
Un roman écrit « sept fois » , coupé en deux, et dont la première partie L’Arc-en-ciel a été censurée lors d’un procès pour indécence de la part de l’évêque de Londres, en vertu d’une loi de 1857. L’auteur de moins de 30 ans décrit l’activité sexuelle à une époque où le conflit mondial pousse la moralité publique à se rigidifier. Il faudra encore quatre ans pour que la seconde partie, qui deviendra Femmes amoureuses, puisse enfin être éditée, après moult corrections et révisions, et d’abord aux États-Unis, à 1250 exemplaires seulement, avant le succès. L’édition anglaise de 1500 exemplaires, ne suivra que précautionneusement, l’année suivante, la critique trouvant le roman « absurde », voire « une abomination ». C’est que la religion, la bourgeoisie et le qu’en-dira-t-on ne badinent pas avec les convenances victoriennes. Et ce n’est qu’en 1960 qu’un nouveau procès à propos d’une œuvre ultérieure de l’auteur, L’amant de Lady Chatterley, balayera – enfin ! – ces réactions d’un autre âge.
« Ce roman ne prétend être qu’un témoignage sur les désirs, les aspirations et les luttes de son auteur : en un mot, un récit des plus profondes expériences du moi. Rien de ce qui vient de l’âme profonde et passionnée n’est mauvais, ni ne peut être mauvais. Il n’y a donc aucune excuse à présenter, sauf à l’âme elle-même, si l’on a donné d’elle une image mensongère. » C’est ainsi que l’auteur tente de se justifier dans un Projet de préface en 1919. Il est vrai que le roman parle du désir, de « l’amour », de ce qu’il est et de ce qu’il devrait être, l’ensemble de l’histoire baignant constamment dans une atmosphère érotique.
Deux jeunes femmes de 30 ans, déjà présentes dans L’arc-en-ciel, Ursula et Gudrun, songent à « s’établir » en société. Ce qui signifie, outre le métier, qu’elles exercent, plus ou moins le mariage. Pas d’autre fin dans la société chrétienne bourgeoise anglaise pour les filles. C’est qu’en l’absence d’avortement autorisé et de pilule pas encore inventée, tout « écart » peut engendrer un bébé, donc dévaluer la personne et la mettre au ban de la « bonne » société respectable. Sauf que l’émancipation est venue aux filles avec le siècle, Ursula enseigne en primaire tandis que Gudrun sculpte et dessine, artiste à peu près reconnue dans les milieux londoniens. Pas question, donc, de devenir des bobonnes assignées aux mômes, à la cuisine et à l’église. Toutes deux portent des prénoms wagnériens et sont adeptes de la volonté nietzschéenne, que l’auteur prisait fort.
Elles vont jeter leur dévolu, dans leur province minière aux alentours de Nottingham, sur deux hommes à peu près de leur âge, Rupert Birkin, inspecteur des écoles, qu’Ursula côtoie professionnellement, et Gerald Crich, fils aîné du patron des houillères locales, que Gudrun attire physiquement. Les deux jeunes hommes sont amis, et même « amoureux » l’un de l’autre, dépassant le magnétisme du corps pour viser la fusion des âmes.
