle il peut ouvrir une noix de coco et peut soulever 29 kg ; trois plus petites paires de pinces pour marcher et grimper aux arbres jusqu’à une hauteur de 6 m ; une dernière paire généralement rentrée pour nettoyer ses organes respiratoires. Il possède un bon odorat mais une mauvaise vision, ses antennes détectent les vibrations. En immersion constante il se noie mais, privé d’eau de mer, il meurt également…

KAUEHI OEUFS DE KAVEKA

L’accouplement se déroule à terre de décembre à mars. Au bout d’un mois, après la nouvelle lune, la femelle migre la nuit dans l’océan. A marée haute, elle présente son abdomen aux vagues et libère alors entre 50 000 et 150 000 œufs. Les œufs éclosent, deviennent des larves qui demeurent un mois dans la mer. Elles deviennent amphibies, sortent de l’eau, se métamorphosent en jeunes crabes qui se protègent dans une coquille. La bête abandonne sa coquille après un an et trois mues successives et vit en bordure de mer. Adulte, il ne muera plus qu’une fois par an. Pour ce changement de carapace, il séjourne près d’un mois dans un trou creusé jusqu’à 1 m de profondeur. Son régime alimentaire ? Il mange de tout : fruits, feuilles décomposées, bois, rats, charognes, sa propre mue, source de calcium ! Il est suffisamment fort pour débourrer une noix de coco, l’ouvrir et la manger. Sur une noix de coco il y a deux yeux et une bouche noire. Il suffit au crabe de découvrir l’endroit le plus fragile pour perforer la noix de coco et se nourrir. Dans la journée il se cache dans des trous ou sous des arbres, échappant ainsi aux prédateurs et à la chaleur desséchante. Unique au monde et appartenant aux richesses du patrimoine polynésien, il faut sauvegarder cette espèce insolite et rare. La cohabitation avec l’homme est dangereuse pour sa survie. Pour l’avoir goûté une seule fois, ici à Kauehi, la chair des pattes et pinces a un goût de coco assez prononcé et ce que l’on peut manger dans son corps a un aspect un peu « bizarre » et un goût encore plus bizarre.

On nous avait fait goûter aux œufs de kaveka qui ont la taille des œufs de poules nini, dont le jaune est plus foncé, presque orange et qui sent un peu l’océan. Délicieux, ces œufs !

KAUEHI ANCIEN PHARE DE TAGAROAROMATAHARA

Allons marcher vers l’océan. Voici les restes de l’ancien phare de Tagaroaromatahara. Construit dans les années 1930 pour guider les bateaux venant d’Amérique, il n’a jamais été mis en service, la lumière n’ayant pas été installée par manque de financement ! « Aita e moni, aita e mori » (pas d’argent, pas de lumière). Il est dans un piteux état actuellement. C’était la famille Degage de Rurutu qui avait eu le marché des phares de Kauehi et de Fakarava. Il y eut un mort sur le chantier lors de la construction, enterré dans le cimetière de Kauehi. On cherche toujours des sponsors pour nettoyer le lieu et le rendre visitable par les touristes. Eugène Degage s’était engagé à participer à la mise en valeur du lieu. Il semble que Kauehi soit toujours en attente d’autres sponsors pour financer ce qui serait  une bonne action.

KAUEHI TEATA PECHEUR AU HARPON

M. souhaitait remplir sa glacière pour ramener quelques poissons à sa famille de Tahiti. Elle avait entendu parler d’un pêcheur au patia (harpon). Ce pêcheur, Teata, avait été la vedette d’un reportage. Courir sur le platier, harponner des perroquets en pleine course n’est pas donné à tous. Nous apprendrons aussi qu’il est champion de lancer du javelot du village, qu’il est un excellent pétanqueur également. Rendez-vous est donc pris avec lui. Nous embarquons tous les quatre sur le speed boat de JC. L’eau du lagon est agitée, très agitée, et il faut traverser ses eaux pour rejoindre la passe. Arrivés à destination, le pêcheur et M. doivent sauter à l’eau pour rejoindre les bords du hoa et le platier. JC et moi restons à bord, franchissons la passe au courant sortant, et nous nous retrouvons côté océan, beaucoup plus calme que le lagon ! JC installe ses cannes avec l’espoir de ramener un thon ou autre poisson. Il attrapera un mahi mahi (dorade coryphène) aux couleurs magnifiques mais qui se décrochera tout seul et deux énormes loches qu’il rejettera. Les pêcheurs ont un doute sur la chair de ces loches – tant mieux pour elles. Elles retrouvent les eaux de l’océan après une sacrée peur !