Le corps, l’esprit, ne sont que des concepts ; dans la réalité des êtres, ils ne peuvent être dissociés. « Et elle sut, avec la clarté du savoir suprême, que le corps n’est que l’une des manifestations de l’esprit, la transmutation de l’esprit intégral inclut aussi la transmutation du corps physique » p.204. Conception très nietzschéenne, que l’auteur fait sienne, et qu’il décline chez les deux sexes. « Oh, la beauté de ses reins soumis, blancs et faiblement lumineux lorsqu’il grimpa sur le côté de la barque, cette beauté inspira à Gudrun une envie de mourir, mourir. La beauté de ses reins pâles et lumineux lorsqu’il grimpa dans la barque, son dos arrondi et doux… Ah, c‘en était trop pour elle, c’était une vision trop définitive. Elle le savait, c’était fatal. Le terrible désespoir du destin, et de la beauté, d’une telle beauté ! Pour elle, il n’était pas comme un homme, il était une incarnation, une grande phase de la vie » p. 192 Pléiade. Le corps a une aura qui attire, et le désir sexuel qu’il suscite est une étape vers le désir d’amour qui va plus loin. « Gerald s’approcha du lit et contempla Birkin dont la gorge était dévoilée, dont les cheveux en bataille retombaient de façon charmante sur son front chaud, au-dessus d’yeux si incontestés et si calmes dans ce visage satirique. Gerald, aux membres pleins et gonflés d’énergie, répugnait à s’en aller, il était retenu par la présence de l’autre homme. Il n’avait pas le pouvoir de partir » p.223. Gerald est un tombeur, sa beauté nordique, sa prestance musculaire, son aisance sociale font tourner les têtes des filles. « Gerald, qui maîtrisait à présent parfaitement la danse, avait à nouveau pour partenaire la cadette des filles du professeur, qui se mourait presque d’enthousiasme virginal, parce qu’elle trouvait son cavalier si beau, si superbe. Il la tenait en son pouvoir, comme si elle était un oiseau palpitant, une créature qui voletait, rougissante, aux abois » p.443.
Pour lui, la sexualité est une limite qui empêche d’aller au-delà du corps, vers l’âme. C’est un obstacle, la plupart du temps désagréable. « C’était le sexe qui transformait l’homme en moitié brisée d’un couple, la femme en autre moitié brisée. Et il voulait être une unité à lui seul, comme la femme serait une unité à elle seule. Il voulait que le sexe retournât au niveau des autres appétits, considéré comme un processus fonctionnel et non comme un épanouissement. Il croyait en un mariage sexuel. Mais par-delà, il voulait une union plus complète, où l’homme avait un être et la femme avait le sien, deux êtres purs, chacun constituant la liberté de l’autre, chacun équilibrant l’autre comme les deux pôles d’une même force, comme deux anges, ou deux démons. Il aspirait tant à être libre, et non sous la compulsion d’un besoin d’unification, et non torturé par le désir insatisfait » p.212. Pour elle, c’est au contraire l’amour qui est tout. « Elle croyait que l’amour surpassait de loin l’individu. Il disait que l’individu était supérieur à l’amour, ou à toute relation. Pour lui, l’âme brillante, isolée, acceptait l’amour comme une de ses situations, une condition de son propre équilibre. Elle croyait que l’amour était tout. L’homme devait se soumettre à elle, pour qu’elle pût le boire jusqu’à la lie. Qu’il fût entièrement son homme, et elle en retour serait son humble esclave, qu’il le voulût ou non » p.285. C’est cela qui est inacceptable pour Birkin, qui a quitté Hermione, trop dominatrice ; c’est aussi inacceptable pour Gerald, qui finira par presque tuer Gudrun pour échapper à son pouvoir, et fuira hors d’atteinte de ses rets. Laquelle Gudrun se pense comme Cléopâtre, la couguar dévoreuse d’hommes, à commencer par ses frères-maris dès 13 ans, les Ptolémée. « Cléopâtre avait dû être une artiste ; elle prélevait l’essentiel d’un homme, elle récoltait la sensation suprême, et jetait l’enveloppe » p.484.
Vampirisme féminin ou brutalité phallique, l’amour est une guerre des sexes, tandis que le mariage est une guerre des classes, et l’entreprise une guerre de domination sur la matière et sur les hommes. Tout est conflit, chez Lawrence. Il interprète la « volonté de puissance » de Nietzsche comme on le faisait en son temps pré-nazi, comme une volonté de domination. Alors que ce n’est pas cela, nous le savons aujourd’hui. De même, les amis s’affrontent, ils doivent être « les meilleurs ennemis » dit Nietzsche. C’est lorsqu’un troisième personnage intervient, comme un trublion, que la violence éclate. Ainsi Hermione avec Birkin, ou Loerke avec Gerald.
Ce que nous appelons « l’amour » est un combat, une lutte continuelle, où le désir physique de domination est roi, de l’aura magnétique des corps à la possession des étreintes et à l’imposition de sa volonté à l’autre. Homme comme femme. Gerald tente ainsi de posséder Birkin par la lutte japonaise. Les deux amis s’entraînent « nus » sur le tapis dans le salon, où ils ont poussé les meubles, porte verrouillée à cause des domestiques. « C’était comme si toute l’intelligence physique de Birkin et le corps de Gerald s’interpénétraient, comme si son énergie fine et sublimée entrait dans la chair de l’homme plus robuste, comme une puissance, ses muscles enfermant dans un filet étroit, dans une prison les profondeurs mêmes de l’être physique de Gerald » p.290. Fusion des corps comme amour des âmes. Gudrun est excitée par Gerald, fantasmant une absence complète de retenue licencieuse. « Elle se rappela les abandons de la décadence romaine, et son cœur s’embrasa. Elle savait qu’elle aspirait elle-même à cela aussi, ou à autre chose, à quelque chose d’équivalent. Ah, si se libérait ce qu’il y avait en elle d’inconnu et de refoulé, quel événement orgiastique et satisfaisant ce serait. Et elle le voulait, elle tremblait légèrement du fait de la proximité de l’homme qui se tenait derrière elle, suggérant la même noirceur licencieuse qui se dressait en elle. Elle la voulait avec lui, cette frénésie inavouée » p.308.
N’avoir que des relations entre sexes rend incomplet, inachevé, pense Birkin ; pas Gerald. « En fait, poursuivit Birkin, parce qu’on fait de la relation homme-femme la relation suprême et exclusive, c’est là qu’intervient toute la contrainte, la mesquinerie et l’insuffisance. (…) Il nous faut quelque chose de plus large. Je crois en une relation additionnelle parfaite entre hommes, additionnelle au mariage. (…) Gerald eut un mouvement de malaise. Tu sais, je ne sens pas cela. Il ne saurait y avoir entre deux hommes quelque chose d’aussi fort que l’amour sexuel entre un homme et une femme. La nature n’y fournit aucune base. – Eh bien, moi, je pense le contraire, évidemment. Et je crois que nous ne pourrons pas être heureux tant que nous ne nous serons pas établis sur cette base. Il faut se débarrasser de l’exclusivité de l’amour conjugal. Et il faut accepter entre deux hommes cet amour refusé. Cela offre plus de liberté pour tous, un plus grand potentiel d’individualité chez les hommes comme chez les femmes » p.380. Mais c’est Birkin qui va se marier, pas Gerald…
Un roman qui reflète le chaos de Lawrence, reflet du chaos de son monde, ce début du XXe siècle qui allait bouleverser les consciences, les mœurs, l’économie avec ses guerres mondiales, la perte des empires, l’émancipation de la religion – et la montée des individus.
En 1969, Ken Russell réalise Women In Love, un film tiré du roman.
David Herbert Lawrence, Femmes amoureuses (Women in Love), 1920, Folio 1988, 704 pages, €5,00
D.H. Lawrence, L’Amant de Lady Chatterley et autres romans, Gallimard Pléiade 2024, 1281 pages, €69,00
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Les romans de D.H. Lawrence déjà chroniqués sur ce blog
France-Culture s’est couvert de pipi
En virant Jean-Louis Bourlanges de l’antenne, pour avoir déclaré dans l’mission de Philippe Meyer L’esprit public, après un argumentaire étayé, son choix raisonnable d’Emmanuel Macron de préférence à François Fillon – compte-tenu des « affaires » que vous savez – la chaîne montre soin mépris des auditeurs autant que sa sensibilité pour le moins très variable des « règlementations ».
Cela ne gêne personne, sur cette chaîne de service public, dont on aimerait qu’elle soit plus au service du public, de militer en faveur de Mélenchon ou de soutenir Hollande ou Valls – mais cela gêne que quelqu’un vende la mèche. Le « mainstream » de nombreuses émissions de gauche, sinon dans le gauchisme d’ambiance, sont tout aussi orientées (les chroniqueurs « de droite » – bien qu’intelligents, dirait-on à gauche – Alain-Gérard Slama puis Brice Couturier ont été par exemple « écartés » des Matins) – mais dire que le roi est nu est un scandale chez les vieilles barbes cultureuses.