KAUEHI OURSIN CRAYON

C’était en quelques lignes notre séjour sur l’atoll de Kauehi aux Tuamotu. Une pension à recommander mais pensez aux moustiques et nonos qui pourraient gâcher  les soirées de votre séjour.

Hiata de Tahiti

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Motu de Kauehi

Nous continuons notre promenade. Le motu principal est long. Après la pension, l’aéroport, le village, quelques rares habitations isolées, d’anciennes fermes perlières abandonnées dont les bâtiments continuent de rouiller dans le lagon, les cocoteraies qu’une association avait commencé à nettoyer et à régénérer, nous restons toujours sur la piste.

KAUEHI MARE A KOPARA DE PATAMURE

JC nous montre les lagunes, grandes mares d’eau saumâtre où les pati’i (Chanos chanos) grandissent. La mare à kopara est un univers clos où la vie semble retenir son souffle. Le poisson-lait est un animal quasiment légendaire. Lorsque les eaux de l’océan sont en furie, la mer pénètre dans les cocoteraies, inonde des atolls  se confondant avec leur lagon. Les Chanos chanos suivent les flots, abandonnent l’océan et s’aventurent « à terre » ! Persona non grata ? Non, ils ne repartent pas après les tempêtes et se laissent piéger dans les mares formées après l’inondation. Le Chanos chanos, blanc sur les flancs, gris vert sombre sur le dos, peut atteindre 1,50 m de long à l’âge adulte. Ce sont des prisonniers volontaires de ces petits lacs peu profonds, en plein soleil durant la journée et où l’oxygène devient rare. Ils pourront rester prisonniers volontaires durant deux ou trois ans avant d’entreprendre leur retour vers l’océan en profitant d’une autre tempête. Leur comportement est ahurissant. Ils se nourrissent de ce tapis de bactéries, ce kopara, une nourriture abondante mais peu variée.

KAUEHI MARAE

Le Chanos chanos (poisson-lait) est une espèce importée de Tahiti qui existe en « trois versions » :

  1. un possède une poche à kopara (le plus prisé pour sa poche qui est un mets de choix pour les Paumotu (habitants des Tuamotu) ;
  2. un autre dont l’estomac a la forme d’une boule consistante (pouru) ;
  3. et le dernier qui ne possède ni poche, ni pouru!

Le kopara est une sorte d’algue poussant dans la vase des mares, mangée par les Chanos chanos. On prélève cette algue prédigérée par le poisson. Mélangée à de l’eau de coco et consommée avec du mitihue, cela donne un mets typique – excellent… pour les habitants des atolls. Le mitihue est une sauce préparée à partir de morceaux de coco ‘omoto mis à fermenter dans  de l’eau avec du jus de chevrettes, à l’intérieur d’une calebasse. ‘Omoto est le quatrième des six stades de croissance du coco. A ce stade, l’amande du coco est consistante sans être dure. Nous n’avons pas été invitées à nous familiariser avec ce kopara !

KAUEHI MARAE DE TAGAROAFAINU

La lagune de Patamure se trouve près du puits du même nom. Ce puits donne une eau pure et délicieuse. Les habitants venaient par le lagon se ravitailler en eau douce. Maintenant il y a Vaimato et Royale (eaux de source) en bouteilles, en bonbonnes… vendues dans les magasins ou sur la goélette.

KAUEHI PUITS PATAMURE

Il existe un motu à piu’u. Les piu’u (coques) sont de tout petits coquillages blancs, jaunes ou orange que les femmes allaient ramasser pour les enfiler et en faire des colliers. Actuellement, c’est pour la Toussaint que ces coquillages sont utilisés par pelletées pour recouvrir les tombes du cimetière. A Tahiti, on fait venir du  sable blanc des Tuamotu pour recouvrir les tombes. Aux Tuamotu on utilise les piu’u.

Il y a bien un ancien site de ponte des tortues sur l’atoll, mais la chair de tortue est si prisée par les habitants, les œufs de tortues sont paraît-il excellents alors… les tortues ont déserté l’atoll, comme à Ahe.

KAUEHI POKEA (POURPIER ATURI)

Un des marae de l’atoll ne comporte plus que quelques pierres dressées et se situe dans le jardin de la pension. C’est le marae Tagaroafainu comme le nom de la terre sur laquelle la pension a été bâtie en 2008.

Voici la légende des manifestations du guerrier Tagaroafainu : Sur le motu Tagaroamatahara, on pouvait apercevoir le grand guerrier Tagaroafainu se cacher sous l’apparence d’un kaveu (crabe de cocotier) ou prendre la forme d’un paku (nuage) qui lui ressemblait. La légende dit que les anciens ont souvent vu ce crabe de cocotier qui était bien reconnaissable car totalement entouré de mousse. Mais lorsqu’on l’attrapait, il n’était pas possible de le cuisiner. Sitôt dans la marmite, il disparaissait et retournait à l’endroit où on l’avait pris. On raconte également qu’il n’aurait eu qu’une seule pince. Droitier ou gaucher, nul ne le sait mais il pinçait fort disait-on. Lorsque l’on voyait son paku, le nuage ayant sa forme, au-dessus du motu Tagaraomatahara, cela signifiait alors aux villageois qu’un bateau arrivait, ou que le temps allait être maussade. Les récits anciens racontent que lorsqu’on voyait le paku de Tagaroafainu, on pouvait également voir le nuage  au-dessus de la passe Arikitamiro à Kauehi. Si celui-ci regardait au loin, alors une tempête se préparait et si le nuage regardait au milieu de la passe, alors un bateau arrivait.

Hiata de Tahiti

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Atoll de Kauehi aux Tuamotu

Le rendez-vous était fixé à 6 heures à l’aéroport de Tahiti-Faa ’a. Il avait fallu se lever à l’aurore, prendre la voiture à 4h45 pour rejoindre l’aéroport des lignes intérieures – et déjà ceux qui partaient vers Papeete étaient nombreux sur la seule route de l’île. Bien arrivées, bien enregistrées, le départ ne saurait tarder.

ATOLL ATIU

Tiens, c’est un ATR-42, et il y a deux escales avant d’arriver à destination ! La flotte d’Air Tahiti se chiffre à : 7 ATR 72-500 + 2 ATR 42-500 + 1 Beechcraft affecté à Air Archipels et 1 Twin-otter, propriété de la Polynésie française exploitée par Air Tahiti. Air Tahiti est la compagnie aérienne qui dessert régulièrement 47 îles en Polynésie française ; Air Archipels est spécialisée dans les vols à la demande et les évacuations sanitaires (evasan). Elle assure également pour le compte d’Air Tahiti la desserte de certaines îles en Twin-otter et en Beechcraft. La Polynésie vient de faire l’acquisition d’un ATR 600.

Pour poser un ATR 42 il faut disposer d’une piste d’une longueur minimale de 900 m, qui passe à 1 100 m minimum pour un ATR 72. En fonction des caractéristiques de la piste, des performances de l’avion on calcule la charge maximum qui peut être offerte au décollage et à l’atterrissage. En cas de pluie, la distance est augmentée. L’ATR 42 ne pourra embarquer que 36 places sur les 48 proposées. L’avion est déclaré plein par la Compagnie, à la grande surprise des passagers qui découvrent des rangées de sièges vides ! Un défi perpétuel.

Ce matin, l’avion n’est pas rempli ! A l’escale de Fakarava tous les passagers sont priés de descendre même ceux en transit car l’avion fera le plein. Quelques passagers sont accueillis par les pensions de famille. On repart direction Kaukura où descendent quatre passagers, mais les sièges libres sont destinés à recevoir du fret dans une toile bleue conçue à cet effet. Heureusement qu’il y a un passager qui se trouve être une personne de l’escale de Kauehi et qui aide ses deux collègues bien empêtrés. On repart, on atterrit à Kauehi, nous sommes quatre à descendre : deux touristes pour le Kauehi Lodge et deux locaux. Nous sommes accueillies avec chacune un énorme collier de tiare Tahiti. En route pour la pension à environ deux kilomètres de l’aéroport en Land-Rover !