La « neutralité » du service public est tellement vantée en ce qui concerne le port du voile ou le prêche des religions que l’on croyait naïvement qu’elle devait s’appliquer autant à ces religions laïques que sont les idéologies. Mais vous n’y pensez pas ! « Les mêmes usages seront appliqués partout », déclare la directrice de la chaîne Sandrine Treiner (je souligne le futur qui est employé…). Or, soit on définit les limites avant, indiquant clairement ce qu’il ne faut pas déclarer – et on l’applique à tous – soit la souplesse est de mise, par exemple avec un rappel à l’ordre et un droit de réponse. Mais pensez-vous ! Un « journaliste » a une éthique : s’il défend tel ou tel courant, croyez bien que ce n’est que pur professionnalisme, un avatar de sa « mission » d’éclairer le bon peuple des ignorants. Quant aux chroniqueurs invités – comme Jean-Louis Bourlanges – c’est en tant qu’acteurs et non en tant que « journalistes » qu’ils interviennent sur France-Culture. Or un acteur a des convictions – pas les journalistes – on peut virer un acteur, jamais un journaliste… CQFD.
Cette chaîne de radio ne doit pas beaucoup être écoutée dans la « France périphérique », ni par le peuple tout court si l’on en croit les sondages (1.8% d’audience cumulée après la grève XXL de l’an dernier). Le public qui l’écoute est donc éclairé et censé intelligent. Comment pourrait-il accepter cette forme de censure hypocrite de la part d’ignorants ou de velléitaires ? Argumenter, puis conclure, est de bonne logique humaniste. Faire appliquer le règlement est juste… quand il s’applique également à tous. Ce qui est loin d’être le cas dans chacune des émissions, sans que « la direction » s’en émeuve !
A-t-elles subi des « pressions » ? On dit que le cucul clan Fillon s’est lamenté. Mais « les affaires » sont les affaires : peuvent-elles changer la réalité ? Se disent-elles plutôt, ces vieilles barbes cultureuses, qu’après cinq ans de gauche, une droite revancharde risque de revenir au pouvoir, allumant déjà le brasier où griller leurs petites fesses ?
L’esprit public s’était déjà dégradé avec l’arrêt d’antenne « pour doublon avec une autre émission » de Jean-Claude Casanova, puis l’éviction d’Yves Michaud en 2009 pour propos virulents contre Roman Polanski, enfin le départ pour raisons de santé de Max Gallo. La sortie de Jean-Louis Bourlanges ôte un peu plus à l’émission ce rôle original de club de professionnels qui conversent au profit du rôle convenu du clan des « journalistes » qui monologuent. Ils sont bien pâles en comparaison, ânonnant d’une voix morne leurs observations de l’extérieur, sans cette veine du vécu qui valait tant.
Si L’esprit public devient un club de journalistes, comme il en existe un peu partout sur les chaînes, son intérêt est perdu. Jean-Louis Bourlanges avait été conseiller maître à la Cour des comptes, conseiller régional, député européen, sénateur, professeur à Science Po ; Max Gallo avait été la plume de François Mitterrand avant de devenir l’écrivain d’histoire qui l’a rendu célèbre. Combien reste-t-il de personnes ayant exercé une fonction réelle, dans cette émission ? Un ancien ambassadeur, un ex-PDG d’entreprise culturelle – et voilà tout. Le reste est composé de « journalistes »… des commentateurs, pas des acteurs.