KAUEHI LODGE

Le lieu est superbe, pieds dans l’eau du lagon, palette de couleurs à disposition et un coco à siroter.

KAUEHI LODGE

Kauehi, appelée Noka Noka par les anciens, puis Cavahi à sa découverte par Fitzroy, ensuite Vincennes par Wilkes est un atoll de l’archipel des Tuamotu dépendant administrativement de la commune de Fakarava.

FAKARAVA

Son nom peut être traduit par « s’arrêter pour pêcher ». Stevenson, au cours de son voyage dans les mers du Sud, l’a trouvée inhabitée. « Elle était toute de brousse verte et sable blanc, sertie d’une eau bleue et transparente ; les cocotiers étaient rares, mais quelques-uns pourtant complétaient la brillante harmonie de couleurs en laissant pendre un éventail d’or jaune ». Cet atoll est situé à 17 km au nord-ouest de Raraka, l’île la plus proche qui ne dispose pas d’un aérodrome. Les passagers à destination de Raraka descendent à Kauehi et prennent un speed-boat pour rejoindre l’île.

KAUEHI

Kauehi est à 45 km au nord-est de Fakarava et à 462 km au nord-est de Tahiti. Kauehi, de forme ovale, s’étend sur 24 km de longueur et 18 km de largeur maximales pour une surface de terres émergées d’environ 15 km2 et un lagon de 320 km2 accessible par la passe Arikitamiro. Celle-ci fait 200 m de large et 9 m de profondeur, elle est navigable. Un chenal de 15 km, balisé à travers le lagon, permet l’accès jusqu’à quelques centaines de mètres du village. La goélette reste au large car elle ne peut accéder au quai à cause des grands bancs de sable à proximité. D’un point de vue géologique, l’atoll est l’excroissance corallienne de 95 m du sommet d’un petit mont volcanique sous-marin homonyme qui mesure 1 535 m depuis le plancher océanique. Il s’est formé entre 52,5 et 58,1 millions d’années.

D’après le dernier recensement de 2012, il y aurait 531 habitants sur l’atoll, regroupés dans le village de Tearavero mais, en parlant avec les locaux, nous apprendrons qu’il n’y en aurait qu’une centaine. Alors qui croire ? Ceux qui y habitent ? Ou ceux qui font des statistiques ?

KAUEHI VILLAGE DE TEARAVERO

On pense que l’atoll était connu depuis fort longtemps des marchands de perles mais officiellement c’est l’Anglais Robert Fitzroy qui, le 13 novembre 1835, a posé le premier pied blanc sur l’atoll. Mais l’endroit fut certainement peuplé par les Polynésiens venant de Fidji, Tonga et Samoa autour de l’an 1 000 (+ ou – 200 ans). Imaginez les grandes pirogues à balancier, sans instruments de navigation « modernes », réalisant cet exploit tandis qu’aujourd’hui l’ATR 42 nous y dépose sans aucune difficulté ! Kauehi fut néanmoins l’une des dernières  îles découvertes par les Européens en 1835 alors que Magellan au cours de son tour du monde en 1521  avait découvert l’atoll de Puka-Puka. La colonisation de l’atoll par les Français n’interviendra qu’au milieu du 19e siècle. Coprah et pêche lagonaire sont ses ressources, les fermières perlières ont  maintenant déserté l’atoll.

L’atoll est classé comme conservatoire biologique de très haute importance par l’UNESCO, programme MAB « Réserve de la biosphère » créé en 1977. Sept atolls composent la réserve : Aratika + Fakarava + Kauehi + Raraka + Toau + Niau + Taiaro. C’est Taiaro qui avait été classé le premier en réserve intégrale depuis 1972 à la demande de son propriétaire W.A.Robinson. La réserve s’est étendue en 1973 à la totalité de l’atoll et à une zone de 1 000 m au large. Les autres atolls l’ont rejoint comme «réserve de la biosphère » en 1977.

Trois grandes directives pour une réserve de biosphère :

  1. conservation de la biodiversité et des écosystèmes ;
  2. développement économique et social de la population ;
  3. appui logistique du réseau international de recherche d’observation et de formation.

Hiata de Tahiti

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