La « bêtise » gagne du terrain. Flaubert en aurait fait une notule de son Dictionnaire des idées reçues : « France-Culture ? Le mâchonnement des idées reçues par des contents d’eux dans l’entre-soi – tonner contre. »
« Lettre de Jean- Louis Bourlanges à Philippe Meyer et aux auditeurs de l’Esprit public lue dimanche et publiée sur le site de l’émission :
Je m’adresse à vous, cher Philippe, chers camarades, et chers auditeurs de l’Esprit public, pour vous dire au revoir. La direction de France Culture a décidé de m’interdire toute participation à l’Esprit public pendant la durée de la campagne pour l’élection présidentielle, sous prétexte que j’ai affiché publiquement ma préférence pour l’un des candidats en compétition, en l’occurrence pour Emmanuel Macron. Cette décision est doublement incohérente. Elle l’est d’abord parce que je ne participe pas à cette émission en qualité de journaliste tenu à un devoir de neutralité et d’impartialité, ce que je ne suis pas et que je n’ai jamais été, mais comme ce que Raymond Aron appelait » un spectateur engagé “, invité en raison et non en dépit de ses prises de position dans le débat public. Parlementaire européen du centre pendant près de vingt ans, longtemps vice-président de l’UDF, je n’ai jamais fait mystère de mon engagement » libéral, social et européen » et j’ai toujours eu à cœur au cours des quinze dernières années d’afficher mes couleurs à chaque élection présidentielle ou législative.
L’incohérence de la décision se lit aussi dans le calendrier choisi. Pourquoi limiter la mise en œuvre de la sanction à la seule campagne présidentielle et me promettre un retour à l’antenne sitôt ce grand rendez-vous passé, alors que la question se posera en des termes strictement identiques pour la campagne des élections législatives et devrait en bonne logique appeler la prolongation du « régime spécial » qui m’est réservé ? N’était-il pas déjà contraire à la logique dont on argumente que la direction de France Culture ne se soit pas émue de me voir il y a quelques semaines prendre position en faveur d’Alain Juppé dans le cadre de la primaire de la droite et du centre. Sans doute avait-elle alors conscience de cette évidence aujourd’hui oubliée : c’est la raison d’être de l »Esprit Public que d’organiser un dialogue, voire une confrontation, civilisés entre des personnalités engagées à des titres divers dans la vie de la Cité.
Ces incohérences comme les explications embarrassées de la directrice de l’antenne révèlent que la raison véritable de mon ostracisme est d’un autre ordre : il ne s’agit pas de veiller, très légitimement, à l’équilibre des temps de parole entre les partisans des différents candidats mais, l’allusion au courrier reçu par le médiateur est éclairante à cet égard, de me sanctionner pour les propos très durs que j’ai tenus sur l’un des candidats en le qualifiant de » sournois, arrogant et corrompu ». Bien que je ne sois pas seul à formuler une appréciation aussi sévère sur M. Fillon, je comprends que mes propos aient pu choquer certains auditeurs et je ne peux que le regretter. Je constate toutefois qu’ils n’ont pas donné lieu à une plainte pour diffamation, plainte que j’aurais d’ailleurs, en l’état présent du dossier Fillon, accueillie avec sérénité. On sait – et qui les en blâmerait ? – que les partis politiques excellent à susciter des réactions collectives organisées aux propos qui les dérangent. Céder à ces pressions, de la part d’un média comme France Culture revient à reconnaitre à certains groupes un droit à l’intimidation et à justifier du même coup l’institution d’un véritable délit d’opinion opposable à ceux qui interviennent sur son antenne.
Vous comprendrez que tout en moi m’interdit de cautionner de telles pratiques. Je veux bien être un intermittent du spectacle mais pas un intermittent de la censure. J’ai donc décidé de mettre un terme définitif à ma participation à Esprit public. Après plus de quinze ans de présence hebdomadaire au cœur de la Maison ronde, cette décision me coûte mais elle est inévitable. Je remercie tous ceux, réalisateurs, techniciens, assistants qui m’ont permis de m’adresser librement à vous chaque semaine. Ma gratitude va, bien entendu, d’abord à Philippe Meyer qui m’a donné cette magnifique tribune et qui, de plus, m’a supporté pendant de longues années avec un stoïcisme qui mérite hommage. Je l’adjure de continuer aussi longtemps qu’on lui en laissera le pouvoir à porter cette émission nécessaire. Pour ma part, je me contenterai en vous quittant de pousser deux vivats qui devraient n’en faire qu’un : vive France Culture, vive la liberté de l’esprit !
Jean- Louis Bourlanges »